Carburants :
pour une écologie populaire
Au nom de l’écologie, le gouvernement augmente fortement les taxes sur le carburant. Cette décision est irresponsable.
Elle ne s’inscrit pas dans une stratégie globale de transition écologique.
Le soupçon selon lequel ces taxes financent les cadeaux fiscaux aux plus riches et aux entreprises (sans effet sur l’emploi) est fondé, puisque les dépenses pour l’écologie n’augmentent pas par ailleurs. Le bâtiment (chauffage des habitations et bureaux) représente 20 % des émissions de gaz à effet de serre (GES) de la France. Or le gouvernement a réduit les subventions pour la rénovation thermique du bâti ancien. De même, il freine la construction de logements neufs (peu énergivores) à la fois privés (réduction des aides aux primo-accédants) et plus encore de HLM. Le transport est responsable de près de 30 % des émissions de GES. Rien n’est prévu pour réduire le transport routier de marchandises, lequel est pourtant responsable d’un tiers de ces émissions. La part du fret ferroviaire dans le transport des marchandises a chuté de 24 % en 1990 à 10 % aujourd’hui. Le ferroviaire subit la concurrence déloyale de la route puisque, à l’inverse des camions, il paie ses infrastructures. Rien n’est prévu pour le relancer. Rien n’est prévu pour re-réglementer le transport routier de marchandises, en le taxant pour le désavantager, en soutenant (contre le principe de « libre concurrence ») les compagnies nationales face à des concurrentes qui s’adonnent au dumping social et environnemental. L’ouverture à la concurrence a été délétère pour le fret ferroviaire : le gouvernement a décidé de l’étendre au transport de passagers. De nouvelles « petites lignes » fermeront donc. De même, aucune taxe sur le kérosène n’est prévue (alors que certains pays le taxent pour les vols intérieurs).
LE SIGNAL-PRIX EST DÉJÀ LÀ
Et la voiture ? Dans une trentaine d’années, la voiture électrique devra être généralisée. Mais comment assurer cette transition ? La hausse du prix du carburant est nécessaire sur une longue période pour dissuader son usage. Mais cette hausse doit être planifiée et annoncée. Le prix du pétrole variant fortement (40 dollars en 2004, 100 en 2008, 60 en 2009, 100 entre 2011 et 2014, 30 début 2016), les taxes devraient être ajustées en conséquence. Depuis début 2016, le prix du baril a plus que doublé. Le signal-prix est déjà là, le supplément de taxes ne se justifie donc pas. Surtout, la hausse du prix du carburant est à compenser par des mesures fortes pour les moins aisés, bien au-delà des mesurettes annoncées. Le chèque énergie pour les ménages modestes, par exemple, devrait être beaucoup plus revalorisé que prévu (+50 euros seulement). Il en va de même pour les primes à la conversion qui devraient être à la fois bien plus amples pour les moins aisés, mieux ciblées (50 % des véhicules neufs vendus aujourd’hui sont des SUV(1)) et plus réfléchies (on oublie souvent que la construction d’un véhicule neuf requiert beaucoup d’« énergie grise »). L’écologie doit être populaire. On en est loin avec Macron.
Christophe Ramaux, économiste atterré
1- Véhicule utilitaire de sport.
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