Ce blog rassemble, à la manière d'un journal participatif, les messages postés à l'adresse lemurparle@gmail.com par les personnes qui fréquentent, de près ou de loin, les cafés repaires de Villefranche de Conflent et de Perpignan. Mais pas que. Et oui, vous aussi vous pouvez y participer, nous faire partager vos infos, vos réactions, vos coups de coeur et vos coups de gueule, tout ce qui nous aidera à nous serrer les coudes, ensemble, face à tout ce que l'on nous sert de pré-mâché, de préconisé, de prêt-à-penser. Vous avez l'adresse mail, @ bientôt de vous lire...
BLOG EN COURS D'ACTUALISATION... ...MERCI DE VOTRE COMPREHENSION...
LE VENDREDI 30 JUIN A PARTIR DE 19H ET LE
VENDREDI 7 JUILLET
Voyage au cœur
des Andes et de l'Amazonie
Discussions et expo photo
Animé par Ariel Inti Phùru,
diaporama par Isaur-Isabelle Casanovas
Les peuples
premiers constituent la mémoire vive de notre planète,
mémoire ancestrale qui est un trésor de savoir. Ces peuples ont
en commun des traditions qui visent à maintenir un équilibre
subtil et pourtant nécessaire à la cohésion des différents
systèmes qui constituent notre monde.
Les 2 soirées se dérouleront comme suit :
A 19h, diaporama sur le peuple Shipibos et la
famille Arevalo issue d'une lignée de shamanes Curandevos habitant
au coeur de l'Amazonie Péruvienne.
A 20h, grignotage avec des tapas...
A 21h, Discussion, débat sur les peuples
premiers et le shamanisme avec Ariel Inti Phùru (initiée depuis 14
ans par la famille Arevalo).
Intervenants :
Ariel Inti Pùrua effectué de
nombreux voyages à leur rencontre. Ellenous parlera de leur vie, de
leur projet de reforestation, et partagera son vécu.
Isaur-Isabelle
casanovas, l'a accompagnée dernièrement pour leur rendre
hommage au travers d'un diaporama et d'une exposition photo.
MARDI
DE 9h15 a
10h15
EXERCICES
CORPORELS ET MEDITATION
Avec Bernard
de Rivasson
Se connecter à son corps, son mental, ses
émotions et ses énergies pour se sentir plus vivant.
MERCREDI
A 15h
QI GONG
Avec Vero
Un art de santé
qui permet d'assouplir le corps et l'esprit
Ouvert
à tous tous tous !!!
JEUDI
A 17h30
L'AMAP
DE LA KAJETTE BIO !
Venez chercher
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partir de 18h et jusqu'à 21h !
Paris, le 23 juin 2017. Migrants porte de la Chapelle devant le centre humanitaire. Photo Albert Facelly pour Libération
Plus
de deux mois après son évacuation, le campement sauvage du nord de
Paris a réapparu. Faute de place en centre d’hébergement, les réfugiés
doivent survivre dans des conditions indignes.
Sept heures du matin, porte de la Chapelle, dans le nord
de Paris. Une cinquantaine de réfugiés patientent déjà en silence le
long de la grille du centre de premier accueil, sous le regard
impassible des gendarmes. Les yeux mi-clos, ils somnolent debout en
attendant l’ouverture de l’établissement humanitaire. Chaque matin, dans
la file, c’est la loterie : le personnel du centre sélectionne et
accueille une poignée d’entre eux en fonction des places vacantes, puis
les redirige ensuite vers des centres d’hébergement plus pérennes. Mais
ce vendredi, le flux et le reflux du centre sont comme suspendus.
« Ça fait trois jours que plus personne n’entre »,
constate Qusat, qui dort sur la chaussée d’en face. Pour ce Soudanais
de 24 ans, le même scénario se répète depuis des semaines : chaque
matin, il rejoint la grille avec son groupe vers 3 heures. Ensemble, ils
se fondent dans la queue déjà dense et patientent pendant
d’interminables heures. Puis, « vers 8 h 30, les policiers s’approchent et nous dispersent en nous aspergeant de gaz lacrymogène », souffle le jeune demandeur d’asile, qui s’inquiète de passer une énième nuit dehors.
Arbitraire
Plus de deux mois après son évacuation, le campement sauvage de la
porte de la Chapelle renaît de ses cendres. Déchets, sacs de couchage à
même le sol, vêtements suspendus aux branches basses des bosquets… Faute
de places suffisantes dans les centres d’hébergement, les exilés
improvisent à nouveau des installations sommaires sur les parcelles de
terre battue qui séparent les voies du périphérique. Les conditions de
vie y sont déplorables. Pas de toilettes, pas d’accès à l’eau courante… « On vit comme des animaux ! » s’exclame El Fatih Mohamed, sous le regard abattu de ses amis soudanais.
Les températures caniculaires n’arrangent rien à la situation. En
début de semaine dernière, Kenté, originaire de Guinée-Conakry, a été
hospitalisé à la suite d’un malaise dans la foule. « J’espère qu’au centre, ils tiendront compte de mes maux de tête et me trouveront une place »,
confie le jeune homme, qui est revenu à La Chapelle sitôt sorti de
l’hôpital. Face à l’urgence sanitaire, la maire de Paris, Anne Hidalgo, a
adressé le vendredi 16 juin une lettre au gouvernement. Elle y plaide
pour l’ouverture de nouveaux centres de premier accueil dans les
métropoles régionales françaises, faute de quoi « plusieurs milliers
de personnes seraient contraintes de vivre dans ces conditions indignes
au sein de la capitale au cœur de l’été ».
En guise de réponse, le ministre de l’Intérieur, Gérard Collomb, a
seulement mentionné qu’aucun établissement ne sera ouvert à Calais, tout
en assurant qu’il présentera d’ici quinze jours un nouveau « plan » au
président de la République, « pour traiter le problème de l’asile de manière plus facile qu’aujourd’hui ».
Une heure passe à La Chapelle, rien ne bouge. Des membres de
l’association Utopia 56 rejoignent les jeunes migrants, qui commencent à
perdre patience. « Depuis deux semaines, on ne voit que des Afghans rentrer dans le centre », lance Qusat, qui se rappelle de « fortes bousculades »
avec eux les jours précédents. Pour Yann Manzi, le vice-président de
l’association, ces réactions emportées sont compréhensibles car le mode
d’attribution des places est arbitraire. Pire, il favorise selon lui « la loi du plus fort, au lieu de laisser entrer les personnes dignement ».
A la place, l’association a déjà proposé à la mairie de Paris
d’organiser des rendez-vous individualisés qui permettraient de
désengorger les abords du centre en douceur. Mais à chaque fois, cette
option se heurte « aux refus de la préfecture ».
« C’est mort les gars »
Erythréens, Soudanais, Afghans, Centrafricains… Alignés le long du
grillage, ils ont déjà tenté leur chance en Allemagne, en Italie ou en
Norvège avant d’atterrir dans le chaos migratoire de La Chapelle. Pour
certains, une première demande d’asile a été enregistrée dans l’un de
ces pays. Mais faute de réponse, ils retentent leur chance ici.
Pour
d’autres, la demande d’asile a été rejetée. Face à la diversité des
profils de réfugiés, les membres d’Utopia 56 s’activent dans la queue
pour éclairer les migrants sur les procédures à suivre. « Ces jeunes sont en pleine errance administrative », explique Yann Manzi, qui dénonce le fonctionnement de l’établissement d’accueil, devenu pour lui un « centre de tri ». « On les fait entrer dans ce centre, et quand on voit qu’ils sont "dublinés", on les renvoie chez nos voisins européens ».
Car en vertu du règlement de Dublin III, chaque réfugié doit demander
l’asile dans le pays où ses empreintes ont été enregistrées. « C’est une aberration, poursuit Yann Manzi. Des pays frontaliers comme l’Italie et la Grèce ne peuvent pas accueillir tous les demandeurs d’asile. »
Il est 8 h 30. « C’est mort les gars, lance le directeur de l’association. Ils ne laisseront entrer personne aujourd’hui. »
La rumeur circule dans la queue. Au compte-gouttes, les migrants se
dispersent lentement et regagnent leurs sacs de couchage, abandonnés à
l’aube de l’autre côté de la route. Les mains agrippées à la barrière,
trois jeunes Somaliens persistent. S’ils n’arrivent pas à avoir une
place aujourd’hui, cela signifie qu’ils passeront un nouveau week-end à
la rue. « Peut-être qu’ils en font rentrer cet après-midi ? » demande T. aux deux autres, le regard tourné vers la colonne de gendarmes mobiles. « Mieux vaut rester, on ne sait jamais. »
Pour
la 18ème année consécutive le village de Py se prépare à célébrer la
semaine des foins.
Tout au long de la semaine, à compter du lundi 3
juillet, venez nombreux accompagner les agents de
la réserve naturelle de Py à faire vivre les gestes et techniques de
fauche transmises par les anciens du village.
Cette semaine s'achèvera
le samedi 8 juillet par une journée conviviale.
Le matin un atelier
confection de ratafia sera proposé à 10 h sur la
place de Py avec dans un premier temps un atelier cueillette des
plantes traditionnelles nécessaires à l'élaboration du ratafia. Apportez
votre alcool de fruit et vos bouteilles vides.
À midi vous aurez la
possibilité de vous restaurer à l'auberge de Py sous
réservation au 04 34 52 02 84.
L'après-midi sera consacrée au montage du traditionnel
paller de la Falguerosa.
Pour finir
la journée un apéritif préparé par l'association Rotjà vallée gourmande
vous sera offert par la mairie et la réserve naturelle.
Cet apéritif
sera aussi l'occasion de trinquer à la signature
de la convention entre l'état, la fédération des réserves naturelles
catalanes et l'association gestionnaire de la réserve naturelle de Py.
L'Europe ne doit pas réduire l'ambition du label "bio"
L’Europe ne doit pas brader le label « bio » européen : Interpellez le nouveau ministre de l’Agriculture !
Alors que la consommation de produits bio a progressé de 21% entre
2015 et 2016 et qu’une vingtaine de fermes françaises se convertissent à
la bio chaque jour, le règlement bio européen risque d’être affaibli par la Commission européenne. Il s’agit pourtant aujourd’hui d’un label plébiscité par le grand public et les producteurs pour sa fiabilité et son exigence.
Les institutions européennes travaillent à la révision du règlement
bio européen depuis 2014 mais les négociations se sont enlisées depuis
de nombreux mois.
D’ici la fin du mois de juin, plusieurs réunions
importantes à Bruxelles pourraient sceller le sort du label bio. Sous la
pression de plusieurs pays européens, trois modifications majeures
risquent de mettre en danger la cohérence et le sérieux de l’agriculture
biologique européenne :
Autorisation du hors sol :les pays baltes et
scandinaves souhaiteraient pouvoir certifier la culture en bacs, ce qui
est contraire aux principes du lien au sol et de la rotation des
cultures ;
Nombre de contrôles à la baisse : Abaissement du
nombre de contrôles des exploitations pour vérifier qu’elles respectent
bien le cahier des charges. Au lieu d’un contrôle par an on passerait au
mieux à un tous les deux ans voire plus ;
Un seuil de pesticides : une liberté serait donnée
aux États-membres de l’Union européenne de décider d’un seuil permettant
de déclasser une production biologique en fonction d’un niveau de
présence de résidus de pesticides. Ceci risque de créer un label à
plusieurs vitesses selon le seuil décidé par chaque État-membre !
Une réunion du Conseil européen des ministres de
l’Agriculture vient d’avoir lieu et le nouveau ministre français ne
s’est pas exprimé sur ce sujet.
Nous demandons au gouvernement par l’intermédiaire de son ministre de
l’Agriculture M. Stéphane Travert, de prendre clairement position sur
ce sujet afin de défendre l’intégrité du label bio auprès des
institutions européennes et face aux autres Etats-membres.
Il faut que la France exprime clairement son refus d’un label bio au
rabais qui pourrait dégrader la confiance des Français-e-s vis-à-vis de
la bio.
Message à envoyer au ministre de l'Agriculture
Monsieur le ministre de l’Agriculture,
A l’abri des regards, la Commission européenne cherche actuellement à niveler par le bas le cahier des charges de l’actuel label bio européen en autorisant le hors sol, en diminuant le nombre de contrôles destinés au respect du cahier des charges et en assouplissant les critères permettant de déclasser une production biologique en cas de contamination par des pesticides !
Je vous demande de vous opposer à ces trois points dans le cadre de l’adoption du nouveau projet de règlement européen pour sauvegarder un label bio plébiscité par les consommateurs.
Comptant sur votre écoute, je vous prie d’agréer, Monsieur le ministre de l’Agriculture et de l'Alimentation, l’expression de mes sentiments distingués.
Pour signer cette pétition merci d'aller sur le site en ligne
Dans toute situation la manière dont réagit un corps peut tout changer. Du moins faut-il, peut-on le croire.
Dans toute situation la manière dont réagit un corps peut tout changer.
Du moins faut-il, peut-on le croire.
Ce vendredi 23 Juin, à l’aéroport de Roissy Charles de Gaulle, un
homme, de nationalité afghane, devait être renvoyé de force vers Kaboul
via Istanbul.
Il était maintenu en centre de rétention depuis 44 jours, par deux
fois la police l’avait conduit à l’aéroport et par deux fois des
militants ayant alerté l’équipage et les passagers, la résistance de
certains avait réussit à le faire débarquer. Cet homme n’était coupable
de rien d’autre que d’avoir vu sa demande d’asile non traitée et d’être
de ce fait en séjour irrégulier sur le territoire français où il s’était
réfugié, fuyant la guerre en son pays natal.
Emprisonné en centre de rétention administrative (CRA) suite à un
contrôle et à une OQTF (Obligation de quitter le territoire français),
il avait épuisé tous les recours juridiques et la police des frontières,
malgré l’interdiction théorique selon les Conventions de Genève de
renvoyer des ressortissants dans des pays en guerre (rappel : comme
l’Afghanistan), recevait mission de le déporter au gré des alliances
avec les compagnies aériennes.
Cet homme devait être libéré demain, la rétention administrative ne
pouvant pas excéder 45 jours. L’ultime tentative de renvoi eut dont lieu
la veille.
L’obstination et les moyens mis à sa disposition payent en général,
l’administration le sait. Les militants de La Chapelle debout sont
alertés dans la matinée que M. a quitté le CRA et qu’il va être déporté
par le vol X de la compagnie Turkish Airlines, à 16h. Alors qu’ils sont
parvenus à empêcher son renvoi mardi dernier, ils éprouvent la dernière
tentative de la machine à expulser pour ce qu’elle est, un durcissement
et une menace.
Au dernier moment les gens quittent leur travail, leur rendez-vous,
se jettent dans le RER, et dix personnes arrivent à Roissy dès 14h.
L’équipage a été briffé par une mystérieuse hiérarchie invoquée à
chaque phrase, et le pilote devant les hôtesses au complet explique
qu’il est tenu à la plus grande fermeté.
Les hôtesses sont médusées
derrière leur fond de teint, et tournent les talons au rythme d’un
bataillon de Tsahal. Un employé de la même compagnie (Turkish Airlines
Voyage voyage pas) nous affirmera sur tous les tons et sans que nous lui
ayons rien demandé qu’en Turquie tout va très bien et qu’il ne faut pas
croire ce que racontent les médias, il n’y a pas de purge, il n’y a pas
de problème… Reprend ton souffle …
Convaincre l’équipage semblant peine perdue et alertés par contacts
divers que nous avions tout intérêt à être discrets, sinon on vous
embarque, dix d’entre nous vont individuellement informer de la
situation chaque passager, quand ceux-ci acceptent de prêter leur
oreille. Nous distribuons également un tract expliquant la situation de
M., ses revendications, et la procédure à suivre pour faire usage de son
droit à refuser de décoller dans un avion où un homme menotté, masqué,
parfois drogué, et encadré par la PAF, est contraint de rentrer dans un
pays en guerre. En gros, c’est simple, tu dis non.
Le vol n’est pas très plein, l’aéroport est calme. Tout roule en
apparence. On ne sent ni agitation, ni tension, ni joie. Rien qu’un
froid policé. Presque tous avaient le maintien des touristes riches avec
leurs valises en plastique dur, et la vraie fausse terreur, engendrée
par le dispositif de sécurité depuis le 11 Septembre 2001, glaçait
l’espace et toute émotion naissante.
Nous partions plutôt battus. Deux d’entre nous étaient au bord des
larmes, et répétaient comme un mantra qu’ils n’attendaient rien. Les
futurs passagers ont embarqué pour la zone où nous ne pouvions les
rejoindre sans ticket de vol. Certains avaient semblé attentifs, avaient
donné leur téléphone, avaient pris fait et cause pour cet homme
inconnu, beaucoup n’avaient pas envie d’en penser quoique ce soit.
Les dés étaient jetés, même si une partie essentielle de l’action
allait avoir lieu par téléphone entre passagers, dans l’avion, et
militants assis en rond autour d’un poteau du Hall 20. Trois femmes au
téléphone, en français, en anglais, les échanges reprennent, s’arrêtent,
des sms, des nouvelles de l’avion, où est il, masqué au fond,
l’entendez-vous, que dit l’équipage ?
Ça semble compliqué, mal parti. D’un bout de l’avion à l’autre on n’a
pas les mêmes perceptions, et puis certains ont des enfants, un mari,
une femme part enterrer sa mère, les militantes restent particulièrement
calmes malgré la peur, une jeune danoise sourit à un passager, oui même
au téléphone.
Un air de défaite flotte.
Alors que je suis sortie fumer une cigarette, j’apprends que l’avion a
fait demi-tour. Je retourne dans le hall 20. Mes camarades racontent,
au fur et à mesure que l’information se répand, que le pilote avait tenu
à décoller, malgré l’opposition de certains passagers. M. quand à lui
était solidement encadré par la PAF, masqué et menotté au fond de
l’avion. Les passagers n’avaient pu avoir de contact avec lui. Les
policiers leurs auraient menti en leur disant qu’il était faux que M.
eut une femme et un enfant en France et qu’il était dangereux, ayant
fait « des choses dans son pays ».
Le pilote a donc lancé l’avion, rapidement, M. s’est mis à hurler.
Puis les passagers SE SONT LEVÉS. Un par un et à plusieurs. L’avion
roulait, les passagers restaient debout. Au bout d’un certain temps, le
pilote a été contraint de ralentir et d’arrêter « sa » machine, pour
raisons évidentes de sécurité. M. a été débarqué et ramené au CRA. En
principe, il devrait être libéré demain matin.
Le procureur de Toulouse a requis ce mardi 20 juin le non-lieu dans
l’affaire Rémi Fraisse. Mais il oublie dans son raisonnement des
éléments décisifs et commet plusieurs erreurs. Reporterre, qui a lu son
réquisitoire, le décrypte.
Il aura fallu plus de quatre mois à Pierre-Yves Couilleau, procureur de
la République à Toulouse, pour rendre ses conclusions dans l’affaire
Rémi Fraisse. C’est un non-lieu généralisé qui est requis au terme d’un
réquisitoire de 137 pages. Dans ce document, daté du 20 juin 2017, que Reporterre
a pu lire, le magistrat retrace l’ensemble de la chronologie des faits
et des témoignages récoltés par la justice sur les évènements de la nuit
du 25 au 26 octobre 2014, où Rémi Fraisse fut tué d’une grenade offensive lancée par un gendarme mobile.
Si le chargé de la communication du procureur nous assurait au mois d’avril que "tout serait fait pour être au maximum précis et factuel",
la lecture du document nous permet d’en douter. De manière générale,
dans ce récit, la parole de l’Etat et des forces de l’ordre prédomine.
Ce sont eux qui permettent de former le récit, tandis que les
témoignages des manifestants, bien moins nombreux, sont relégués au
second plan quand ils ne sont pas discrédités.
Dans la chronologie, des incohérences surgissent : "Certains
escadrons, dont celui de La Réole devaient effectuer plusieurs services
de rétablissement de l’ordre sur le site. En particulier, durant la nuit
du 2 au 3 octobre 2014, des opposants au projet incendiaient des abris
de chantiers de type « Algéco » installés sur un terrain privé appartenant à la CACG."
D’une part, cet incendie a eu lieu dans la nuit du 23 au 24 octobre
(admettons l’erreur de frappe). Ensuite, cet évènement entrainerait "consécutivement"
la mise en place d’agents de sécurité privés. Or, les agents de
sécurité étaient justement sur place le 24 octobre au moment de
l’incendie de l’Algeco. Un détail mineur ? C’est pourtant cet évènement initial qui va décider en quelques heures du déploiement de plusieurs escadrons de gendarmerie sur la zone.
Erreurs et omissions
A la suite de cet exposé, chacun des témoignages est repris
substantiellement par le texte. Sur la présence d’un groupe de gendarmes
à l’écart des autres et en dehors de la "zone-vie" où ceux-ci étaient regroupés, seul un témoignage est cité directement : celui de Christian. Au travers de ses déclarations à Reporterre puis devant les juges, il livre "une version pour le moins inédite des événements de la nuit" puisqu’il voyait des gendarmes en nombre "en dehors de la zone de vie". L’audition devant les gendarmes d’un autre témoin clé, Marc, est décrite en ces termes : " Mis devant les contradictions de ses déclarations, celui-ci s’emportait et quittait les locaux du service enquêteur."
Et pour cause : les enquêteurs refusaient d’inscrire au procès-verbal
les propos du témoin, qui faisait lui-aussi état d’un groupe hors zone. De ces pressions, le procureur ne dit rien.
Sur les instructions données par l’autorité civile, le magistrat
reprend le témoignage du commandant des gendarmes du Tarn. A la fin de
la journée du 25 octobre, celui-ci "faisait un point avec le directeur de cabinet [du préfet] lequel lui retransmettait les consignes du ministre de l’intérieur : "Apaisement mais riposte proportionnée si agression des forces de l’ordre".
Il confirme ainsi que Paris était bien tenu informé des évènements
durant la journée du 25 octobre. Dans l’esprit du procureur, "la mission consistant à tenir la zone de vie commandait une action strictement défensive". L’hypothèse d’un désengagement des gendarmes étant jugée plus risquée que leur maintien sur place.
Plus grave, dans un schéma reconstituant le positionnement de chacun,
on note l’absence pure et simple d’un portail (ouvert à deux reprises)
donnant accès depuis la zone de vie vers la zone où se trouvait le "front des manifestants",
description abusive pour décrire une addition de groupes disparates. Le
dessin donne une troublante impression de gendarmes piégés. Pourtant,
la moitié des gendarmes était en retrait ou sur le côté, en dehors de
cette zone.
De ces éléments, le procureur livre une analyse à sens unique. Il
constate qu’il est établi de manière irréfutable que Rémi Fraisse a bien
été tué d’une grenade offensive de type F1 tout en précisant bien qu’"aucun
élément ne pouvait, au moment des faits, laisser croire que ces
grenades étaient létales. (..) Aucun décès n’était par ailleurs
répertorié, à cette époque, comme étant intervenu consécutivement à son
utilisation." En 1977, Vital Michalon avait pourtant été tué à Creys-Malville par une grenade de ce même type.
Sur la grenade elle-même, son usage était "prescrit", "autorisé" et "commandé par l’autorité légitime", sans être "manifestement illégal". L’usage des armes et précisément de la grenade offensive est selon lui conforme au principe d’ "absolue nécessité" et de "stricte proportionnalité". Enfin, le procureur dédouane également toute responsabilité de la part de la hiérarchie civile et militaire affirmant que "l’absence d’autorité civile et/ou le manque de précision des consignes ne peuvent constituer une faute qualifiée".
Une manière de désamorcer les critiques des parties civiles qui mettent
depuis plusieurs mois en cause, sans succès, Thierry Gentilhomme,
préfet du Tarn et son directeur de cabinet d’alors, Yves Mathis premiers
responsables civils cette nuit-là.
Aussi, pour le procureur, tout ceci est une "tragédie", ayant causé la mort d’un "jeune
homme totalement intégré, calme, pondéré et pacifique" (...) mû par des
convictions pacifistes, très attaché à la protection de la nature". Alors pourquoi ? "Une
manifestation pacifique, à bonne distance des forces de l’ordre qui
avaient reçu une consigne d’apaisement, n’aurait jamais dégénéré."
C’est ainsi qu’en une phrase, le procureur, voix de l’Etat, fait
cyniquement reposer la responsabilité de la mort de Rémi Fraisse tué par
une grenade lancée par des gendarmes, sur les manifestants qui leur
faisaient face.
De là, il ne peut effectivement que
conclure au non lieu et à l’absence totale de mise en cause pénale de
quelque protagoniste de l’affaire. A aucun moment le procureur
n’envisage que c’est la présence, inopinée et non prévue avec les
organisateurs, d’un escadron complet de gendarmes mobiles sur une zone
vide, terrain d’un chantier d’un projet aujourd’hui jugé illégal, qui
serait à l’origine des affrontements et de la mort de Rémi Fraisse. On
mesure ici l’absence totale de prise de conscience par l’Etat de ce qui
s’est joué entre des citoyens et les forces de l’ordre à Sivens et
au-delà.
D’ici quelques semaines, le verdict des juges toulousaines sera sans
doute de la même eau : un accident, une affaire tragique, un non lieu.
Pourtant, avec les mêmes éléments, des magistrats déterminés
pourraient aboutir à des conclusions toutes différentes, reprendre le
dossier, éclaircir les zones d’ombres qui subsistent, faire juger le
dossier par un tribunal moins directement intriqué dans la vie locale
que celui de Toulouse. Ces demandes de la part des parties civiles sont
demeurées lettres mortes. Il restera alors peut-être à un tribunal
administratif de juger de la responsabilité de l’administration de
l’Etat et à une Cour Européenne de peut être donner une réponse
juridique définitive à la question : qui a tué Rémi Fraisse.
Ingénieur forestier de formation, docteur en sciences naturelles, Ernst
Zürcher est un amoureux des arbres, mais pas un doux rêveur. Dans « Les Arbres, entre visible et invisible », il tente de répondre en scientifique à des questions disparates qui conduisent le lecteur de surprise en surprise.
On croit tout connaître des arbres. Des montagnes de livres existent qui nous expliquent ce qui les distingue les uns des autres ;
d’autres révèlent les secrets de leur reproduction sexuelle ou les
outils qu’ils ont créés au fil des millénaires pour se défendre contre
les agressions extérieures ; d’autres encore racontent pourquoi certains arbres vivent des milliers d’années et d’autre pas…
En réalité, on sait peu de choses sur eux. Dans ce XXIe siècle
qui prétend tout connaître ou presque, les arbres conservent
l’essentiel de leur mystère. Comment font-ils pour résister au vent, à
la neige ? Quelle force les anime qui maintient horizontales les branches d’un séquoia qui pèsent des centaines de kilos ? Comment réussissent-ils à alimenter en eau une cime parfois située à plus de cent mètres du niveau du sol ?
D’autres questions renvoient à des notions plus mystérieuses.
Pourquoi, gamins, éprouvons-nous le besoin de grimper aux arbres, d’y
construire des cabanes ? Comment expliquer
que les hommes, aussi loin que l’on remonte dans la nuit des temps, ont
investi certains arbres — comme l’if ou le chêne — de pouvoirs
mystérieux jusqu’à en faire des « arbres sacrés » ?
Des millions de Japonais qui pratiquent chaque année des « bains de forêt »
Voilà le type de questions disparates auxquelles s’efforce de
répondre Ernst Zürcher dans son livre. Car, ce qui intéresse l’auteur,
ce sont les liens à la fois visibles et invisibles qui unissent l’arbre à
son environnement. Il y a beaucoup à apprendre d’eux. Les arbres,
écrit-il, « peuvent être vus comme semblables à des “humains du règne végétal”, qui
nous aident à sentir battre le cœur du monde — hors de nous et en nous.
Par la prise de conscience d’une appartenance à un même monde, nous
pourrons retrouver nos rythmes profonds et recevoir des forces nouvelles ».
Dit ainsi, on pourrait redouter que l’ouvrage verse dans un bric-à-brac new age
ennuyeux et vain. Ce n’est pas le cas. L’auteur n’est pas un doux
rêveur, mais un scientifique qui a beaucoup lu et médité. Ingénieur
forestier de formation, docteur en sciences naturelles, Ernst Zürcher a
ses lettres de noblesse : ses publications se comptent par dizaines et
il enseigne entre autres à l’École polytechnique fédérale de Zurich.
Lorsqu’il invite, par exemple, le lecteur à un voyage à l’intérieur des
tissus et des structures cellulaires de l’arbre pour comprendre le
miracle du cheminement de l’eau et des sels minéraux dilués à travers
des vaisseaux parfois interminables, il le fait avec rigueur et
compétence. Un souci identique transparait lorsqu’il met en évidence
l’influence sur la germination et la croissance des arbres des
mouvements de la Lune (et sa position par rapport aux autres corps
célestes). À défaut d’être toujours aisée à suivre, la démonstration est
solide. Les conclusions qui en découlent accréditent d’ailleurs souvent
des dictons anciens, qu’il s’agisse d’abattre des arbres à la meilleure
période ou de construire une habitation en bois.
Dans ce voyage au long cours illustré des magnifiques dessins au
crayon de David Dellas, où il est autant question des forêts que de
l’arbre en tant que tel, le lecteur va de surprise en surprise. Qui sait
qu’au Japon des millions de personnes pratiquent chaque année, sous
contrôle médical, des « bains de forêt »,
une sorte de thérapie forestière qui, pour diminuer le stress et
renforcer les défenses immunitaires, mise sur l’effet positif des
substances aromatiques volatiles dégagées par les arbres et les sols
forestiers ? Autre sujet d’étonnement, la
capacité de certains arbres à annoncer le temps des prochains jours. Un
épicéa desséché, en pleine terre, lève ses branches par beau temps, mais
les baisse avant l’arrivée de la pluie. Plus étonnant, des expériences
récentes conduites dans des universités japonaises, à partir
d’électrodes implantées dans le tronc, ont mis en évidence chez
certaines variétés d’arbres une capacité à prédire les tremblements de
terre. Le mécanisme (déjà observé chez des animaux) est encore
inexpliqué. Comme dotés d’antennes, les arbres enregistreraient les
perturbations électriques corrélées aux mouvements de la croûte
terrestre.
Consacrer un temps à l’apprentissage des arbres et de la forêt dans les écoles
On pourrait multiplier les exemples de bienfaits mis en avant par
l’auteur de ce qu’apporte le bois matériau, qu’il s’agisse de se loger,
de se chauffer, voire de cuisiner (une planche à découper en bois est
bien plus hygiénique que le polyéthylène à cause de l’effet bactéricide
de la lignine et des constituants naturels du bois).
Si l’on doit adresser un reproche à l’auteur, c’est d’en faire trop
dans son ode à l’arbre et à la forêt. Dans la préface (élogieuse) du
livre, le botaniste Francis Hallé ne se prive d’ailleurs pas de lui
lancer quelques piques. « Dans les zones polluées dont la faune a disparu, est-il vrai que les jeunes arbres “ressentiraient comme un manque” l’absence des chants d’oiseaux et des bruissements d’insectes », s’interroge-t-il ?
Hallé n’y croit pas. Mais ces réserves sont peu de choses. Le livre de
Zürcher est celui d’un amoureux des arbres qui sait communiquer sa
passion. Lorsqu’il clôt son livre en préconisant de consacrer un temps à
l’apprentissage des arbres et de la forêt dans les écoles, ou de
protéger les arbres les plus vieux, ceux qui sont porteurs de mémoire,
au même titre qu’un être humain, on ne peut que lui donner raison.
Les Arbres, entre visible et invisible, de Ernst Zürcher, dessins de David Dellas, préface de Francis Hallé, éditions Actes Sud, septembre 2016, 288 p., 29 €.
Ci joint une liste de livres pour l'été dressée pour ATTAC 66.
Amitiés.
Des livres pour l’été 2017 pour ATTAC 66.
A partir de la bibliographie de la CONFERENCE THERMOMUSICALE
du Professeur BOUM BOUM.
« La biosphère », par Wladimir Vernadsky, coll. Points Science S147, Seuil 2002 : un petit classique en poche de l’histoire vertigineuse de l’apparition de la vie sur la Terre.
« La sixième extinction : comment l’homme détruit la vie », de Elisabeth Kolbert - Librairie Vuibert - 2015 : volumineuse histoire, très bien écrite, d’une enquête, sur les différentes extinctions des espèces. Prix Pulitzer. Se lit comme un roman.
« Or noir » La grande histoire du pétrole, de Matthieu Auzanneau, Editions La Découverte - 2015 : un véritable traité, où l’on constate en conclusion que le pétrole a été mêlé de près ou de loin à tous les conflits du 20ème siècle.
« Le choix du feu », par Alain Gras, Edition Fayard 2007 : l’auteur, anthropologue, analyse longuement les causes et les conséquences de l’addition progressive des énergies fossiles aux énergies renouvelables.
« Oil : petite anthropologie de l’or noir », de Alain Gras - éditions B2 - 2015 : un très petit livre sur les rapports entre le pétrole et l’énergie.
« L’énergie des esclaves », le pétrole et la nouvelle servitude, de Andrew Nikiforuk - Editions Ecosociété - 2015 : comment le pétrole a remplacé les esclaves, au point que nous avons l’équivalent de centaines de ces derniers à la disposition de chacun d’entre nous. (Note de lecture)
« SIX DEGRES - Que va-t-il se passer ? », par Mark Lynas, Editions Dunod 2008 - Collection Quai des sciences : une compilation, déjà dépassée mais initiatique, de centaines d’études sur le réchauffement climatique, catastrophe vers laquelle nous marchons les yeux grands ouverts.
« Extractivisme. Exploitation industrielle de la nature : logiques, conséquences, résistances. » d’Anna Bednik, Editions le passager clandestin - 2016 : un tour du monde des ravages que nous imposons à ses habitants, y compris les pauvres des pays riches, pour satisfaire, par l’intermédiaire des grandes sociétés minières, notre boulimie de consumérisme. (Note de lecture) (A lire avant de venir entendre l’auteur(e) à l’Aude à la Bio 2017 à Couiza).
« L’Ecologisme des pauvres, une étude des conflits environnementaux dans le monde », de Joan Martínez Alier - édition Les petits matins/Institut Veblen - 2014 : assez gros volume, lisible comme une analyse politique mondiale des conflits environnementaux, qui complète bien le livre d’Anna Bednik. (Note de lecture)
« Les limites à la croissance » (dans un monde fini), de Donella Meadows, Dennis Meadows, Jorgen Randers - Editions Rue de l’échiquier - 2012 : la troisième édition du fameux rapport du Club de Rome, qui n’est toujours pas pris en compte au bout de quarante ans de déni, alors que les statistiques réelles corroborent progressivement le scénario « business as usual ».
« Quel futur pour les métaux ? », de Philippe Bihouix & Benoît de Guillebon, édité par EDP Sciences - 2010 : un tout petit peu technique, mais explique très bien comment l’économie circulaire et le développement durable vont se heurter à la raréfaction de beaucoup de métaux, dont certains très stratégiques.
« Les sables bitumineux : la honte du Canada », de Andrew Nikiforuk - Editions Ecosociété - 2010 : un livre sur l’ensemble des problèmes soulevés par le développement de l’exploitation des sables bitumineux du Canada.
« Brut », de David Dufresne, Nancy Huston, Naomi Klein, Melina Laboucan- Massimo, et Rudy Wiebe - Lux Editeur - 2015. (12 €) : un petit livre très bien écrit sur le drame sociétal que provoque l’exploitation des sables bitumineux du Canada, présentés comme la parade au pic pétrolier, au prix de la multiplication de nos émissions de carbone.
« Vert paradoxe », Le piège des solutions écoénergétiques, de David Owen, Editions Écosociété - 2013 : explique comment, très souvent, les pratiques écoénergétiques ont un effet pervers qui aboutit à l’inverse de l’amélioration recherchée. (Note de lecture)
« Comment tout peut s’effondrer - petit manuel de collapsologie à l’usage des générations présentes », de Pablo Servigne et Raphaël Stevens - Editions du Seuil - 2015 : un livre qui explique comment la complexité du système occidental n’a d’égale que sa fragilité.
« La fin de l’abondance - l’économie dans un monde post-pétrole », par John Michael Greer, Editions Ecosociété - 2016 : un livre bien écrit et très lisible, où l’on comprendra pourquoi la fascination pour la monnaie est un piège terrible, et pourquoi l’écologie doit primer de toute urgence sur l’économie. (Note de lecture)
« L’événement Anthropocène : la Terre, l’histoire et nous », de Christophe Bonneuil et Jean-Baptiste Fressoz - Editions Seuil mise à jour mai 2016 - coll. POINTS H517 : une histoire vaste et détaillée des multiples évolutions qui nous ont amenés à la situation actuelle, très inquiétante, où l’homme devient un agent géologique..
« La question climatique : Genèse et dépolitisation d’un problème public », de Jean-Baptiste Comby - Editions Raisons d’agir - collection Cours et Travaux - 2015 : une enquête sociologique très sérieuse, mais qui peut se lire comme un roman, sur la façon dont la promotion des petit gestes, par les médias et les administrations, dispense l’Etat d’affronter les industriels pour mettre en place une politique efficace et indispensable de réduction de nos émissions de carbone. (Note de lecture)
« COMMENT LES ECONOMISTES RECHAUFFENT LA PLANETE », de Antonin Pottier - Editions du Seuil - septembre 2016 : une démonstration à la fois savante et accessible, avec de fines pointes d’humour, que les recommandations absolument irréalistes des économistes bien en cours, comme l’organisation du marché du carbone, nous mènent à la catastrophe si l’écologie ne devient pas prioritaire dans les décisions économiques. L’auteur définit très clairement par exemple ce qu’est un taux d’actualisation, et comment la valeur qu’on lui donne suffit à choisir entre deux directions opposées. Notre survie est en jeu.
Jugé en appel à Aix-en-Provence pour aide
à l’entrée, à la circulation et au séjour de personnes en situation
irrégulière, l’agriculteur Cédric Herrou, qui héberge des migrants en
vallée de la Roya, s’est retrouvé confronté à un mur d’incompréhension.
Ce 19 juin 2017, l’agriculteur Cédric Herrou, 37 ans et figure
emblématique du combat des habitants de la vallée de la Roya,
comparaissait devant la cour d’appel d’Aix-en-Provence pour aide à
l’entrée, à la circulation et au séjour de personnes en situation
irrégulière. Il lui était également reproché l’occupation le 20 octobre
2016 d’une ancienne colonie de vacances de la SNCF, à
Saint-Dalmas-de-Tende, avec une cinquantaine de migrants. « Vous vivez seul ? »,
commence par demander le président de la cour, comme une blague à
répétition. L’agriculteur hébergeait ce jour-là sous des tentes et dans
des caravanes installées sous ses oliviers près de 130 migrants…
Depuis le rétablissement des contrôles à la frontière franco-italienne
en novembre 2016 à la suite des attentats de Paris, cette vallée des
Alpes-Maritimes est devenue un point de passage obligé pour les migrants
souhaitant rejoindre la France. Toutes les nuits, de petits groupes
partent de Vintimille par les voies de chemin de fer, les sentiers ou la
départementale. Ils croisent souvent sur leur chemin les champs
d’oliviers, puis l’habitation de Cédric Herrou, à 7 kilomètres de la
frontière. Visible de la voie ferrée, celle-ci est la première avant le
village de Breil-sur-Roya.
Le 10 février 2017, le tribunal correctionnel de Nice avait condamné
l’agriculteur à 3 000 euros d’amende avec sursis pour avoir aidé des
étrangers en situation irrégulière à franchir la frontière italienne.
Soulignant la « situation globale d’indignité et de détresse dans laquelle se trouvent nécessairement les migrants, isolés […] démunis de l’essentiel », le tribunal correctionnel de Nice l’avait relaxé pour les autres faits, en faisant jouer l’exemption humanitaire. « Il
ne saurait être reproché à quiconque de les avoir recueillis, logés,
nourris, écoutés et entourés, afin de les restaurer dans leur dignité », indiquent les juges niçois dans leur décision écrite.
Incongruité notoire, l’immunité créée en 2012 par le gouvernement
socialiste porte uniquement sur l’aide au séjour et non sur l’aide à la
circulation : il est légal d’héberger un migrant sans contrepartie, pas
de l’emmener en voiture jusqu’à chez soi. Avec bon sens, le tribunal
niçois avait étendu cette immunité aux faits d’aide à la circulation : « Pour apporter […] un hébergement provisoire, Cédric Herrou a nécessairement dû véhiculer les migrants pris en charge sur le sol français. »
Les juges avaient également estimé que l’occupation de l’ancienne
colonie de vacances de la SNCF répondait à l’état de nécessité, « au regard de la gravité de la menace encourue par les migrants dans l’hypothèse où il se seraient trouvés à la rue ». En
revanche, le tribunal avait estimé que cette immunité ne concernait pas
le transport de familles et mineurs isolés pris en charge à Vintimille,
côté italien, transport pour lequel l’agriculteur a été condamné, faute
d’avoir apporté « la preuve au cas par cas » de la « situation de danger réelle et constatée » pour chacun de ces migrants.
Les témoignages de cinq militants de la vallée, dont deux
infirmières, avaient sans doute pesé sur la décision des juges niçois,
en faisant entrer au sein du palais de justice un peu de cette réalité,
de leur désarroi face à des gamins arrivant les pieds en sang d’avoir
marché toute la nuit sur les voies ferrées. Le procureur de Nice, qui
avait réclamé huit mois de prison avec sursis, avait fait appel, suivi
par Cédric Herrou et la SNCF, déboutée de sa demande de réparation.
Manifestement, la cour d’appel d’Aix-en-Provence ne partage pas non plus l’analyse des juges niçois. « Vous
connaissiez la loi qui incrimine de façon très précise l’aide aux
étrangers ? Aviez-vous conscience que vous étiez en contradiction avec
la loi ? », répète son président Bernard Jacob. Alors que l’absence
de contrepartie a été clairement établie par l’enquête, un de ses
assesseurs questionne l’agriculteur sur la présence de trois enveloppes
contenant plus de 1 000 euros en liquide dans le fourgon de
l’association Roya citoyenne. L’autre assesseur l’interroge sur
l’habitude qu’il avait prise, depuis une première interpellation,
d’effacer systématiquement ses textos et le journal des appels de ses
trois téléphones portables, « une pratique courante dans cette chambre spécialisée dans la délinquance organisée », glisse-t-il.
L’avocat général Christophe Raffin menace Cédric Herrou, concernant ses relations avec le préfet des Alpes-Maritimes : «
Est-ce qu’il vous est arrivé de l’insulter ? Même pas sur Facebook ?
Injure et diffamation, vous connaissez la loi la presse ? »
Avant de tailler en pièces la décision du tribunal de Nice, dont il juge les motivations « très particulières, alambiquées et peu compréhensibles ». Il remet en cause la « sérénité » des débats en première instance, insinuant que des « actions de pression » ont pu amener les juges niçois à cette décision clémente, qualifiée de « détournement de l’économie de ces textes ».
À demi-mots, l’avocat général laisse entendre que
l’agriculteur utiliserait les migrants pour servir une cause militante.
Et que cette dernière constituerait bien une contrepartie ! « Quand
l’aide à l’entrée s’inscrit dans une contestation globale de la loi,
elle n’entre pas dans les exemptions prévues mais sert une cause
militante, et non une réponse à une situation de détresse. Ce service
constitue, à ce titre, une contrepartie. »
Christophe Raffin estime que le fait que plusieurs migrants soient
décédés depuis l’été 2016 en tentant de rejoindre Nice ne justifie pas
l’occupation du bâtiment de la SNCF. « Le danger doit être réel et imminent, et non hypothétique et futur », tonne-t-il. Le jour même, un accident est pourtant survenu à la frontière.
Selon les secours, un migrant de 27 ans a été retrouvé électrocuté sur
le toit d’un train. Il a été évacué en urgence absolue au centre
hospitalier pour grands brûlés de Toulon, dans le Var. Depuis le début
de l’année, la SNCF dénombre 4 morts et 2 blessés par électrocution
entre Vintimille et Cannes, sans compter les accidents sur les voies.
Mais à Aix-en-Provence, l’avocat général avance que c’est plutôt
l’agriculteur qui a mis les 58 migrants en danger en les abritant dans
des locaux inadaptés. « Des solutions alternatives étaient possibles,
car au moment de l’arrivée des gendarmes, il n’en restait plus que 4.
C’est bien que M. Herrou avait trouvé des solutions pour les loger »,
argue-t-il, provoquant des rires indignés dans le public. Quant aux
migrants que Cédric Herrou a transportés depuis l’Italie, il ne s’agit «pas d’une aide humanitaire, car la situation est comparable des deux côtés ».
L’avocat général a requis huit mois avec sursis, avec limitation à
certains heures de l’autorisation de conduire et confiscation du fourgon
acquis par l’association Roya citoyenne pour éviter toute récidive.
Grand prince, il conclut qu’il n’y a pas besoin d’un suivi par les
services judiciaires, suivi dont « on pourra s’assurer par d’autres moyens, voire même par voie de presse ».
« Nous, on parle d’humains, eux remplissent des cases juridiques »
Cédric Herrou demande lui la relaxe, contestant avoir continué à
transporter des migrants depuis l’Italie après fin septembre 2016.
Interpellé en flagrant délit par la police aux frontières (PAF) le 11
août 2016, avec à bord de sa camionnette huit personnes, dont trois
femmes et deux enfants de cinq ans, tous Érythréens, qu’il venait
d’embarquer à Vintimille, Cédric Herrou avait été relâché sans poursuite
à l’issue de sa garde à vue. Le procureur de la République de Nice,
Jean-Michel Prêtre, avait classé l’affaire le 11 octobre 2017 pour
immunité humanitaire. La cour n’est donc pas saisie de ces faits.
Pour étayer cette infraction, l’accusation ne peut s’appuyer que sur ses déclarations de l’époque aux médias. Dans un article duNew York Times du 4 octobre 2016, l’agriculteur avait estimé avoir aidé « plus de 200 migrants africains à entrer en France ». « Au mois d’octobre, je n’ai pas transporté de personnes depuis la frontière. Ils sont arrivés seuls à mon domicile », affirme Cédric Herrou à la barre. « Où sont les étrangers en situation irrégulière ?, demande son avocat, Me Zia Oloumi. Si vous n’avez pas d’étrangers en situation irrégulière, il n’y a pas d’infraction [d’aide à l’entrée – ndlr] ».
L’avocat a insisté sur les manquements de l’État à la frontière
franco-italienne, documentés par plusieurs ONG, ainsi que le Défenseur
des droits. Le 31 mars 2017, le tribunal administratif de Nice a condamné le préfet des Alpes-Maritimes pour « atteinte grave et manifestement illégale au droit d’asile ». Récemment, ce même tribunal a constaté
que les préfabriqués dans lesquels les étrangers étaient détenus à la
PAF de Menton, en attendant d’être reconduits en Italie, n’avaient
aucune existence légale. « Lorsque le citoyen intervient, c’est doute qu’il y eu une carence de l’État », remarque Zia Ouloumi, qui rappelle que Cédric Herrou vient d’une famille d’accueil et « a été nourri au grain du partage et de la fraternité ».
L’avocat a défendu une conception large de l’exemption humanitaire. « La
loi de 2012 crée une véritable immunité sans distinction. C’est surtout
l’intention qui compte. On ne peut pas fractionner la solidarité : être
condamné pour ceci, pas pour cela. L’abbé Pierre ne posait pas la
question aux gens avant de les aider… »
Entre « 120 et 180 migrants » continuent d’arriver chaque
semaine dans la vallée. Mais, depuis ces décisions de justice condamnant
l’État, la situation a évolué. « Les mineurs isolés sont mieux pris en compte et nous avons des accords avec la gendarmerie pour accéder à la Pada à Nice »,
explique Cédric Herrou à la barre. Le matin même, une centaine de
migrants sont montés à la gare Breil-sur-Roya dans le TER pour Nice. La
mairie de Breil-sur-Roya et l’association Roya citoyenne ont pris en
charge les billets, à tarif négocié avec la SNCF. Trois jours plus tôt,
84 migrants, accompagnés de militants, avaient du faire le chemin à pied
(trois jours de marche), faute de billets.
Une fois arrivés à Nice, les migrants effectuent leur pré-demande d’asile à la Plateforme d’accueil des demandeurs d’asile (Pada), puis repartent souvent ailleurs. « On les dirige vers les petites villes, explique Morgan, le frère de Cédric. La
plupart veulent demander l’asile en France, mais pas en Paca, tellement
ils y ont mal été accueillis. À Nice, il n’y a aucun hébergement et la
police fait une chasse au faciès. »
La préfecture a elle encore resserré sa surveillance autour de la ferme de l’agriculteur, qu’il a rebaptisée avec humour « CCH » pour « Camping Cédric Herrou ». Depuis début mars, des policiers de la PAF, aidés de projecteurs, contrôlent
24 heures sur 24 les voitures à Fanghetto, la frontière
franco-italienne, à 7 kilomètres de chez lui. Et plus récemment,
l’agriculteur a constaté la présence, sur la colline en face de chez
lui, de gendarmes équipés d’appareils photos et de caméras, se
protégeant sous des bâches.
L’absurdité des moyens déployés le frappe. « Je
n’ai jamais rencontré de migrant bloqué depuis un an à Vintimille. Au
bout de deux ou trois mois, ils réussissent à passer, quels que soient
les contrôles policiers. À un moment, il faut sortir des beaux locaux de
la préfecture pour voir ce qui se passe et arrêter d’incriminer les
aidants et de stigmatiser les réfugiés », dit-il.
Vidéo montrant les gendarmes mise en ligne le 17 juin par Cédric Herrou.
À chaque passage devant une juridiction, les militants de la vallée de
la Roya (Alpes-Maritimes) constatent eux le décalage entre leur vécu et
la justice. « Il y a une méconnaissance des réalités qui est
stupéfiante. On nous demande, face à un groupe, de faire un état des
lieux personne par personne pour distinguer qui est vraiment en
danger ,» s’exclame René Dahon, 69 ans. Ce porte-parole de
l’association Roya Citoyenne était jugé le 16 mai avec trois autres
retraités pour avoir transporté vers Nice depuis la vallée six personnes
venues d’Érythrée et du Tchad, dont deux adolescents.
« Nous, on parle d’humains, eux remplissent des cases juridiques »,
renchérit Michel Audibert, 55 ans, gérant de société civile immobilière
(SCI) près de Nice, qui a accueilli à plusieurs reprises des exilés. « Quand on les a chez soi, leur détresse est évidente de par les horreurs qu'ils ont vécues, dit-il.
Ce sont des jeunes anéantis, qui au bout de quelques jours racontent
avoir été entassés à 30 dans une voiture pour traverser le désert
libyen, que ceux qui mouraient suffoqués étaient laissés au bord de la
route, qu’en attendant les bateaux les passeurs leur balançaient un seau
de pâte pour nourrir tout un groupe, qu’ils étaient traités comme des
chiens. De toute façon, ils ne peuvent plus rentrer, après avoir
impliqué toute leur famille dans leur exil. Et là, on nous dit qu’il
faudrait attendre l’accident pour considérer qu’existe un danger ? »
------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- L’article L622-1
prévoit qu’aider un sans-papier est passible de 5 ans d’emprisonnement
et d’une amende de 30 000 euros. Ajouté en 2012, l’article L622-4
liste cependant des exemptions humanitaires. Pour ne pas être condamné,
il faut n’avoir touché aucune contrepartie, notamment financière. Mais
il faut remplir une seconde condition sur le type d’aide apportée. Il
faut avoir fourni des conseils juridiques, une alimentation, un
hébergement ou des soins médicaux, « ou bien toute autre aide visant à préserver la dignité ou l’intégrité physique de celui-ci ». L’article ne mentionne pas explicitement le transport.
L’agriculteur
de la région de Nice se trouvait en garde à vue depuis mercredi
après-midi pour avoir aidé des étrangers en situation irrégulière.
Le Monde.fr avec AFP
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• Mis à jour le
Cédric Herrou au palais de justice de Nice en février 2017. VALERY HACHE / AFP
Cédric Herrou, l’agriculteur militant devenu le symbole de l’aide
aux migrants à la frontière franco-italienne, est sorti jeudi 22 juin
de la gendarmerie de Breil-sur-Roya (Alpes-Maritimes) après une garde à
vue qui avait commencé la veille à 16 heures.
Selon l’association Roya citoyenne , « il est sorti et les deux
gamins arrêtés en même temps ont été pris en charge par l’Aide sociale à
l’enfance (ASE), service du département ».
Plus tôt dans la journée, son avocat avait affirmé qu’il était reproché à son client une « aide à l’entrée, à la circulation et au séjour d’étrangers en situation irrégulière ».
Selon son avocat, Cédric Herrou a d’abord été convoqué à la gendarmerie pour une simple vérification
concernant la situation de deux jeunes migrants, des mineurs, arrivés
chez lui, et pour lesquels il avait fait un signalement auprès des
autorités et demandé leur prise en charge. L’audition libre se serait
ensuite muée en garde à vue pendant toute la nuit.
L’agriculteur bio de 37 ans de la région de Nice avait été condamné en février à une peine d’amende de 3 000 euros avec sursis dans une affaire similaire, pour avoir « transporté des gens », des migrants – majoritairement des Soudanais et des Erythréens – depuis l’Italie et aidé jusqu’à 200 clandestins. Le parquet de Nice avait fait appel de sa condamnation.