Gaz de schiste: hémorragie de capitaux aux Etats-Unis
Le mouvement de désinvestissement qui touche le secteur des pétroles de roche aux Etats-Unis commence à prendre des proportions inquiétantes : près de 30 milliards de dollars de capitaux ont été retirés par les investisseurs du secteur sur le seul 1er semestre.
30 milliards de dollars (données du cabinet FactSet), c’est presque autant que l’ensemble des sorties de capitaux qui ont touché le secteur américain des gaz de schiste sur l’ensemble de l’année 2014 ! Un chiffre spectaculaire qui confirme une fuite en avant assez problématique pour une industrie dans une situation de plus en plus précaire.
Il est vrai que le paramètre-clé, les prix du brut, a radicalement changé la donne. Quand une industrie aux lourds coûts d’investissement doit affronter une baisse de 50% de la matière première qu’elle travaille, cela provoque une série de transformations structurelles. Surtout que le pétrole de schiste est bien plus coûteux et cher à extraire que les gisements plus classiques.
Réduction de moitié des forages
Mais même si le baril se stabilise autour des 40-50 dollars, cela n’arrive pas à assurer des socles de stabilité. Pas moyen pour le moment de trouver des marges acceptables. La restructuration est donc loin d’être finie pour l’appareil de production de gaz de schiste américain.
Autre preuve flagrante, le nombre des fermetures de sites de forages. Sur un an, les producteurs ont réduit la voilure de 57%, avec même une accélération très notable depuis le mois de mai. Il semble donc qu’il y ait un effet retard notable, et que l’industrie paye plusieurs mois d’un statu quo dangereux en fin d’année dernière et en début d’année 2015.
Le dilemme du pétrole bon marché
Un vrai dilemme pour l’Amérique qui est tiraillée entre un pétrole bon marché qui fait le bonheur des consommateurs et de certains secteurs d’activité, alors que tout le segment pétrolier, très large contributeur au PIB du pays, subit de plein fouet cette crise, provenue d’un filon qui devait au contraire l’enrichir.
Mais au-delà de la problématique industrielle, qui est d’ailleurs une des inquiétudes majeures du côté des pays producteurs (les Etats Unis ne font pas partie de l’OPEP), commence à poindre une vraie inquiétude financière.
Bulle de crédit inquiétante
En effet, ces sociétés qui ont multiplié les forages et les projets, alors que le baril était encore à 100 dollars l’année dernière, ont contracté pour des dizaines de milliards de dollars de prêts et de crédits auprès du secteur financier américain.
Des créances désormais considérées comme quasiment toxiques, avec un baril qui chute de moitié. L’ensemble de la dette du secteur américain du pétrole de schiste est estimé désormais à 170 milliards de dollars à fin juin, le double du montant enregistré à la fin de l’année passée. Une aggravation de la situation qui suit sur les mêmes multiples la baisse des capacités de production, et la baisse des cours.
Augmentation des défauts de paiement
Du coup, énormément de sociétés de forage spécialisées, naguère chouchoutées par les investisseurs, sont à présent dans une situation financière déplorable. Depuis le début de l’année, 6 d’entre elles ont été obligées de se placer sous protection du Chapitre 11, la loi américaine sur les faillites.
Ce qui pour les banques et les créanciers concernés constitue un nouveau fardeau de créances très à risques, à l’image des crédits sub-prime ou autres. Le gaz de schiste qui était censé devenir une manne pour le pays ressemble de plus en plus à une situation industrielle critique, doublé d’une bulle financière en cours d’explosion.
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