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vendredi 28 février 2014

Tract des Opposants aux Nouvelles Nécro-Technologies

Contre le Minatec de Caen


samedi 15 février 2014 par Des réfractaires de Caen
Vous souvenez-vous du temps pas si lointain où toutes sortes d’imbéciles et de menteurs nous assuraient que "les nanotechnologies n’existent pas" ? Qu’il ne s’agissait que d’un "bluff" des labos pour pomper des crédits ? Scientifiques, journalistes ou militants, on ne lit plus beaucoup de dénis parmi ces esprits forts et bien informés. Depuis, il y a eu Minatec (2006), il y a eu le Minatec de Saclay, celui de Toulouse, et aujourd’hui celui de Caen. Aujourd’hui le nanomonde.
Ci-dessous, le tract distribué à Caen ce 15 février 2014 par les opposants au "Campus Effiscience", à l’occasion d’une visite de Michel Destot, techno-maire de Grenoble.

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Ce samedi 15 février 2014, le maire de Caen, Duron, organisait une réunion avec en vedette le député-maire de Grenoble Destot, l’un des fondateurs du campus spécialisé dans les nanotechnologies MINATEC. Cette réunion était l’occasion de lancer le projet d’un MINATEC caennais, autour du campus Effiscience (sur deux sites, le campus 2 avec l’accélérateur de particules au GANIL et l’école d’ingénieurs, ainsi que l’ex bastion ouvrier SMN réhabilité en « pépinière » d’entreprises des nouvelles technologies, avec Webhelp et NXP notamment) spécialisé dans le nucléaire, les nanotechnologies et autres technologies sans contact. Une petite poignée d’opposant-es s’y sont invités, ont distribué le tract ci-joint et exprimé leur opposition avant de partir, non sans avoir éclaté quelques boules malodorantes…

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« Notre volonté à terme : faire du Plateau Nord un MINATEC caennais, à l’image du célèbre campus d’innovation grenoblois. » - Philippe Duron

Ce samedi, le maire de Caen Philippe Duron nous invite à écouter le technocrate Michel Destot, actuel député-maire de Grenoble et artisan de MINATEC. 
Le but ? Promouvoir un projet avec ses ravages industriels annoncés, et une liberté toujours plus réduite, au profit d’entreprises «  innovantes ». Innovantes, surtout pour développer de la merde.

MINATEC, qu’est-ce que c’est ?

MINATEC, c’est un « campus d’innovation pour les micro et les nanotechnologies » basé à Grenoble, un lieu où des chercheurs travaillent à rendre plus efficaces et invisibles les appareils de contrôle : caméras intelligentes, drones de surveillance, ou encore puces RFID. Ces puces minuscules contiennent des informations lisibles à distance et sont de plus en plus présentes dans tous les objets, et bientôt sous notre peau. 

Nous ne voulons pas être contrôlés à chaque moment de notre vie.
C’est avec le même zèle et porté par la même pensée policière que Destot soutient le délire sécuritaire qui s’empare de la technopole grenobloise après des émeutes en 2010. C’est dans cette ambiance que Sarkozy livre son discours ouvertement raciste et anti-roms quelques semaines plus tard.

Nous ne voulons pas non plus de l’être humain amélioré ou augmenté que nous promettent les nouvelles technologies. Nous n’avons que faire des textiles intelligents et autres nouveaux gadgets inutiles qui réduisent toujours plus notre autonomie.

MINATEC, fondé par des chercheurs du Commissariat à l’Energie Atomique, c’est un lieu où des chercheurs financés par un mix public-privé se proposent de résoudre les désastres générés par ceux qui les ont précédés avec conviction dans le développement d’innovations capitalistes et industrielles. C’est visiblement un lieu où le bon sens n’a sa place que s’il peut générer de nouveaux profits : dépolluer, soigner à l’aide de nanoparticules, apprendre à vivre en zone contaminée etc. Bien sûr, hors de question de s’attaquer au nucléaire, à l’agrochimie, aux industries, au capitalisme, bref tout ce qui est au cœur du redressement productif à la sauce sociale-libérale.

MINATEC, c’est surtout un lieu où s’échangent les bons plans pour se faire du fric, un lieu où se mêlent Etat, chercheurs, industriels et politiciens. Un lieu qui participe à l’exploitation capitaliste, aux ravages industriels et à la réduction de notre liberté au profit de quelques patrons et technocrates.

Le campus Effiscience, qu’est-ce que c’est ?

Les élus de Caen veulent faire de Caen une capitale, une métropole, ils ont des envies de grandeur. Ils ont choisi des secteurs stratégiques (nucléaire, nanotechnologies et numérique) « comme fers de lance de leur stratégie de développement » (dixit Duron). Le campus Effiscience est l’incarnation de cette stratégie.

Effiscience n’est pas un campus comme les autres, bien qu’ils soient tous bientôt appelés à lui ressembler. C’est un campus au profit du capitalisme, avec ses 80 start-ups, c’est-à-dire de notre exploitation. Recherche et science y sont soumises aux intérêts du capital. Etat, collectivités locales, industriels et chercheurs s’y croisent, voire se confondent, comme ce Michel Destot, député et maire de Grenoble depuis 19 ans, lui-même ex-ingénieur au Commissariat à l’Energie Atomique et créateur d’entreprise.

Les emplois et le médical pour justifier les désastres

On ne compte plus les désastres politiques, sociaux, sanitaires et environnementaux créés par les nouvelles technologies. Etat, chercheurs, industriels et politiciens le savent bien, c’est pour ça qu’ils cherchent des moyens de faire passer la pilule. 

L’acceptabilité, c’est l’avenir. 

C’est d’ores et déjà ce qu’on propose aux chercheurs en sciences sociales, appelés à devenir des spécialistes de l’acceptabilité d’un monde toujours plus merdique et chargés d’étudier les oppositions pour mieux les contrôler.

L’acceptabilité, c’est aussi essayer de faire accepter n’importe quoi en promettant des emplois. Ou comment se foutre de la vie au profit de l’économie. Ça devrait nous faire oublier les désastres industriels, la radioactivité, les appareils de contrôle etc. Obsédés par la croissance, ces apôtres du progrès préfèrent l’alimenter plutôt que d’interroger le mode de fonctionnement de nos sociétés. Il ne faut pas s’attendre à ce que ceux qui gagnent à prolonger le désastre veuillent y mettre un terme.

L’acceptabilité, c’est aussi sortir l’argument médical à tout va. Les technosciences, après avoir développé vos cancers, se proposent de les soigner. C’est ainsi qu’AREVA, multinationale du nucléaire et propagateur de radioactivité en masse, va investir 200 millions d’euros à Effiscience pour « lutter contre le cancer », et bien évidemment au passage se faire du fric. On hésite entre le rire et la baffe. Apparemment, eux ont choisi le cynisme… La recherche fondamentale et les applications médicales sont toujours le cheval de Troie de l’industrie nucléaire et du développement des nécrotechnologies dans leur ensemble.

Plus que le médical, ces campus d’innovation servent d’appui à des industriels avides de profit et à des technocrates qui ont pour obsession de programmer un monde à leur convenance et protégeant leurs intérêts. En outre, derrière le médical se cache parfois des vérités moins reluisantes. 

MINATEC travaille aussi pour le militaire. 

Un rapport publié en juin 2006 par l’Observatoire des transferts d’armements met le doigt dessus. Comme on peut le lire sur le site de Pièces et main d’œuvre, « les ’communicants’ ont beau exhiber les blouses blanches des chercheurs du CEA, c’est d’un kaki tout militaire que s’habillent leurs recherches. Nano-drones espions ’Libellule’ et Fantassin à liaisons intégrées ’FELIN’ sortent aujourd’hui des nano-labs et viennent agrandir le bestiaire militaire. Quand les batteries de ces machines de guerre ne sortent pas directement du CEA, il ne faut pas chercher plus loin qu’à Minalogic, où start-up et spin-off du CEA, sous contrat avec la DGA (Délégation Générale pour l’Armement), travaillent pour le progrès. »

Et l’écologie dans tout ça ?

Ça fait bien longtemps qu’elle ne combat plus les logiques des industriels pas plus qu’elle ne les entrave. Pire, elle les sert en renvoyant la culpabilité à un niveau individuel. Si tout est affaire de comportements, tout devient traçable : de la viande aux communications en passant par les déplacements, les poubelles mais aussi les consommations électriques. Contrôle du vivant, pistable en permanence… 

L’écologie devient alors le meilleur allié de ce socialisme technocratique et technophile défendu de concert par Destot, Duron et leurs complices. Avec la collaboration d’EELV au gouvernement et à la municipalité, seuls sont servis les intérêts du capital. Pour eux, il ne s’agit plus tant de sauver la planète que de sauver un monde, celui de la consommation, des écrans plats, des boulots absurdes, des conforts factices, des besoins créés, des objets inutiles, etc.

De la même manière qu’à Grenoble une opposition s’est constituée contre les délires techno-scientistes et les appétits capitalistes, nous entendons bien à Caen ne pas laisser ce projet se réaliser en silence. 
Leur détermination à faire un monde de merde n’est pas à la hauteur de notre rage !

Des réfractaires

Source : http://www.piecesetmaindoeuvre.com/spip.php?page=resume&id_article=471).

jeudi 27 février 2014

Un Pacte de Responsabilité Pour la Planète Pas Pour les Patrons !

Ce n’est pas au Medef qu’il faut proposer un pacte de responsabilité… mais à la planète

NOËL MAMÈRE
mercredi 19 février 2014





Plutôt l’écologie que le patronat… c’est le chemin que ne prend pas le gouvernement. Et c’est la première chronique de Noël Mamère, invité par Reporterre.


Le 22 février, les écologistes, rassemblés au-delà de leurs querelles de chapelle, se retrouveront à Nantes pour une grande manifestation. Les travaux du projet d’aéroport de Notre Dame des Landes ont reçu le feu vert du préfet de Loire-Atlantique. Il a signé, en décembre, deux décrets mettant le projet en conformité avec les lois sur l’eau et la protection des espèces.
A trois semaines des élections municipales, ce rassemblement est un moment politique important. Le gouvernement Ayrault s’obstine et ne comprend toujours pas le message des opposants qu’ils soient paysans et riverains, jeunes et occupants de la « Zone à Défendre » ou élus locaux. Le message de ce nouveau Larzac est pourtant aussi fort que l’ancien. Si les écologistes réussissent à sauver les terres agricoles et l’écosystème de Notre-Dame-des-landes, un rapport de force nouveau s’installera, tant au niveau français qu’européen. Il représentera un signe fort contre ces monstruosités écologiques que sont les « éléphants blancs » du XXIème siècle : les Grands Projets Inutiles et Imposés.
Il faut en finir avec les "éléphants blancs"

Pourquoi construire un aéroport de plus quand on sait que nombre de ceux déjà construits ne servent à rien ou presque ? Les exemples de la France et de l’Espagne sont probants. En France, les aéroports d’Angers, de Lorraine, de Tours, (pour ne choisir que ceux dont la configuration ressemblerait à NDDL ) ont un taux de fréquentation, soit ridicule (10 % à Angers), soit impliquant un déficit structurel. Ils sont concurrencés par des lignes TGV, qui permettent de rallier Paris en deux ou trois heures maximum. A l’instar de l’aéroport de Tours, leur survie va dépendre des subventions des collectivités locales aux compagnies low-cost, telle Ryan Air, qui reçoit 45 euros du contribuable par passager.
En Espagne, qui compte proportionnellement le plus grand nombre d’aéroports commerciaux de toute l’Europe (48 publics et 2 privés), une dizaine d’entre eux sont vides aujourd’hui. L’aéroport de Castellon (communauté de Valence) a coûté quelque 150 millions d’euros et ne dispose toujours pas des licences lui permettant d’accueillir des vols. Construit au milieu d’une plaine désertique, à 200 kilomètre de Madrid, l’aéroport international de Ciudad real a été mis en service en 2008. Prévu pour accueillir 4 millions de passagers par an, il en a vu passer... 100 000 en quatre ans ! Ces aéroports fantômes avaient été conçus dans la période de la bulle spéculative immobilière. Quand elle a explosé, ils se sont effondrés eux aussi.
En Turquie, le premier ministre Erdogan tente de passer en force pour exiger la construction du « plus grand aéroport du monde », à Istanbul. Pour un coût estimé à 22 milliards d’euros, ce projet de troisième aéroport est situé au beau milieu d’une forêt, sur deux sources d’eau qui contribuent à alimenter la capitale économique de la Turquie.
La coopération plutôt que la métropolisation
La question de Notre-Dame-des-landes ne se réduit pas à la protection nécessaire de la biodiversité, ni à la défense des terres agricoles. Elle pose des problèmes d’aménagement du territoire et de mode de développement. Le néolibéralisme met les villes en compétition pour qu’elles deviennent des métropoles capables d’attirer l’investissement. Au lieu de construire de la coopération et un patrimoine commun, les élus se vivent en concurrence sur un marché international des transports lui-même vicié par le low-cost, mirage éphémère qui accroit la dépendance des villes à quelques compagnies privées, peu soucieuses du bien public. Veut-on renforcer l’emprise de ces compagnies, à la recherche de la moindre part de marché, qui économisent dans tous les domaines y compris ceux de la sécurité ? Veut-on un monde accro au C02 ?
Ce n’est pas au Medef qu’il faut proposer un pacte de responsabilité, mais à la planète : Comment arrêter le gaspillage des dépenses publiques pour des projets inutiles, coûteux et destructeurs de l’environnement et de la biodiversité ? Comment imaginer un monde où les territoires, les entreprises, les usagers coopèrent, pour en finir avec l’économie carbonée et rester ouverts au reste du monde ? On est loin du projet de Vinci et des barons socialistes de Loire-Atlantique ! Raison de plus pour le combattre avec l’énergie des causes justes.

Source : Noël Mamère pour Reporterre.
Photos :
. dessin de Mandryka
- Aéroport de Ciudad Real : Wikipedia.

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http://www.reporterre.net/spip.php?article5437

mercredi 26 février 2014

NDDL : Lettre Ouverte de Françoise Verchère à Manuel Valls Suite à la Manif du 22 Février

Aujourd'hui il est question de la manif de samedi 22 février à Nantes, contre l'aéroport de Notre Dame Des Landes : deux lettres ouvertes, le témoignage de Quentin (qui a perdu l'œil gauche suite à un tir de flash ball) et enfin un article du Monde.

Lettre ouverte de Françoise Verchère à Manuel Valls

rédigé par Françoise Verchère le Lundi 24 Février 2014


Monsieur le Ministre de l’Intérieur, 

Je vous ai entendu commenter dès samedi soir les événements en marge de la manifestation contre l’aéroport de Notre Dame des Landes et vos propos appellent de ma part quelques réactions et aussi plusieurs questions. 

Sur les chiffres d’abord : vous avez parlé de 1000 casseurs et de 20 000 manifestants dont vous avez dit qu’il fallait les différencier des premiers. Je crois décidément que vos services ont un problème avec le calcul car nous étions beaucoup plus de manifestants et il y avait beaucoup moins de casseurs : disons qu’on pourrait diviser le premier chiffre et multiplier le second par deux au moins pour approcher de la vérité. Mais dans cette affaire d’aéroport, la vérité est décidément malmenée depuis longtemps… 

Sur les fameux casseurs : je vous avoue que j’ai été très surprise de comprendre que vos services les connaissaient visiblement bien (vous avez donné des précisions sur leur origine, leur positionnement politique) et même qu’ils savaient ce qui allait se passer. Depuis deux jours, les bruits couraient sur des incidents à venir ; les avocats savaient qu’ils risquaient d’être réquisitionnés pour de nombreuses gardes à vue. Samedi matin, au moment où nous étions avec les tracteurs à l’aéroport de Nantes-Atlantique, les policiers présents nous ont spontanément parlé des « blacks blocs », en nous disant « qu’ils allaient gâcher notre manifestation ». 

Je m’étonne donc que « les forces de l’ordre » n’aient pas été au fond plus efficaces puisque cela aurait dû être leur mission, n’est-ce pas ? Puisque l’on sait désormais interdire un spectacle avant même qu’il n’ait lieu, et puisque nous n’avons pas sur la ZAD 1000 casseurs ni blacks blocs, pourquoi ne les avez-vous pas fait arrêter avant leur arrivée ? J’imagine que s’ils sont si dangereux, vous avez certainement des preuves et même des faits graves à leur reprocher ? 

Mais peut-être préfériez-vous les arrêter en flagrant délit ? Est-ce pour cela que vous n’avez pas fait protéger l’agence Vinci, située au tout début du parcours de la manifestation, pas plus que des engins de chantier Vinci aussi (car Vinci est partout vous le savez, immobilier, parkings, aéroports…) dont vous saviez qu’ils seraient forcément des cibles ? Est-ce pour cela que la Préfecture n’a autorisé qu’un parcours ridiculement petit, jamais vu jusque là ? Est-ce pour cela que les échauffourées localisées dans un périmètre pourtant restreint ont duré plusieurs heures ? Et au bout du compte combien y a-t-il eu d’interpellations ? Une douzaine seulement… C’est assez curieux et à vrai dire difficilement compréhensible alors que les moyens déployés étaient impressionnants, en hommes et en matériel anti-émeute, alors que la fermeture du centre ville était inédite, alors qu’il y avait vraisemblablement des hommes à vous des deux côtés. 

Évidemment les images de « la guérilla urbaine » dont vous avez parlé seront reprises à l’envi plus que celles du char-triton, des 520 tracteurs présents ou des nombreuses familles manifestant paisiblement. Évidemment, cela permettra d’occulter une fois encore le fond du dossier, évidemment le choeur des partisans de l’aéroport poussera des cris horrifiés en rejetant la responsabilité sur les organisateurs de la manifestation. 

Organisateurs qui ont pourtant tenté d’éviter l’affrontement en interposant des tracteurs entre l’imposant mur de fer érigé et ceux qui voulaient effectivement en découdre. 

Organisateurs dont le métier n’est pas d’assurer l’ordre, vous en conviendrez et à qui il serait malvenu de demander de faire mieux que vous… Organisateurs particulièrement choqués, en tout cas, par les propos du Préfet de Loire-Atlantique qui n’a pas hésité à affirmer que nous « opposants historiques » devions cesser « d’être la vitrine légale d’un mouvement armé ». Je me suis pincée pour y croire… encore un peu de temps et nous finirons nous-mêmes par être tenus pour de dangereux terroristes alors que nous avons participé loyalement au débat public, et à toutes les commissions mises en place. Débat déloyal puisqu’il y a une « vérité officielle » intangible même quand elle est contraire aux faits, aux chiffres et à la réalité. Le Premier Ministre ne reconnaît la validité que de la commission du dialogue à qui il avait donné mission de valider à nouveau le projet, mais refuse de regarder les conclusions accablantes de la commission des experts scientifiques au regard de la loi sur l’eau. Comment croire encore à la parole de l’État ? 

En réalité, Monsieur le Ministre, tout cela est très lisible et vieux comme le pouvoir. 

Pour discréditer notre combat, et tenter de retourner l’opinion publique qui nous est aujourd’hui favorable, on fera appel à la peur du désordre, on utilisera l’image, déplorable je vous l’accorde, des dégradations commises par les méchants casseurs et on justifiera ainsi une nouvelle opération policière pour aller enfin nettoyer la ZAD de ses « délinquants dangereux », en même temps que de ses tritons et de ses paysans. Il faudra mettre les moyens (ils sont mille, ne l’oublions pas, et les tritons innombrables…) mais vous y êtes peut-être prêts pour que « force reste à la loi »? Permettez-moi de vous le déconseiller car pour que nous, citoyens, acceptions désormais cette clef de voûte théorique de la société, (« la seule violence légitime est celle de l’État »), il faudrait que l’État soit irréprochable, que la loi soit juste et que ses représentants soient dignes du mandat que nous leur avons confié. Vous avez compris, je pense, que ce n’est pas le cas depuis longtemps. 

Depuis deux jours, j’ai lu et entendu que le centre ville de Nantes était « saccagé », qu’un commissariat avait été « dévasté », qu’il faudrait du temps pour « panser les plaies de la ville », que les dégâts ne pouvaient pas encore être chiffrés, autant dire que c’était l’apocalypse. Les mots eux-mêmes sont visiblement sens dessus dessous... Puis-je vous suggérer de venir à Nantes pour juger de la situation ? Aujourd’hui dimanche, flottait certes une petite odeur de gaz lacrymogène, mais le tramway roulait et les nantais flânaient. Je ne nie pas les poubelles brûlées, les pavés arrachés, les vitrines brisées et les murs maculés dans le secteur des affrontements. Je déplore ce vandalisme d’autant plus que nous dénonçons par ailleurs le gaspillage d’argent public qu’induirait le transfert de l’aéroport ! 

Mais je voudrais aussi vous rappeler que samedi des personnes âgées, des enfants ont été noyées sous les lacrymogènes. Et qu’un jeune manifestant a perdu un oeil à cause d’un éclat de grenade assourdissante. Ce n’était pas un casseur. Et cela nous rappelle le même malheur survenu déjà à Nantes, à cause d’un tir tendu de flash ball lors d’une manifestation sans violence devant le Rectorat. Les aubettes seront reconstruites, cela fera même monter le P.I.B mais ce jeune restera, lui, marqué à jamais. Cela m’interroge sur la manière dont les forces de l’ordre utilisent leurs armes et me scandalise davantage que la casse matérielle. Et demain, si le gouvernement persistait dans son projet d’aéroport, la destruction du bocage de Notre Dame des Landes et de la vie qu’il abrite serait elle aussi irréversible. 

Il faut arrêter un projet désormais dans l’impasse et régler le problème en prenant la seule décision raisonnable : respecter la loi sur l’eau, améliorer l’aéroport de Nantes-Atlantique et rendre sa sérénité à Notre Dame des Landes pour que la ZAD redevienne une campagne où vivre et travailler. Vous pourrez ainsi, Monsieur le Ministre, vous consacrer aux blacks blocs si vous le jugez indispensable. 

Dans l’espoir de votre réponse, je vous assure de mes salutations les plus distinguées, 

Françoise Verchère, 

Conseillère générale de Loire-Atlantique

NDDL : Lettre Ouverte des Blacks Ploucs à Monsieur le Préfet de Loire Atlantique

Lettre ouverte du mouvement armé au préfet de Loire atlantique, M. Christian de Lavernée. 

Sur la zad, le lundi 24 février 2014

Cher Christian,

Vous avez déclaré hier, « L’opposition institutionnelle à l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes doit cesser d’être la vitrine légale d’un mouvement armé ». Il nous serait facile de vous reprocher, M. Le Préfet, de vouloir à votre tour briser des vitrines. Mais après la manifestation de samedi, autant l’avouer tout net et cesser enfin de nous cacher : nous sommes bel et bien un mouvement armé.

Nous sommes un mouvement armé de bon sens remuant et d’idées explosives, de palettes et de vis, de pierres parfois - même s’il y a ici plus de boue et de prairies, de carottes et de poireaux, d’humour et de tracteurs, d’objets hétéroclites prêts à former spontanément des barricades et d’un peu d’essence au cas où, d’aiguilles à coudre et de pieds de biche, de courage et de tendresse, de vélos et caravanes, de fermes et cabanes, de masques à gaz ou pas, de pansements pour nos blessés, de cantines collectives et chansons endiablées, de livres, tracts et journaux, d’éoliennes et de radios pirates, de radeaux et rateaux, de binettes, marteaux, pelles et pioches, de liens indestructibles et d’amitiés féroces, de ruses et de boucliers, d’arcs et de flêches pour faire plaisir à Monsieur Auxiette, de salamandres et tritons géants, de bottes et impers, de bombes de peinture et de lances à purin, de baudriers et de cordes, de grappins et de gratins, et d’un nombre toujours plus important de personnes qui ne vous laisseront pas détruire la zad. 

Vous ne nous ferez pas rendre ces armes.

Et vous, M. Le préfet, quand cesserez vous d’être la vitrine légale d’un mouvement armé ?

Sincèrement,

Les Black Ploucs


NDDL : Quentin a Perdu un Oeil Qui en Parle ?

AÉROPORT DE NOTRE-DAME-DE-LANDES : CE QUI EST ARRIVÉ À QUENTIN, À NANTES, LE 22 FÉVRIER 2014.


Caroline  de Benedetti et Émeric Cloche animent la revue L’Indic à Nantes. Ce sont aussi des amis de longue date.
Comme beaucoup de personnes en Loire-Atlantique, il ont pris part, pacifiquement, à de nombreuses manifestations contre le projet d’aéroport à Notre-Dame-des-Landes.
Ce sont eux qui m’avaient fait parvenir cette lettre d’un médecin généraliste, laquelle témoignait de violences policières massives durant le week-end des 24 et 25 novembre 2012.
Un étrange silence médiatique s’était alors abattu, faisait remarquer Émeric, autour des très nombreux blessés.
Cet épisode n’en a pas moins marqué un recul momentané du gouvernement sur le dossier, jusqu’à l’annonce officielle, l’année suivante, d’un « retard sur le vol », pour reprendre la métaphore du Monde en date du 9 mars 2013.
Fin décembre cependant, des arrêtés préfectoraux ont été signés, prélude à une reprise du projet, et les travaux programmés avant l’été 2014.
Pour s’y opposer, une nouvelle manifestation a donc eu lieu hier, 22 février.
Elle a rassemblé 20 000 personnes selon la Préfecture, 40 000 selon les organisateurs. C’est un écart, somme toute, plus que raisonnable. Depuis que la droite a pris la rue, on n’y est plus guère habitués.
La veille, un autre ami nantais, Luc Douillard, écrivait sur un réseau social:
Notre-Dame-des-Landes : veillée (…) à Nantes avant la manifestation. En annonçant au tout dernier moment qu’elle refuse le parcours de la manifestation (déjà annoncé par toute la presse), la Préfecture de Nantes :
- 1 – organise l’incertitude sur le tracé du cortège, au détriment matériel et moral des manifestants, mais aussi des indifférents, des commerçants et des notables, tous mis en danger ;
- 2 – provoque artificiellement un point de désaccord entre manifestants tentés sincèrement par l’accommodement et manifestants sincèrement jusqu’au-boutistes.
- 3 – se donne les justifications (illégales et anticonstitutionnelles) pour réprimer brutalement les uns et les autres.
(…)
(Conclusion, demain, ce samedi, venez avec vos caméras pour témoigner ensuite).
Il ne pensait pas si bien dire.
Parmi les médias nationaux, France infos s’est fait largement écho des « scènes de violence ».
Cette radio a surtout parlé de 6 blessés parmi les policiers le 22 février au soir, devenus 8 le lendemain, évoquant par ailleurs un dépôt de plainte du maire de Nantes.
Elle a aussi précisé que 56% des Français, d’après un sondage IFOP, étaient opposés au projet.
Pour être tout à fait précis, il faudrait ajouter que 20% ne se sont pas prononcés.
Il reste donc moins d’un Français sur quatre pour lui être favorable.
Sur cette même radio en revanche, aucune mention n’a été faite de manifestants blessés.
Aujourd’hui, 23 février, Caroline m’écrit:
Quentin a eu 29 ans hier à Nantes. Il était comme nous à la manifestation contre l’aéroport. Il est charpentier, c’est le fils d’un de nos amis, et nous sommes en colère. Voici la retranscription du témoignage de Quentin, gravement blessé, recueilli par sa mère, Nathalie.
On peut entendre la voix de Quentin dans l'article originalhttp://dormirajamais.org/nddl/
Ça a démarré vraiment quand on s’est retrouvés vers Commerce, au moment où on devait remonter normalement le cours des 50 otages, ce qui était censé être le parcours de la manif. Là, il y avait des cars de CRS et des barrières qui bloquaient tout. Nous quand on est arrivés, direct on s’est fait gazer. Il y a eu tout de suite des gaz lacrymo qui ont été jetés sur les gamins, sur tous les gens qui étaient là.
Là c’était la manifestation paisible, normale ?
C’était la manifestation paisible mais il y avait quand même déjà des gens un peu excités déjà avant, depuis le début de la manif. Donc nous on est restés un petit peu dans la zone, voir un peu ce qui se passait, et puis après, sur les conseils des organisateurs et tout, on a continué à marcher, à aller vers le point de ralliement, l’endroit où c’était fini, pour qu’il y ait un mouvement et que ça s’essouffle un peu.
Après, il y a eu plusieurs salves d’affrontement, des lacrymos qui perpétuellement revenaient, lancés par les flics. Et moi, ce qui m’est arrivé, c’est à la fin, on était vers la place Gloriette, entre Gloriette et l’autre là, là où il y a le café plage, ce rond-point là en fait, près du CHU justement. Et nous on allait pour se replier, on rentrait, les CRS avançaient eux, avec les camions et tout le truc, et moi je reculais avec tout un tas d’autres gens. Je reculais en les regardant pour pas être pris à revers et pouvoir voir les projectiles qui arrivaient. Et là, à un moment, j’ai senti un choc, une grosse explosion et là je me suis retrouvé à terre et, comme ils continuaient à nous gazer, ils continuaient à envoyer des bombes assourdissantes alors que j’étais au sol, des gens ont essayé de me sortir le plus vite possible, de m’emmener plus loin aussi. Et puis après  je sais pas trop, on m’a mis dans une… les pompiers m’ont emmené quoi.
Et donc, on dit que tu as reçu une grenade assourdissante qui, au lieu d’être tirée en l’air, a été tirée de façon horizontale, dans ton œil ?
Je l’ai prise directement dans le visage. Elle a explosé dans mon visage. Vu ce que ça a fait… Elle a explosé là et c’est comme ça que moi je l’ai ressenti, quoi. Le choc, ça a été un bruit et une douleur extrêmement vive sur le coup, puis bon moi je me suis écroulé. C’est vrai que c’était assez violent j’ai trouvé. Il y avait, de la part des manifestants, des gens qui voulaient absolument lancer des trucs sur les CRS mais les CRS, eux, gazaient n’importe qui. Et ils visaient, au flash ball, ils étaient cachés, on les voyait viser, suivre des gens qui marchaient ou qui couraient en face pour aller se mettre à l’abri. Ils les visaient, les suivaient et shootaient, quoi. et ils visaient pas les pieds. On a vu la façon dont ils tiraient, c’était très… c’était ciblé.
Et toi tu étais là, en manifestant paisible, tu n’étais pas armé, tu n’avais rien dans les mains ?
J’étais pas armé, j’avais pas de masque à gaz, j’avais pas de lunettes de protection. On était là pour une manifestation familiale, festive, on était là pour faire masse, pour faire du nombre. Et après, c’est vrai que je suis resté même s’il y avait les lacrymos, parce que je trouvais ça injuste et qu’il fallait rester. Y’avait des gens, y’avait des pères de famille, y’avait des anciens, y’avait un petit peu de tout et voilà, moi je voulais rester aussi avec les gens pour montrer qu’on était là mais sans…
(Quentin n’a plus d’œil gauche)



Compléments autour des violences policières du 22/02/2014:
Sur le projet de l’aéroport:
Source : http://dormirajamais.org/nddl/

NDDL : Manif Réussie : 50 000 Manifestants, 520 Tracteurs, 65 cars et Plus de 200 Collectifs de Soutien

La manifestation contre l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes dégénère 

Le Monde.fr | 23.02.2014


Il est 17 heures, ce samedi 22 février à Nantes, et Olivier Niol, 45 ans, essaye de manœuvrer son grand tracteur vert pour quitter le cours Franklin Roosevelt, dans le centre de la ville. Le nuage de lacrymogène l'a presque atteint et il a du mal à ouvrir les yeux.
A quelque dizaines de mètres derrière lui, des groupes de manifestants et les
gendarmes mobiles se répondent à coup de pierres, bouteilles et fusées d'un côté et, pour les forces de l'ordre, décidés à dégager le centre-ville, grenades lacrymogènes assourdissantes ainsi qu'un canon à eau.
Devant l'engin de l'agriculteur, venu du Morbihan où il élève des volailles fermières, se tient, au même moment, le meeting de clôture de la manifestation des opposants à l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes (NDDL), qui a réuni des dizaines de milliers de personnes.
« La fête est gâchée, les organisateurs sont débordés par la frange radicale sur
laquelle ils s'appuient depuis le début de ce mouvement », dénonce la préfecture de Loire-Atlantique.
Elle fait état de huit blessés du côté des forces de l'ordre, tous hospitalisés, et
plusieurs dizaines d'hommes contusionnés, ainsi que dix interpellations.
Des journalistes ont aussi été violemment pris à partie par des opposants.
Aucun bilan sur le nombre de blessés côté manifestants n'était disponible samedi soir.
Une dizaine de commerces ont été fortement endommagés.
Les casseurs s'en sont également pris à un poste de police, une agence du groupe Vinci, concessionnaire du projet d'aéroport, mais aussi du mobilier urbain ou encore des caténaires SNCF afin de bloquer la circulation des trains.
Au moins deux engins de chantier mais aussi une barricade et une voiture ont aussi été incendiés.


GOUVERNEMENT QUI VEUT « PASSER EN FORCE »


L'opposition à ce projet, cher au premier ministre Jean-Marc Ayrault, ancien maire de Nantes, et soutenu par le gouvernement, c'est tout cela en même temps : la volonté d'en découdre avec les gendarmes et les CRS d'un gouvernement qui veut « passer en force » selon les opposants ; et le combat politique et juridique pour bloquer toute ouverture de chantier.
S'y retrouvent, comme dans les rues de Nantes ce samedi, des associatifs, des 
agriculteurs, des militants de gauche (Front de gauche, NPA, etc.), des écologistes, des syndicalistes et des anticapitalistes, souvent plus extrêmes, comme une partie de ceux qui occupent la ZAD, la zone d'activité différée devenue zone à défendre.


DE 20 000 et 60 000 MANIFESTANTS


A l'heure de la dispersion, il est difficile d'évaluer le nombre exact de participants, car la manifestation s'est vite coupée en plusieurs morceaux. 
Du côté de la préfecture, on annonce « autour de 20 000 manifestants avec près de 1 000 manifestants radicaux prêts pour le combat qui n'ont pu être contrôlés par les organisateurs ».
Les organisateurs, eux, revendiquent entre 50 000 et 60 000 manifestants, ainsi 
que 520 tracteurs. Soit davantage que le 17 novembre 2012, date à laquelle 30 000 personnes avaient défilé pour réoccuper le bocage au nord de Nantes et contre les violences policières. 
« Il  s'agit  de  la  plus  grosse  mobilisation  du  mouvement », soulignent les 
représentants de la « Coordination » de toutes les associations opposées au projet, et du « Copain », des agriculteurs proches de la Confédération paysanne et des anti-capitalistes habitant la ZAD. 
« Cette journée est un succès et les différentes composantes de la lutte restent unies sur le terrain », déclarent-ils, samedi soir, dans un communiqué commun.


« Avec 65 cars en provenance des 200 collectifs qui existent dans toute la France, on  constate  que  le  front  de  solidarité  s'est  encore  élargi, se réjouit Julien Durand de l'ACIPA (Association citoyenne intercommunale des populations concernées aujourd'hui par le projet d'aéroport de Notre-Dame-des-Landes). 
Et selon un sondage IFOP publié aujourd'hui, une majorité de Français (56 %) n'est pas  favorable  au  transfert  de  l'aéroport  de  Nantes-Atlantique  actuel,  vers  celui  qui doit être construit dans le bocage.
On ne voit vraiment pas comment politiquement, le gouvernement peut s'entêter. »
C'est aussi ce que pense Olivier Niol, au volant de son tracteur. 
« De plus en plus d'agriculteurs sont opposés. Celui  qui  m'a  prêté  son  tracteur  pour  venir  à  Nantes  –  le  mien  aurait  rendu  l'âme avant d'arriver –, n'est pas engagé à la Confédération paysanne, mais il en a marre comme  beaucoup  du  recul  des  terres  agricoles, explique le robuste éleveur de 
volailles. Je ne vois pas pourquoi le gouvernement ne reculerait pas sur ce dossier, alors qu'il a cédé à plusieurs reprises à la droite. Il est en train de perdre la gauche paysanne. »

DOSSIER ÉMINEMMENT POLITIQUE



Le dossier, au-delà des aléas juridiques – des référés ont été déposés par les opposants début février contre les arrêtés de la préfecture sur la loi sur l'eau et les espèces protégées pris fin décembre – est éminemment politique.
Dans la manifestation, beaucoup en veulent aux deux têtes de l'exécutif. « Non à l'Ayraultport de Notre-Dame d'Hollande », lit-on un peu partout.
Si la proximité des élections municipales laisse entrevoir une pause et une
probabilité nulle d'intervention contre les zadistes et les occupants des quelque six fermes encore en exploitation dans la future zone de construction, ainsi que de la vingtaine de maisons encore occupée par des particuliers, la vigilance ne faiblit pas.
« Les travaux, je n'y crois pas, dans les mois qui viennent, estime José Bové,
député européen Europe-Ecologie-Les Verts. Ils ne peuvent pas déplacer les espèces protégées, il y a les élections : toute tentative de Jean-Marc Ayrault d'envoyer les forces de l'ordre sur le terrain rencontrerait une opposition plus forte qu'en novembre 2012. Le risque politique est trop grand. »
« Le gouvernement finira pas reculer parce que tout cela est absurde, assure
également le coprésident du Parti de gauche, Jean-Luc Mélenchon. Toutes les
enquêtes ont montré les dégâts qu'allait provoquer cet aéroport pour rien.
Pourquoi voulez-vous le faire dans ces conditions ? »

« OUI AUX LÉGUMES, NON AU BITUME »


Dans la manifestation, certains brocardent, gentiment, les Verts, suspects de rester dans la majorité gouvernementale.
« Europe-Ecologie les Jaunes », dénonce sur une pancarte, Jean-Marie, un enseignant venu de Rennes.
Au volant aussi d'un gros tracteur vert, Thomas Rabu, 35 ans, est venu de la région d'Ancenis avec une cinquantaine de collègues. «  Il  faut  qu'ils  se  rendent  compte qu'on ne va pas se nourrir de bitume », explique le jeune éleveur de brebis. Tout au long du cortège, largement bon enfant et égayé par les prestations de nombreux clowns, c'est un leit-motiv. « Oui aux légumes, non au bitume. »


La mobilisation paysanne, en ce jour d'ouverture du Salon de l'agriculture à Paris, est forte. Jean-François Guitton, un des responsables de Copain 44 (Collectif des organisations professionnelles agricoles indignées par le projet d'aéroport) est venu de Saint-Gildas-des-Bois, pour manifester. 
Producteur laitier, avec 80 vaches, adhérent aussi de la Confédération paysanne, très présente dans le cortège, il explique que  «  la  FNSEA  est  contre  le projet d'aéroport, mais qu'elle ne peut pas s'afficher avec la Conf' et les écologistes ». 
Pour lui, « il fallait marquer un coup politique fort avant les municipales car, au-delà de NDDL, beaucoup trop de candidats ont des projets d'artificialisation des sols, pour agrandir des zones d'activité ou construire des logements ».

« MINORITÉ D'OPPOSANTS VIOLENTS »



Au-delà des affrontements, qu'auraient préféré éviter les organisateurs, le bilan est positif selon eux. 
"Le  gouvernement  ne  peut  pas  s'entêter  et  vouloir  passer  en  force, estime Françoise Verchère, du collectif CéDpa (Collectif d'élus doutant de la pertinence de l'aéroport). La mobilisation ne faiblit pas et il doit en tenir compte." A la préfecture, à Nantes, on attend le feu vert pour le transfert des espèces protégées. 
«  Tous  les  recours  des  opposants  ont  été  perdus  par  eux, dit Mickaël Doré, sous-préfet en charge du dossier. Il  cristallise  beaucoup  d'oppositions  diverses.  C'est la  première  fois  que  l'on  va  construire  un  nouvel  aéroport  depuis  une  vingtaine d'années.  Nous  tiendrons  compte  de  tous  les  éléments  environnementaux  de  ce dossier. Mais il n'est pas question qu'une minorité d'opposants violents s'oppose à un projet démocratiquement décidé. »

Rémi Barroux (envoyé spécial à Nantes) 

Journaliste au Monde 

Jean-Marc Ayrault et Manuel Valls condamnent les violences 
Le premier ministre Jean-Marc Ayrault « condamne  avec  la  plus  grande  fermeté les  actes  violents  commis  par  un  millier  de  manifestants  radicaux », selon un communiqué publié par Matignon. « En  démocratie,  le  droit  de  contester  et  de manifester contre un projet est légitime. Mais de telles violences sont inacceptables, et rien ne pourrait les justifier », ajoute M. Ayrault, ancien maire de Nantes, favorable au projet. « Il salue l'action du préfet et des forces de l'ordre » face aux violences.
De son côté, le ministre de l'intérieur Manuel Valls a mis en cause l'ultra-gauche et les « Black  Blocs », « très  violents », qui «  se  sont  livrés  à  des  exactions  et  à des  violences  intolérables  :  cocktails  Molotov,  boulons,  pavés  jetés  sur  les  forces de  l'ordre,  détruisant  des  vitrines  de  magasins,  saccageant  un  certain  nombre  de commerces,  du  mobilier  urbain  ainsi  que  l'entrée  d'un  commissariat  de  police ». 
Manuel Valls a exprimé sa crainte que « des groupes isolés continuent cette guérilla urbaine ». (AFP)

mardi 25 février 2014

Viande : Les Ravages de l'Elevage Industriel


Les ravages de l'élevage industriel

VALENTIN DAUCHOT Publié le - Mis à jour le 

La consommation de viande en Europe a doublé depuis les années 50. Les pays émergents suivent la même trajectoire. Mais l’élevage actuel consomme déjà énormément d’eau, de terres et de céréales.

Fin des années 50, un Belge consommait en moyenne 150 g de viande par jour. En 2013, il a mangé le double et cette tendance est en train de gagner la Chine, le Brésil, la Russie, et tous les autres pays de la planète dont le niveau de vie est en augmentation. L’industrie qui a fourni l’année passée près de 310 millions de tonnes de viande de par le monde devrait donc logiquement intensifier l’élevage et combler ces nouvelles et lucratives attentes, à une limite près : son usage intensif de ressources naturelles.

La production mondiale de viande et d’alimentation destinée au bétail consomment à elles seules 70 % des réserves d’eau fraîche de la planète, un tiers des 14 milliards d’hectares de terres cultivées et 40 % des productions annuelles de maïs, blé, seigle et avoine. "Si la consommation de viande devait continuer à augmenter aussi rapidement, il faudrait deux fois plus d’eau qu’aujourd’hui pour faire pousser suffisamment d’alimentation en 2050", explique Adrian Bebb de l’ONG Friends of the Earth qui a publié jeudi l’"Atlas mondial de la viande" pour dénoncer l’impact environnemental de cette industrie massive et les risques pour la santé d’une production aussi difficilement contrôlable. "Il est tout simplement impossible que tout le monde mange autant de viande qu’en Europe. La population mondiale augmente, les réserves en eau potable sont limitées et 2,5 milliards d’individus vivent déjà dans des zones de stress hydrique." Sans parler de l’impact sur l’alimentation d’une telle monopolisation des terres, de l’usage intensif de nitrates et autres produits chimiques répandus sur des milliers d’hectares pour fertiliser les champs et de l’impact climatique de l’élevage intensif, responsable selon la Food and Agriculture Organization des Nations unies (FAO) de 15 % des émissions globales de gaz à effet de serre.

"La production de viande est devenue tellement importante qu’elle est dangereuse pour l’environnement et tellement globalisée qu’elle est incontrôlable pour les consommateurs", poursuit Adrian Bebb. "La taille des fermes a augmenté, leur nombre a diminué et les multinationales brésiliennes ou américaines peuvent désormais tuer et exporter en une journée des millions d’animaux dans le monde entier sans que le consommateur puisse déterminer dans quelles conditions les porcs, bovins et autres poulets nourris au grain, au fourrage et aux antibiotiques ont été élevés."





Consommer moins de viande


Contenir la demande serait une idée judicieuse, mais les consommateurs européens et américains peuvent difficilement demander aux classes moyennes des pays émergents de limiter leur propre consommation de viande. Il semble donc inévitable que les premiers réduisent les quelque 260 grammes de viande engloutis quotidiennement pour provoquer une diminution ou une stagnation de la consommation globale.

"On ne peut pas forcer les gens", regrette Marta Messa du mouvement Slow Food. "L’alimentation est un sujet personnel et difficile à aborder, mais nous n’avons pas le choix. Le système comme il existe est tout simplement intenable. Il faut inciter les gens à acheter différemment et recréer le lien entre producteurs et consommateurs pour cesser de soutenir une production industrielle. C’est un bon moyen de faire pression sur l’industrie et d’inciter les autorités à changer les règles." Les règles, justement, ne sont pas si évidentes à modifier. Les enjeux économiques sont considérables. Des millions de producteurs "durables", en Afrique notamment, n’ont pas accès au marché et "les tractations commerciales entre l’Europe et les Etats-Unis risquent d’entraîner une révision à la baisse des réglementations sur l’élevage et l’alimentation des deux côtés de l’Atlantique", précise l’Atlas. Ce qui renforcerait de facto la position dominante de l’industrie. "Le système a besoin d’antibiotiques, de tarifs douaniers accessibles et de solutions abordables pour se débarrasser des déchets issus de l’élevage", conclut Bastian Hermisson de la Fondation Heinrich Böll qui a coécrit l’ouvrage, "tant que tout cela restera bon marché, on ne pourra pas faire grand-chose".

dimanche 23 février 2014

Nucléaire : Compte-Rendu du Procès des Bloqueureuses d'Uranium

Narbonne, 20 février : procès des bloqueuses et bloqueurs d’uranium

Le 12 septembre 2013, 40 personnes du collectif Stop Uranium ont bloqué un camion chargé d’uranium à sa sortie de l’usine Comurhex Malvési, près de Narbonne pour dénoncer les risques des convois radioactifs qui sillonnent quotidiennement la région. La seule militante arrêtée et inculpée suite à l’action risque deux ans d’emprisonnement et 4500 euros d’amende. En solidarité, et pour souligner le caractère collectif et politique de l’action, vingt-deux autres militants ont demandé leur comparution volontaire. Lors d’une première audience, le 7 janvier, la juge a demandé le renvoi du procès pour en tenir compte. Les comparants sont convoqués ce 20 février à une nouvelle audience. Le Réseau "Sortir du nucléaire" réaffirme son soutien à tous les participants à cette action.
Plus de 8500 personnes ont affirmé leur solidarité avec les militants de Stop Uranium en signant l’appel "Nous sommes tout-e-s des bloqueurs-euses d’uranium !".

Live-twit sur le rassemblement et le procès via notre compte twitter @sdnfr

8h : rassemblement et point presse devant le Palais de Justice de Narbonne. Beaucoup de monde...


8h40 : les militants entrent dans le tribunal.
10h17 : après trois autres affaires, l’audience commence. Le juge va d’abord examiner les demandes de comparution volontaire puis se retirera pour statuer sur leur recevabilité, et reviendra ensuite traiter du fond. Tous les comparants sont appelés à la barre un par un pour vérification des identités et de leurs casiers judiciaires.
10h40 : tous les témoins ont été appelés puis sortis de la salle. Terry, la seule à avoir été initialement inculpée, est appelée à la barre. Son cas sera traité après que le juge aura statué sur la comparution volontaire.
L’avocat des bloqueurs commence sa plaidoirie. Il rappelle qu’il est des principes supérieurs qui permettent d’aller au-delà de la loi quand il y a un état de nécessité. Dans des affaires comme celles-ci, il faut s’intéresser aux causes. Il rappelle également que les comparants sont conscients qu’ils peuvent être condamnés et assument leurs actes.
Le procureur demande le rejet de la demande de comparution volontaire. Le parquet a fait le choix de poursuivre Terry - la militante initialement seule inculpée - car c’est son véhicule qui a servi à l’action. Le droit à un procès équitable sera assuré même si la demande de comparution est rejetée.
11h15 : le juge se retire pour délibérer sur la demande de comparution volontaire.
11h30 : Retour du juge, qui rejette la demande de comparution volontaire, l’acte en cause étant une entrave à l’aide d’une camionnette. L’infraction qui est reprochée à Terry est... une infraction au code de la route.
11h35 : Didier Latorre, porte-parole de Stop Uranium, est entendu comme témoin : "Vous n’avez pas affaire à des délinquants routiers mais à des lanceurs d’alerte. La plupart des gens qui sont ici sont des militants de longue date qui n’ont jamais été entendus. Cette action, qui s’est déroulée en toute sécurité, dans un endroit choisi, a permis de mettre en lumière les risques de l’usine Comurhex Malvési et des transports. Ce sont nos observations qui ont permis de rendre public le nombre de camions qui sillonnent les routes tous les jours. Aujourd’hui c’est nous qui sommes à la barre alors que la Comurhex fait fi des lois et règlements depuis des années. C’est le combat du pot de terre contre le pot de fer. Nous ne sommes pas des délinquants, mais des lanceurs d’alerte face à l’omerta, dans un pays où on ne remet pas en question le nucléaire après Fukushima."
11h45 : Francis Viguier, élu municipal : "J’ai participé à cette action en tant qu’élu, pour protester contre le fait que nous soyons tenus dans l’ignorance de ces transports et de leurs risques alors qu’il est de notre devoir de garantir la santé et la sécurité publique. Je me suis renseigné sur le tétrafluorure d’uranium, qui réagit fortement et peut produire un gaz très corrosif. Je ne veux pas me retrouver dans la situation du maire de Drancy, qui n’a pas su quoi faire face au déraillement d’un convoi nucléaire".
11h50 : troisième témoin, Bruno Chareyron, ingénieur nucléaire de la CRIIRAD (Commission de Recherche et d’Information Indépendante sur la Radioactivité) : "Je n’étais pas sur l’action mais j’interviens dans ce dossier pour affirmer l’importance d’informer la population sur les transports radioactifs et leurs risques. Les normes des transports sont en incohérence avec celles de la radioprotection. Et en matière d’exposition à la radioactivité, il n’y a pas de dose d’inocuité. La situation constatée en 2006 sur cette usine n’a pas du tout évolué".
Lire l’analyse de la CRIIRAD sur ces transports->http://www.criirad.org/installations-nucl/malvesi/malvesi-transport.pdf]
Terry adhère à tout ce qui a été présenté et assume son action, qu’elle ne regrette pas.
12h : Pour le procureur, le rôle de la justice n’est pas de statuer sur la manière dont doivent se comporter les exploitants nucléaires. Il rappelle cependant que c’est l’action des militants qui fait évoluer la société, et mentionne par ailleurs l’affaire en cours entre le Réseau et l’usine Comurhex Malvési, qui a fonctionné dans l’illégalité pendant des années. Réquisition : l’infraction est constituée, il faut que la culpabilité de Terry soit reconnue mais qu’elle soit dispensée de peine.
L’avocat plaide la relaxe, en réaffirmant qu’il y a état de nécessité. Et rappelle qu’il n’y a pas eu entrave à la circulation.
12h25 : le juge se retire pour délibérer.
Verdict : Terry est reconnue coupable, l’infraction au code de la route étant déclarée constituée, et subira probablement un retrait de points ; mais elle est dispensée de peine !