PROJET D’AYRAULT – PORT de NOTRE DAME DES LANDES (44)
décembre 2014
ZAD du TESTET – PROJET DU BARRAGE DE SIVENS (81)
ZAD ailleurs
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La bataille de l'Esplanade |
MNAC Convergence
Conisme - Lyon
Brunel et Girard 2010
Huile sur bois 240 cm x 180 cm
Infos de la semaine du 1er au 7 Décembre
Mardi 2 décembre
Notre-Dame-des-Landes - Manuel Valls réaffirme "la détermination de l’Etat" pour construire l’aéroport et annonce 75 millions d’euros pour les infrastructures routières.
Brèves – Reporterre
Jeudi 4 décembre
Alors là, on peut dire qu’on a été un peu débordé ces derniers temps et pas trop eu l’envie de se taper la lecture de la boite mail pour mettre à jour ce flash info. Résultat on vous jette un peu en vrac des trucs à lire, à écouter, un condensé rapide de résistance aux violences policières et d’alertes antifa, de luttes à soutenir et de zad naissantes.
On l’a déjà dit et on n’hésitera pas à le rappeler, la vigilance est nécessaire contre les tentatives d’infiltration des zad par l’extrême droite. Ci joint une analyse de la situation.
"Depuis la médiatisation de la lutte de la zad du testet suite à la mort de Rémi Fraisse, certains groupes fascistes ( GUD, Mouvement d’action sociale, etc...) ont des vues bien particulières sur la lutte. Ainsi sur le site cerclenonconforme, un article (http://cerclenonconforme.hautetfort.com/archive/2014/11/05/ecologie-politique-et-combats-locaux-5482580.html ) publié il y a quelques semaines, analyse les luttes des zads. Ils en concluent que ces tactiques de luttes sont utiles pour combattre le capitalisme et la mondialisation, que "l’écologie radicale" ne doit pas être l’apanage des mouvements dits de gauche et que ces luttes s’inscriraient parfaitement dans une convergence avec les mouvements identitaires. Ils n’hésitent pas à reprendre la sémantique de nos luttes contre les dominations, et même les illustrations venant de nos milieux anti-autoritaires.
Plus grave, à la fin de l’article, ils appellent à venir nous rejoindre sous une forme ou une autre par je cite : "Au risque de me répéter, il se trouve parmi les zadistes des militants pour qui le capitalisme mondialisé est l’ennemi numéro un et avec qui nous pourrions sans aucun doute définir des convergences de luttes. Il nous faut à cette fin rejoindre des combats écologiques locaux. Reste à définir lesquels, sous quelle bannière et de quelles manières les intégrer. C’est tout l’enjeu des mois à venir."
Rappelons-leurs que les zads et autres lieux de luttes où , certes des combats écologiques sont menées, sont avant tout des ZONES ANTIFASCISTES.
Ce mail a été envoyé à plusieurs collectifs en lutte afin que chacun d’eux soit informé de leur projet.
Que chaque groupe trouve alors les moyens appropriés pour les mettre en échec dans leur envie d’infiltration /intégration.
NO PASARAN !"
Dimanche 7 décembre
Contre les violences policière la devanture d’un local appartenant au champion mondial de la pyrotechnie a été redécorée jeudi après-midi en plein Paris. Cette action visait le groupe Etienne Lacroix, qui se vante plus rarement d’être aussi l’un des fournisseurs officiels de l’Etat en armes de maintien de l’ordre. Elle produit toute la panoplie des grenades meurtrières, dont celle qui a tué Rémi Fraisse le 26 octobre. (https://paris-luttes.info/armes-de-la-police-action-contre-2221)
Infos de la semaine du 8 au 14 Décembre
Mercredi 10 décembre
Chantage aux subventions contre les anti-aéroport, et sanction pour l’exemple. Humus 44, ces dangereux terroristes.
Jeudi 11 décembre
Lundi et mardi 8 personnes ont été jugées pour la manif du 22 novembre contre les violences policières et judiciaires. Des brefs compte-rendu par le CARILA : à propos des 3 personnes passées lundi (dont une personne a pris 2 mois de prison ferme) ; puis à propos des 5 personnes jugées mardi.
Dimanche 14 décembre
On a reçu une liste avec toutes les entreprises qui arment les troupes de l’Etat. Vous pouvez trouver l’article
> ICI <
Infos de la semaine du 15 au 21 Décembre
Lundi 15 décembre
Mercredi 17 décembre
A Notre-Dame-des-Landes, on rêve d'une «commune libre de la ZAD»
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Dans la ZAD de Notre-Dame-des-Landes, le 16 décembre 2014. (Photo Isabelle Rimbert) |
«Libération» retourne sur les «zones à défendre» emblématiques de la lutte contre les grands projets d'aménagement. Premier volet dans le bocage nantais, théâtre du combat le plus ancien contre l'aéroport.
Parmi les habitants de la «ZAD» (1) de Notre-Dame-des-Landes, Stéphane fait partie des plus anciens. Ce trentenaire s’est installé dans le bocage nantais en 2009. «A l’époque, ça paraissait fou d’imaginer arrêter le projet d’aéroport», se souvient-il. Cinq ans plus tard, les pelleteuses d’AGO (Aéroport du Grand-Ouest) n’ont toujours pas pelleté. Le dossier est au point mort, et les autorités ont annoncé que rien ne débuterait tant que subsisteraient des recours juridiques. Sur la ZAD, beaucoup pensent que ce projet vieux de 40 ans ne verra jamais le jour. Quelque 200 personnes vivent désormais sur la zone de 1 600 hectares, disséminées sur une soixantaine de sites : des vieilles fermes retapées, des maisons squattées, des cabanes construites au fil de la mobilisation.
(1) «Zone à défendre»
Sur le même sujet :
Par Lilian Alemagna
Par Sylvain Mouillard
Les Fosses noires, où Stéphane a posé ses valises, est un des lieux «historiques». Avec sa caravane Internet et sa boulangerie, c’est un endroit «de croisement et de sociabilité». Ici, l’habitat est en dur, mais beaucoup de zadistes continuent de dormir dans des cabanes en bois et torchis, dont le standing s’est nettement amélioré. «On veut que ça soit le plus confortable possible», explique un habitant. «L’hiver, pour se chauffer, on compte sur les poêles à bois et une bonne isolation.» Les occupants de la ZAD visent aussi l’autosuffisance alimentaire. Une vingtaine de projets agricoles, allant de l’élevage de vaches laitières à l’apiculture, en passant par la plantation de tabac et la fabrication de beurre ou de fromage, ont vu le jour. Il y a peu, un verger a été planté.
«Judas», croisé au bord d’un chemin de traverse, s’occupe d’animaux un peu particuliers : des boucs des fossés. «Des débroussailleuses en puissance», sourit-il. Le gaillard, 35 ans, est arrivé à Notre-Dame-des-Landes il y a cinq mois, en provenance de Belgique, où il bossait comme fermier. «J’ai entendu dire qu’il y avait besoin de main-d’œuvre ici, raconte-t-il.Depuis, je n’arrête pas, il y a du boulot tout le temps.» Sa mission, avec son bouc prénommé «Jean-Jacques», c’est d’assurer l’entretien des fossés et des haies, plutôt oubliés ces dernières années. Pour accélérer la cadence, il a organisé des saillies sur des chèvres de la même espèce. «On verra bien ce que ça donne.» Stéphane détaille : «En fait, on redécouvre le travail et sa vertu sociale, conviviale, partageuse. On travaille avec les paysans du coin, on échange les savoirs.»
«L’argent ne doit pas être un frein»
Sur la ZAD, les occupations ne manquent pas. Dans chaque lieu de vie, les volontaires s’organisent en groupes de travail. Au programme : autoconstruction, maraîchage, plantes médicinales ou encore communication. Le journal «ZAD News» est distribué tous les lundis après-midi par une équipe de facteurs. Des activités culturelles (projections, débats, concerts) ont été mises en place. Un groupe d’écoute accueille les personnes en souffrance psychologique ou en délicatesse avec les drogues. Plus réjouissant, une «maison des enfants» a été aménagée, «dans laquelle il y a eu plusieurs accouchements», raconte un habitant.
Dans un bois des alentours, on tente de mettre en pratique la convergence des luttes avec les militants «No Border» de Calais. Plusieurs migrants de la Corne de l’Afrique ont été accueillis, et reçoivent de l’aide pour les demandes d’asile, des cours de français. Le vendredi, c’est le jour du «non-marché», où l’on retrouve les produits estampillés ZAD à «prix libre». «L’argent ne doit pas être un frein, mais il ne faut pas non plus que certains s’épuisent pour d’autres», explique Stéphane. Les habitants disent en tout cas avoir grandement réduit leurs besoins et (bien) vivre avec quelques centaines d’euros par mois. Certains exercent des petits boulots salariés aux alentours, ou des travaux agricoles épisodiques. D’autres se contentent du RSA.
«Les blagues graveleuses entre mecs, on les laisse de côté»
Cette vie en collectivité n’échappe pas à de (nombreux) moments de débats, voire de tensions. Faut-il, par exemple, accepter les véhicules motorisés pour les travaux des champs ? Les partisans de la traction animale s’opposent à ceux qui jugent l’aide d’un tracteur parfois bienvenue. On s’empoigne aussi sur les rapports entre les sexes. «L’objectif, c’est de casser les schémas classiques, détaille Judas. Les blagues graveleuses entre mecs, on les laisse de côté. Et si une fille a envie de conduire un tracteur ou de manier une tronçonneuse, elle le fait.»
Les zadistes ont beau majoritairement «combattre le capitalisme», les «rapports de classe» subsistent, reconnaît une ancienne étudiante en socio. «Ceux qui ont les codes et l’habitude de parler en public prennent plus facilement la parole en AG», illustre-t-elle. «Certains sortent de la fac, d’autres de la rue, ajoute Stéphane. On retrouve ici les inégalités sociales classiques, mais on tâche d’en faire un sujet d’attention.» Les chantiers collectifs, par exemple, permettent aux plus réticents de s’exprimer davantage.
«Une «commune libre de la ZAD» ?
La disparition des forces de l’ordre, invisibles sur place depuis 18 mois, incite aussi à penser à plus long terme. «Les autorités savent que cette ZAD est emblématique et que si les gendarmes et les pelleteuses reviennent, la mobilisation sera d’ampleur, estime Stéphane. Lors de l’opération César [tentative d’évacuation du site à l’automne 2012, NDLR], des gens ont relevé la tête et dit non.» Ils rêvent maintenant de construire autre chose.
Une alternative que Jean-Jo, militant anarchiste d’une cinquantaine d’années, imagine comme une «commune libre de la ZAD». Au Haut-Fay, cet ancien cadre commercial dans l’industrie anime une «université populaire autogérée». «La période des expulsions, il y a deux ans, était la moins intéressante à vivre. Le vrai processus révolutionnaire commence aujourd’hui. Pour cela, l’enjeu, c’est de contrôler la terre et d’arriver à y bosser de manière pratique, ce qui nous crédibilisera aux yeux des voisins.»
«Il est possible d’enrayer la machine»
Les zadistes sont d’accord sur un point : il faut barrer la route aux «cumulards», les agriculteurs qui ont accepté un dédommagement pour céder leurs terres au conseil général, mais qui pourraient, si le projet n’aboutissait pas, tenter de les récupérer. La plupart espèrent aussi conserver la liberté qui irrigue les lieux. «Il ne faut pas en faire une enclave ou un ghetto à ciel ouvert, illustre Stéphane. Mais un endroit où on vit et on lutte de manière différente.»
Judas s’imagine volontiers vivre «un bout de temps» sur la ZAD. Mais il ne se voit pas comme un «militant déterminé», plutôt comme un «travailleur». Il veut expérimenter à Notre-Dame-des-Landes une «agriculture qui ne soit pas destructrice», espère aussi y trouver une autre forme de vie en société. «Dans le monde du travail, je ne me suis pris que des portes. Ici, il y a moins d’entraves, moins d’intermédiaires.»
L’idée, «face aux grands projets qui risquent de faire disparaître des possibilités existentielles», c’est de «réinventer le quotidien», synthétise Stéphane. «On n’offre pas d’emplois ou de possibilités de consommer. Ce n’est pas forcément un message facile à entendre quand tu es pris dans la vie de tous les jours, mais les ZAD rendent tangible qu’il est possible d’enrayer la machine.»
Sylvain Mouillard - Libération
Jeudi 18 décembre
Notre-Dame-des-Landes : Valls relance et surprend Royal
Manuel Valls a relancé la polémique autour de Notre-Dame-des-Landes en suggérant d'engager la construction du futur aéroport nantais après la mi-2015, à la grande surprise de sa propre ministre de l'écologie, Ségolène Royal.
Dans un entretien paru jeudi dans Ouest-France, M. Valls répète la position du gouvernement, à savoir que les travaux sont suspendus à la fin des recours juridiques déposés par les opposants au projet. Mais il ajoute une précision : « Ce sera le cas au premier semestre 2015. Après la décision du tribunal administratif, il faudra alors s’engager dans la construction de Notre-Dame-des-Landes. »
Ségolène Royal, invitée en direct sur France 5, a confié qu'elle n'était pas au courant de cette déclaration. « Bon courage », a lancé la ministre, visiblement embarrassée, avant d'expliquer que « le premier ministre a le droit de prendre des décisions, je n'ai pas à les commenter ».
La Rédaction de Médiapart
Vendredi 19 décembre
Amnésie » juridique ?
La commission juridique qui assiste les associations d'opposition à Notre-Dame-des-Landes marque sa surprise devant les déclarations de M.Valls et de J.Auxiette. Ces déclarations sont singulières, sur le plan juridique, à deux titres :
Manuel Valls semble connaître à l'avance le résultat des décisions de justice, et c'est en soi très inquiétant pour celui qui est, en raison des ses fonctions, l'un des garants de l'indépendance de la justice.
Quant à J. Auxiette, il veut oublier qu'après la première instance, s'ouvre une procédure d'appel quelle que soit la partie perdante, puis de cassation devant le Conseil d’État.
Tous deux ignorent qu'en outre les espèces protégées ne peuvent être déplacées ou détruites avant l'automne. Comment prétendre donc commencer les travaux dès ce printemps ? Ils manifestent ainsi leur double ignorance des procédures juridiques et des difficultés écologiques du projet.
Nous rappelons au Premier Ministre que des accords politiques successifs ont été conclus au plus haut niveau de l’État, accords qui prévoient que le début des travaux ne peut avoir lieu avant épuisement des droits de recours.
Nous lui rappelons aussi l'existence d'une procédure européenne et l'exigence de plusieurs autorisations à venir.
Enfin à ce jour le permis de construire n'a pas été délivré. Les délais de recours ne sont pas une question de mois mais bien d'années.
Débuter les travaux dès avril prochain serait donc un passage en force.
Communiqué de presse - ACIPA
Samedi 20 décembre
Dimanche 21 décembre
Sur la ZAD
Un premier chantier a eu lieu la semaine passée pour entretenir la route des Chicanes (D281 entre la Pâquelais et le carrefour des Ardillières). Une quarantaine de personnes des environs et des habitant-e-s de la ZAD, ont répondu à l’appel de l’ACIPA, de l’ADECA et de COPAIN 44. Les tranchées faites par les services du Conseil Général 44 il y a un an ont été transformées en ralentisseurs et les trous intermédiaires bouchés avec un mélange de gravier et de sable de carrière. Certaines chicanes ont été réduites. et un chargement d’ordures diverses a été emmené à la déchetterie intercommunale. Ceci donne un aspect plus agréable pour les usagers et les habitants de cette route.
Dans la lutte contre l’aéroport...
...et son monde
Infos de la semaine du 22 au 28 Décembre
Mardi 23 décembre
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Le Canard enchainé |
Infos de la semaine du 1er au 7 Décembre
Mercredi 3 décembre
Sivens : l'inspection de la gendarmerie dédouane les gendarmes
Les forces de l'ordre « ont rempli leur mission avec professionnalisme et retenue », salue l'inspection générale de la gendarmerie nationale dans un rapport sur le maintien de l'ordre à Sivens depuis fin août 2014. Aucune faute professionnelle n'est retenue dans les événements qui ont causé la mort du jeune homme. Tout juste l'inspection générale concède-t-elle« deux cas de manquements à la déontologie » sur des événements annexes : le jet d'une grenade dans une caravane occupée par des zadistes, qui a grièvement blessé une personne à la main, et un manifestant au sol roué de coups de pied par un gendarme.
L'enquête administrative confiée à l'inspection générale de la gendarmerie nationale (IGGN), après la mort la nuit du 25 octobre de Rémi Fraisse à Sivens, a dédouané les gendarmes, mardi 2 décembre, de toute « faute professionnelle ». C’est bien un gendarme mobile qui a lancé la grenade offensive qui a tué le jeune manifestant, mais, selon cette enquête interne, il a agi de façon on ne peut plus réglementaire, après avertissement. « L'enquête administrative ne fait pas ressortir de manquement aux règles juridiques et déontologiques et aux techniques enseignées au maintien de l’ordre », conclut l’IGGN.
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Rémi Fraisse (DR) |
Selon son rapport, les grenades et autres armes ont été utilisées conformément à la loi qui autorise les forces de l’ordre à en faire usage en cas de « violences contre la force publique ou impossibilité de défendre autrement le terrain qu'elle occupe ». L’IGGN avait pour mission de se pencher sur les modalités des opérations de maintien de l'ordre sur le chantier du barrage, le respect des procédures et de la déontologie depuis fin août 2014. Seuls des représentants des forces de l'ordre et de la préfecture ont été entendus : préfet du Tarn et son directeur de cabinet, ainsi que des gendarmes du Tarn, de la gendarmerie mobile de Limoges, de La Réole ainsi qu'un officier de la CRS 20 de Limoges. Sollicité, Ben Lefetey, le porte-parole du collectif pour la sauvegarde de la zone humide du Testet, n'a pas répondu selon l'IGGN.
- La nuit du 25 au 26 octobre
Le journal de bord du Groupement tactique gendarmerie (GTG) révélé par Mediapart montrait que dès la mort du jeune manifestant, les gendarmes mobiles avaient immédiatement fait le lien avec le tir d’une grenade offensive (depuis interdites par Bernard Cazeneuve). Les gendarmes mobiles y ont écrit à 1 h 45 : « Un opposant blessé par OF », c’est-à-dire une grenade offensive. À 1 h 59, le journal du GTG indique : « Opposant blessé serait décédé. Hémorragie externe au niveau du cou. » Mais ce journal, pourtant sans équivoque, est délibérément ignoré par l’IGGN qui a reconstitué la chronologie de la nuit du 25 au 26 octobre uniquement à partir des films enregistrés par l’escadron de gendarmerie mobile de La Réole, ainsi que des enregistrements de ses échanges téléphoniques avec le Centre d'opérations et de renseignement de la gendarmerie (CORG) du Tarn. Auditionné le 2 décembre par la commission des lois de l'Assemblée nationale, le chef de l'IGGN, le général Pierre Renault, a expliqué préférer se baser sur des enregistrements sonores où « on entend les voix » « plutôt que de se fier à des écrits qui, parfois, le sont en des termes sibyllins voire flous ».
Au moment de la mort de Rémi Fraisse, c’est un escadron de 72 gendarmes mobiles – « l’effectif minimum concevable » selon Pierre Renault – qui fait face à « une centaine » de manifestants sur la base de vie du chantier, entourée de douves et de grillages. Cet escadron, venu de La Réole (Gironde), connaît bien le site puisqu’il est « sur zone depuis le 16 octobre » et a déjà « tenu le site la nuit précédente ». À 0 h 25, « 50 à 70 manifestants recommencent à envoyer des projectiles sur les forces de l'ordre ». Le niveau de violence s'accroît alors « rapidement ». Mais le rapport de l’IGGN confirme qu’aucun gendarme mobile ne sera blessé cette nuit-là. En revanche, deux gendarmes et six CRS (dont deux grièvement et deux contusionnés) ont été blessés dans l’après-midi.
À 0 h 49, les premières grenades lacrymogènes sont tirées, suivies à 1 h 03 de grenades explosives, GLI F4 (mixtes lacrymogènes-effet de souffle) et OF F1 (offensives). Au total,« 237 grenades lacrymogènes, 41 balles de défense, 38 grenades F4 et 23 grenades offensives » sont tirées par les gendarmes mobiles entre 0 h 20 et 3 h 27 du matin. Suite à un tir de lanceur de balle de défense (LBD 40), une première manifestante tombe au sol et est secourue. « Il s'avère que c'est une jeune femme qui n'est pas blessée et qui est laissée libre de rejoindre les rangs des manifestants », assure le rapport.
Vers 1 h 40, les opposants auraient reçu des renforts. Puis c’est au tour de Rémi Fraisse de tomber, mortellement touché. Le maréchal des logis chef J. repère à « une quinzaine de mètres » « un groupe de manifestants hostiles, équipés de casques et de boucliers, qui lance des projectiles, suivi d'un autre groupe plus important qui occupe le terrain ». Ce groupe serait « dirigé par un homme dont on entend les ordres ». Après avoir utilisé ses jumelles de vision nocturne et effectué un avertissement, le gendarme « lance sa grenade (offensive, ndlr) dans le secteur préalablement identifié et réputé inoccupé, par un mouvement de lancer en cloche » au-dessus du grillage de 1,80 m.
Lors de son audition, un major du même peloton a reconnu avoir aperçu un manifestant tomber au sol après la détonation. Mais « il n'est pas en mesure de faire la relation entre les deux situations », assure le rapport. « Une masse sombre à terre » est signalée quelques instants plus tard. À 1 h 45, des gendarmes sont chargés de ramener le manifestant pour le secourir, « sous les jets de projectiles ». Dans un fourgon, un secouriste « lui prodigue les premiers soins dont un massage cardiaque. Il est interrompu par la découverte d'une plaie importante dans le haut du dos ». À 1 h 51, le commandant du dispositif appelle le Centre d'opérations et de renseignement de la gendarmerie (CORG) du Tarn sans préciser « que la victime est déjà décédée » ni donner « aucune précision sur l'origine des blessures ». À 1 h 53, le même commandant signale la mort de Rémi Fraisse ainsi que « la concomitance avec un tir de LBD et un lancer de grenade offensive ». « À ce moment, il ne s'agit que de supputations », insiste le rapport de l’IGGN.
À 4 h 12 du matin, « un premier examen sommaire du corps » a lieu dans le véhicule des pompiers par un médecin légiste, puis de façon plus approfondie à 5 heures du matin à la maison funéraire. « Cet examen ne permet pas plus que le premier de lier la blessure mortelle aux effets d'une grenade offensive », selon l’IGGN. Selon qui seuls les résultats des analyses le mardi 28 octobre permettront de lever le doute sur l’origine de la mort du jeune manifestant.
- La transmission de l’information
On constate que, dans la nuit du 25 au 26 octobre, l’autorité judiciaire sera la dernière à être alertée des faits. Un premier message sur la boîte vocale du parquet d'Albi a bien été laissé à 2 heures. Mais ce n’est qu’à 2 h 42 que les gendarmes parviennent à joindre le substitut de permanence, juste avant que les enquêteurs et les techniciens de la section de recherche de la gendarmerie de Toulouse arrivent à Sivens – « peu avant 3 heures ».
Entre-temps, le cabinet du préfet du Tarn a, lui, été alerté dès 2 h 08 « sans indiquer la cause de la mort, en l'absence de renseignements précis ». À 2 h 23, le téléphone sonne à la permanence du cabinet du ministre de l’intérieur Bernard Cazeneuve pour annoncer « la découverte du corps d’un opposant à Sivens dans des circonstances non établies ».
Arrivé à Sivens au petit matin avant que ses troupes lèvent le camp, « le commandant en second de la région de gendarmerie Midi-Pyrénées évoque le fait que le jet d’une grenade offensive par un gendarme mobile et la chute à terre d’un opposant ont eu lieu dans un temps proche ». La brève envoyée au cabinet du ministre de l’intérieur à 4 h 29 du matin est encore plus « prudente » : « Ce document confirme le décès d’un opposant lors d’affrontements avec les forces de l’ordre, sans pouvoir affirmer que la mort est imputable au lancer d'une grenade offensive. » Pourquoi cette retenue d’information ? L’IGGN y va au culot de sa petite leçon de journalisme : « Il est en effet indispensable de transmettre un renseignement consolidé après recoupement des différentes informations obtenues du terrain mais aussi des services de permanence des autres ministères et administrations. L'expérience prouve que la transmission d'une information sans vérification préalable présente un risque élevé de démenti ultérieur. »
« Imaginons l’effet que peut avoir l’information qu’un manifestant a été tué par une grenade offensive sans qu’elle soit recoupée », s’est exclamé le général Pierre Renault devant les députés le 2 décembre. C’est donc par un louable souci d’éviter toute « désinformation » – selon l’expression du général – que les gendarmes ont sous-informé... À 9 h 55, la préfecture du Tarn indiquera dans un communiqué validé par le cabinet du ministère de l’intérieur que « le corps d’un homme a été découvert dans la nuit de samedi à dimanche sur le site du barrage contesté de Sivens (Tarn) ». Sans plus de détails, comme s’il s’agissait d’une découverte fortuite. Cet élément de langage sera repris en fin de journée, à 19 h 40, par un communiqué du ministère de l’intérieur : « Le corps d’un jeune homme a été découvert vers 2 h 00. Les secours ont malheureusement constaté son décès. »
- La décision de positionner des forces de l’ordre pour le rassemblement du 25 octobre
C’est l’un des points les plus controversés car il n’y avait plus rien à protéger sur le chantier, les engins ayant été retirés dès le 23 octobre comme le confirme le rapport. Mais suite à l’incendie de l’Algéco et du générateur laissés sur place, le commandant de la gendarmerie du Tarn et le directeur de cabinet du préfet décident de « protéger la base vie du chantier jusqu'au lundi 27 matin par une présence permanente de forces de l'ordre ». Le rapport liste quatre raisons, dont la dernière semble la plus importante :
« – la protection du site ne peut être assurée par les vigiles seuls en cas d'agression ;
– les organisateurs de la manifestation sont dans l'incapacité de tenir leur engagement de rester à l'écart de la base vie ;
– la présence d'un EGM (escadron de gendarmerie mobile) sur zone permet de s'interposer en cas de contre-manifestation par les riverains et agriculteurs favorables au projet, pour éviter des faits de violence graves ;
– enfin, la reprise des travaux le lundi matin impose de ne pas laisser les opposants les plus déterminés occuper et piéger le site et ses accès, sauf à devoir conduire des opérations de grande envergure le 27 octobre au matin pour dégager les axes routiers et reprendre le contrôle du site. Or ces opérations comporteraient un risque important d'incidents et mettraient en jeu la sécurité des manifestants présents sur le site et des gendarmes. »
Bref, il ne fallait surtout pas retarder les travaux du barrage et laisser un nouveau Notre-Dame-des-Landes s’installer. C’est tout de suite l’escalade. Dès le vendredi 24 au soir, l’escadron de gendarmerie mobile de La Réole utilise « 68 grenades CM6 lacrymogènes, 38 grenades F4 mixtes explosives/lacrymogènes, 17 grenades offensives et 27 cartouches pour lanceurs de balles de défense » pour « se maintenir sur le site afin d'éviter sa prise de contrôle par les radicaux ». Ceux-ci sont décrits comme « équipés de protections (casques, masques, boucliers) et qui emploient des projectiles de toutes sortes (cailloux lancés à l'aide de frondes et de lance-pierres puissants aux montants plantés en terre, mortier artisanal, cocktails incendiaires) ».
Malgré cela, CRS et gendarmes mobiles sont de retour le lendemain. Le commandant du GTG a alors pour « mission d'assurer la protection des engins à Montans et de la base vie du chantier (…) sauf s'il estime que la situation devient intenable pour la sécurité de la force mobile ». Pourquoi ne pas s’être retiré dans la nuit comme il en avait reçu la consigne s’il estimait « que la sécurité de ses hommes (était) menacée » ? Selon l’IGGN, le lieutenant-colonel aurait jugé « qu'une manœuvre de désengagement à courte distance des manifestants et sous leurs jets de projectiles ferait courir davantage de risques aux gendarmes que le maintien sur place ».
Sur PV, ce même commandant du GTG, entendu comme témoin dès le 26 octobre à 4 h 30 du matin, avait évoqué des consignes « d’extrême fermeté » de la part du « préfet du Tarn, par l'intermédiaire du commandant de groupement ». Le rapport de l’IGGN passe complètement sous silence ce point et ne parle que de consignes d’« apaisement ».
Le dimanche 26 octobre, le procureur d’Albi avait déploré que les enquêteurs n’aient pu accéder au site en raison de « l’hostilité » des opposants. En fait, d’après le rapport de l’IGGN, il semble qu’ils n’aient même pas tenté d’y retourner. « Tout déplacement sur les lieux risque d'être interprété comme une provocation de la part des forces de l'ordre et comporte des risques pour la sécurité des personnels », indique le rapport.
Le rapport décrit une « montée brutale en violence de l'opposition au projet à compter du 25 août 2014 ». Celle-ci coïncide avec les travaux préparatoires au début du déboisement (1er septembre) et la prise de fonction de l’actuel préfet du Tarn, juste après celle d’un nouveau commandant de groupement de gendarmerie du Tarn et du commandant de la compagnie de Gaillac (début août). Les premiers affrontements entre gendarmes et contestataires remontaient aux premières expulsions en février et mai 2014. Mais ces heurts « se résument à une résistance symbolique qui ne nécessite pas l'emploi de munitions spécifiques au maintien de l'ordre ». Entre gendarmes départementaux et militants se crée même un véritable « dialogue ».
Mais à partir du 23 août, les autorités changent de braquet. L’heure est aux conseils de guerre. Pendant deux mois, chaque soir, « le directeur de cabinet (du préfet, ndlr) anime une audio-conférence vers 19 heures avec les responsables du conseil général, le maître d'ouvrage délégué (la CACG), la mairie de Lisle-sur-Tarn et le commandant du Groupement de gendarmerie du Tarn, ce qui permet de dresser un bilan quotidien et de décider des opérations du lendemain ». Cette tactique correspond selon l’IGGN à l’apparition d’une « poignée de radicaux regroupés dans un collectif baptisé "Tant qu'il y aura des bouilles" » et à l’influence de « 13 zadistes de Notre-Dame-des-Landes (…) formellement identifiés par les services de renseignements ».
Le rapport évoque « une stratégie de harcèlement quotidien des forces de l'ordre ». « Les plus violents viennent au contact des GM et les harcèlent, mais dès que les gendarmes passent à l'action pour sécuriser le chantier et ses ouvriers, les meneurs se retirent et mettent en avant des opposants non-violents (écologistes, clowns, badauds...) généralement inconnus de la gendarmerie et de la police, qui s'interposent entre les forces de l'ordre et les radicaux, détaille-t-il. Des prises de vues des réactions des forces de l'ordre sont réalisées pour caractériser l'idée de réponse disproportionnée. » Photos à l’appui, l’IGGN estime que « le niveau de violence dépasse celui rencontré à Notre-Dame-des-Landes par la sophistication des moyens employés (mortiers, bouteilles d'acide, piégeages de barricades, herses artisanales) ».
L’IGGN n’hésite pas à citer le témoignage d’un journaliste de TV Libertés « infiltré » chez les zadistes pour prouver des entraves au travail des médias. Il s’agit d’une web télé apparue en janvier 2014 qui rassemble des figures des extrêmes droites françaises (Renaud Camus, Robert Ménard, les ex-FN Roger Holeindre et Martial Bild), en particulier de la Nouvelle Droite et du Club de l'Horloge (Jean-Yves Le Gallou, Yvan Blot).
Bilan de cette extrême violence des zadistes ? En deux mois, l’IGGN a recensé 13 agressions physiques sur les forces de l’ordre, dont 8 ont en fait eu lieu la nuit du 25 au 26 octobre (il s’agit des 6 CRS et 2 gendarmes dont nous avons déjà parlé). La blessure la plus sérieuse est celle d’un adjudant du PSIG touché à la main le 15 septembre lors d’une interpellation (45 jours d’ITT). Comme nous l’avions déjà écrit, deux zadistes, accusés de lui avoir porté un violent coup de pied ainsi qu’à un autre gendarme, ont été condamnés en comparution immédiate, le 17 septembre, à deux mois et quatre mois de prison avec sursis, plus un mois pour l’un d’eux pour refus de prélèvement ADN. Les deux militants ont fait appel, car ils affirment que le gendarme aurait en fait reçu un coup de ranger d’un de ses collègues au cours de l’interpellation. Le chef des renseignements territorial, qui s'était pris un coup de tête dans le nez à la sortie d'une réunion au Conseil général, a également reçu 3 jours d'ITT.
Le rapport ne compte en revanche que 7 blessés chez les manifestants, alors que plus d’une vingtaine de plaintes ont été déposées depuis début septembre. S’appuyant sur les chiffres des sapeurs-pompiers, le général Pierre Renault affirme également qu’aucun manifestant n’a été blessé la nuit du 25 au 26 octobre (en dehors de Rémi Fraisse tué). Nous en avons relevé au moins deux :
– Marc P., 56 ans, a été blessé au thorax, selon lui par un tir de projectile (sans doute un tir de LBD) en provenance des forces de l’ordre, entre 1 heure et 1 h 30 du matin. Il souffre d’une contusion pulmonaire et a reçu une ITT de 13 jours. Il a déposé plainte auprès du procureur d’Albi fin novembre, selon son avocate Me Claire Dujardin.
– Paul B., qui selon Me Dujardin, a déposé plainte le 26 novembre auprès du procureur d’Albi. « Il est tombé dans les pommes suite au jet d’une grenade assourdissante la nuit du 25 au 26 octobre et a perdu 30 % d’audition », affirme-t-elle.
Plusieurs opposants, blessés cette même nuit, ont été directement pris en charge par l'équipe médicale bénévole de la ZAD, sans passer par les secours. Ils n'ont donc pas été comptabilisés. L’un d’eux, rencontré à Sivens le 31 octobre, avait ainsi reçu une balle de LBD en haut du torse à droite. Six jours plus tard, le contour de l’impact était encore très net. Florian, un autre zadiste, présentait, lui, un énorme hématome violacé sur la cuisse : il disait avoir reçu un tir tendu de grenade lacrymogène non dégoupillée peu après minuit. Parmi les militants, certains ne veulent pas déposer plainte, soit parce qu'ils n'ont plus de papiers, plus confiance en la justice, ou parce qu'ils ont affronté les forces de l'ordre et ne veulent pas être identifiés. Ce qui rend le décompte des blessés compliqué.
- Déontologie : seulement deux manquements relevés
Sur l’ensemble des vidéos et plaintes des opposants, l’IGGN relève uniquement « deux cas de manquements à la déontologie » qui ont tous deux eu lieu lors de l’expulsion du lieu dit « Gazad » le 7 octobre 2014. Chance pour les opposants, ces actes de violence ont été filmés par leurs camarades. Pour le reste, «si d'autres manquements avaient été commis, il est probable que les opposants qui filmaient systématiquement les comportements des gendarmes, les auraient médiatisés », balaie négligemment l’IGGN. Nulle condamnation donc des actes de destruction des affaires personnelles des zadistes, parfois en dehors de toute expulsion judiciaire.
Dans les deux cas, ce sont des sous-officiers affectés en PSIG (peloton de surveillance et d’intervention de la gendarmerie nationale) qui sont mis en cause. Le « manquement » le plus grave, révélé par Mediapart dès le 27 octobre, concerne Elsa Moulin, militante de 25 ans, dont la main a été grièvement blessée par une grenade de désencerclement jetée dans une caravane par un gendarme du PSIG. Devant la commission des lois, le général Pierre Renault a confirmé qu’il s’agissait d’une grenade de désencerclement et condamné « une faute professionnelle grave » du gendarme. Ce qui n’empêche pas son rapport de mettre en doute « le lien entre la blessure et le jet d'une grenade DMP dans la caravane » qui ne serait« pas établi avec certitude ». « En effet, les images ne permettent pas d'identifier l'objet dont l'explosion a provoqué le flash et la blessure », poursuit le rapport.
Le 5 novembre, lorsque nous avons rencontré Elsa Moulin, une longue cicatrice marquait sa main, à cause d'une incision réalisée par le chirurgien pour éviter une nécrose des tissus.
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Elsa Moulin a failli perdre sa main après un jet de grenade par un gendarme. © LF |
L’IGGN met également au conditionnel le dépôt d’une plainte car « aucun service d'enquête ne semble avoir été saisi de ces faits ». À toutes fins utiles, voici le numéro sous lequel le parquet de Toulouse nous indiquait le 6 novembre 2014 avoir enregistré la plainte avec constitution de partie civile d’Elsa Moulin : 14303000235.
L’autre « manquement » concerne un manifestant au sol roué de coups de pied par un gendarme du PSIG d’Albi. Mais selon l’IGGN, il s’agissait d’« un geste pour faire se relever l'individu sans intention de le blesser ». Le gendarme s’en est tiré par une réprimande verbale du commandant de groupement « compte tenu du contexte de sur-exposition prolongée des personnels des PSIG soumis depuis plusieurs mois à la fatigue physique et à la pression psychologique dues aux événements ».
Au bout du compte, l’IGGN ne relève donc aucun dérapage généralisé des forces de l’ordre. « Avant le décès de Rémi Fraisse, le bilan particulièrement réduit des blessures dans les rangs des manifestants depuis la fin du mois d'août, malgré la violence des confrontations, démontre que les forces de l'ordre, toutes catégories confondues (GM, CRS et GD), ont rempli leur mission avec professionnalisme et retenue », les félicite-t-elle. À un mort près.
Jeudi 4 décembre
Testet et Rémi Fraisse : les gendarmes mentent encore
L’Inspection de la gendarmerie a publié un rapport prétendant faire la lumière sur le comportement des forces de l’ordre sur la zone du Testet. Mais dès la page 2, un mensonge surgit.
Le 2 décembre 2014, l’Inspection générale de la gendarmerie nationale (IGGN) a remis son Rapport d’enquête administrative relative à la conduite des opérations de maintien de l’ordre dans le cadre du projet de barrage de Sivens (Tarn).
Le document entend faire la lumière sur ce qui s’est passé entre août et octobre 2014 sur la zone humide du Testet. De nombreux éléments en sont discutables, notamment tout ce qui concerne le comportement des forces de l’ordre durant les mois de septembre et d’octobre. Un passage mensonger révèle le manque d’honnêteté de ce rapport. Reporterre publie le témoignage de Ben Lefetey, le porte-parole du Collectif pour la sauvegarde de la zone humide du Testet :
Page 2 du rapport, les auteurs indiquent : « Monsieur Ben Lefetey, porte-parole du collectif pour la sauvegarde de la zone humide du Testet a été contacté par l’IGGN pour lui proposer de recueillir ses commentaires sur les événements de Sivens, sans réponse de sa part à ce jour ».
Alors que mon téléphone était en mode silence du fait que je voyageais en train, j’ai reçu un message téléphonique le jeudi 27 novembre à 16 h 45 du Général Marc Betton, membre de l’IGGN : « J’aurai souhaité recueillir vos commentaires par visioconférence, si vous en êtes d’accord bien entendu puisqu’il s’agit d’une démarche purement volontaire. Cet entretien pourrait se faire au cours de la journée de demain, rappelez-moi si vous en êtes d’accord ».
M. Betton ne me laisse pas de numéro de téléphone, mais mon appareil a enregistré son numéro d’appel. Lorsque je prends connaissance du message vers 17 h 30, je note le numéro utilisé pour m’appeler et je tente aussitôt (17 h 36) de le joindre. Aucune réponse. Le lendemain, j’ai tenté à nouveau 4 fois (10 h 17, 10 h 21, 11 h 06 et 14 h 30).
J’ai ensuite abandonné en prévoyant de rechercher les coordonnées de l’Inspection générale la semaine suivante quand j’aurais assez de temps, étant très pris par mes rendez-vous sur Paris. Mais le rapport a été publié le mardi 2 décembre…
Alors que l’enquête a commencé début novembre, les inspecteurs m’ont donc contacté la veille de la clôture du rapport et sans tenter de me recontacter eux-mêmes le vendredi 28.
Il est malhonnête de laisser croire dans le rapport que je n’ai pas voulu donner suite, sous-entendant ainsi que le Collectif d’opposants n’aurait rien à dire, lors de cette enquête administrative, sur l’attitude des gendarmes.
Nous avons toujours montré notre volonté de coopérer avec les enquêteurs comme la dépêche AFP l’a bien relayé dès le 26 octobre au matin quand nous avons réagi au décès de Rémi Fraisse. Déjà, ce soir là, le procureur avait prétendu que les enquêteurs n’avaient pu se rendre sur place « du fait de l’hostilité des opposants » alors qu’il n’avait même pas tenté de nous joindre pour faciliter leur venue. Les jours suivants, prévenus de la venue des enquêteurs, les zadistes les ont laissé pourtant travailler sans aucune hostilité !
A quand une enquête administrative sur le comportement de l’Inspection générale de la gendarmerie nationale ou du procureur d’Albi ?
Ben Lefetey pour Reporterre.
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Le fossé manquant dans les cartes de la gendarmerie |
Tant qu’il y aura des bouilles
Vendredi 5 décembre
Le rapport de l’Inspection Générale de la Gendarmerie Nationale commandé par Cazeneuve à propos des opérations maintien de l’ordre à Sivens vient d’être rendu public.
Un premier article du Monde s’en fait l’écho en insistant sur la nuit du 25-26 et la mort de Rémie Fraisse (« pas de faute professionnelle de la part des gendarmes« , « l’enquête judiciaire de déterminer l’exacte responsabilité et le degré de responsabilité imputable au lanceur »).
Ce rapport évoque aussi l’évacuation de GaZAD (la grenade lancée par un PSIG dans une caravane occupée) et la vidéo d’un gendarme qui se défoule à coup de pieds sur un copain (pas de pb, le sac à dos amortit les coups !). Il est téléchargeable ici.
Réactions qui nous sont parvenues :
Samedi 6 – Dimanche 7 décembre
6 et 7 décembre 2014 :
Journées mondiales contre les projets nuisibles et imposés (PNI)
1 Les peuples du monde ne veulent plus que les états et autres profiteurs imposent leurs projets dévastateurs !
2 Ne nous laissons plus déposséder de nos moyens d’action, d’expression, d’organisation et de l’usage de notre Terre !
3 Les 6 et 7 décembre, mobilise-toi contre le projet nuisible et imposé près de chez toi ou contre tous ceux qui imposent leurs nuisances ailleurs !
4 Réfléchissons et agissons pour une planète vivante et vivable !
Partout dans le monde, des entreprises imposent par l’intermédiaire ou avec la complicité des états et autres institutions, des projets dits « d’aménagement », « de développement »,… Ces projets vont systématiquement dans le sens d’une fuite en avant économique qui se matérialise par une destruction des milieux de vie. Petit à petit, les ultimes espaces sauvages sont rongés par le capitalisme. Petits et grands, tous ces projets nuisent au Vivant en général et nient les besoins fondamentaux des humains, y compris leurs conditions de vie.
Les acteurs de ces projets peuvent être publics ou privés, décideurs, promoteurs ou bénéficiaires.
Où que tu sois, tu trouveras une entreprise qui participe à un projet nuisible et imposé, ou une institution qui le finance. Où que tu sois, rejoins celles et ceux qui veulent réfléchir et agir pour une planète vivante et vivable.
Le collectif Tant Qu’il y aura des Bouilles
Infos de la semaine du 8 au 14 Décembre
Lundi 8 décembre
Encore un super week end sur la ZAD, cloturé de fort belle manière par la conférence de Pièces et Main d’Oeuvre. Merci à tous, photos sous peu !
Et aussi deux autres photos ci-dessous :
Pour le reste, voir ci-dessous et pensez à la page Agenda et à la page Revue de presse, que l’on alimente à nouveau ! La page Legal permet de suivre les procès en cours (c’est la saison).
Mardi 9 décembre
Encore des réactions à propose du rapport de l’Inspection Générale de la Gendarmerie Nationale commandé par Cazeneuve à propos des opérations maintien de l’ordre à Sivens :
Stop Sivens sur Planete Amazone
Barrage de Belo Monte, barrage de Tapajos (EDF), barrage de Sivens : même combat !
Mercredi 10 décembre
On reçoit des textes , liens et articles en lien avec notre lutte :
Jeudi 11 décembre
On reçoit des textes , pétitions, liens et articles en lien avec notre lutte :
Infos de la semaine du 15 au 21 Décembre
Lundi 15 décembre
STOP avec les fringues et la vaisselle ! Désolé du ton un peu abrupt, mais on a plus de place sur la ZAD pour stocker ces surplus.
Mercredi 17 décembre
Après le meurtre d’un frère le 26 octobre, nous occupantEs de la zone à défendre du Testet, avons oeuvré pour ramener la vie et la beauté dans la vallée. ConscientEs des impasses dans lesquelles nous enfonce la classe politique – climat, mort des territoires, éclatement social – nous voulons expérimenter des nouvelles formes de faire et vivre ensemble. Assemblées populaires, éco-construction, jardin collectif, blés paysans en agroforesterie, travail en association avec les animaux, auto-média, chorale, etc. font de la ZAD un lieu d’échange et d’apprentissage oeuvrant à se libérer des relations marchandes et de la bureaucratie. Notre démarche n’est pas centrée sur nous-mêmes mais ouverte vers le territoire, pour preuve toutes les solidarités tissées avec les habitantEs et paysans locaux ou encore la ré-appropriation de l’espace public sur les marchés du coin pour ouvrir le débat. Nous allons continuer à occuper partager et faire vivre cet espace et le territoire alentour. En 2015, nous organiserons une semaine d’échange de savoir et savoir-faire traditionnels, créerons les conditions pour la réhabilitation de la zone humide, imaginerons et planterons une forêt comestible, et développerons une coopérative d’entre-aide paysanne. Pour que vive la ZAD du Testet comme Zone d’Autonomie Définitive et comme espace commun porteur d’espoir.
Des habitantEs de la ZAD du Testet
Barrage de Sivens : la concertation est dans l'impasse
La concertation sur le projet de barrage de Sivens (Tarn) lancée par Ségolène Royal le 4 novembre, quelques jours après la mort de Rémi Fraisse, ne débouche toujours pas sur un compromis. Les experts nommés par le ministère de l’écologie pour faciliter la discussion entre monde agricole et associations de défense de l’environnement devaient restituer jeudi 18 décembre une synthèse des débats menés depuis un mois et demi, en vue d’un texte d’accord vendredi. Mais les différends restent trop substantiels pour que ce calendrier d’apaisement se déroule comme prévu. Le ministère de l’écologie a annulé la réunion de restitution, et convoqué séparément professions agricoles et écologistes à une rencontre avec Ségolène Royal vendredi 19 décembre au ministère.
Lors de la dernière réunion, le 5 décembre, la création d’une réserve latérale sur la rivière Tescou, afin de compléter les volumes d’eau utilisés pour les cultures, a été proposée, en sus d’un meilleur usage des réserves existantes. Les opposants au barrage de Sivens y semblaient favorables, tandis que les représentants des agriculteurs ne paraissaient pas s’y opposer. Mais depuis, la FNSEA a appelé à manifester vendredi en défense du barrage de Sivens. Et la tension a continué de monter dans le contexte de la campagne pour les élections départementales. La maison de Ben Lefetey, porte-parole du collectif pour la défense de la zone humide du Testet, a été taguée. Dans ses conditions, difficile de trouver un consensus. D’où la nouvelle intervention de Ségolène Royal. Aucune décision ne devrait être annoncée vendredi 19 décembre. La concertation devrait se prolonger en janvier. Alors que l’Union européenne a ouvert une procédure d’infraction contre la France pour violation présumée de la directive sur l'eau, la crise de Sivens reste sans solution à ce stade.
Jeudi 18 décembre
9h30 : La ZAD est bloquée par les GMs. 5 fourgons à Barat. Des fourgons à Lascar. Les pro-barrage, les gros maïsiculteurs de la plaine de Saint-Nauphary, ont prévu de venir sur la D999 à hauteur de la ZAD. On sait que la gendarmerie et la police sont « assez complaisants » avec les façons de faire des exploitants agricoles (ils ont répandu du lisier dans Albi en toute impunité en novembre dernier). Mais la manifestation leur permet de revenir contrôler la zone au motif de la sécurité. Résultat : les habitantEs de la ZAD sont emmerdés toute la journée par la police bien plus que par les pro-barrage à 15h15.
Hier, on a appris que la Préfecture avait annulé la dernière réunion entre experts de tous poils qui devait avoir lieu aujourd’hui et demain. À la suite de cette réunion devait émerger une « solution » pour Sivens. L’annulation de cette réunion signifie donc que pour la Préfecture, il est plus que temps de patienter avant de décider. Pourtant, la solution, elle est simple : il y a 4,5 millions de m3 d’eau stockés dans les retenues collinaires et seulement 1,5 millions sont utilisés. Si les exploitants agricoles de la plaine de Saint Nauphary, à l’esprit de cupidité dégoulinant, veulent de l’eau pour la maïsiculture, qu’ils la demandent aux autres exploitants qui en ont plein et qui ne s’en servent pas !
14h : Tribunal Correctionnel d’Albi, Rassemblement pour la comparution d’un camarade accusé de « violences sur agent des forces de l’ordre » lors de la 1ère expulsion de la Bouillonnante en février 2014.
15h30 : Tout est calme. Mais les GM sont partous aux alentours de la ZAD sous prétexte de manifestation des maïsiculteurs qui eux ne sont pas là. Les GM laissent sortir de la vallée mais ne laissent rentrer que les résidents cadastraux. On espère qu’ils vont se casser ce soir et ne pas revenir. Enfin, on rappelle que les numéros de téléphone INFOZAD sont opérationnels pour avoir des nouvelles ou quoi.
18h30 : Le copain qui comparaissait au TC d’Albi pour « violences sur agent » a été relaxé.
Cet après-midi, des exploitants agricoles sont venus sur la D999. Une myriade de GMs bloquaient l’accès à la vallée du Testet. Un journaliste s’est fait menacé par une dizaine d’énervés, et un photographe indépendant qui s’est fait casser son appareil photo par les mêmes. Maintenant, les GMs sont repartis.
Vendredi 19 décembre
9h00 : un article du Tarn Libre qui éclaire le mic-mac d’hier concernant le processus de négociation en cours. Les différents acteurs impliqués dans le processus sont reçus à tour de rôle aujourd’hui à Paris. Vu ce que l’on sait du rapport remis hier par la mission d’expertise, on comprend mieux le coup de chaud des jusque-boutistes de la FNSEA & co. (qui ont fait leur manif hier à une petite quinzaine de tracteurs…), toujours soutenus par Carcenac et consorts…
Samedi 20 décembre
Articles et textes que l’on nous envoie :
Pour commencer, le communiqué de presse du Collectif Testet suite à sa rencontre avec Royal aujourd’hui. On potasse le document des experts et on vous fera part de nos impressions et de celles du collectif Testet. Nouvelle réunion (finale ?) le 10/01 sur Paris avec les mêmes acteurs.
Sur tout cela avalanche d’articles dans les médias, par exemple :
Dimanche 21 décembre
Une lettre ouverte que chacun peut co-signer :
Madame, monsieur,
Clients du Crédit Mutuel, nous tenons à vous faire part de notre colère à l’égard du Crédit Mutuel Esquirol.
Dans un contexte social explosif, l’agence du Crédit Mutuel Esquirol a été la cible de dégradations, à plusieurs reprises en novembre 2014, en marge des manifestations contre les violences policières et autour de la mort de Rémi Fraisse.
Lundi 15 décembre en début d’après-midi avait lieu le procès d’un jeune boulanger de 21 ans, accusé d’avoir dégradé le Crédit Mutuel Esquirol et lancé un pavé sur un membre des forces de l’ordre.
Lors de ce procès, auquel certains des signataires de cette lettre ont assisté, l’avocate de l’agence bancaire toulousaine a demandé au juge de condamner le jeune homme à payer 45.000 euros, somme correspondant selon l’avocate au coût des réparations de la boutique d’Esquirol.
Le jeune homme a été reconnu coupable du bris d’une vitre. Comment peut-on nous faire croire qu’une vitre puisse coûter 45.000 euros ? En fait, on va faire payer à cette personne des travaux qui n’ont aucun rapport avec son délit. Cette agence effectue, en effet, actuellement des travaux de rénovation de tout le hall de sa boutique.
Ce jeune homme, qui va passer 6 mois en prison, devra utiliser pendant toute sa vie une part conséquente de ses revenus pour payer des dommages et intérêts au Crédit Mutuel, qui a su grassement utiliser ces dégradations, pour refaire une jeunesse à son agence d’Esquirol..
Les signataires, clients du Crédit Mutuel, sont scandalisés par l’attitude de l’administration du Crédit Mutuel Esquirol et demandent l’arrêt des poursuites contre le jeune homme.
Le Crédit Mutuel « une banque qui appartient à ses clients » : faisons en sorte que ce slogan soit respecté.
Cordialement,
Pour co-signer, expédiez nom, prénom et département agence Crédit mutuel à
(remplacez le arau@baz par @ c’est pour éviter que les robots spammeurs trouvent les adresses trop facilement)
Infos de la semaine du 22 au 28 Décembre
Lundi 22 décembre
Rappel de l’AG des Bouilles du solstice : la ZAD est un lieu ouvert, où l’on circule librement, il n’y a pas de douane, pas de terreur. Si des personnes se sont fait refouler jeudi 18 décembre, c’était dans un contexte de manifestation menaçante de la FNSEA (qui ne défend pas les agriculteurs).
Vendredi 26 décembre
On vous met avec beaucoup de retard les compte-rendus des procès dont nous disposons (pour des faits s’étant déroulés au Testet ou lors des manifs toulousaines ayant suivies la mort de rémi Fraisse). Tout cela sur la page Legal.
Samedi 27 décembre
Dimanche 28 décembre
Discussion autour des chantiers à mettre en place pour 2015, à partir de 14 h, au moment de l’AG des Bouilles afin de mettre en commun nos idées, nos outils et de formuler nos besoins et nos disponibilités.
L’objectif est d’organiser un chantier collectif propre à faire la démonstration d’un mode de vie enviable, autonome et collectif… même lorsque les flics ne sont plus face à nous !
Infos de la semaine du 29 au 31 Décembre
Mercredi 31 décembre
Réveillon california biche .zad testet
Swarzy, gouverneur de californie et les membres du f.i.s.t vous invitent à venir réveillonner sur les plages californiennes, Zad du Testet.
Nous tenons à cette occasion a adresser nos meilleur voeux à tout les acteurs de la lutte, pacifistes ou pas, vegans, carnistes. Grimpeurs, clowns et activistes en tout genre.
Une grosse pensée également pour Rémi, pour sa famille qui nous soutient encore, pour Lara.
« California biche » 31 déc. Zad du Testet. soirée mix, bouffe prix libre et bar cool price
Infos de la semaine du 14 au 21 Décembre
Samedi 20 décembre
Infos de la semaine du 22 au 28 Décembre
Jeudi 25 décembre
Appel de l’Amassada de Saint-Victor
Nous vous invitons donc à une nouvelle journée de construction samedi 27 décembre à partir de 11 heures (soupe et sandwiches sur place) sur le site de « la Plaine » (fléché depuis le terrain de foot de Saint-Victor). Venez nombreux, en famille et entre amis…
ZAD Roybon : "Le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble a suspendu, mardi 23 décembre, l’exécution de l’arrêté du 3 octobre 2014 qui autorisait les travaux de défrichement préalables au chantier contesté de construction d’un Center Parcs à Roybon (Isère).
Sivens, Notre Dame des Landes et autres grands projets inutiles et imposés : la fracture démocratique*"
· Dossier de Libé sur les ZAD : 1, 2, 3, 4
Dimanche 28 décembre
Devant, et sur les flancs.
Lettre un peu péremptoire mais amicale au mouvement zadiste.
« Les classes moyennes [...] ne sont donc pas révolutionnaires, mais conservatrices; bien plus, elles sont réactionnaires : elles cherchent à faire tourner à l'envers la roue de l'histoire.
Si elles sont révolutionnaires, c'est en considération de leur passage imminent au prolétariat :
elles défendent alors leurs intérêts futurs et non leurs intérêts actuels; elles abandonnent leur propre point de vue pour se placer à celui du prolétariat. »
(Manifeste du Parti Communiste, 1848)
« Il réfléchit et commence à comprendre »
(Kashima paradise,1973)
Après avoir annoncé d’une seule voix la création d’un « nouveau Sivens » à Roybon, dernièrement la presse a tenté de comprendre qui étaient ces zadistes de Chambaran. Qui sont-ils, d’où viennent-ils, que veulent-ils ? Malgré le regain de tension avec certains habitants, elle s'est peu penchée sur une autre question, non moins cruciale : qui sont les « pro ». Qui sont ces locaux qui soutiennent les chantiers du Center Parcs à Roybon, du barrage à Sivens, ou de la LGV Lyon-Turin du côté de la Maurienne, pour ne prendre que des exemples médiatiques et récents. Ce que
les journalistes ne font pas, faisons-le nous-mêmes : essayons de comprendre. Allons-y.
Hypothèse n°1 : ce sont tous des fascistes, des mafieux, des ripous ? Non, on conviendra que c'est un petit peu plus compliqué. Alors prenons les choses autrement, commençons par nous demander ce qu'ils ne sont pas, et par définir les forces en présence dans le conflit des nouvelles ZAD. Ce texte
propose de profiter du répit relatif dont nous disposons, suite à la mort d’un camarade, et grâce aux demi-victoires juridiques des écologistes et des légalistes, pour forger notre analyse et notre discours politique. Car d’autres ne nous attendront pas pour parler à notre place.
1. Le Parti du Progrès progresse partout.
Revenons un instant dans les années 80 : après une phase de grandes luttes sociales, le reflux politique impose de trouver de nouvelles formes de subversion. À la marge du système, des militants et des artistes ouvrent des brèches dans les grandes villes en voie de désindustrialisation, où les bâtiments vides ne manquent pas : c’est l’expansion du mouvement des squats politiques et culturels. C'est aussi le début d'un processus qui portera, 20 ans plus tard, à l'implantation d'une nouvelle bourgeoisie dans les faubourgs. Le modèle de la gentrification des quartiers populaires
est bien connu aujourd’hui, et peut être résumé comme ça : Squat et modes de vie alternatifs > Abandon des luttes sociales et populaires, prédominance de la culture, de l’écologie et de la technologie attirant la petite bourgeoisie > Flambée immobilière et embourgeoisement.
Ces forces sont hétérogènes, le phénomène n'est pas linéaire, et les groupes sociaux qui y participent sont parfois concurrents, voire opposés. Mais chaque phase est sous-tendue par un même fil rouge, une même idéologie (d’après moi, celle de la cybernétique, de la gouvernance, c’est à dire de l’organisation optimale du corps social, sous des formes différentes telles que l'ingénierie sociale, ou l'écologie). Résultat du processus : l'émergence d'un nouveau groupe social
à fort capital immatériel, qui engage une guerre de classe dans l'espace, puis l'emporte à la fois géographiquement et politiquement. Cette classe sociale qui émerge puis s'impose (à Grenoble, nous l’appelons
parfois ironiquementcelle des « écotechs »), c’est ce que nous pourrions définir comme « le nouveau Parti du Progrès », ou plus précisément « la nouvelle avant-garde du P.d.P. ». Elle se nourrit de culture (de gauche, libérale), d'écologie (soft) et de (high) technologie, de préférence au sein de la métropole.
Elle est individualiste, mais dit le contraire, et sait défendre ses intérêts de classe. Son progrès est celui de la croissance verte et du capitalisme 3.0., celui qui assure la continuité du système et ne réserve au peuple que chômage et consommation factice. Elle a déjà gagné beaucoup de terrain dans les grandes villes, et repoussé les pauvres dans les campagnes rurbaines.
Imaginons un instant – pure fiction – qu'une partie de cette avant-garde, déjà un peu à l'étroit en ville, commence à s'étendre au-delà des métropoles, et que certains conflits – au hasard, par exemple, les nouvelles luttes locales et parmi elles les ZAD – leur serve d'avant-poste pour s'implanter dans les territoires périphériques.
2. Prospective zadiste.
Imaginons. Comme les salles de spectacle et les casabio ont fleuri en ville sur les pas des gentrifieurs, les réseaux de petits agronomes bio et de néo-ruraux entreprenants apparaissent dans certains territoires périphériques, mais
Stratégiques (comme dans les quartiers populaires, l’avant-garde choisit les zones où le potentiel de fructification de son capital est le plus fort), et transforment les structures économiques et sociales locales. La chose est banale, et déjà en cours. Des héritiers gentrifiés, chassés des villes, des écotechs attirés par l'image du retour à la
terre et les prix du foncier, parsèment pour le momentces zones périphériques. Ils sont d'ailleursgénéralement mal accueillis, même après des années, par les communautés post-agricoles auprès desquelles ils s'installent. C’est la guerre de basse intensité entre purin d'ortie et agro-chimie.
Ces gentrifieurs des champs sont plutôt sensibles à l'écologie, mais aussi au développement personnel,entretiennent parfois des rapports fétichistes à la nature, sont empreints de libéralisme postmoderne (chacun fait ce qu'il veut, tout dépend du point de vue), et votent volontierspour une démocratie plus efficace. Mais surtout : ils ont renoncé à la lutte politique antagoniste, sauf par procuration. Ce qui est pratique, puisque ça permet d'être à la fois zadiste
etau hammam.
Les ZAD sont les avant-postes
par lesquels ces catégories pourraient acquérir enfin une légitimité locale. Même si leur position dans les ZAD est secondaire, restreinte soit à une partie de la contestation légale (que nous leur laissons bêtement), soit au soutien indirect via internet – moi aussi, je suis zadiste ! – elles pourraient en tirer profit, et obtenir une position dominante après le conflit. Par exemple, simple hypothèse,en gagnant des recours juridiques, et en s'emparant du leadership
politique, aidés par le manque de discours de notre côté. Elles pourraient même avoir intérêt à ce que l'occupation ne dure pas trop.
Ces manipulateurs prolongeraient ainsi leur guerre de classe dans l'espace pour préserver et préparer, en marge des métropoles dont ils sont issus et dont ils tirent leur richesse (télétravail, laboratoires sociaux et économiques), leur futur cadre de vie.
3. Ce qui nous attend, et ce que nous voulons.
Que la petite bourgeoisie s'allie un temps au peuple dont elle est issue pour se forger une position dominante, n'est pas une première. Mais revenons à nos moutons : ce petit détour permet à présent de répondre à notre question initiale : qui sont les « pro ». C'est par opposition à cette partie du mouvement que nous avons définie ensemble commela nouvelle avant-garde du P.d.P., que nous pouvons définir l'alliance hétérogène des « pro », à Roybon, à Sivens, ou en Maurienne : vieux souteneurs de l'industrie, agriculteurs forcés à l'intensif depuis 50 ans et ne voyant plus d'autre voie, commerçants sans plan B, suivis d'une partie de leur main-d'oeuvre prolétaire, et des partis qui les représentent ; ils forment l'arrière-garde du Parti du Progrès, ceux qui ont nourri la France d'après-guerre, mais qui ont loupé le virage des années 80, de l'innovation et de l'information.
Ils ne sont pas fascistes, même si la xénophobie les traverse allègrement ; même pas forcément de droite, mais certainement tousproductivistes. Laissés pour compte de la mondialisation, pas rentables, tout aussi sous perfusion de subventions étatique que les allocataires RSA qu'ils montrent du doigt, ils vomissent les réformes sociétales et les taxes.
Et s’ils se mobilisent, c’est parce qu'ils sentent bien que, derrière les zadistes, les peluts, les anti-tout, il y a le nouveau modèle des dominants, intéllos, verts et technophiles, avec un vrai projet de société, leur relève en
quelque sorte, qui va s'approprier leur territoire. Ce sont ces « extérieurs » qui représentent une menace réelle pour les pro.
Avant et arrière-gardes, ces deux composantes encerclent les ZAD, et tout en l'ignorant, forment deux appendices du même animal : le Parti du Progrès, alias le capitalisme nouvelle vague. Nous, les anarchistes, les militants, les zadistes, nous sommes, pour l'instant, les mercenaires aveugles (et gratos) du P.d.P. On défriche, on ouvre une brèche, et on la tient un temps, comme dans les villes depuis 20 ans. Et contrairement à ce que nous laisse supposer la situation aujourd'hui, « pro » et « anti » peuvent très rapidement s'entendre sur plusieurs points :
- un point technique d'abord : les écotechs expliqueront aux pécores qu'il faut opter pour un projet alternatif et durable ; qu'il faut plus de zones compensatoires, plus de CNDP ; ils négocieront via la FRAPNA, la FNSEA ou d'autres (tiens, c’est le cas en ce moment même, sous l'égide du gouvernement), et s'entendront sur un modus vivendi. - --
- Souvenons nous que EELV a soutenu le TAV jusqu’en 2011, puis changé de camp pour réclamer, depuis, une autoroute maritime à la place d’une autoroute ferroviaire. Techniquement, tout devient possible.
- pragmatique : les zadistes sont encombrants et ingouvernables. Bref, pro et anti diront bientôt, et à l'unisson :
« foutez le camp, on est chez nous», ou des variantes de gauche : « maintenant, il faut laisser place à la démocratie
». S. Royal, dans le Monde du 22/12/14 : « Quand une solution sera trouvée, il faudra que les occupants partent». Nous sommes prévenus.
On sait ce qui nous attend. À ce moment là, on sera seuls contre les réacs, les flics et les légalistes.
Once again
. Inutile de patienter poliment, de se forger une image médiatique de gentils jeunes, ou d'adorateurs des merveilles de Gaïa, on ne se fera balayer que plus rapidement. Si on rentre sur le champ de bataille de l'opinion publique, c'est toujours par tactique, non pour la gagner. Entre un front et l'autre, notre position est courageuse, mais glissante. Pour rester offensive, elle doit chercher la stratégie qui nous permette de gagner la bataille politique, derrière la bataille géographique. La ligne de crête que l'on doit voir dès maintenant dans le brouillard, entre pro et anti, c'est celle où l'on assume nos ambitions : la ZAD est un moyen de faire face au capitalisme, à l'industrie des flux, aux avant-postes de la métropole, auxquels nous opposons nos forces, en mettant en pratique notre idée du commun, la fusion de la vie collective et de la lutte politique. Chacun peut nous rejoindre, mais qu'ils sachent que nous ne serons ni les sauveurs de la France périphérique, ni les larbins des bourgeois métropolitains.
Pierrette Rigaux
Grenoble, Décembre 2014.
Infos de la semaine du 29 au 31 Décembre
Lundi 29 décembre
un communiqué de la ZAD de Saint Victor (Aveyron), suite aux actes de vandalisme sur l’Amassada.
MINUIT CRÉTIN
Certaines personnes ont une curieuse manière de fêter le réveillon de Noël, puisque dans la nuit du 24 au 25, à Saint-Victor, les vitres de l'Amassada (1) ont été brisées. Violation de propriété, dégradation d'une jolie cabane en bois construite dans la joie collective : tels sont les ultimes arguments des pro-transformateurs. Il faut croire que ceux-là ne sont pas meurtris par le saccage de notre territoire, et que même au contraire ils en défendent la destruction. Mais cette puérile « action d'éclat » n'entame en rien notre détermination, les vitres seront remplacées dès le prochain chantier collectif. Nous continuerons à construire là où ils veulent détruire. L'Amassada est et restera le lieu de tous ceux qui veulent lutter contre la transformation de l'Aveyron en zone industrielle électrique.
(1) « Assemblée » en Occitan, nom donné à la cabane construite à Saint-Victor le 21 décembre sur les terres convoitées par RTE pour son méga-transformateur.
· Projet d’incinérateur à Echillais :
il faut du monde le 8/01 à Rochefort (Charente Maritime – 17) !
Voir aussi la page Facedebouc !
BONNE ANNEE 2015
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