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dimanche 5 avril 2015

Chronique du mois de mars 2015 ZAD du TESTET


ZAD DU TESTET - PROJET DE BARRAGE DE SIVENS (TARN)

Source : 

MARS 2015



Infos du 1er au 8 Mars

Dimanche 1er mars

Communiqué de presse de la coordination des opposants au projet
Barrage de Sivens, les pro-barrage sont dangereux
Dans la vallée de Sivens, les pro-barrage sont toujours plus violents. Après avoir bloqué et interdit l’accès plusieurs week-ends de suite, ils se mobilisent nuit et jour jusqu’au 5 mars quitte à affamer les occupants du site. Ils font pression sur les élus du CG qui se réunissent le 6 mars  espérant que ces derniers  opteront pour un barrage pourtant majoritairement contesté. Ils ont donné un premier assaut  samedi matin qui s’est soldé par de la violence.
Nous sommes très inquiets quant à leur capacité de nuisance physique, et la propagande qu’ils sont capables de faire circuler via leur syndicat agricole, quelques élus et et la presse locale. Nous en avons averti la préfecture.
Ici, depuis la Seconde guerre mondiale, nous refusons que les milices fassent la loi.
Lundi 2 mars

A Sivens, les pro-barrages font monter la tension



Les FDSEA de Midi Pyrénées ont lancé samedi une opération de blocage de la Zad de Sivens. La tension s’est accrue pendant le week-end.

La tension est montée d’un cran, ce week-end, sur le site du barrage de Sivens.
Selon le collectif Tant qu’il y aura des bouilles, une attaque violente de pro-barrages s’est produite à l’entrée de la ZAD samedi 28 février. "Des affaires persos (outils, papiers d’identité,etc…) [ont été] brulées et un copain tabassé, les quelques gendarmes présents au moment des faits s’étant fait déborder. Grosse présence policière (fourgons de GMs) alentours depuis."
Selon l’AFP, les gendarmes sont intervenus samedi pour bloquer les deux principaux accès au site. « Il y avait trop de monde pour qu’on assure la sécurité, on a reçu l’ordre de ne laisser entrer personne », a indiqué l’un des gendarmes.
« Les forces de l’ordre nous ont empêchés de poursuivre jusqu’à la Zad comme certains parmi nous le voulaient, et ils ont eu raison dans ce contexte tendu », indique à La Dépêche Bernard Boulze, conseiller régional (UDI) de Midi-Pyrénées.
Dans un communiqué de presse, la coordination des opposants au projet, s’inquiète de la violence de pro-barrages : "Dans la vallée de Sivens, les pro-barrages sont toujours plus violents. Après avoir bloqué et interdit l’accès plusieurs week-ends de suite, ils se mobilisent nuit et jour jusqu’au 5 mars, quitte à affamer les occupants du site. Ils font pression sur les élus du Conseil général qui se réunissent le 6 mars, espérant que ces derniers opteront pour un barrage pourtant majoritairement contesté. Ils ont donné un premier assaut samedi matin qui s’est soldé par de la violence…"
Une barricade construite et détruite trois fois
Le point de tension est une barricade installée par les zadistes au carrefour de la D999. Elle a donc été détruite et reconstruite trois fois avant d’être définitivement démantelée dimanche matin.
Les agriculteurs ont obtenu samedi « l’autorisation de redétruire la barricade », selon la gendarmerie. Les zadistes l’ont ensuite reconstruite dans la nuit mais dimanche matin elle a de nouveau été démantelée par les agriculteurs.
La montée de tension est une stratégie délibérée des pro-barrages, à quelques jours de la discussion du Conseil général du Tarn, vendredi 6 mars, sur les projets de retenue de Sivens. Dans un communiqué publié le 26 février, la FDSEA (Fédération départementale des syndicats agricoles) du Tarn avertissait : « Afin de s’assurer que l’Etat prenne bien ses responsabilités et fasse effectivement évacuer le site, la FDSEA, les JA [Jeunes agriculteurs] du Tarn, la FRSEA [Fédération régionale] et les JA de Midi-Pyrénées ont engagé avec les huit FDSEA et JA de Midi-Pyrénées un blocage de la Zad pendant toute la semaine du 2 au 6 mars. Chaque département bloquera le site sur une journée, ce lundi 2 mars ce sera le tour de l’Aveyron, le Tarn se chargeant de maintenir le blocage pendant les nuits »
« La comédie n’a que trop duré. Il faut passer d’une phase où les « anti-tout » peuvent tout bloquer, à une phase de développement responsable, où les projets économiques structurants pour nos territoires peuvent être engagés et réalisés », ajoute le communiqué.
Camille Martin - Reporterre




À Paris ce soir 18h30 : APPEL À RASSEMBLEMENT DEVANT LE SIÈGE DE LA FNSEA
11 rue de la Baume, dans le 8e arrondissement, Métro Miromesnil.
Des membres du collectif francilien de soutien à Notre-Dame-des-Landes et des ami-e-s et soutiens de la lutte au Testet
  • Expression libre] Les conseillers du CG81 sont les seuls responsables de cette situation dramatique. En oeuvrant pour les seuls intérêts des dirigeants de la FNSEA, CACG, SAFER, Chambre Agri, des toutous trop habitués à se faire assister et en excluant de la réflexion globale toutes les autres composantes de la population. C’est André Cabot, qui palpe du fric à tous les rateliers dans le projet de barrage, c’est Thierry Carcenac qui palpe du pognon sur tous les fronts (avec son entreprise qui fait du Wifi), c’est Georges Paulin qui se gave avec ses entreprises et sa centrale photovoltaïque…
  • Lettre d’Attac Tarn au Préfet : poser des conditions favorables à un débat raisonnable autour d’un projet alternatif au barrage de Sivens
  • Avertissement de la Destroïka (blog du lundi matin)
  • Semaine à haut risque à Sivens (presse les bourgeois c’est comme les cochons, plus ça devient vieux, plus ça devient bête ; les bourgeois c’est comme les cochons, plus ça devient vieux, plus ça devient… Le figaro)
  • Sivens : les gendarmes bloquent l’accès après de vives tensions (Boursorama, qui s’inquiète du niveau de ses bourses)

Autour de Sivens, les élus font bloc pour défendre leurs prérogatives

Dans le Tarn, les élections départementales se préparent dans une atmosphère explosive. Les pro-barrage de Sivens pratiquent l'intimidation, tandis que les élus mènent un jeu politique opportuniste et brouillent les lignes. Le département de Jaurès pourrait basculer à droite.
Tarn, de notre envoyée spéciale.-  Un verre de vin rouge se tend vers le plafond du bar du marché : « Je trinque au “changement, c’est maintenant”. » La main qui le tient appartient à Philippe Folliot, député UDI, et possible futur président du conseil général du Tarn, bastion de la gauche menacé d’alternance lors des élections départementales (22 et 29 mars). Le toast provoque les éclats de rire des militants et candidats des listes d’union UMP-centristes qui prennent quelques minutes de pause après une matinée de tractage. Nous sommes le samedi 28 février, à Albi.

Au même moment, à une trentaine de kilomètres de là, des agriculteurs
ont sorti les tracteurs pour dégager une barricade sur la départementale 132 conduisant au site du barrage de Sivens, occupé depuis l’été dernier par des opposants : la ZAD du Testet. C'est un avant-goût d'une semaine de blocus. À partir du lundi 2 mars, la FDSEA et les Jeunes Agriculteurs veulent bloquer la ZAD pour faire pression sur le conseil général qui doit voter le 6 mars sur les suites du projet. L’action a démarré lundi matin. Mercredi, un convoi « alimentaire » d’anti-barrage doit encercler les bloqueurs. Sur les routes du Tarn, la tension est à son comble, quatre mois après la mort de Rémi Fraisse, jeune opposant au barrage tué par la grenade offensive d’un gendarme, dans la nuit du 26 au 27 octobre dernier.

Le barrage de Sivens, c'est le boulet de Thierry Carcenac, le président socialiste du conseil général du Tarn qui s’est obstiné à vouloir construire cet équipement malgré l’opposition croissante qu’il suscitait. Son refus de rencontrer les opposants et d’écouter leurs critiques a nourri la tension.
« Mourir pour des idées, c’est une chose, mais c’est quand même relativement stupide et bête » : sa déclaration après la mort du jeune homme l’a figé dans une posture méprisante, aux accents cyniques, qui jette une ombre sur son mandat quasi perpétuel. Il siège au conseil général depuis 36 ans et le préside depuis 1991. Fonction qu’il cumule depuis l'automne dernier avec un fauteuil de sénateur – la loi ne l’obligera à choisir entre les deux qu’en 2017.

Philippe Folliot, candidat UDI-UMP, en campagne à Réalmont (Tarn) (JL).
Selon Philippe Folliot, « les gens en ont assez du système Carcenac, une organisation pyramidale, où tout remonte au président, sans transparence. C’est une organisation du passé. Il faut de la collégialité et non pas un autocrate qui décide de tout ». Lui-même est favorable au barrage et souhaite une commission d’élus pour sortir de l’ornière politique dans laquelle le projet est englué. Au volant de sa voiture, entre Castres et Albi, en route vers une réunion de candidats et militants de la campagne, il insiste : « Il faut plus de modestie. Je conduis ma voiture. Le système du conseil général aujourd’hui, c’est : le président se déplace avec son chauffeur, le vice-président aussi et un photographe suit. Il faut être plus économe. »
Pourtant, lui aussi s’apprête à cumuler sièges parlementaire et départemental. Dans la salle des fêtes de Réalmont, il est accueilli par Françoise Bardou, candidate divers droite : « Nous sommes tous des travailleurs. » Folliot se régale, entre deux tranches de saucisson : « Ça fait très longtemps que j’en rêve, je vais pouvoir commencer un discours en disant “Travailleuses, travailleurs”. »

Dans le Tarn, la droite s’amuse à parler comme la gauche. Mais cela ne l’empêche pas de s’unir contre la majorité socialiste sortante. Opposées lors des législatives de 2002, 2007 et 2012, UMP et UDI se sont rassemblées pour les départementales de 2015, dans la foulée de la victoire à la mairie d’Albi d’une coalition UMP-UDI-Radicaux valoisiens-MoDem-PRG.
« Notre but c’est d’avoir la majorité, au minimum 12 cantons (sur 23 au total  ndlr). » Ce serait un dénouement retentissant dans le département de Jean Jaurès, natif de Carmaux, ancien pays minier, de textile et de mégisserie, frappé par la désindustrialisation et le dépeuplement des campagnes. Sur les listes de droite, on trouve une ancienne conseillère régionale PS, Marie-Claude Bascoul, enseignante en psychologie à l’université Champollion d'Albi : « Les gens ne font plus confiance à aucun parti politique. Il faut dépasser les clivages. »

Face à cette offensive, Thierry Carcenac lui aussi joue l’ouverture :
« J’ai considéré que j’avais une motivation intacte pour conduire une équipe très large, dans le cadre d’une majorité pas forcément de gauche » (Le Journal d'ici, 6 janvier 2015). Un conseiller général de sa majorité actuelle n’exclut pas (en off) que le sénateur du Tarn sauve sa présidence, même en cas de majorité des cantons à droite. Difficile d’établir des pronostics avec un nouveau mode de scrutin (binominal) et des circonscriptions cantonales redécoupées. Bien des choses vont dépendre de l’abstention, qui promet d’être substantielle.

Sollicité par Mediapart, Thierry Carcenac n’a pas donné suite à nos demandes d’interview. La vice-présidente Claudie Bonnet, vers laquelle son responsable de communication nous a renvoyés, n’a pas non plus répondu à nos appels. Le barrage de Sivens n’est pas au cœur de la campagne des départementales dans le Tarn. Mais pour l’opposition, ce fiasco politique et ce drame humain symbolisent l’usure du patron du Tarn, qui brigue, encore une fois, un mandat départemental.

Les militants du MJS en plein tractage sur le marché d'Albi. (JL)
Dans les allées du marché couvert d’Albi, Nicolas Bruihle, militant au Mouvement des jeunes socialistes (MJS), déprime : « Quand les gens voient nos tracts, ils disent soit “surtout pas vous”, soit “j’espère que vous êtes contre Hollande”, soit “la politique, j’y crois pas”. » Mathilde Maulat, ajoute : « Quand on leur explique que le département, c’est la politique sociale, on nous répond “assistanat” et “profiteurs du système”. » Les seuls passants motivés par l’élection qu’ils ont croisés disent vouloir voter Front national. La gauche se présente divisée dans plusieurs cantons. Carcenac affronte Roland Foissac, conseiller général communiste sortant, qui explique : « Il n’y a plus de majorité ! Depuis 2012, Carcenac a épousé la politique du gouvernement actuel. »

Brigades anti “pue la pisse”

Pendant ce temps, dans le canton de Vignoble-Bastide, celui du barrage de Sivens, l’ambiance est à couteaux tirés. À la sortie de Montauban, sur le bord de la route, une main a tracé en grosses lettres noires : « Ségo+Conf=fachos » (“Conf” pour Confédération paysanne). Sur les troncs des platanes, on peut lire : « Pelus dehors. » Les « pelus » ou « pelutes », ce sont les « pue la pisse », les occupants de la ZAD du Testet, qui ont construit cabanes et fort de défense pour empêcher la construction du barrage de Sivens. C’est là que Rémi Fraisse, 21 ans, est mort, tué par les gendarmes lors d’un affrontement nocturne. Le sort du barrage est suspendu à la décision que doit annoncer le conseil général du Tarn le 6 mars, à quinze jours du premier tour des élections.

Marie Chantepie, candidate d'une liste citoyenne anti-barrage de Sivens. © JL
Marie Chantepie, 35 ans, candidate aux départementales sur une liste citoyenne opposée au barrage, a subi la dégradation de sa voiture : « ZAD » tagué sur le capot. Et sur le côté : « ZAD partou », sans « t », fait-elle remarquer. Pourtant, contrairement aux zadistes parfois décrits comme des « occupants » par les agriculteurs pro-barrage, c’est une fille du coin, née dans le Tarn. Ouvrière agricole, elle habite Castelnau-de-Montmiral, un village d’une centaine d’âmes.
Ces derniers mois, elle a vu surgir des « milices », en treillis, sweat-shirts à capuche équipés de dossards « soutien aux gendarmes de Sivens » et de brassards orange où l’on peut lire « brigades anti pelutes ». Ils bloquent parfois les voies d’accès à la ZAD et font des rondes en quads dans la forêt. Un zadiste raconte avoir vu le slogan « Zad dehors sinon mort » et des pendus gravés sur des troncs d’arbres. Un autre décrit les pneus crevés de la voiture d’un sympathisant, l’intérieur souillé par de l’urine, et le caddie de ravitaillement d’une copine réquisitionné par des pro-barrage. Une page Facebook a un temps annoncé « ouverture de la chasse : un zadiste tué =une balle offerte ». Marie Chantepie a porté plainte. Les auteurs du post s’en sont tirés avec une convocation au commissariat.
Dans les rues du village, il lui arrive d’entendre des klaxons hostiles, de croiser des regards « de dégoût ». À l’école, sa fille s’entend dire que sa mère est « une pelute » et qu’à cause de ses amis, « on ne pourra plus boire l’eau ». La maire de la commune toute proche de Lisle-sur-Tarn, Maryline Lherm, « a réussi à détourner le regard du barrage vers les zadistes par une campagne de dénigrement », décrit Marie Chantepie. Fin 2014, l’édile a convoqué les services sanitaires pour de supposés problèmes de gale sur la zone.
Patrick Rossignol, maire de Saint-Amancet (JL).
Le 1er février, des incidents ont éclaté entre opposants et défenseurs du barrage. Patrick Rossignol, maire de la petite commune de Saint-Amancet, dans le sud du Tarn, adhérent de la FDSEA, producteur de céréales et de maïs, mais opposant au barrage de Sivens, raconte avoir été « bousculé » par un groupe d’hommes en tenue de chasse, équipés de manches de pioche, barrant une route départementale. « Ils veulent me retourner le fourgon et me pousser dans le fossé. Ils m’insultent : “Dégage pauvre con !”, “J’espère que vos électeurs vous cracheront à la gueule quand ils sauront que vous soutenez ces rats”. »
Quelques heures plus tard, dans les rues de Gaillac, il tombe sur quatre ou cinq de ces pro-barrage, barre de fer en main, « qui voulaient s’en prendre à des jeunes ». Il s’interpose et se présente en tant qu’élu. « Ils me menacent : “On est chez nous”, “T’as rien à foutre ici”. » Il retrouve ensuite sa camionnette « fracassée, avec de longs impacts sur le côté, le pare-brise et la vitre latérale brisés ». Il part, avec d’autres (crevaison de pneu, entrave à la circulation), déposer plainte à la gendarmerie de Gaillac. À la sortie, surprise : les mêmes hommes menaçants, avec « les mêmes outils en main », habillés de sweat-shirts noirs à cagoule avec un logo « Brigade antiPelluts-soutien aux gendarmes de Sivens », s’approchent d’eux.
Le groupe de plaignants appelle alors l’interphone de la gendarmerie : « Il y a des personnes avec des barres dans les mains qui arrivent. » Réponse de l’autre côté du mur : « Non, ils n’ont rien dans les mains. » Il faut attendre que les pro-barrage cassent l’appareil photo d’une journaliste stagiaire pour que les militaires sortent de leur bureau, et raccompagnent la bande d'agresseurs jusqu'à leurs voitures. « Nous avons été surpris de voir les gendarmes laisser partir les agresseurs après avoir discuté avec eux. »

Pour Rossignol, adhérent à Europe Écologie-Les Verts (EELV) mais maire sans étiquette,
« si les élus avaient géré la situation comme il fallait, on n’en serait pas là. Les zadistes ne seraient pas venus et on n’aurait pas des miliciens armés faisant régner la terreur ». Pour Guillaume Cros, conseiller régional EELV, « les élus en place qui attisent la violence sont irresponsables »
Conférence de presse d'ACTES à Lisle-sur-Tarn (JL).
Sur le canton de Vignoble-Bastide, celui de Sivens, la liste citoyenne ACTES conteste le barrage de Sivens. Elle dénonce le monopole de la décision publique exercé par les élus, les conflits d’intérêts, le refus d’écouter les opposants. « On ne pouvait pas laisser le canton sans candidat contre le barrage », explique Claude Forgeot, ancien technicien agricole puis patron d’une entreprise de BTP, encarté au Parti de gauche et désigné candidat par un processus d’assemblées citoyennes.
« C’est la prochaine assemblée qui va décider de ce qui sera fait à Sivens. On veut faire entendre les citoyens. On a un modèle, c’est Podemos. Le barrage de Sivens est emblématique des maux de notre société : les conflits d’intérêts, les dépenses déraisonnables, les dossiers bidonnés. Un élu a le droit de tout à partir du moment où il est élu. Ce sont les mêmes élus depuis des années, il faut que ça change. » Pour sa fille, Maud, candidate à Saint-Sulpice : « Certains élus disent qu’il faut réaffirmer leur rôle, sous-entendu quand les projets sont votés, ils ne doivent pas être contestés par les citoyens. C’est tout ce qu’on dénonce ! C’est une vision dépassée de la politique. »
« Sivens nous a ouvert les yeux, explique Marie Chantepie. Je ne me rendais pas compte à quel point dès que l’on n’est pas d’accord avec la majorité, on n’est pas entendu. On voulait protéger nos forêts, on a manifesté pacifiquement, et on nous fait passer pour des terroristes ! » Katia Guillaumé, 49 ans, aide à domicile, remplaçante sur la liste d’ACTES : « Le jour où des gens se sont enterrés pour empêcher les bulldozers d’entrer sur la ZAD, j’ai vu un gradé donner l’ordre à ses hommes de foncer sur eux. Ça m’a énormément choquée. J’ai capté son regard pour lui demander pourquoi il faisait ça. Il m’a répondu en faisant des mains le signe qu’il n’y pouvait rien. Là, j’ai pensé qu’il fallait faire changer les choses. »
Leur liste est soutenue par EELV, les Alternatifs et, officiellement, le Front de gauche – à ceci près que les communistes ont préféré présenter leurs propres candidats. Ils espèrent un bon score car, aux dernières européennes, les bureaux de leur circonscription ont accordé plus de voix aux écolos et au Front de gauche qu’au PS et à la droite. Mais moins qu’au FN.

« On ne va quand même pas baisser le pantalon »

« Sivens, c’est une ânerie énorme, on n’impose pas les projets à la matraque » : c’est la voix de Jacques Pagès, assis dans son salon, entre une réunion au conseil général et la sortie d’école de ses deux jeunes enfants. Élu départemental sortant, il fut le seul à voter contre le projet de barrage. Infirmier à domicile, président de la commission des infrastructures et des déplacements au conseil général, il repart en campagne sous les couleurs de la majorité, malgré la rupture de Sivens. Il affronte Philippe Folliot, le candidat de droite et potentiel futur chef du Tarn, à armes inégales, dans une circonscription énorme où la plupart des électeurs ne le connaissent pas.
Sa voix s’étrangle, les larmes lui sont montées aux yeux. « Je suis anéanti par le fait que ce projet stupide et déconnecté a foutu en l’air tout notre bilan. » Quelques secondes de silence. « Sur 90-95 % des actions du conseil général, j’ai été d’accord, et même, enthousiaste : agenda 21, plan énergie-territoire, la politique sociale, l’aide aux cantines scolaires, les trajets en car à 2 euros, la défense des zones humides, de l’environnement. »
Jacques Pagès, élu divers gauche au conseil général.
Enfant des monts de Lacaune, au sud du Tarn, il est entré en militantisme à la fin des années 1980 en s’opposant à un projet de barrage sur la rivière Viaur, déjà voulu par le conseil général et la CACG – la société au cœur du conflit d’intérêts de Sivens –, qui menaçait de noyer sa vallée. « Un jour, on a vu débarquer des gens avec des lunettes de mesure. Ils nous ont dit :“Vous n’êtes pas au courant ? Demain, il y aura de l’eau jusqu’au clocher de l’église.” »
Les habitants se mobilisent alors contre le projet. Pagès devient maire de son village. « Je n’aurais peut-être jamais eu l’idée de me présenter si je ne m’étais pas dit que les élus faisaient n’importe quoi. Ma vie politique est née de l’anti-barrage. » Si bien que trente ans plus tard, lorsqu’il a vu arriver le dossier de Sivens, « ça a fait tilt ». Pour aller chez lui, la route traverse le relief granitique des monts de Lacaune, ses rivières de rochers et ses forêts. L’Aveyron n’est pas loin, on y produit le lait qui sert à fabriquer le Roquefort.
Pourquoi n’a-t-il pas réussi à infléchir le projet ? « J’en ai été malade. J’étais seul contre tous. C’était comme être face à une religion. Ça m’a déstabilisé. » La logique majoritaire de l’assemblée et la division des tâches ont fait le reste. « Les conseillers généraux ne maîtrisent qu’un ou deux sujets, sur le reste, ils font confiance aux autres. Chaque élu travaille son dossier avec les services, puis le présente au groupe majoritaire et le soumet au vote. C’est un travail superficiel. » Pourquoi une telle obstination de l’exécutif ? « En réunion, j’ai entendu : “On ne va quand même pas baisser le pantalon”, et aussi : “ On ne pourra plus rien faire.” Mais heureusement qu’on ne peut plus tout faire ! »
L’alternative, il y en a un qui ne doute pas de l’incarner, c’est Frédéric Cabrolier, conseiller municipal et communautaire du Front national à Albi. Il donne rendez-vous dans la grande salle du plus grand café de la ville, en bordure de sa plus grande place, haute silhouette derrière son verre de jus d’ananas. « Ici, je suis comme un poisson dans l’eau. Il y a des gens qui ne m’aiment pas du tout mais je fais partie du paysage local. »
Conseiller financier pour un groupe d’assurance, 48 ans, il se présente contre Thierry Carcenac : « C’est l’archétype du politicien qui a échoué. Nous sommes le département le plus mal géré de France. C’est un exécutif de copains et de coquins. Sivens a mis au grand jour des conflits d’intérêts. On fait travailler des entreprises amies. Tout est à l’avenant. Quand il y a de la suspicion, on n’a plus de démocratie apaisée et juste. Au bout de trois, quatre mandats, nos élus n’écoutent plus le peuple. Ils sont dans leur tour d’ivoire. » Lui aussi est favorable au barrage de Sivens, mais en plus petit.

À gauche, le FN, à droite, le Front de gauche, sur le marché de La Madeleine, à Albi. (JL).
Pour son parti, il lorgne les votes ruraux de cette périphérie de Toulouse qui accueille de plus en plus de ménages rejetés par la hausse des prix de l’immobilier dans la métropole régionale. L’emploi s’y fait rare. Les laboratoires Pierre Fabre, longtemps puissance économique locale, sont en pleine restructuration et viennent d’annoncer un plan social. « Ce sont les territoires oubliés de la République. On a dépensé des milliards d’euros en politique de la ville en direction des quartiers, et on a délaissé les campagnes où la misère s’est développée. » Il espère emporter quatre cantons, dont celui de Carmaux, 1'ancien bastion de la gauche ouvrière : « Le Tarn, c’est là où nous avons le plus d’élus municipaux en Midi-Pyrénées, c’est le département où nous aurons le plus d’élus. »

Samedi matin, il tracte au marché de la Madeleine à Albi, au côté de sa deuxième de liste
« d’origine africaine», comme il la décrit. Bonnefoi Ndietom, 40 ans, standardiste dans l’hôtellerie, fille d’une réfugiée politique tchadienne, et habitante de Cantepau, une zone urbaine sensible. C’est une transfuge de l’UMP : « J’ai fait la campagne de Sarkozy en 2007 : une fois l’élection passée, plus personne ne me prenait au téléphone. » Frédéric Cabrolier insiste : « On pratique la diversité, ça devrait vous plaire. Je suis pour l’assimilation et envoyer des signaux à tous ces Français issus de l’immigration : ils peuvent réussir en politique, ils ont leur place chez nous. »
Pratique-t-on la politique différemment après la mort d’un jeune contre un barrage ? Et après que les experts mandatés par le ministère ont révélé les failles, les zones d’ombre et les erreurs techniques du projet voté à la grande majorité par le département ? Si peu. Thierry Carcenac se représente. Le préfet est toujours en place. Les principales formations politiques continuent de promouvoir de grands projets pour développer leur territoire : la Zac des Portes du Tarn, développée par la SEM 81, le syndicat mixte du conseil général ; une autoroute entre Castres et Toulouse ; le câblage en haut débit des campagnes. Philippe Folliot rêve d’un « troisième Louvre » à Castres. « Le drame de Sivens n’a pas politiquement affaibli Thierry Carcenac, analyse Guillaume Cros, conseiller régional EELV. Au contraire : les présidents de la chambre d’agriculture et de la chambre des métiers, la FDSEA, la FNSEA sont tous montés au créneau pour défendre le vote des élus et donc sa décision. » Le barrage de Sivens est devenu un symbole pour les élus, celui du pouvoir qu’ils veulent garder. « C’est comme s’il fallait qu’ils resserrent les rangs pour garder leurs privilèges », décrit Guillaume Cros, pour qui « Sivens n’a rien changé ».
Jade Lindgaard - Médiapart
Mardi 3 mars

Une nuit sur la Zad du Testet


Alors qu’opposants et pro-barrages attendent la décision du Conseil général du Tarn quant à l’avenir du barrage de Sivens, la tension monte sur la zone humide du Testet. Les pro-barrages bloquent la Zad. Il y a quelques jours, Reporterre a passé une nuit avec les zadistes qui veillent face aux provocations.
 Zad du Testet, Lisle-sur-Tarn (Tarn), reportage
1 h 30 du matin, la température extérieure tombe à -7 degrés. Une poudre glacée recouvre la vallée du Tescou. Il fait à peine plus chaud dans la guérite du checkpoint « Barikade », une cabane construite en bois, isolée par des couvertures et des bâches en plastique. Cette nuit de février, ils sont cinq zadistes dont une femme, âgés de 19 à 23 ans. Groupés autour d’un petit poêle centenaire, ils sirotent du thé à la menthe. Ils scrutent les environs avec leurs lampes frontales, guettant la moindre anomalie, les oreilles rivées au talkies-Walkies.
Bienvenue au principal point d’entrée de la ZAD du Testet. Tous les autres sont condamnées par des barricades et des ravins. Situé sur la départementale D999, on y pénètre après le passage de cinq chicanes et en attendant l’ouverture d’une lourde porte en métal.
Vingt-quatre heure sur vingt-quatre, des groupes se relaient à ce poste stratégique : c’est ici que se situe le dernier accès encore praticable par des véhicules. Militants, ravitaillements ou policiers et « pro-barrage »... tous passent par ici. « On observe qui entre sur la zone, car on est jamais à l’abri des infiltrés », expliquent les veilleurs, qui souhaitent garder l’anonymat. « On repère tout de suite les gens à leur attitude, on se rend vite compte s’ils connaissent les lieux et les usages. » En cas de problème, les veilleurs lancent une alerte par talkies-walkies. La nuit, toutes les heures, un « check radio » permet de vérifier que les autres postes de surveillance reçoivent bien les communications... et qu’ils ne dorment pas. Les noms de code sont d’usage, comme « Espion », « Stardust » ou « Kebab ».
"Des locaux nous soutiennent en apportant matériel et nourriture"


« Ici on est la première ligne. S’il y a une attitude agressive sur la barricade, même si on lance une alerte aux talkies et que les renforts arrivent vite, les premiers sur la zone, ce sont nous. » Boucliers, barrières, cailloux, bâtons. Les zadistes préfèrent garder quelques armes de fortune, au cas où. Pour la surveillance, ils élèvent aussi des chiens. « Certains sont particulièrement attentifs et arrivent à repérer des mouvements et des bruits à plusieurs centaines de mètres la nuit. Mais la plupart du temps, ils pensent surtout à manger. »
Les veilleurs nocturnes restent souvent au check point plus de dix heures. La cabane dispose donc d’une cuisine, et un lieu pour dormir est en construction. « C’est aussi un lieu de vie », précisent les zadistes. Le poêle permet de maintenir un peu de chaleur, mais rien à faire contre l’humidité. « On a beau mettre des sacs en plastique dans nos chaussures ou fabriquer des sur-chaussures en couverture, la flotte est partout », soupirent-ils.
Quand des visiteurs surgissent sur le chemin, ils se retrouvent nez-à-nez avec les veilleurs munis de masques et de boucliers. « Ceux qui viennent pour la première fois sont parfois perturbés, mais il y a surtout des locaux, qui nous soutiennent en nous apportant du matériel et de la nourriture. Il y a un même un groupe qui vient de Montpellier tous les jeudi avec du tabac, du vin et des bougies ! »
Des provocations fréquentes
Soudain on entend une, puis deux explosions, comme des coups de feu, provenant de l’autre bout de la vallée. Les talkies-walkies ne tardent pas à crépiter de tous les indicatifs. « Vous avez entendu ça ? Ça vient d’où ? » La réponse ne se fait pas attendre et arrive du poste avancé sur la D999 : « La barricade du pont est en feu ». Tout le monde pense immédiatement à une action nocturne des pro-barrages. « On a besoin de soutien sur la barricade du pont, la situation n’est pas claire et on voit des mouvements de lampes frontales dans les bois ».

Immédiatement une partie de l’équipe du checkpoint Barikade saute dans une vielle 106 déglinguée, fonçant toutes lumières éteintes à travers la ZAD. En chemin, ils se masquent et éteignent leurs lampes frontales. Une fois sur place, la barricade a été éteinte à grand renfort de neige et d’eau du Tescou. Ça sent l’huile et l’essence à des centaines de mètres. Les zadistes découvrent des bonbonnes de peinture, hautement explosives, dans le brasier. Certains se lancent à la poursuite des « assaillants ». On entend des cris, « Sortez de mon champ ! », et des imitations de hurlements de loups.
Si les actions de pro-barrages sont très fréquentes, les policiers semblent plus discrets. « Ils viennent jeter un coup d’œil, mais ils s’arrêtent à la première chicane. Et en général si on s’avance avec les boucliers et les masques, ils s’en vont. » Mais depuis quelques jours, la situation se tend à nouveau.
 La zad du Testet vue du ciel
Gaspard Glanz – Reporterre

A Paris, une manifestation devant la FNSEA en soutien à la Zad du Testet


Lundi soir, une cinquantaine de personnes sont venues exprimer leur soutien aux zadistes du Testet aux abords du siège de la FNSEA. Le syndicat agricole présidé par Xavier Beulin encourage les provocations contre les zadistes.
 Paris, reportage
Alors que la situation s’est tendue ce week-end autour de la Zad de Sivens, des « membres du collectif francilien de soutien à Notre-Dame-des-Landes et des ami-e-s et soutiens de la lutte au Testet » appelaient à un rassemblement lundi 2 mars à 18h30 devant le siège de la FNSEA (Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles), rue de la Baume, à Paris.
Le rassemblement n’ayant pas été déposé en préfecture, les forces de l’ordre étaient présentes afin d’éviter le « risque de manifestation », selon les mots d’un agent. À 18 h 30, des policiers étaient présents à chaque extrémité de la rue afin de filtrer les passages et ne laissaient passer que les riverains.
Mais vers 19 h, un regroupement d’une cinquantaine de personnes s’était constitué du côté de l’avenue Percier. D’abord pris au dépourvu, les manifestants ont finalement commencé à donner de la voix : « La police protège la FNSEA », « FNSEA - milice », entendait-on.
"Les pro-barrages agissent avec la bénédiction de la FNSEA"
« Ceux qui bravent la loi c’est la FNSEA, pas nous ! Ils n’ont pas le droit de bloquer la route. C’est eux qu’il faut coffrer » expliquait un manifestant, en référence aux récents évènements de Sivens (lien). « La police défend la malbouffe, et nous on est obligé de consommer béton et agro-industrie productiviste » déplorait un autre. « Mais les policiers aussi ont besoin d’une bonne alimentation. On veut vivre avec eux dans un monde meilleur. L’ennemi c’est pas nous, c’est eux [la FNSEA] ! » concluait un troisième.
Joël, membre du collectif francilien de soutien aux Zad, justifiait ainsi le rassemblement : « Les zadistes ont un sentiment de solitude. Ils nous disent qu’ils sont littéralement assiégés et ont du mal à avoir de la nourriture. Là-bas, ils sont trop peu nombreux pour mettre en place un rapport de force. C’est pour cela qu’on a décidé de venir ici et de montrer à la FNSEA qu’on n’est pas d’accord avec ce qui se passe. »
En effet, l’appel à manifester rappelait que « les pro-barrage agissent avec la bénédiction de la direction départementale de la FNSEA et la complicité des gendarmes ». De plus, il évoquait l’urgence à « soutenir les ami-e-s qui se sentent bien isolé-e-s dans la lutte sur place et appellent à l’aide depuis maintenant deux semaines dans un silence assourdissant ».
« La FNSEA encourage les pratiques d’intimidation et de destruction de biens à Sivens. Ils sont dans le coup de force, pas dans le débat. Et puis il y a une complicité évidente entre les agriculteurs de la FNSEA et la police. Alors plus on est nombreux ici plus on peut dire à la FNSEA qu’elle ne peut pas tout se permettre », expliquait encore Joël.
Bloquant pendant plusieurs minutes la circulation de l’avenue Percier, les manifestants étaient bientôt confrontés aux sorties des forces de l’ordre destinées à les repousser. Après quelques mouvements de ligne des policiers auxquels répondaient ceux des manifestants, les derniers présents se dispersaient autour de 20h.
Baptiste Giraud - Reporterre
Mercredi 4 mars

APPEL à actions décentralisées : Nous, sympathisant-e-s tarnais de la lutte contre le barrage de Sivens, sommes indignés des méthodes utilisées par la FNSEA (Fédération Nationale des Syndicats d’Exploitants Agricoles) et les JA (Jeunes Agricoles) pour assiéger et tenter d’affamer des militants écologistes légitimes.
Nous dénonçons le « deux poids, deux mesures » et la passivité des forces de répression face aux menaces de mort et actes violents commis par les membres de ces syndicats. Nous appelons à des actions décentralisées visant la FNSEA et les JA dans tous les départements du territoire!
Une captain de gendarmerie parlait de 8 escadrons de gendarmes qui seront mobilisés pour déloger les zadistes dans les prochains jours. Ils ont déjà fait le coup d’agir pendant des appels à rassemblement à Albi…
 Rassemblement à Gaillac, place de la Libération à 14h pour un départ en convoi alimentaire vers la ZAD dans l’après midi. Apportez de la nourriture même si vous ne pouvez vous vous joindre au convoi par la suite.
Marche Toulouse-Testet-Albi en deux étapes : RV à 8h aujourd’hui, place du Capitole

Autour de Sivens, la solidarité s’organise face au blocage des pro-barrages


A deux jours du vote du Conseil général du Tarn sur l’avenir du projet de barrage, le blocage de la zone du Testet continue. Les zadistes endurent et font face tant bien que mal aux provocations des pro-barrages. La solidarité extérieure s’organise.
 Saint Affrique (Aveyron), correspondance
"Pro barrage en bas de chez nous, les mensonges fusent. Impossibilité d’aller chercher notre fils à l’arrêt de bus qui se situe sur la D999 qui est une route a grande circulation. Les pro barrages refusent catégoriquement que l’on sorte de chez nous. Menace de mort, de dégradation de véhicule, coup de téléphone de pro barrages qui se trouvent en bas de chez nous, etc." Tel est le témoignage que livre Nadine Lacoste dans une lettre ouverte au préfet du Tarn.
Habitante de Barat, confinée chez elle à cause du blocus des pro-barrage, venus nombreux depuis lundi matin pour bloquer les accès à la zone. Le tort de cette famille : ne pas suivre une supposée "volonté des habitants de vallée" de faire le barrage de Sivens. Sauf si l’on est riverain (favorable au projet) ou journaliste disposant de la carte de presse, il est presque impossible d’accéder à l’intérieur de la zone du Testet, soit sous la pression des pro barrages, soit de celle des gendarmes.
"Il faut savoir si on est dans un Etat de droit". La tirade de Philippe Jougla, responsable de la FDSEA (Fédération départementale des syndicats d’exploitants agricoles) du Tarn, pourrait faire sourire en d’autres circonstances. Car de fait, c’est bien son syndicat agricole qui organise des opérations d’entrave manifeste aux libertés de circulation sur la zone. Pourtant, son propos vise les occupants, réduits à une petite cinquantaine sur place depuis le début de l’hiver, qui "menacent la démocratie" par le seul fait d’être présent sur la ZAD du Testet.
Blocus 24h sur 24
Jour et nuit, venus de tous les coins des départements voisins, les agriculteurs en colère campent et barrent l’accès à la zone du Testet. Sur les route adjacentes et les sentiers forestiers, d’autres groupes patrouillent, menaçants. Et quand la voie n’est pas barrée par les agriculteurs, elle l’est par les gendarmes. Des forces de l’ordre passives face à ces actions qui "troublent l’ordre public" selon les définitions légales.
- A Albi -
Mais pour l’heure, le préfet tente d’empêcher les affrontements directs. Les gendarmes appliquent cette consigne avec une ardeur mesurée, selon leur tempérament personnel. Philippe Jougla, conscient de l’existence de ces tentatives violentes, explique : "Ce blocus c’est aussi un moyen de gestion" de ses propres affiliés. Sans condamner directement les excès de certains, il précise que "l’objectif est de dénoncer l’inaction des pouvoirs publics qui ne mettent pas en oeuvre les décisions de justice" en ayant "pour ligne de conduite d’éviter la violence".
Ce qui n’empêche pas des débordements. Ainsi, en fin de matinée, ce mardi, aux abords de la D999, un groupe très décidé, armé de barres de fer et de bâtons, décide de franchir les bois séparant la route du premier campement zadiste. Un face à face s’engage, un cordon de gardes mobiles bloque les zadistes, un autre retient les pro-barrages, sans les empêcher de se rapprocher. Et forcément, à un moment donné, la tension monte. Des coups sont échangés au milieu des bois. Après des pierres et des insultes, c’est un engin incendiaire qui est jeté par un pro barrage sur une yourte plantée à côté.
Le temps est humide et les opposants parviennent à éteindre l’incendie naissant sur l’habitation, mais l’acte délictueux est bien là, filmé et avec des témoins. Sauf que, les gendarmes, plutôt que de s’en prendre aux assaillants, demandent fermement aux zadistes de reculer car "leur présence fait monter la tension".
Les délits des pro-barrages restent impunis par la police
Comme si la faute de la montée de violence des pro-barrages revenait aux militants écologistes. A ce jour, aucune arrestation de pro barrage n’a été jusqu’ici recensée depuis le déclenchement de cette stratégie de la tension permanente, orchestrée par le syndicat agricole majoritaire. Bilan de la journée : "Des coups sur la tête, dans les côtes et coup de poing sur un jeune de 22 ans ainsi qu’un autre blessé par des coups de bâton sur la tête ", rapporte Camille (pseudonyme). Ces blessés seront finalement évacués à l’hôpital.
"Ils nous empêchent de travailler et d’accéder à nos terres", expliquent en réponse les pro-barrages. Pourtant, dans une lettre d’apaisement, les occupants de la zone avaient fait part il y a déjà plusieurs semaines de leur accord pour dégager les terres que les riverains souhaitaient cultiver, situées aux alentours de la zone.
Quant à Mme Maurel, habitante de la zone qui, selon les pro-barrages, "ne pouvait pas accéder à son domicile" [information démentie par l’intéressée dans le Canard Enchainé], Camille raconte avoir vu "ce matin les barricades à l’intérieur de la zone être ouverte pour laisser passer le fils Maurel qui est allé récupérer des meubles de sa mère" et repartir de la zone sans avoir aucunement être menacé.
La solidarité se réveille
Face à ce statu quo où les zadistes sont face à deux groupes peu amènes, gendarmes et pro-barrages, le soutien s’organise. "Des soutiens locaux et autres personnes motivé-e-s sont rassemblé-e-s dans les locaux de la FDSEA à la chambre d’agriculture d’Albi". Après l’action parisienne devant le siège de la FNSEA, c’est dans les locaux de la Chambre départementale, soutien fervent du projet, que des opposants au projet de la région se sont retrouvés mardi 3 mars après midi.

Selon l’AFP, ils étaient une trentaine a avoir envahi les locaux de la Chambre d’Agriculture. La directrice, Maire-Lise Housseau, raconte : "Il y a eu une grosse bousculade. La police a mis tout le monde dehors à coups de lacrymogène". Selon Helios (pseudonyme), présent dans cette action et joint par Reporterre, "les choses avaient démarré calmement, avec un affichage de messages comme ’agriculture toxine’ ou ’que vont devenir les paysans’ sur des papiers".
Le ton monte, des agriculteurs s’invitent dans les discussions lançant des "Je vais t’écraser, t’es pas chez toi ici" à des personnes habitant pourtant sur les communes voisines. Quelques coups sont échangés, conduisant les gendarmes, observateurs jusqu’ici, à faire sortir tout le monde à coup de lacrymogènes. La suite, raconte Helios, c’est "l’arrivée de la Brigade anti criminalité, beaucoup plus énervée, qui nous menaçait ’Vas-y, donne nous une raison de te frapper, viens, viens’. Le directeur de cabinet du Préfet est enfin arrivé sur place pour clore l’accrochage, disant ’on ne peut pas être partout à la fois’ ".

Dans la foulée, à Toulouse, on s’organise à la hâte pour réagir au blocage continu de la zone. Issu de l’association Les amis des bouilles, un petit groupe décide d’organiser une marche "sur le modèle de celle de Nice à Notre Dame des Landes". La "Marche de la solidarité avec les zadistes assiégés" a pris le départ ce mercredi matin à 8 heures de la mairie de Toulouse.
Camille est optimiste : "Il ne faut pas se décourager. A Nice, ils ont commencé à quatre seulement après avoir décidé ça la veille pour le lendemain". Arrivée prévue cet après midi à Saint Sulpice La Pointe et Rabastens avant de converger vers la ZAD jeudi et à Albi vendredi.
Ce mercredi également, un rassemblement est prévu à Gaillac, pour organiser un soutien alimentaire "et même humanitaire" pour ravitailler la zone où "ils n’ont plus que des lentilles". Presque une blague, et pourtant ... Si l’action de porter des légumes et des médicaments est symbolique, c’est un problème réel de pénurie alimentaire que pourrait connaître la ZAD du Testet.
La stratégie de siège est assumée par le syndicat agricole. "Notre objectif c’est bien qu’ils partent de la zone et qu’ils ne reviennent plus", y dit-on. il n’est pas sûr que la stratégie de blocus généralisée par les agriculteurs et riverains n’engendre pas l’effet inverse et re-propulse la lutte de Sivens au cœur des attentions des mouvements militants de toute la région. En tout cas, elle n’empêche pas les premiers bourgeons de fleurir sur les lieux même du chantier.
Dernières manœuvres avant le vote du Conseil Général

Plus l’échéance du vote du Conseil général de ce vendredi se rapproche et plus la situation se précise. Dans une lettre datée du 27 février, Ségolène Royal, ministre de l’Ecologie, a annoncé que l’Etat s’engagera à indemniser le porteur du projet poru les coûts liés à l’arrêt du projet initial. « Je me suis engagée à ce que l’Etat vous accompagne pour solder financièrement les opérations déjà mises en œuvre au titre du projet initial et qui ne pourront pas être redéployées pour réaliser le nouveau projet », explique t elle.
La contrepartie : "L’abandon définitif et irrévocable des travaux et de tout recours indemnitaire contre l’Etat, en cas de l’annulation de [l’autorisation]. » Cette affirmation est directement liée à la menace d’une sanction européenne pour non respect de la loi sur l’eau ainsi qu’aux recours juridiques toujours pendants sur l’arrêté initial d’autorisation des travaux à Sivens.
De leur côté, les écologistes ont une nouvelle fois appelé "au calme" et réitèrent "leur opposition à tout projet destructeur de la zone naturelle du Testet".
Grégoire Souchay – Photos : Elie Parachini - Reporterre
Un témoignage-résumé de la journée
Le rassemblement à Gaillac est un beau succès : on est au moins 150-200 personnes, slogan : « des poireaux, pas des fachos ! ». Le dispositif policier est impressionant : toutes les issues sont surveillées par un cordon de GMs. Beacoup de médias. Quand on commence à s’organiser pour décoller, on se rend compte que l’on est bloqué : impossible de sortir. Les autorités ne veulent pas que le convoi parte et se posent en intermédiaire pour faire parvenir la nourriture à la ZAD. La tension monte vers 15h30 quand des appels venant de la ZAD font état d’un raid des pro-barrages : deux camions retournés, une cabane détruite,etc…des dégats matériels seulement, au niveau de la Pinède. On bouge sur la place d’une issue à l’autre pour tenter de forcer le passage. Les gendarmes sont un peu débordés et il y a aussi plein de civils (enfants, etc…) dans le tas donc au final ils se retrouvent à encercler une vingtaine de personne, les autres étant passées « du bon côté » du cordon.
Du coup, départ du convoi, très beau convoi avec une trentaine-quarantaine de véhicules pleins de gens motivés et de bouffe…il serpente sur les côteaux du gaillacois, direction Barat. Quand vous êtes perdus dans ces coins là, pour retrouver la bonne direction, c’est facile, levez les yeux et regardez où est l’hélico de la gendarmerie…c’est par là !!! On arrive par la route St Jérôme-Barat. A 100m de  Barat, on stoppe, le comité d’accueil n’a pas l’air super sympa et on est presque content de voir rappliquer la cavalerie (en l’occurrence une bonne quarantaine de GMs) qui forment un double cordon entre nous et la FNSEA. On les surprend tous à être aussi nombreux !
Le face à face commence, on veut passer pour apporter la nourriture. En queue de convoi, deux 4*4 blancs rutilants (la PAC, ça paie !) avec des gros bras masqués et armés (battes de base ball, barre de fer) débarquent. Là on est content d’avoir des motivé-e-s avec nous qui rappliquent aussitôt (bien plus vite que le petit groupe de GMs qui parcourt  les 300m depuis l’avant du convoi en 4 bonnes minutes). Cela discute vigoureusement et au final les gros bras de la FNSEA partent en panique, marche arrière à fond, portes ouvertes, avec un peu de tôle froissée…Puis les GMs prennent position en queue de convoi.
Ensuite 2 heures d’attente/négociation  pour le passage de la nourriture sous le soleil couchant. Un groupe se monte pour aller soutenir les marcheurs de Toulouse qui arrivent vers St Sulpice où la FNSEA barre la nationale notamment, avant d’apprendre qu’ils sont en sécurité. Finalement, on lève le camp et le convoi rentre sur Gaillac.
On n’est pas passé mais on est arrivé jusqu’à Barat et on se s’est pas laissé intimider !
19h00 : Fin de l’action à Barat. On essaie toujours de trouver un moyen d’acheminer la nourriture sur zone.
Les milices FNSEA ont bloqués les accès à St Sulpice empêchant les 8 marcheurs d’entrer en ville. Ils ont vraiment les jetons. Faut dire qu’il auront du mal à faire le poids sur le terrain de la cote de sympathie vu leur méthode de fachos.

Sivens : pour Le Foll, « 80 agriculteurs, ça mérite qu’on s’en occupe »

Le ministre a réaffirmé mercredi 4 mars sur France Info qu'il était « pour » le projet de retenue d'eau, qui permettra de stocker de l'eau en hiver quand elle est abondante, au profit, l'été, des cultures et de l'élevage dans la région concernée.
Le ministre de l'agriculture Stéphane Le Foll appelle à la « raison » à Sivens à deux jours de la décision du conseil général du Tarn. Le ministre a réaffirmé mercredi 4 mars sur France Info qu'il était « pour » le projet de retenue d'eau, qui permettra de stocker de l'eau en hiver quand elle est abondante, au profit, l'été, des cultures et de l'élevage dans la région concernée : « Le jour où on aura une sécheresse, même si on n'en a pas eu depuis longtemps, personne ne sera là pour les agriculteurs et on viendra voir le ministre pour lui demander d'acheter du foin » pour les élevages. Et il ajoute : « Il faut être raisonnable et comprendre les besoins. 80 agriculteurs, ça mérite qu'on s'en occupe. »

Jeudi 5 mars
  • Beaucoup d’intox dans les médias, notamment en provenance de la FNSEA, suivez le site pour des infos fiables et recoupées !
  • Les marcheurs partent de Rabastens ce matin : RV à partir de 8h30 devant la Mairie. Soyons encore plus nombreux qu’hier! Après 35 kms jusqu’à St Sulpice, les 6 marcheurs-ses ont été bloqué-e-s par  FNSEA et pro-barrages à 1 km du but. Plein de tracts distribués, énorme soutien le long du trajet. Gendarmes et médias les ont suivis à la trace.
  • Communiqué de gens du peuple suite aux violences commises par des milices fascistes après le rassemblement du 4 mars 2015 (conférence de presse le 5 mars à la préfecture d’Albi)
    Mercredi 4 mars, des sympathisant-e-s de la lutte contre le barrage de Sivens se sont réuni-e-s dans le calme à Gaillac pour organiser un convoi alimentaire destiné aux habitant-e-s de la ZAD du Testet assiégée à l’appel de la FDSEA et des JA du Tarn.
    Nous sollicitons votre présence pour vous alerter des évènements ayant suivi le non-départ du convoi. Aujourd’hui, dans le Tarn, des individus organisés en milices font la loi et sèment la terreur. Ils/Elles nous menacent de mort, nous pourchassent et nous frappent sous prétexte que nous ne sommes “pas d’ici”. Les forces de l’ordre sont impuissantes ou passives.
    L’heure est grave, combien de temps pour dénoncer cette escalade de la violence avant un nouveau drame? Condamnons toute forme de haine, qu’elle bafoue la liberté d’expression ou quelque liberté que ce soit. Rendez-vous à la préfecture d’Albi jeudi 5 mars pour une conférence de presse.

A Sivens, les milices de la FDSEA multiplient les agressions dans l’impunité


Un nouveau cap a été franchi ce mercredi dans la stratégie de la tension imposée par la FDSEA du Tarn. Alors qu’un convoi alimentaire tentait d’être acheminé depuis Gaillac pour alimenter la zone du Testet en vivres, les attaques des pro-barrages se sont multipliées. Récit d’une journée folle, devenue le quotidien à Sivens.
 Gaillac (Tarn), reportage
Il est près de 14 heures mercredi 4 mars quand nous parvenons sur la place de la Libération à Gaillac. Environ deux cent personnes sont là, rassemblées pour témoigner de leur soutien aux occupants de la zone du Testet et pour mettre en place un convoi alimentaire afin de ravitailler la cinquantaine d’occupants présents sur la Zad de Sivens. L’ambiance est bon enfant et calme. Le préfet du Tarn, Thierry Gentilhomme, est là et discute avec Jean-Claude, un militant anti barrage à qui il explique : « Je veux éviter la confrontation et ne faire prendre de risque à personne ». Une consigne qui n’a pas empêché de multiples agressions depuis plusieurs mois, avec une intensification depuis le début de la semaine et le blocage total de la zone par les agriculteurs pro barrage.
Le maire de Gaillac, Patrick Goisserand, regarde ce qui se passe. Il insiste sur la nécessité de « respecter la loi. Il faut qu’ils partent, agriculteurs comme zadistes, ensuite, je me ferai l’écho pour que tout le monde se mette autour de la table et qu’on reparte à zéro ». Intention louable mais à Sivens, rien n’est jamais si simple.
L’odyssée des poireaux de Gaillac
L’épisode du convoi de ravitaillement a été le fil conducteur de la journée. Ce qui devait être une simple transmission de légumes et de matériel de pharmacie aux zadistes a pris une tournure absurde jusqu’à devenir impossible.
Au départ, le préfet refuse l’entrée de tout véhicule sur la zone « pour éviter les contacts ». Les manifestants rassemblés sur la place centrale de Gaillac s’insurgent contre cette décision. Les voilà enfermés dehors, pendant une heure, entre divers cordons de policiers qui se déplacent dès que les manifestants bougent. Devant l’impuissance, une discussion s’improvise entre le préfet et Patrick, charpentier, repéré comme interlocuteur par un commandant de gendarmerie.
- Patrick -
Voilà donc Patrick parti pour « négocier », bien qu’il précise d’emblée qu’il n’a aucun mandat et qu’il se fait juste « la bouche et l’oreille » du collectif. Proposition du préfet : acheminer les vivres par un autre camion, neutre, de la municipalité ou par un camion de gendarmerie. Dehors, on discute, chante, crie des slogans, tente des percées, proteste contre les mouvements policiers.
Une information tombe : à Sivens, un « commando » d’agriculteurs a fait une incursion en traversant les bois et a créé du grabuge sur la ZAD : une camionnette retournée, la tente dédiée à l’espace radio ravagée, un chapiteau mis au sol, une ferme avec des animaux d’élevage dégradée et enfin, ultime provocation, l’arbre érigé au milieu de la zone déboisée le 24 octobre dernier a été coupé. Philippe Jougla, de la FDSEA du Tarn, confirme l’information auprès de l’AFP dans l’après midi.
- Agriculteur armé d’un bâton -
En réaction, à Gaillac, la majorité des personnes décide de partir en voiture vers les abords de la zone, en évitant les routes principales. J’entends plusieurs personnes sur la place indiquer discrètement au téléphone : « Ca y est, ils s’en vont vers la zone » sans savoir s’il s’agit de pro ou d’anti barrage.
Des milices organisées pour des agressions éclair
Arrivés à proximité de Barat, les manifestants sont bloqués par des CRS disposés pour maintenir à distance les opposants des agriculteurs bloqueurs. Ceux-ci sont une centaine à Barat, et une autre centaine à l’autre extrémité de la zone. Beaucoup sont armés de bâtons de bois, barres de fer, de manches de pioche ou de battes de base-ball. Je reste du côté zadiste, les agriculteurs s’en prenant souvent aux journalistes, comme cela m’est déjà arrivé.

Soudain, à cent mètres, au bout du cortège de voiture garées, trois 4x4 surviennent et leurs occupants commencent à s’en prendre à des véhicules et aux quelques manifestants venus de Gaillac et restés sur place. Zadistes et gendarmes accourent, les agresseurs sont déjà repartis, parfaitement organisés et rompu à ces exercice d’agression éclair. Puis, deux jeunes casqués traversent un champ sur une moto tout-terrain et s’approchent du groupe d’opposants en contournant le dispositif policier. D’un peu trop près, puisqu’un militant, fou de rage, saute littéralement sur la moto et frappe le conducteur qui est bien obligé de s’arrêter au milieu du champ. Alors seulement les gendarmes interviennent.
- Négociation avec un représentant du ministère -
Mais la question du convoi alimentaire n’est pas réglée. La discussion reprend avec un représentant du ministère de l’Intérieur. Patrick est de nouveau reparti pour entendre les propositions. Deux heures d’aller retour lui seront nécessaires pour aboutir à une proposition qui en surprend plus d’un : « Ce qui a été dit c’est que la FNSEA et les agriculteurs s’en vont si nous aussi on s’en va. Et le responsable de la gendarmerie s’engage à acheminer les vivres sur la zone, mais il faut que nous les amenions à Gaillac dans un camion prêté par la municipalité ». Patrick n’est pas décideur, beaucoup font la moue, et exigent que les agriculteurs partent les premiers, que des garanties soient prises. Quasiment personne ne fait confiance à la gendarmerie : « Ils nous ont déjà tellement trompés, ils sont complices des milices » soupire Camille (pseudonyme). Finalement, de mauvaise grâce et sous l’avancée des cordons policiers, le convoi des automobiles repart dans l’autre sens, signe de bonne volonté. En face, les agriculteurs, eux, ne bougent pas.
- Des pommes de terre pour les zadistes -
Quant aux vivres, au lieu de traverser le kilomètre restant vers les campements du Testet, ils font marche arrière eux aussi pour être transbordés dans une autre camionnette. Mais celle-ci reste ensuite clouée sur le parking de la gare de Gaillac. La raison ? Il semblerait que, craignant pour sa sécurité, le maire ait appel au Préfet qui a lui-même appelé le ministère. Les zadistes décident de récupérer la moitié de la marchandise et de « l’acheminer avec leurs propres moyens ».
La nuit tombée, la violence des pro barrage redouble d’intensité
Rien n’est encore fini. Revenant de l’intérieur de la zone, après avoir été menacée de mort par des pro-barrage, une confrère raconte l’incapacité totale des occupants à faire face à la situation.
A l’extérieur de la Zad, on peine aussi à faire face. En deux heures, après la tombée de la nuit, plusieurs agressions se produisent. Une jeune fille est interpellée par une patrouille d’agriculteurs en voiture et découvre en fuyant que ses agresseurs discutent paisiblement avec les gendarmes. Plus loin, un autre zadiste, tentant de venir voir le cortège depuis l’intérieur de la zone, est pris a partie et cogné par plus d’une vingtaine d’agriculteurs. Les gendarmes le sauvent d’agressions plus graves et l’évacuent de la zone. On apprend qu’à Saint-Jérome, hameau où le cortège avait fait une halte en quittant la zone, certains se font fait attaquer, deux voitures étant prises d’assaut. Un des occupants témoigne avoir reçu un coup de barre à mine dans le bras. Et la liste semble encore longue des faits et gestes incontrôlables des milices pro-barrage.
Au soir, beaucoup de militants ont le sentiment que les autorités pratiquent deux poids, deux mesures, entre un convoi alimentaire bloqué toute la journée et l’impunité pour les multiples agressions commises par les pro-barrages.
Une cinquantaine d’agriculteurs avait également mis en place un barrage à l’entrée de Saint Sulpice La Pointe, première étape pour les marcheurs partis de Toulouse à une vingtaine hier matin. « On a appris la menace, on a décidé de continuer quand même », raconte l’une des cinq marcheurs restants hier soir. Les marcheurs repartent ce jeudi matin dès 8 heures de la mairie de Rabastens en espérant arriver sur la zone dans la journée et à Albi vendredi.
LES JOURNALISTES MENACES
La parole des agriculteurs est absente de cet article. « Ils connaissent ton nom », « fais gaffe », « ils parlent de toi derrière, attention à toi ». Les conseils ont été nombreux et salutaires pour révéler le danger qu’il pouvait y avoir pour Reporterre à se rendre à proximité des zones contrôlées par les pro barrage pour les interroger. Un confrère journaliste s’est par ailleurs vu menacer de mort un peu plus tôt juste pour avoir voulu se rendre à l’intérieur de la ZAD.
Reporterre, qui donne la parole à tous les agriculteurs quelle que soit leur carte syndicale et mène un travail continu sur les questions agricoles et écologiques, proteste contre cette atteinte à la liberté d’expression et à notre travail de journaliste.
Grégoire Souchay - Reporterre

Sivens : à la veille du vote du conseil général, le débat tourne à l'irrationnel

Le conseil général du Tarn doit annoncer vendredi 6 mars sa décision de construire ou non un barrage sur le site controversé de Sivens. Mais la bataille est devenue tellement idéologique que les arguments se perdent dans l’irrationnel, en particulier sur le nombre d'agriculteurs concernés.
Quelle sortie de crise dans le Tarn autour du projet de barrage de Sivens ? Le conseil général doit annoncer vendredi 6 mars sa décision : créer un réservoir plus petit, 330 mètres en amont du site initial, ou installer des retenues collinaires en aval. Ce sont les deux options retenues par Ségolène Royal, à l’issue de la mission d’expertise commandée par son ministère (lire ici le rapport d’octobre 2014 de Nicolas Forray et Pierre Rathouis). La ministre a écrit aux élus départementaux fin février pour leur signifier que le projet initial de barrage devait être « définitivement abandonné » (voir sa lettre publiée par Le Tarn Libre) et qu’elle s’engage à indemniser le département des coûts occasionnés par les travaux (la zone humide du Testet a été déboisée en septembre dernier), en contrepartie de l’abandon « définitif et irrévocable des travaux ». Mais l’assemblée s’est réunie à huis clos lundi pour préparer le vote du 6 mars, sans qu’aucune position commune n’émerge, selon La Dépêche du Midi.
Manif de zadistes et de sympathisants devant le Palais de justice à Albi (février 2015) ©JL

Un certain nombre d’élus plaident pour la construction d’une version réduite du barrage, tandis que les opposants, dont le collectif pour la défense de la zone humide du Testet, soutenus par un ensemble d’associations, refusent catégoriquement cette option. Chacun des scénarios validés par le ministère est jugé inacceptable par les uns ou les autres. Dans ces conditions, que peut annoncer le conseil général vendredi ? À quinze jours du premier tour des élections départementales, qui risquent de faire basculer le département à droite, il ne dispose ni du temps ni de l’autorité politique pour s’engager sur les suites du projet. Il pourrait décider de ne pas décider dans l’immédiat.
C’est exactement ce que veut éviter la FDSEA, dont des militants, accompagnés de membres des Jeunes Agriculteurs, bloquent les accès de la ZAD, empêchant ses occupants d’entrer et sortir, depuis le début de la semaine pour mettre sous pression l’exécutif tarnais. L’occupation du site du barrage est dénoncée par la majorité des élus, locaux mais aussi nationaux – notamment  le député socialiste Jacques Valax – qui réclament au préfet, Thierry Gentilhomme, l’expulsion du site. Le représentant de l’État, déjà en place au moment de la mort de Rémi Fraisse, le jeune homme tué par les gendarmes en octobre, semble pris entre des injonctions contradictoires : d’un côté, celles du ministère de l’intérieur, qui veut mettre fin à la ZAD ; de l’autre, le ministère de l’écologie, qui veut en finir avec le projet de barrage.

Dans ce contexte extrêmement tendu, les arguments rationnels et les faits se perdent. Ainsi, le ministre de l’agriculture, Stéphane Le Foll,
a déclaré mercredi (sur France Info) qu’il était « pour » un barrage plus petit et qu’« il faut être raisonnable et comprendre les besoins. 90 agriculteurs dans une petite vallée, ça mérite qu'on s'en occupe. »

90 agriculteurs ? C’est beaucoup plus que le nombre de bénéficiaires comptabilisés par les experts missionnés par le ministère de l’écologie. Dans leur rapport d’octobre 2014, ils estiment à 30 le nombre de bénéficiaires se situant
« dans une optique de sécurisation/substitution » et à « environ 10 » le nombre d’éventuels nouveaux préleveurs (à lire ici p. 19). Selon les opposants, seules 19 personnes auraient besoin de l’équipement. Même la CACG, la société maître d’ouvrage du barrage, n’estime qu’à 80 le nombre
Selon un autre rapport d’experts du ministère, « Mission pour un projet de territoire du bassin du Tescou » (à lire ici, p. 80), le nombre de bénéficiaires du barrage peut même être revu à la baisse. En décembre 2014, ils ont invité à une réunion de travail 80 exploitations agricoles disposant de terres à proximité de la rivière Tescou, et donc susceptibles de demander un volume d’eau. Au moins 120 personnes sont venues, pas tous des agriculteurs. Les experts leur ont remis des questionnaires sur leurs besoins en eau, dont 33 ont été remplis sur place et remis. Les documents sont anonymes. Il en résulte que : seulement 16 personnes disent avoir pompé dans le volume d’eau qu’elles sont autorisées à prélever dans le Tescou. On est, encore une fois, loin des 90 agriculteurs décrits par Stéphane Le Foll.

Parmi les exploitants qui irriguent leur culture à partir de la seule rivière Tescou, seulement huit sont demandeurs de volume supplémentaire. Et quand on leur demande combien ils seraient prêts à payer pour cette eau, les réponses sont instructives : un ne veut rien payer, cinq
« le moins cher possible ». Une personne est d’accord pour payer 10 euros par hectare, deux autres pour payer entre 20 et 30 euros par hectare. Or, à titre d’exemple, les volumes d’eau issus du barrage tout proche de Thérondel sont payés 25 euros par hectare pour un volume de 2 000 m3 par hectare. Au total, le nombre d’agriculteurs se disant prêts à payer environ le prix de l’eau qui sortira du barrage de Sivens s’élève donc à onze. On peut imaginer qu’ils soient plus nombreux une fois l’équipement en place.
Mais en plein drame local, aucune solution durable ne pourra être trouvée sans prise en compte rigoureuse et de bonne foi par les décideurs de la réalité du dossier.
Jade LindgaardMédiapart

Alternatives au barrage de Sivens : elles existent, bien sûr !

Première mise en ligne le 24 novembre 2014.


L’étude des solutions alternatives a enfin officiellement commencée. En fait, les alternatives sont étudiées et proposées de longue date par les opposants. Ce qu’elles annoncent : une meilleure agriculture locale, adaptée au changement climatique et créatrice d’emploi.

Il n’y a jamais eu de « réelle analyse des solutions alternatives » au projet de barrage de Sivens. C’est ce qu’affirment les experts mandatés par Ségolène Royal dès l’introduction de leur rapport.
Un groupe de travail a donc commencé à plancher sur le sujet. Autour de la table, les représentants des opposants, des conseils généraux du Tarn et du Tarn-et-Garonne, et les Chambres d’agriculture des deux départements. Leur mission : remettre à plat le débat et aboutir à un compromis. Mais attention, le projet de barrage n’est « pas enterré », a averti Pierre-Alain Roche, l’un des deux experts qui préside les discussions.
Cinq solutions selon le rapport
Parmi les alternatives possibles, il y a d’abord celles évoquées dans le rapport remis à Ségolène Royal. En tout, ses deux auteurs envisagent cinq issues au problème :

 - l’arrêt total du projet, - le maintien en l’état du projet, - la réduction du volume du barrage, - le maintien en l’état du barrage, mais avec plus d’eau allouée au maintien du débit du Tescou, le remplacement du barrage par plusieurs petites retenues d’eau le long du Tescou. Le coût est « nettement plus faible », l’impact sur la rivière moindre, mais la gestion de l’eau serait plus complexe, précise le rapport.

Le président de la FDSEA (Fédération départementale des syndicats d’exploitants agricoles) du Tarn, Philippe Jougla, a déjà fait son choix. Hors de question d’abandonner le projet de barrage. Le quatrième scénario, qui propose de le conserver tel quel, mais avec une « ré-allocation » d’une partie des volumes d’eau vers la rivière est selon lui la solution de compromis. « Il permettrait d’améliorer la vie aquatique de la rivière, alors que la zone humide n’est pas le vrai problème », dit-il à Reporterre.
Pourtant, « si on concevait le projet aujourd’hui, la solution choisie serait plusieurs retenues d’eau plus modestes », admet-il. Mais il y quinze ans, elle ne faisait pas partie des techniques préconisées par les spécialistes.
Il se retranche derrière les experts pour affirmer que le maintien du barrage est la seule possibilité : « Le rapport considère que les travaux sont déjà engagés, et que juridiquement il est trop compliqué d’annuler le barrage. »
Pour le consultant spécialiste de l’eau, Marc Laimé, rien n’est en revanche impossible. « Toute la question est de savoir si un rapport de force peut s’installer pour remettre en cause le système d’utilisation de l’eau dans le Tarn ou le Gers : aujourd’hui, il repose sur l’utilisation de dizaines de retenues collinaires comme celle projetée à Sivens », dit ce pourfendeur des lobbies.

Prendre le problème par le bon bout
Mais si le nœud du problème n’était pas l’eau ? Pour France Nature Environnement, partir des besoins en eau des agriculteurs revient à prendre le problème par le mauvais bout.
« On ne veut pas partir de la problématique eau, expose Thierry de Noblens, président de France nature environnement Midi-Pyrénées. Sinon, on retombe dans le piège de ’’il faut une réserve d’eau.’’ On propose de partir des agriculteurs qui ont des problèmes. »
« Nos difficultés économiques sont liées à la conjoncture, pas seulement au manque d’eau », reconnaît Philippe Jougla. Même constat pour Pierre Lacoste, l’un des agriculteurs de la vallée du Tescou. Il est opposé au barrage et ose même le dire publiquement. « Dans la vallée du Tescou, on a les mêmes problèmes économiques que tous les agriculteurs en France. Les marchés des céréales et de la viande sont très fluctuants, les primes de la Politique agricole commune (PAC) nous empêchent de vendre nos produits à la vraie valeur. Mais nous ne sommes pas plus pauvres qu’ailleurs. »
Cependant, dans ce contexte difficile, l’accès à l’eau reste une sorte « d’assurance », maintient Philippe Jougla. « Quand il y a de l’eau sur mon exploitation, je peux faire des cultures à valeur ajoutée comme le soja, la luzerne ou la production de semences, explique-t-il. C’est ce qui me permet de trouver un successeur. »
La production « maïs semence », en particulier, pourrait se développer en aval de la vallée si le barrage est construit. Pierre Lacoste affirme que plusieurs de ses collègues « d’en-bas » lui ont fait part de leur souhait de s’y mettre. Une production « à très forte valeur ajoutée », mais qui demande un soin particulier et beaucoup d’eau aux étapes cruciales de croissance de la plante, explique l’agriculteur.
Le maïs semence sert à produire une variété de maïs hybride, récoltée pour ses graines. Celles-ci sont revendues à un semencier, qui les cède à son tour à des producteurs dits de maïs grain, utilisé pour la consommation humaine ou du bétail.
Mais ce choix agricole mène à une fuite en avant, juge Pierre Lacoste : « Avec le réchauffement climatique, les sécheresses vont être plus fréquentes. D’abord on fait Sivens, puis le barrage ne suffira plus. Est-ce qu’on va encore faire d’autres barrages ? »

Des « bassines » existent, mais elles sont sous-utilisées
Lui a décidé de se passer d’irrigation. Il produit de la viande : poulets, cochons et vaches. Tous gambadent dans ses quarante hectares de prairies, plutôt que d’être nourris de maïs ensilage. D’ailleurs, il semble que d’autres agriculteurs de la vallée aient déjà commencé à s’adapter.
« A une époque, les primes de la PAC étaient majorées quand on irriguait, raconte-t-il. Mais plus maintenant. Du coup, de nombreux agriculteurs de la vallée se sont tournés vers les cultures sèches type blé, orge, colza, tournesol. Car irriguer cela a un coût. »
Le rapport des experts confirme que les « bassines », ces petites retenues d’eau de substitution construites par les exploitations grâce aux primes PAC, sont aujourd’hui « largement sous-utilisé[es]. » La question, ici, n’est pas un problème de ressource, mais de gestion en commun. Pour l’instant, chaque agriculteur propriétaire de "bassine" utilise jalousement son eau, en pompant au maximum dans les ressources communes avant de recourir à sa propre réserve. Ce qui manque, c’est la méthode et le désir de gérer le bien commun dans un esprit de coopération.
Il n’est donc pas du tout certain que le barrage permettrait de sortir les agriculteurs locaux de leurs difficultés économiques. France nature environnement propose de saisir l’occasion pour faire de la vallée du Tescou « une zone test », où la relation des agriculteurs à leur territoire et leur rôle dans la protection de l’eau ne serait plus subis, mais choisis et valorisés. Son modèle ? La ville de Munich, en Allemagne.
Là-bas, dès 1998, le service municipal de l’eau encourage les agriculteurs se situant sur les zones de captage à se convertir en bio. Pour les convaincre, la ville s’engage à leur trouver des débouchés et introduit leurs produits au menu des crèches, des cantines, etc. Elle leur verse également une prime par hectare, pour service rendu à la protection de la qualité de l’eau. Au final, le programme coûte moins cher à la municipalité que le traitement de l’eau.

Sauver la polyculture
La première proposition du Collectif de défense de la zone humide du Testet est donc de mettre des produits locaux dans les cantines des écoles, des maisons de retraite et en particulier des collèges, gérés par le Conseil général promoteur du projet de barrage. Le prix d’achat des produits pourrait être garanti par des contrats de cinq à dix ans, pour permettre aux agriculteurs de pouvoir enfin « vivre de leur production », explique Sylvain Doublet, vice-président de FNE Midi-Pyrénées.
La priorité pour cet ingénieur agronome est de préserver la diversité des productions de la vallée, notamment en aidant les fermes en polyculture élevage, pour « aller contre le tendanciel, qui conduit à la perte des emplois agricoles et à l’abandon dans les fermes de l’élevage au profit des grandes cultures. »
Ensuite, « une fois qu’un partenariat de confiance sur plusieurs années sera mis en place, tout le monde sera prêt à modifier ses pratiques, assure-t-il. Les agriculteurs pourraient être accompagnés pour réduire les produits phytosanitaires et l’azote, et arrêter le maïs irrigué. »
Paysan bio, membre de l’agence de l’eau Adour-Garonne et opposant de longue date au barrage de Sivens, Benoît Biteau imagine déjà le nouveau paysage qui pourrait se dessiner. « Il faudrait planter le long du Tescou des arbres en alignement de façon à faire remonter l’eau vers la surface et satisfaire les besoins des cultures développées entre les arbres, quand l’eau est en pénurie », soutient-il.
Il faudrait surtout, selon lui, soutenir un modèle agricole basé sur des variétés de maïs, de tournesol, de blé, d’orge ou d’avoine qu’on appelle « variétés populations : elles permettent d’obtenir des rendements surprenants en culture sèches, justement parce qu’elles sont parfaitement adaptées à leur zone de production, qui n’ont rien à voir avec les variétés standardisées proposées par les firmes semencières ».
Marie Astier et Philippe Desfilhes – Reporterre

Sivens : l’expulsion des zadistes imminente
L’expulsion de zadistes qui occupent le site du barrage contesté de Sivens, dans le Tarn, est imminente, selon notre envoyée spéciale sur place. La police est d’ores et déjà entrée dans la zone occupée et discute avec les zadistes pour tenter de les convaincre d’évacuer la zone. Cette opération, qui ne devait pas intervenir selon nos informations avant lundi ou mardi, se fait en présence du sous-préfet de Castres, Jean-Yves Chiaro.
Environ 300 gendarmes mobiles ont été mobilisés, ainsi que deux buldozers. On dénombrait environ 400 agriculteurs et une quarantaine de zadistes.
Un débat doit se tenir vendredi au conseil général d’Albi sur des projets alternatifs à la retenue d’eau contestée.
Delphine de Mallevoüe - LeFigaro.fr
Interdiction du rassemblement albigeois ce vendredi
22h30:  « Le Collectif Tant qu’il y aura des Bouilles apprend que tout rassemblement est interdit demain par la Préfecture à Albi.
Il appelle ce soir à ne pas se rendre à Albi mais plutôt à organiser concrètement la solidarité envers les zadistes de Sivens, agressé-e-s et menacé-e-s par les milices pro-barrages/FNSEA depuis plusieurs jours, et dont l’expulsion semble imminente. »
  • Pas d’intrusions des miliciens sur la ZAD aujourd’hui
  • Un super reportage de l’agence des copains sur la journée d’hier : la fausse impuissance des nouveaux casques bleus
  • Solidarité avec le Testet :
    « Ce vendredi 6 mars, 18h30, devant la Préfecture de Vannes (Place du Général de Gaulle) : rassemblement pour dénoncer la brutalité des milices de la FDSEA du Tarn, la complaisance de la gendarmerie… et pour continuer à revendiquer l’arrêt du projet de barrage de Sivens, et non sa simple réduction, contre l’agro-industrie productiviste, pour soutenir les zadistes et autres opposants au barrage. Appel du groupe Lochu et d’individus. «  »Cette nuit un message clair a été laissé sur le parvis de la chambre d’agriculture de Rennes, abritant les locaux de la FDSEA et des J.A.(Jeunes Agriculteurs): DEGAGEZ DU TESTET Face aux violences de la FNSEA et des J.A. ces jours-ci au barrage de Sivens: -Encerclement de la ZAD empêchant le ravitaillement et les entrées et sorties de la zone. -Passage à tabac d’individus. -Destruction d’affaires personnelles et habitats. -Attaque de groupes d’occupantEs et de leurs véhicules. Nous nous devons de réagir, quelques soit nos gestes. Ils pillent la terre, ruinent les sols, engraissent des multinationales de l’agro et de la phyto industrie. Parce que nous ne voulons pas de ce monde ni ici ni ailleurs. RESISTANCE ET SABOTAGE »
  • Les marcheurs ont donné un rendez-vous Place de la Libération à Gaillac pour 16h30, en solidarité avec les copain-e-s qui sont en danger sur la ZAD. Là-bas, les milichiens sont devant la barricade, les GMs font barrage, empêchent toute confrontation, mais aussi toute discussion, comme il y a pu avoir hier par exemple. les marcheurs sont partis de Gaillac pour se reposer en lieu calme vers 19h. Un grand merci à eux !

  • Témoignage de Myriam vécu hier mercredi 4 mars
  • Communiqué du NPA, communiqué du Front de Gauche, d’EELV sur leurs sites respectifs. Rien du PS, rien de l’UMP, rien du FN.
  • Attention aux rumeurs : il n’y a pas « expulsion ». La milice voudrait expulser elle-même, continuer les exactions, mais aujourd’hui, les GMs se sont déployés autour pour faire mine d’empêcher quelque chose.
  • Cette nuit, une bagnole a cramé, hors ZAD.
APPEL à rassemblement massif dans le calme devant la Préfecture d’Albi PLACE DU VIGAN (le trottoir devant le CG est « réservé » par la FNSEA) à 14h ce jour pour conférence de presse – Communiqué de gens du peuple suite aux violences commises par des milices fascistes après le rassemblement du 4 mars 2015

  • Même les caméras de France 3 ont filmé le saccage de la ZAD par la milice, comme si elles étaient accréditées durant des opérations officielles des forces de l’ordre : voir le journal de France 3 ! Ça nous fait penser à ce dessin de Pierre Fournier (Charlie Hebdo n°64, 7 fév. 1972) :

  • Témoignage du 4 mars – milices en action sous le regard débonnaire des GMs
  • HOLLANDE UTILISE LA MÉTHODE SAMARAS SUR LA ZAD DU TESTET (Yannis Youlountas) qui décortique la méthode d’un gouverneur de générer le chaos violent avec des énervés d’extrême-droite pour pouvoir imposer par la force ses décisions.
  • Les marcheurs partent de Rabastens demain matin : RV à partir de 8h30 devant la Mairie. Soyons encore plus nombreux qu’aujourd’hui ! Après 35 kms jusqu’à St Sulpice, les 6 marcheurs-ses ont été bloqué-e-s par  FNSEA et pro-barrages à 1 km du but. Plein de tracts distribués, énorme soutien le long du trajet. Gendarmes et médias les ont suivis à la trace.

Les miliciens de la FNSEA ont des noms et des adresses

Barrage de Sivens. Des tags contre la FDSEA en Ille-et-Vilaine
Des inscriptions hostiles à la FDSEA ont été peintes sur la Maison de l’agriculture à Rennes, et dans le bourg de Chasné-sur-Illet, commune du directeur du syndicat.
Des tags sur le parvis et sur la façade de la Chambre de l’agriculture à Rennes, route de Vezin.
« Zad » ; « FDSEA et JA dégagez du Testet ». Des tags ont été peints, dans la nuit de mercredi à jeudi, sur la façade de la Maison de l’agriculture à Rennes.
La Zad du Testet bloquée
Ces slogans, hostiles au syndicat agricole, font référence à l’engagement des agriculteurs de la FDSEA qui, depuis plusieurs jours, bloquent l’accès à la Zad du Testet, dans le Tarn. Ils empêchent ainsi le ravitaillement des militants, opposés au barrage de Sivens, qui se sont installés sur le site.
D’autres tags ont été peints dans le bourg de Chasné-sur-Illet, au nord de Rennes. Les inscriptions visent directement le directeur de la FDSEA 35, nommé en fin d’année dernière et qui réside dans la commune.
« Inadmissible »
Loïc Guines, président de la FDSEA en Ille-et-Vilaine, réagit : « Notre directeur a été visé, dans sa commune, alors qu’il est arrivé il y a quatre mois. On nous insulte et on nous assimile au FN. C’est inadmissible. » Il ajoute : « Les zadistes, dont certains sont des énergumènes, ne respectent pas la République. »
Plusieurs plaintes ont été déposée pour dégradation et insultes.
Ouest-France.fr

Vendredi 6 mars

Armé d’une tronçonneuse, le milicien FNSEA hurle : « Ta gueule, salope »


Des pro-barrages venus de loin et ignorant le dossier. Des injures et des tronçonneuses. Des menaces envers les agriculteurs opposés au barrage. Des gendarmes bien polis avec les miliciens de la FNSEA. Récit de la journée du 5 mars. Bienvenue à Sivens.
 Lisle-sur-Tarn (Tarn), reportage
« Votre carte de presse ! » En ce jeudi après-midi, ce n’est pas auprès de gendarmes mobiles mais d’agriculteurs qu’il faut montrer patte blanche pour accéder à la ZAD du Testet. Postés à l’entrée de Barrat, décorée pour l’occasion de drapeau FNSEA, un petit groupe de pro-barrages filtre le passage. Le ton est péremptoire. Moi et mon confrère nous exécutons. « Il faudra penser à changer la couleur du véhicule parce qu’ici ça ne passe pas, ça fait ’baba-cool’ », nous avise-t-on avant de nous laisser filer. Pourquoi ce conseil ? La camionnette de mon collègue photographe a le malheur d’être verte. La route d’accès principale est encombrée de voitures de pro-barrages. Une soixantaine d’entre eux sont rassemblés à quelques mètres seulement des premières barricades de la ZAD, retenus par un cordon de gendarmes mobiles.
L’agriculteur est contre le barrage ? Il est menacé
Ce « spectacle », Pierre Lacoste l’observe tous les jours depuis chez lui où il est confiné. Au même titre que les zadistes, l’agriculteur-riverain qui s’est toujours prononcé contre la construction du barrage de Sivens est dans le collimateur des pro-barrages. Son fils de 14 ans a manqué plusieurs jours d’école cette semaine.
Impossible pour ses parents de passer au travers des barrages de la FNSEA : « Les gendarmes ont essayer de négocier avec eux mais ont fini par nous avouer qu’ils ne peuvent pas assurer notre sécurité ». Pierre Lacoste limite ses déplacements au maximum parce qu’il n’a pas l’esprit tranquille : « Ils tournent autour de la maison avec des pioches et en disant des grossièretés. Je ne veux pas prendre le risque qu’on crame mon exploitation agricole. Tout ce qui se passe depuis le début de la semaine c’est de la folie. Ils n’ont pas le droit d’être là et les zadistes n’ont jamais bloqué les accès comme eux le font ».
- Depuis la maison de M. et Mme Lacoste -

"On ne connait pas le dossier"
Dans le champ où sont rassemblés les pro-barrages, les regards sont suspicieux, voire haineux. Les Jeunes Agriculteurs de Haute-Garonne sont en première ligne. Ils balaient mes questions d’un revers de la main : « On ne connait pas assez bien le dossier, interrogez plutôt quelqu’un du coin, d’ailleurs on va bientôt s’en aller ».
Comme chaque jour, les FDSEA de toute la région Midi-Pyrénées viennent se relayer aux entrées de la ZAD. De l’autre côté, sur la départementale 999, ce sont les agriculteurs du Gers qui tiennent le siège. Un gendarme mobile regarde la scène d’un air amusé : « On fait le tampon ! » s’esclaffe-t-il devant la situation. Des estafettes montent la garde à deux pas des barricades érigées par les occupants il y a quelques mois pour empêcher les forces de l’ordre de passer.

Sur la ZAD, l’atmosphère est électrique. Deux tirs de pétards viennent de résonner de part et d’autre de la clairière. Accroché au talkie-walkie, Hector donne l’alerte : « Les pro-barrages savent qu’on écoute leurs fréquences, ils utilisent les pétards pour communiquer entre eux. Ces deux tirs, ça veut dire qu’ils sont planqués dans les bois et prêts à attaquer ».
Il quitte la barricade à pas pressés. Direction la Métairie, le seul bâtiment en dur occupé par les zadistes. « Ils vont entrer au milieu », lance-t-il à la volée. Baignée sous un soleil pâle de fin d’après-midi, la ZAD est déserte. Des voitures aux vitres brisées et un chapiteau démonté témoignent du saccage opéré la veille par les pro-barrages lors d’une incursion.
Seul au milieu de l’ex-zone de chantier, Guillaume fait le guet. Son talkie-walkie grésille. « A tous les indicatifs, à tous les indicatifs, les pro-barrages qui sont entrés dans les bois ont été repoussés des deux côtés par les gendarmes mobiles ». Incrédule, Guillaume regarde au loin dans les arbres : « Il y a toujours des petits groupes disséminés. Je ne sais pas ce qu’ils cherchent, s’ils voulaient nous faire du mal ils l’auraient fait depuis longtemps, ils sont trois fois plus nombreux que nous. Tout ça me semble téléguidé. Ça arrangerait bien les autorités de ne pas avoir à s’occuper de notre expulsion. Ils ne veulent pas d’un deuxième Rémi Fraisse. Ils ne veulent pas d’un deuxième martyr », dit-il couvert du bruit de l’hélicoptère qui survole la zone depuis le matin.
"Ta gueule, salope"
Une nouvelle alerte est donnée du côté de la départementale 999. Des zadistes traversent la ZAD au pas de course. Munis de bâtons et de barres de fer, deux-cents agriculteurs ont forcé le cordon des forces de l’ordre à l’entrée du chantier pour se rapprocher au plus près des zadistes. Pro-barrages et occupants se font face à cinquante mètre d’écart, séparés par quelques gendarmes mobiles et de maigres barricades. Ils se regardent en chiens de faïence sous les flashs des photographes.

Quelques noms d’oiseaux et des invectives fusent. « Ce n’est pas de notre faute, si vous avez des cancers à quarante ans à cause des OGM », lance une jeune zadiste. « Ta gueule salope », répond-on de l’autre côté. Une tronçonneuse rugit. Les agriculteurs ont pris l’initiative de dégager une barricade faite de troncs d’arbres pour laisser passer les camions des forces de l’ordre.
Après quarante-cinq minutes de face-à-face, les pro-barrages se font cordialement repousser mètre par mètre par les gendarmes. « Reculez messieurs s’il vous plaît ». On se pousse un peu, pour le jeu. « Reculez encore un chouïa, messieurs s’il vous plaît. » Collés les uns aux autres, agriculteurs et gendarmes rient aux éclats.
Des pro-barrages foncent vers les chapiteaux où les attendent des verres de Pastis. Les leaders de la FDSEA parlementent à voix basse avec les gendarmes. Un groupe d’irréductibles continue de narguer les zadistes de loin. « On reviendra, on reviendra ! » s’égosillent-ils en arborant des sweats siglés « Soutien aux gendarmes de Sivens ».
Michel, agriculteur arrivé en bus du Gers le matin même s’est approché de la ZAD « par défi et par curiosité aussi. Mais je suis déçu, on ne voit rien », soupire-t-il. Le cultivateur de céréales et de maïs syndiqué à la FNSEA s’est déplacé par solidarité dit-il avec ses confrères du Tarn. « Je ne comprends pas pourquoi les politiques n’expulsent pas les zadistes, ils sont illégaux ici. C’est aux agriculteurs de faire respecter la loi puisque l’Etat ne le fait pas. »
Un homme en costume fend la foule. Jacques Valax, député socialiste du Tarn et conseiller général est venu rassurer ses ouailles. En aparté avec un vieil homme, il parle de soutenir le projet de barrage à son « emplacement initial » lors de la réunion décisive au Conseil Général qui aura lieu ce vendredi matin. « Et vous demanderez aussi l’expulsion immédiate de la ZAD ! » vocifère l’agriculteur au visage rougi par la colère. « Parce que sinon nous, à 14h on dégage tout ! » Le vieil agriculteur n’est pas le seul à promettre une expulsion rapide. En marge d’une visite en Haute-Vienne ce jeudi, Manuel Valls le premier ministre a déclaré « qu’il faudra très vite évacuer les lieux ».
Zad is the end ? Les trois-cents gendarmes mobiles déployés autour du site et les forces de sécurité en jeep militaires arrivées à Gaillac dans la journée laissent en effet croire que la fin de la ZAD est proche.
Marine Vlhahovic - Reporterre

ACCUEIL A LA TRONCONNEUSE



 Lisle-sur-Tarn, reportage
Isabelle Rimbert arrive dans l’après-midi aux abords de la zone
Près de la maison de la forêt, le premier contact donne le ton : à peine la voiture arrêtée pour vérification de carte de presse, un homme muni d’une tronçonneuse s’approche et fait vrombir l’engin en signe de bienvenue. Ses collègues encerclent la voiture, ouvrent le coffre, s’emparent d’un casque et de lunettes de protection. Un autre crie à un policier : "Ici c’est une zone de non droit, on fait ce qu’on veut". Pas de réponse du représentant de "l’état de droit"...
On finit par passer. A quelques kilomètres, c’est le poste "Sierra 1". Environ 150 voitures sont stationnées des deux cotés de la D999 qui croise l’entrée sud de la zad. Le petit chemin bucolique desservant la forêt ressemble à un parking de gendarmerie. Entre un champ détrempé et les arbres, 100 à 150 pro-barrages armés de bâtons et de barres de fer scrutent la barricade tenue par une quinzaine d’opposants. Une forte détermination émane des deux camps, séparés par un groupe de gendarmes.
"De ce côté, c’est plutôt tranquille, ironise Mimi, une zadiste de 20 ans, qui se chauffe au soleil près d’une tente de fortune. On est là depuis une semaine, on se relaie tous les jours". En face la milice pro-barrage trépigne et s’impatiente  : "Vermines, pelluts !" hurlent-ils. "Fachos, alcooliques", répondent les zadistes.
Impossible, sur le chemin, d’éviter les agriculteurs : l’un d’eux tente de me bloquer. "Prends son appareil photo", éructe son collègue. S’ensuit une bousculade où la casse est évitée de justesse, sous le regard éteint des gendarmes qui ne bougent pas d’un pouce. Bienvenue à Sivens.
Isabelle Rimbert- Reporterre
  • D’importantes forces de police arrivent d’Albi, présageant l’expulsion de la zone mais rien n’est sûr encore. On attend des nouvelles du CG.
  • Rendez-vous 9h30 place du griffoul à Gaillac pour se retrouver et aller autour de la zone pour récupérer les copains de la ZAD. L’Expulsion de la Zad a déjà commencé. Mais visiblement, on attend tous la décision du CG : il abandonne le projet de barrage ou pas ?
  • La maison des Druides a été expulsée « en douceur ».
10:07 Info Bouilles Orange : L’expulsion de la maison des druides a commencé : les gendarmes laissent le temps aux gens de préparer calmement leurs affaires pour partir dès que le CG se sera prononcé. A priori, ce sera une expulsion générale mais cela n’a pas encore commencé ailleurs. Manif interdite aujourd’hui à Albi, rassemblement actuellement à Gaillac pour décider de la suite. Beaucoup, beaucoup de GM à Barat, une des routes d’accès à la ZAD. Voilà pour le moment.
11h05 source sur place : PAS d’expulsion effectué à ce moment ! Tout a l’air en attente des décisions du CG.
Le CG 81 a décidé ce matin d’abandonner le projet de barrage de Sivens qui lui avait été demandé par la CACG, étudié par la CACG, réalisé par la CACG. On pense à tous les efforts de tous ces gens qui ont créé la résistance à ce projet, et bien sûr à celui à qui il ont tout pris, Rémi. Ils lui ont pris tout ce qu’il avait, tout ce qu’il aurait pu jamais avoir.
11h45 : vu l’abandon du projet, enfin reconnu comme ne satisfaisant pas l’intérêt général, les habitants de la vallée ont posé comme condition pour sortir volontairement du site, que 1) tous les inculpés de Sivens soient amnistiés,
2) que tous les dégâts matériel fait par les gendarmes et les pro-barrages soient remboursés.
12h01 : Le préfet donne l’ordre d’évacuer le site
14h00 : Des gens sur le toit de la Métairie, une armée de robocop pousse les gens à pied depuis Barat vers le bas de la vallée. Idem semble-t-il depuis le fort. Du coup, on espère que les pro-barrages ont déguerpi de la D999.
A tous les médias : arrêtez avec votre utilisation du futur « il y aura un barrage plus petit » ; dans ce pays, il y a des règles, des enquêtes publiques, et tant que l’enquête publique ne s’est pas déroulée, on est prudent, on utilise le conditionnel.

APPEL A RASSEMBLEMENT SPONTANÉ A GAILLAC !

12h00 :Suite à la décision du Conseil général du maintien d’un projet de retenue sur la ZAD du Testet et de l’expulsion immédiate de tous les occupants, et suite à l’interdiction de se rassembler en protestation à Albi comme aux alentours de la ZAD,
L’AG du rassemblement en cours à Gaillac appelle toutes les personnes choquées par cette décision à nous rejoindre Place de la Libération à Gaillac, dès maintenant et quelle que soit l’heure.
Pique-nique spontané sur place, nouvelle AG à 14h, initiatives diverses, n’hésitez pas à amener vos instruments de musiques pour danser et chanter la vie contre le pouvoir mortifère qui nous gouverne, sous un magnifique soleil aujourd’hui.
Si le rassemblement est contraint de se déplacer, il continuera obstinément sur d’autres places de la ville.
Venez nombreux quelle que soit l’heure et faites circuler partout cet appel.
TOU-TE-S A GAILLAC AUJOURD’HUI !!!
Agriculteur, il préserve l’eau…. Et perd ses subventions ! (Association Action Citoyenne Environnementale (ACE) Hendaye)
 Pour pouvoir juger exactement de ce qui a été voté par le CG ce matin, nous attendons le texte exact qui a été approuvé à 43 voix sur 46 : on dirait des scores soviétiques, on se demande où est le bolchevik vraiment…
[Expression libre] La peur du rouge (voir Qui est le zadiste ?), ce bolchevik qui va prendre le pouvoir et faire faire fabriquer des millions de chaussures identiques pour toute la population est plus forte que tout en France, et chez nos « amis » pro-barrages, elle fait des ravages ! Ils se vautrent dans une chasse aux sorcières digne de celle qu’ont pratiqué les faucons néo-libéraux pendant la guerre froide. Il leur faut un ennemi en chair et en os, cela leur évite d’avoir à penser leur condition d’assistés aux aides de la PAC, voulant faire des légumes productivistes là où il n’y a pas d’eau et demandant qu’on leur paye un barrage pour cela. Bon, on verra plus tard pour la suite des commentaires sur leurs croyances. Mais qui est donc ce théoricien du bolchevisme sauce Testet qui se cache derrière les initiales TS ? Manque de bol, la peur du rouge, comme la peur de la chemise brune ont toutes les chances de se répandre comme des virus sans vaccin… Enfin, c’est vrai quand même qu’il y a des gens qui n’ont toujours pas compris ce qu’a donné la croyance en Staline… Si on pouvait seulement discuter sur ces croyances, ça irait peut-être mieux…

Sivens : le conseil général opte pour un barrage plus petit
Le conseil général du Tarn a annoncé ce vendredi sa décision de construire un barrage, de taille réduite, sur le site controversé de Sivens. L'expulsion de la Zad par les gendarmes semble avoir commencé.
Les élus du Conseil général du Tarn ont pris leur décision. Par 43 voix sur 46, les élus du département ont voté une résolution, proposée par le président socialiste du conseil général, Thierry Carcenac, qui propose de procéder à la construction d'une « retenue d'eau redimensionnée » sur la zone du projet initial. Le Conseil général opte de fait pour la solution la plus proche de la décision initiale, alors que deux solutions étaient sur la table. À l’issue de la mission d’expertise commandée par son ministère (lire ici le rapport d’octobre 2014 de Nicolas Forray et Pierre Rathouis), la ministe de l'écologie Ségolène Royal avait en effet annoncé qu'il pourrait y avoir un barrage plus petit sur la même zone, ou bien l'installation de retenues collinaires en aval. La ministre a écrit aux élus départementaux fin février pour leur signifier que le projet initial de barrage devait être « définitivement abandonné » (voir sa lettre publiée par Le Tarn Libreet qu’elle s’engage à indemniser le département des coûts occasionnés par les travaux (la zone humide du Testet a été déboisée en septembre dernier), en contrepartie de l’abandon « définitif et irrévocable des travaux ».
Dans leur décision, les élus du Tarn se sont également prononcé pour l'évacuation sans tarder de la Zad, la zone à défendre tenue par les opposants au barrage. Le ministère de l'intérieur aurait, selon le quotidien Le Monde, donner l'ordre d'évacuer la zone. Les gendarmes étaient déjà présents sur place dans la matinée, un le survol d'un drône était même signalé et des opérations ont déjà commencé.
Jointe par Mediapart, la Legal Team de la Zad nous avait indiqué qu'une évacuation volontaire des lieux était exclue en l'état, même si certaines personnes pouvaient le décider individuellement. Une manifestation qui devait se tenir à Albi a été interdite.

Un certain nombre d’élus plaidaient pour la construction d’une version réduite du barrage, tandis que les opposants, dont
le collectif pour la défense de la zone humide du Testet, soutenus par un ensemble d’associations, refusaient catégoriquement cette option. Chacun des scénarios validés par le ministère était jugé inacceptable par les uns ou les autres.
À quinze jours du premier tour des élections départementales, qui risquent de faire basculer le département à droite, le Conseil général ne dispose de fait ni du temps ni de l’autorité politique pour s’engager sur les suites du projet.
Du côté de la FDSEA, dont des militants, accompagnés de membres des Jeunes Agriculteurs, bloquent les accès de la ZAD, empêchant ses occupants d’entrer et sortir, depuis le début de la semaine pour mettre sous pression l’exécutif tarnais, tout scénario renonçant au projet était impossible. L’occupation du site du barrage est dénoncée par la majorité des élus, locaux mais aussi nationaux – notamment  le député socialiste Jacques Valax – qui réclament au préfet, Thierry Gentilhomme, l’expulsion du site. Le représentant de l’État, déjà en place au moment de la mort de Rémi Fraisse, le jeune homme tué par les gendarmes en octobre, semble pris entre des injonctions contradictoires : d’un côté, celles du ministère de l’intérieur, qui veut mettre fin à la ZAD ; de l’autre, le ministère de l’écologie, qui veut en finir avec le projet de barrage.

Dans ce contexte extrêmement tendu, les arguments rationnels et les faits se perdent. Ainsi, le ministre de l’agriculture, Stéphane Le Foll,
avait déclaré mercredi (sur France Info) qu’il était « pour » un barrage plus petit et qu’« il faut être raisonnable et comprendre les besoins. 90 agriculteurs dans une petite vallée, ça mérite qu'on s'en occupe. »

90 agriculteurs ? C’est beaucoup plus que le nombre de bénéficiaires comptabilisés par les experts missionnés par le ministère de l’écologie. Dans leur rapport d’octobre 2014, ils estiment à 30 le nombre de bénéficiaires se situant
« dans une optique de sécurisation/substitution » et à « environ 10 » le nombre d’éventuels nouveaux préleveurs (à lire ici p. 19). Selon les opposants, seules 19 personnes auraient besoin de l’équipement. Même la CACG, la société maître d’ouvrage du barrage, n’estime qu’à 80 le nombre d’exploitants souhaitant utiliser le barrage.
Selon un autre rapport d’experts du ministère, « Mission pour un projet de territoire du bassin du Tescou » (à lire ici, p. 80), le nombre de bénéficiaires du barrage peut même être revu à la baisse. En décembre 2014, ils ont invité à une réunion de travail 80 exploitations agricoles disposant de terres à proximité de la rivière Tescou, et donc susceptibles de demander un volume d’eau. Au moins 120 personnes sont venues, pas tous des agriculteurs. Les experts leur ont remis des questionnaires sur leurs besoins en eau, dont 33 ont été remplis sur place et remis. Les documents sont anonymes. Il en résulte que : seulement 16 personnes disent avoir pompé dans le volume d’eau qu’elles sont autorisées à prélever dans le Tescou. On est, encore une fois, loin des 90 agriculteurs décrits par Stéphane Le Foll.

Parmi les exploitants qui irriguent leur culture à partir de la seule rivière Tescou, seulement huit sont demandeurs de volume supplémentaire. Et quand on leur demande combien ils seraient prêts à payer pour cette eau, les réponses sont instructives : un ne veut rien payer, cinq
« le moins cher possible ». Une personne est d’accord pour payer 10 euros par hectare, deux autres pour payer entre 20 et 30 euros par hectare. Or, à titre d’exemple, les volumes d’eau issus du barrage tout proche de Thérondel sont payés 25 euros par hectare pour un volume de 2 000 m3 par hectare. Au total, le nombre d’agriculteurs se disant prêts à payer environ le prix de l’eau qui sortira du barrage de Sivens s’élève donc à onze. On peut imaginer qu’ils soient plus nombreux une fois l’équipement en place.
Mais en plein drame local, aucune solution durable ne pourra être trouvée sans prise en compte rigoureuse et de bonne foi par les décideurs de la réalité du dossier.
Jade LindgaardMédiapart

Le POINT des RASSEMBLEMENTS qu’on nous communique
Ce vendredi 6 mars,
  • A Gaillac : Place de la Libération à toute heure. AG à 14 h.
  • A Toulouse: Rassemblement 16h30 pétante à Compans
  • A Vannes, à 18h30, devant la Préfecture (Place du Général de Gaulle) :  rassemblement pour dénoncer la brutalité des milices de la FDSEA du Tarn, la complaisance de la gendarmerie… et pour continuer à revendiquer  l’arrêt du projet de barrage de Sivens, et non sa simple réduction, contre l’agro-industrie productiviste, pour soutenir les zadistes et autres opposants au barrage
  • A Paris, à 18h30, Rassemblement festif de soutiens à la ZAD du Testet, Vendredi 06/03, au métro Belleville (a changé suite à une coordination de plusieurs appels)
  • A Lille: Lille 19h à république http://lille.demosphere.eu/rv/2944
  • A Perpignan 18h devant la Chambre d’Agriculture ce soir vendredi
  • À Langon, 18h devant la sous-préfecture
Mardi 10 mars Nîmes 10h devant la FDSEA du Gard, Maison de l’agriculture 1120 route de Saint Gilles Opresco
Juste après la décision du Conseil Général, expulsion de toute la ZAD en
cours
A la métairie les gardes mobiles brûlent tout
Les copains ne peuvent pas sortir avec leur véhicule, (camion chargé de leurs
effets personnels)
Les violences policières perdurent sous le commandement de Manuel Valls
Vers 14h, une ambulance est rentrée sur le site
Impossible pour  la population environnante qui les soutient de rentrer sur
le site
Pas de journaliste et donc pas de témoin
C’est le chaos démocratique piloté par la FNSEA avec l’aval des élus à tous
les niveaux
Besoin urgent d’une presse libre pour endiguer la montée du fascisme
Les opposants  au projet de Sivens

Sivens : les dernières heures de la ZAD

Ce 6 mars 2015, exactement 120 jours après la mort de Remi Fraisse, les derniers occupants de la Zad de Sivens ont été évacués par les forces de l'ordre. Ils s'étaient installés là durant l'été 2014, pour protéger la zone humide du Testet menacée par le projet de construction d'un barrage. Ils avaient reçu, lors du week-end des 25 et 26 octobre, le soutien de plusieurs milliers de personnes – parmi lesquelles José Bové, Pascal Durand et Jean-Luc Mélenchon. Ce 6 mars, le conseil général du Tarn a voté, par 43 voix sur 46, la construction d'un barrage, de taille réduite (lire ici).

Vendredi 6 mars, en début d'après-midi. Regroupés en chaine humaine autour du lieu où Remi Fraisse est mort en octobre dernier, tué par un gendarmes, les derniers occupants de la “zone à défendre” (la ZAD) sont encerclés par les gendarmes mobiles et patientent dans une ambiance calme.

Quelques heures auparavant, ce vendredi 6 mars au matin, le sourire de certains agriculteurs opposés à la présence des Zadistes sur le site de Sivens annonçait la future évacuation de la zone.

Dans sa cabane, un opposant au barrage profite de ses derniers instants sur la ZAD.




Les opposants observent l'arrivée des forces de l'ordre. Plus de 300 gendarmes mobiles et unités spéciales ont été deploye sur le site « occupé ce matin par une quarantaine d’opposants au projet » précisait un communiqué du ministre de l'intérieur, Bernard Cazeneuve.



Vers 13h, ils ne restent qu'une vingtaine d'habitants de la ZAD, regroupés autour du lieu où Remi Fraisse est mort en octobre dernier.



Certains opposants décident de quitter les lieux avec quelques affaires.

Les gendarmes procèdent aux évacuations, les opposants ont refusé toute violence mais la douleur de se faire expulser est très forte.



En fin de journée, précise un communiqué du ministère de l'intérieur, « 21 individus ont été interpellés, pour des faits de violence ou pour attroupement interdit après sommation ».

Les quatres derniers opposants étaient refugiés sur une tour de plus de six mètres de haut.
Certains descendent par leur propre moyen de peur d'un accident.

Les gendarmes ont saisi du matériel des habitants de la ZAD. L'expulsion des occupants s'est déroulée sans affrontement avec les forces de l'ordre.

Photographe : Romain Etienne / Item - Médiapart

Sujet : [testet46] José Bové: "(...) ces élus en fin de mandat ont voté une délibération incohérente, bâclée, illégale et finalement inexécutable..."
Sivens : le 6 mars 2015, le Département du Tarn a enfanté un monstre juridique.

Ce département met aussi tout en œuvre pour que les conséquences financières de ses erreurs et de son profond dysfonctionnement soient assumées par l’Etat, le tout par une sorte de fuite en avant à quelques jours des élections
Alors que le projet de barrage fait l’objet d’une procédure d’infraction qui a toutes les chances (ou tous les risques) de conduire à la condamnation de la France, le Conseil Général persiste dans l’erreur :
Il maintient le choix de l’essentiel du projet (localisation, utilisations de l’eau, maître d’œuvre, constructeurs, gestionnaires, etc.) qui a fait l’objet de la DUP en passe d’être sanctionnée par l’UE et bientôt par les Tribunaux
Il soutient pouvoir continuer sur la base de cette DUP
Il annonce vouloir négocier « un protocole transactionnel avec l’Etat »

Or, une DUP est un acte pris par l’Etat qui ne peut faire l’objet d’aucune transaction et d’aucune négociation ; soit une DUP est exécutée, soit elle ne l’est pas, et ce uniquement en considération de sa teneur c’est-à-dire de l’ensemble des éléments du projet qui a été autorisé. Il ne peut être retranché ou ajouté de nouveaux éléments

Elle ne peut pas légalement faire l’objet de modifications, d’arrangements ou de transaction selon le bon vouloir de son bénéficiaire. S’il en était autrement cela reviendrait à ne tenir aucun compte de la procédure d’élaboration de la DUP, des enquêtes publiques, du contrôle des services de l’Etat ; cela constituerait finalement une atteinte à l’Etat de Droit.

Bien plus, le Conseil Général a donné un mandat à son exécutif pour négocier un tel « protocole » sans indiquer sur quoi il porterait, dans quels buts et dans quels délais.
Or, dans quelques semaines cet exécutif aura changé, quels que soient les résultats des élections, et ne pourra pas mettre en œuvre une directive aussi incomplète et aussi imprécise.

De plus, il est sidérant de constater que le Conseil Général du Tarn tente de tirer un profit financier d’une situation totalement illégale de laquelle il persiste à ne pas vouloir sortir, et ce d’autant plus qu’il est interdit à l’Etat de transiger sur la légalité et notamment sur le pouvoir de police qu’il exerce au titre de l’environnement.
Autrement dit, il ne peut y avoir de dérogation à l’application de la Loi.

En définitive, ces élus en fin de mandat ont voté une délibération incohérente, bâclée, illégale et finalement inexécutable, qui tente de surcroît d’entraîner par le fond l’Etat qui aurait à payer les conséquences de leur impéritie.

Communiqué de l’assemblée populaire de la place de la Libération à Gaillac – 6 mars 2015 – 20h

Aujourd’hui vendredi 6 mars 2015, sous pression du syndicat agricole majoritaire et de milices fascisantes, le CG du Tarn a demandé l’expulsion immédiate de la ZAD du Testet et a choisi la pire solution : un barrage sur le même site. En solidarité avec les occupants assiégés, harcelés, violemment agressés toute la semaine et finalement expulsés, contre la collusion des pouvoirs politiques et des milices fascisantes, nous occupons dès maintenant la place de la Libération à Gaillac. Contre le barrage et le monde qui va avec, venez nous rejoindre. Pour celles et ceux qui ne le peuvent pas, nous maintenons notre appel à actions ciblées là où elles/ils vivent : préfectures, FNSEA, PS, etc.
L’assemblée populaire de la place de la Libération, qui se réunira de nouveau samedi 7 mars à 14h (Gaillac).

Samedi 7 mars

Sivens : la Zad est expulsée, l’histoire n’est pas finie


La Zad du Testet a été évacuée vendredi 6 mars. Près de cinq cents gendarmes, deux hélicoptères et un drone ont été déployés pour expulser une quarantaine de zadistes. Reportage photo et video.
 Lisle-sur-Tarn (Tarn), reportage
Le jour se lève sur la zad du Testet, vendredi 6 mars 2015. Barat, l’entrée est de la zone, est bloquée par une quinzaine de fourgons de gendarmerie. Sur place, les occupants sont déjà sur le pont. Tous savent que l’expulsion n’est plus qu’une question d’heures. Deux camions ont été autorisés à entrer sur zone pour mettre en sécurité une partie des animaux. Poules, brebis, cochons, chèvres, bouc : l’ arche de Noé prend le large. A la Maison des druides, dans la forêt, une dizaine de personnes discutent de la situation : ce lieu fait partie des parcelles non expulsables pour l’instant. Pourtant, « à sept heures ce matin, les flics sont passés et nous ont demandé de partir ».

En contrebas, ça s’active : on range et met à l’abri des affaires personnelles et du matériel dans les véhicules stationnés sur la route traversante. A partir de 10 h, l’helicoptère de gendarmerie tournoie au dessus de la zad. Au sol, les talkies walkies sont en surchauffe. Le compte à rebours a commencé. Moins de deux heures plus tard, l’évacuation commence par la Maison des druides : les gendarmes montent cueillir les quatre personnes encore présentes.

De part et d’autre de la route qui traverse la zad, il reste deux pôles de résistance, séparés l’un de l’autre d’environ un kilomètre et demi. D’un côté, le lieu ou est mort Rémi Fraisse, de l’autre, la Métairie. Vers 12h30, peu après le déploiement massif de policiers autour de la Métairie, une épaisse fumée noire s’échappe d’une cabane en feu. On ne saura pas qui, des policiers ou des zadistes, est à l’origine de l’incendie. Alors que le feu crépite, les interpellations commencent.

Trois opposants se postent sur le toit de la Métairie avant d’être délogés, comme le reste des occupants présents à cet endroit.

- A la Métairie -
Au bout de la route, le dernier pôle de résistance donne lieu à un dispositif policier démesuré. Toute la zone est quadrillée par des centaines de gendarmes qui encerclent une trentaine de zadistes.
Trois personnes sont installées en haut du Mirador, une plate forme emblématique qui surplombe le lieu de l’assassinat de Rémi Fraisse. A l’endroit où le jeune homme est tombé, se trouve un mémorial réalisé en son souvenir. C’est précisément là que se sont réunis la trentaine d’opposants restant. Ils sont assis, très calmes, serrés les uns contre les autres, et chantent alors qu’autour d’eux la nasse se resserre inexorablement. « Rémi, Rémi, on t’oublie pas ».
Il est environ 14 h : les deux hélicoptères qui balaient la zone sont rejoints par un drone qui tournoie comme une guêpe. Si aucune grenade n’est lancée, les interpellations n’en sont pas moins musclées : sur chaque zadiste fondent cinq ou six gendarmes. Les jeunes sont molestés, écrasés au sol, trainés. Une fille hurle alors que les gendarmes l’ont à moitié déshabillée en essayant de la maitriser.
 Voir la vidéo : Expulsion ZAD Sivens (06/03/2015) from Reporterre on Vimeo.
Des agents photographient leurs cibles, et le sous-préfet, très élégant dans son gilet pare-balle crème, contemple la scène avec une apparente satisfaction.
La disproportion des forces en présence confine à l’absurde. Les interpellés sont ensuite répartis entre les futurs gardés à vus et ceux qui seront relâchés un peu plus tard.
Il est 14 h 40. Il ne reste plus que les personnes au sommet de la plate forme dite Mirador. Les gendarmes tentent de les amadouer, mais c’est peine perdue. Les opposants profitent de la tribune qui leur est offerte : « Réimplantation de la zad du Testet dès que possible ! » Des chants de résistance alternent avec des invectives et des diatribes politiques : « On ne peut pas se battre contre le peuple au profit du capital. Les crises économiques, la désignation de l’ennemi intérieur, tout ça est trop gros. Il faut arrêter la machine pendant qu’il est encore temps ».
 Voir la vidéo de la prise de la plate-forme : Évacuation des derniers Zadistes from Reporterre on Vimeo.
Les policiers menacent d’envoyer un tir « non létal » si les occupants ne descendent pas de leur perchoir. Au bout de vingt minutes, un policier grimpeur escalade les dix mètres de la tour, alors que les derniers zadistes finissent par redescendre.
Il est 15h30, l’opération est terminée. Les interpellés sont emmenés aux abords de la Maison de la forêt, toujours sous très grosse escorte. Si une bonne partie est relâchée, certains sont placés en garde à vue.

En bas, les gendarmes s’apprêtent à commencer la destruction des cabanes. La zad ouverte début 2014 est maintenant déserte et silencieuse. Le mémorial érigé à la mémoire de Rémi Fraisse a été mis en pièce. Un tractopelle arrive sur zone pour évacuer ce qu’il reste des mois de vie sur place.
Pourtant, la zone humide a repris ses droits depuis le défrichage : de jeunes pousses étirent leurs minuscules feuilles vert tendre en direction du soleil.

Isabelle Rimbert et Gaspard Glanz – Reporterre
Les  rassemblements qui nous sont communiqués :
  • A Bordeaux : rassemblement 14h place Saint Projet (croisement rue ste Catherine et rue de l’Utopia) en solidarité avec la Zad du Testet.
  • A Paris : samedi 7 mars à 15h au métro Belleville : La FNSEA expulse la ZAD de Sivens, expulsons la FNSEA !
  • à Angers:  soutien au
  • à Caen : Appel à rassemblement samedi 7, à 14h Place Bouchard
 à Tours :  Le collectif NDDL Loches appelle à un rassemblement cet après midi à 15 heures place Jean Jaurès, en soutien au Testet.
  • à Marseille : 18h au kiosque de la Canebière. Occupation.
Ce matin, l’expulsion a continué : les derniers véhicules et animaux sont sortis de la ZAD. Une GO-PRO, caméra portable a été confisquée par les GMs, et rendue à son propriétaire avec la carte vide. Les expulsés en arrivant à Gaillac se sont garés sur un parking. Des GMs ont déboulé en leur disant que « l’accès à Gaillac est interdit aux zadistes – arrêté préfectoral ». Ce qui ressemble fort à la loi du 4 octobre 1940 prise par le gouvernement de Vichy. Question piège : c’est quoi un « zadiste » ? Même topo sur le parking du Leclerc où ils allaient pour faire des courses, d’un camion militaire au haut-parleur : « le camion rouge : sortez de Gaillac ! ».
12h15  : trente personnes sur la place de la Libération qui ont dormi là. Maintenant, de la flicaille qui fait semblant de négocier et qui s’apprête à produire de la violence et effectuer des arrestations, tandis que les assistés et les casseurs de la FNSEA et des fachos se dorent la pilule aux autels des curés de la technoscience. Assis par terre, les bras dans les bras, il faudra du muscle aux hormones pour bouger les copainEs. Appel à automédia et renforts !
12h45  : suite à l’évacuation de la place, RV est donné à l’ancien camp de concentration pour femmes de Brens (depuis Gaillac, c’est de l’autre côté du Tarn, en passant le pont St Michel)
13h20 : Les résistants qui ont dormi place de la Libération ont été expulsés un par un sous les yeux de nombreuses caméras. Présents à l’expulsion : le maire de Gaillac, Préfet et sous-préfet. Un arrêté leur interdit tout rassemblement sur Gaillac. Le collectif a du partir en direction de Brens.
13h45 : AG à partir de 14h devant l’ancien camp de concentration de Brens à la sortie du pont qui mène à Gaillac, route de Montans (il y a cinquante personnes). Appelez les médias à venir. La gendarmerie bloque les accès à Gaillac, donc venir par Brens, lieu symbolique au vu du fascisme qui monte. Venez nombreux et nombreuses !
Suite à l’AG d’aujourd’hui devant l’ancien camp de concentration de Brens,
Appel à venir nombreux demain dimanche 8 mars à partir de 12h au bord du lac de Lisle-sur-Tarn pour un repas partagé, suivi d’une AG à 14h. Venez nombreux-ses !
  • À Paris, 17h, le rassemblement part en manif vers métro Villiers. Les vélorutions sont présents. Nous sommes 250-300, pour le moment pas de flicaille en vue.
  • A Perpignan (rassemblement du vendredi soir) :


Message de solidarité : « Les nouvelles des expulsions au Testet nous font mal au coeur, et nous enragent. On pense a vous. Soyez forts ! » Attachés sont quelques messages de solidarité pour les expulsées et les inculpées de Sivens, écrit sur des murs chez nous cette nuit : "Solidaritet med kamraterna i Sivensskogen. Mot fascism och statensvåld"/"Solidarité avec les camarades de la forêt de Sivens. Contre le fascisme et la violence de l’état"

A Toulouse : « Bonjour, c’est pour quoi ? - C’est les ZAD ! »


Un modeste rassemblement de soutien aux zadistes s’est tenu à Toulouse. Atmosphère triste, mais pas défaitiste : « On a perdu une manche, mais une manche, ce n’est pas la guerre »
 Toulouse, correspondance
« On en est où, de l’évacuation de la ZAD ? » Ce vendredi après-midi à Toulouse, la trentaine de personnes rassemblées au métro Compans Cafarelli prend des nouvelles de Sivens. Elles arrivent au compte-gouttes : selon un dernier comptage, 21 personnes ont été interpellées. Anne-Marie et Danièle s’agitent : « On ne comprend pas pourquoi les zadistes se font arrêter. Les agriculteurs ont commis des exactions toute la semaine et n’ont pas été inquiétés ! »
« C’est une justice à deux vitesses », renchérit Mélina, encore abasourdie. L’étudiante toulousaine s’inquiète pour l’une de ses amies qui occupe la ZAD depuis août : « Elle a tout lâché pour s’installer là-bas, elle doit être dans un état pas possible. Je ne pense pas qu’elle puisse revenir vivre à Toulouse, elle ira de ZAD en ZAD ». Mélina elle n’a jamais mis les pieds à Sivens, ni sur une ZAD mais elle a accouru au rassemblement.
Le petit groupe stagne. Huit camions de CRS patientent au loin. Un départ en action est donné. Fatima, qui a marché de Toulouse à Gaillac cette semaine pour soutenir les occupants du Testet, reprend son bâton de pèlerin. Direction la Chambre d’agriculture de Haute-Garonne. Objectif : l’occuper.
Arrivés devant le bâtiment, les trente manifestants trouvent les grilles baissées. Un agent de sécurité passe une tête : « Bonjour, c’est pour quoi ? » demande-t-il. « Bonjour, c’est les ZAD ! », lui répond d’un ton enjoué un manifestant cagoulé. L’agent appelle vite la police. Quelques tags sont apposés sur les murs. Une banderole « FNSEA Milice Fasciste » est déployée au milieu de la route pour couper brièvement la circulation. Après une tentative avortée de rejoindre le local du Parti Socialiste, les manifestants se dispersent en petits groupes dans les rues de Toulouse.
Tous n’attendent qu’une chose : rejoindre les abords de la ZAD. Il faut désormais régler les questions logistiques, le rapatriement des uns et des autres ainsi que du matériel laissé sur place. « On a perdu une manche, et les gros bras de la FNSEA ont gagné », soupire Fatima, « mais une manche, ce n’est pas la guerre ». La réoccupation du site est dans toutes les têtes. Les idées germent pour de prochaines actions : « On a perdu la forêt, on a perdu Rémi, désormais on a plus rien à perdre », explique-t-elle avant de partir pour Gaillac pour retrouver les zadistes expulsés.
Marine Vlhahovic - Reporterre

EDITO - MM. Hollande et Valls ouvrent la voie au fascisme


L’affaire de Sivens est tout sauf anecdotique : pour la première fois, le gouvernement y a déployé une tactique de répression propre aux régimes fascistes.
La méthode suivie par le gouvernement pour en finir avec l’affaire de Sivens est nouvelle et extrêmement grave.
Dès septembre 2014, le ministère de l’Intérieur avait laissé la gendarmerie exercer une pression violente, souvent illégale, à l’encontre des zadistes du Testet. Cela n’avait pas suffi à décourager les opposants au barrage, renforcés par le mouvement de solidarité qui se développait dans la région. La tension est montée jusqu’au 26 octobre, lorsque la gendarmerie tua un jeune manifestant, Rémi Fraisse. Un tel événement est – jusqu’à présent - exceptionnel en France. Il ne suscitait pourtant pas une indignation unanime. Une large partie des médias relayait la communication gouvernementale mettant en avant la violence qu’exerceraient les opposants aux grands projets inutiles. Xavier Beulin, président de la FNSEA et du groupe agro-industriel Avril-Sofiproteol, qualifiait les zadistes de « djihadistes verts », ce qui dans un contexte où la France est en guerre contre l’Etat islamique, revient à un appel au meurtre.
L’homicide de Rémi Fraisse était d’autant plus absurde que le ministère de l’Ecologie publiait un rapport d’expertise confirmant l’essentiel des arguments développés depuis des années contre le projet de barrage : coûteux, inutile, impactant sur l’environnement, fondé sur des études médiocres et trompeuses. Peu après, la Commission européenne engageait une procédure d’infraction contre le projet au titre de la directive sur l’eau.
Mais localement, les élus PS et autres ne voulaient pas céder, non plus que les instances de la Chambre d’agriculture et de la FNSEA (Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles). La ministre de l’Ecologie élaborait un compromis écartant les propositions d’alternatives mises en avant par les opposants : on ferait soit un plus petit barrage, soit divers réservoirs dans la vallée du Tescou. Et sur le terrain, légitimée par la provocation de Xavier Beulin, la FDSEA organisait des groupes d’agriculteurs pour mener en décembre près de la Zad une opération « Manche de pioche » dont le nom dit tout.
Elle répétait l’opération en janvier, jusqu’à organiser en février un blocus de la zone. Les agressions et injures se multipliaient de la part de ces agriculteurs chauffés à blanc contre les « peluts » (chevelus, en occitan), alias zadistes, mais aussi contre les locaux opposés au barrage et contre des journalistes. Fin février, ces milices – au sens précis d’organisation paramilitaire – bloquaient les routes, armées de bâtons, de manches de pioche ou de barres de fer, et commettaient de nombreuses agressions, pare-brises cassés, pneus crevés, menaces, sous l’œil indifférent des gendarmes bien présents dans le secteur.
Elles ont agi comme des supplétifs de la police : chargés d’accomplir les basses besognes de tension et d’effroi, soit pour provoquer des réactions violentes qui justifieraient l’action des forces légales de répression, soit pour changer le rapport de forces et affaiblir la capacité de résistance et de solidarité des opposants. La tactique a fonctionné, et l’évacuation de la Zad, menée par dix fois plus de gendarmes que de zadistes, s’est opérée le 6 mars sans heurts.
L’affaire est loin d’être close, mais la tactique répressive employée par le gouvernement, allié avec le représentant affairiste de l’agriculture productiviste et surfant sur le torrent d’injures déversées par l’extrême-droite sur les réseaux sociaux à l’encontre des zadistes et autres écologistes – tel ce sondage lancé par Valeurs actuelles, et parlant des « fascistes verts ».

Tout ceci, comme l’expression de Xavier Beulin, résonne avec la stigmatisation de l’ « islamo-fascisme » de Manuel Valls, pour associer les écologistes – car les zadistes font partie du mouvement écologique – aux « terroristes islamistes », contre qui, on le sait, le permis de tuer est officiel. C’est ce qu’a bien compris un tweet : « Comment un Etat peut aller tuer des centaines d’islamistes en Afrique, et se laisser dicter sa loi par une poignée de dégénérés ? »



On glisse vite des zadistes aux jeunes Français indésirables, comme ce commentaire après la phrase de Manuel Valls annonçant le 5 mars que « l’ordre républicain » - qui ne concerne pas, donc, les miliciens de la FNSEA – doit s’imposer sur la Zad : « Ben mon colon il serait temps ! Mais c’est embêtant parce que aux prochaines émeutes des "jeunes" nantis du 93 il va falloir enfin appliquer aussi l’ordre républicain ».



La tactique de MM. Valls et Hollande est délibérée. Elle ouvre la porte à la répétition de ce type d’actes : des groupes sociaux savent maintenant que, pourvu qu’ils ciblent l’écologie et les jeunes alternatifs tout en glorifiant la police, ils ont le champ libre. Elle s’appuie sur les sentiments d’extrême-droite qui montent dans ce pays. Et suscitera en retour des réactions de même nature, impliquant une répression encore plus stricte.
Je ne sais la qualifier autrement que de pré-fasciste : utlisant les méthodes mêmes du fascisme (des milices supplétives d’un Etat autoritaire) et stimulant la xénophobie et la haine des alternatives. L’essentiel est que rien ne soit mis en cause de l’ordre capitaliste : c’est ce que révèle l’analyse du journal des affaires Les Echos : « Sivens (…) a été choisi par Manuel Valls pour faire valoir (…) la fermeté de son gouvernement face à toutes les résistances au changement ».



Les choses sont claires : un projet coûteux, pourri de conflits d’intérêt, financé par le public pour des intérêts privés, détruisant l’environnement, c’est « le changement ».
D’aucuns persistent encore à croire que le gouvernement de MM. Hollande et Valls est « de gauche ». Il ne l’est pas. C’est pire : il ouvre, à peine dissimulé, la voie au fascisme.
Hervé Kempf - Reporterre

Pour le conseil général du Tarn, « la vie », c’est le barrage


Comme si rien ne s’était passé depuis un an, le Conseil général du Tarn a voté vendredi 6 mars l’engagement d’un projet de barrage à Sivens, dans une version plus petite que le plan initial. Sans tenir aucun compte des arguments des opposants.
 Albi, reportage
Ambiance très calme à Albi vendredi 6 mars. Des camions de CRS sont répartis dans les rues autour du bâtiment du Conseil général. Les manifestations ont été interdites, la grille devant l’entrée du Conseil est fermée, l’on entre par l’arrière. A l’étage, les chaînes d’info continue se préparent devant l’entrée de la salle, tandis qu’un employé prépare à la chaîne café croissant pour tous les présents.
Le débat n’aura pas vraiment lieu en séance plénière. Lundi, une réunion s’était tenue à huis clos pour élaborer entre majorité PS et opposition UMP une position commune. Le procédé s’est répété vendredi avec une pré-réunion pour finaliser un texte commun. Un habitué de ces pratiques explique : « C’est comme dans les congrès PS. Plutôt que de poser les désaccords sur la table, on rédige une motion de synthèse qui ne satisfait personne mais qui sera votée par à peu près tout le monde. »

Thierry Carcenac, président du Conseil, est donc serein quand il entre dans la salle à la sonnerie de 9 heures 30. Les journalistes sont dirigés à l’étage, en surplomb. Presque tous les médias nationaux et locaux sont là pour couvrir l’évènement. Le spectacle peut commencer. Les 46 conseillers généraux sont présents. « Nous nous en tiendrons à des débats brefs et concis », lance le président. « Je ne prétends pas que nous ayons eu raison sur tout, mais nos intentions étaient sincères. Si vous avons voté à une très large majorité ce projet, c’était bien pour répondre au besoin en eau sur la vallée du Tescou, nous ne pouvions ignorer ces difficultés incontestables ». La supposée évidence est posée d’entrée de jeu : la vallée du Tescou aurait besoin d’eau et donc d’un barrage. Elle ne cessera d’être répétée par les différentes prises de parole.
« Une retenue redimensionnée dans la vallée du Tescou, sur la zone du projet »
Une seule motion est proposée au vote par Thierry Carcenac.
 Télécharger la motion :
Le texte écarte l’option de retenues collinaires latérales, « compte tenu des coûts et des délais de réalisation ». C’était le deuxième scénario proposé par les experts du ministère de l’Ecologie dans leur rapport du 27 octobre dernier. Ce sera donc « une retenue dans la vallée du Tescou, redimensionnée, sur la zone du projet » avec un « mandat à l’exécutif départemental pour négocier un protocole transactionnel avec l’Etat » et enfin l’exigence « que l’Etat procède sans délai à l’expulsion des occupants sans droit ni titre ».
S’en suit une suite de prises de parole où, malgré les critiques à la motion « imprécise », « qui ne va pas assez loin », tous ou presque finiront par dire « qu’ils voteront la motion » ou « qu’ils ne pourront pas la désapprouver ».
Ainsi, un premier conseiller, avec une sincérité désarmante, rappelle que « la zone du projet ça peut vouloir dire à cent, deux cent ou trois cent mètres ? J’aurais préféré qu’on dise sur le site du projet ». La seule question devient de savoir pourquoi on ne ferait pas le même projet sur le même site. Il n’y a pas d’autre solution qu’un barrage car, comme l’explique un conseiller, « créer des réserves est la meilleure solution que les hommes ont toujours choisie pour palier au manque d’eau ». Au vu du nombre d’interventions en ce sens, on sent que diminuer de moitié la taille du barrage est pour beaucoup d ’élus une énorme concession, voire un aveu de défaite.
Les zadistes, « animés par le seul but de détruire »
Les paroles abondent pour fustiger ceux qu’on n’aime pas. Jean-Louis Henry, élu du canton de Mazamet, s’attache à fustiger les occupants de la zone : auteurs « d’exactions sur le terrain et au Conseil général, personnes animées par le seul but de détruire et de s’opposer systématiquement à tout projet ». A la presse, il demande : « Pensez-vous que la parole des gens qui masquent leur visage et refusent de donner leur identité vaut plus que celle de lettres anonymes ? » Aux journalistes, il enjoint de « regarder dans les coulisses du théâtre de marionnettes pour connaître tous ceux qui tirent les ficelles ». Car il lui paraît impensable que les zadistes aient une volonté propre et posent des questions légitimes.
« La vie, c’est comme le temps, ça va toujours en avançant »
Les responsables écologistes nationaux, « révolutionnaires de salon », « idéologues urbains », sont également attaqués, eux « qui voulaient expliquer que l’enjeu était celui de la décroissance face au capitalisme agricole ». Henry conclut sa péroraison : « Proposer un retour en arrière, c’est aller contre la vie. La vie, c’est comme le temps, ça va toujours en avançant ».
Toutes les prises de parole vont, fastidieusement, dans le même sens. La palme revenant à Jacques Valax qui, dans un discours d’un quart d’heure, défend « une retenue de taille ridicule qui va apporter une plus value sur le territoire ». Et parce que de taille réduite, ce projet pour lui va de soi. « Et d’aucuns, là haut, au nord de la Garonne, se gaussent sur l’immensité de ce dossier. » La délibération lui paraît claire : « Ce projet doit se faire et il se fera sur le site. Il sera simplement un peu redimensionné »
Maryline Lherm, maire de Lisle-sur-Tarn, commune où se situe le projet, est également conseillère générale. Elle a participé activement à la montée en tension en relayant des rumeurs infondées sur la zone et en soutenant pleinement le blocage orchestré par la FNSEA, poursuit sur le registre de l’émotion : « J’ai envie de vous dire on en a rien à cirer des élections. Nous sommes des gens raisonnables, des Tarnais avant tout, mais nous avons aujourd’hui sur nos épaules la responsabilité de six-cents personnes autour du site. » Elle poursuit : « Si je vote ce texte, c’est que derrière, il y a évacuation du site. Dès ce soir, ça n’attendra pas plus. » Selon elle, « il faut que les choses aillent ensuite très vite pour faire avancer le projet ».
« Quand on connait la puissance des lobbys de la Chambre et de la FNSEA... »
Au milieu d’un flot unanime, seules trois voix discordantes se font entendre. Roland Foissac, conseiller communiste d’un canton d’Albi, est l’un des trois conseillers généraux qui n’ont pas voté le projet initial et qui a depuis appelé à l’abandon pur et simple du projet de barrage.
Il insiste sur le jugement des citoyens et « non pas les bas instincts, les pulsions brutales qui rabaissent l’homme et révèlent la paresse de la pensée ». Ce sera la seule référence de toute la matinée à la brutalité des milices pro-barrages. Dénonçant « les attitudes de déni depuis deux ans », il considère la gestion du dossier comme « calamiteuse ; ce sont les faits qui m’autorisent à employer ce qualificatif. »
Lucide, il « conçoit que reconnaître de s’être trompé et d’avoir été trompé exige un effort sur soi-même » mais « il faut accepter humblement de se mettre en doute ». Il appelle avant toute future décision à ce que s’engagent « au plus vite les études complémentaires ».
Son collègue Serge Entraygues, invite de son côté, avec humour : « Le comité de tourisme va se mettre en vacances, la France entière va maintenant venir voir Sivens, plus connu que la cathédrale d’Albi ». Il demande un vote séparé entre « l’abandon du projet initial » et « les autres propositions », considérant que « quand on connait la puissance des lobbys de la Chambre et de la FNSEA, j’ai des inquiétudes fortes qu’on refasse un projet bis ». Le vote séparé est refusé. Entraygues, Foissac et Jacques Pagès (divers-droite) votent contre. Les quarante-trois autres, sans exception, votent pour.
« Tout recommence maintenant »
A aucun moment il n’a été question de conflit d’intérêt. Au contraire, Jacques Valax a réaffirmé son soutien à « André Cabot, celui qui a tout pris », malheureuse victime de son cumul de fonctions entre CACG (Compagnie d’aménagement des côteaux de Gascogne), Agence de l’eau et Conseil général. Personne n’a parlé de la CACG, du déboisement illégal, de l’archéologie oubliée. L’écologie a été oubliée, sinon pour rappeler combien les agriculteurs sont raisonnables et vertueux dans leurs pratiques.
Aucun élu n’a évoqué l’importance de la zone humide du Testet, des espèces protégées, de biodiversité, ni parlé de la procédure d’infraction de la Commission européenne au titre de la directive sur l’eau. Et jamais la mort de Rémi Fraisse n’a effleuré le bloc de certitude d’élus qui se considèrent toujours légitimes, à deux semaines de la fin de leur mandat.
Au final, on se retrouve quatre années en arrière, lorsque le Conseil général, avec la même majorité, les mêmes votes et les mêmes arguments, avait voté le projet initial. « Cette assemblée départementale est surréaliste », déplore Françoise Blandel, du Collectif pour la sauvegarde de la Zone Humide du Testet : « Le projet futur posera les mêmes problèmes que le projet initial. La zone humide est détruite, dont une partie de manière irréversible. Ils sont passés dessus comme sur la mort de Rémi Fraisse. »
Quelle issue désormais ? « Nous avions déposé quatre recours sur le fond sur la déclaration d’utilité publique et la destruction de la zone humide, la loi sur l’eau. La justice doit maintenant les juger ». Avec leur avocate, elle entend « faire avancer les jugements, avant le vote de la prochaine assemblée ».
Des études supplémentaires doivent maintenant être faites pour « affiner le nouveau projet ». Et sans doute, un processus réglementaire d’enquête publique et d’autorisations. La bataille de Sivens n’est pas finie.
Grégoire Souchay - Reporterre

Infos du 9 au 15 Mars

Lundi 9 mars
Merci pour tous vos messages de soutien, toutes vos actions ! Bien entendu la bataille est loin d’être finie et nous continuerons  à la mener sur le terrain et à  en faire l’écho sur ce site !
Vraiment le Tarn est un département accueillant !! à Gaillac ce samedi un arrêté municipal interdit tout regroupement, à Lisle sur Tarn ce dimanche un arrêté municipal interdit tout regroupement. Ceci afin d’empêcher tout rassemblement des opposants au barrage de Sivens. Les barrages filtrants pratiqués par les GM se font à le gueule du client, ainsi des opposants.tes de plus de 40 ans passent tandis que tout jeune chevelu est bloqué. Ainsi, ces villes seraient « interdites aux zadistes »… Si c’est pas de la discrimination ça… Ce serait légal ? Ce serait acceptable ?? En France, pays où nous serions tous « Charlie », où la liberté d’expression serait défendue, sachez-le : aux défenseurs de la terre, aux lanceurs d’alerte sur les dépenses délirantes et nuisibles du CG81 et de la CACG, la place publique est interdite !!!
Malgré ces pratiques liberticides, l’AG prévue ce dimanche a pu se dérouler dans un lieu ami et l’assemblée a réuni plus de 100 personnes !! Un moment fort en chaleur humaine, militante et résistante, après la bien triste expulsion de la Zad du Testet et après le délibéré indécent de Carcenac et sa clique du CG81. Nous vous invitons tous.tes à lire cette déclaration du CG81 qui reste dans le flou le plus complet quant à la réalisation ou non du projet initial « il n’en reste pas moins que… » À croire que les élections départementales sont pour bientôt et que les socialos sont prêts à tous les mensonges et compromis pour sauver la mise…
Aussi, plus que jamais, nous appelons tous les sympathisants.tes de la cause du Testet à rester mobilisés, la lutte continue jusqu’à l’abandon pur et simple du projet de barrage initial et de tout autre projet similaire !!
APPEL A REGROUPEMENT DE PLAINTES POUR TOUTES LES AGRESSIONS SUBIES CES DERNIERS JOURS ET DERNIERES SEMAINES : si vous avez été victime ou témoin de ces agressions, vos photos, films et témoignages écrits seront des plus utiles. La lutte devant les tribunaux sera longue et là aussi, ON NE LÂCHE RIEN !
De même, nous dénonçons avec vigueur la désinformation dont se sont fait complices la plupart des médias. Qu’il s’agisse de médias locaux partiaux et mensongers ou de caméras venues guetter le moindre emportement de zadistes et très curieusement muettes et aveugles aux violences nombreuses et graves perpétrées par les milices pro-barrage. Pas un mot non plus sur la terreur que ces miliciens font régner sur tout habitant du Tarn opposé à ce délirant barrage.
Un communiqué de presse complet, en cours de rédaction sera publié cette semaine.
Dates de RDV à retenir :
Dimanche 15 mars à 14h : AG du Collectif Tant qu’il y aura des Bouilles à la Fontié.
24 mars Rassemblement de soutien Procès de 2 résistants inculpés à qui il est interdit de se déplacer dans le département du Tarn ! Attention !! Un rassemblement de miliciens pro-barrage est annoncé le même jour ! Aussi, les 2 inculpés appellent tous et toutes à venir nombreux.euses ce 24 mars. Notre nombre demeure la seule garantie de sécurité, puisque les pro-barrage agissent violemment et en toute impunité sous l’oeil bienveillant de la gendarmerie locale.
8 septembre : procès de la plupart des 21 (!) inculpés suite à l’expulsion de la Zad ce vendredi 6 mars. Retrouvons-nous nombreux.euses à leurs cotés !
Après le rush médiatique de la fin de semaine dernière, on commence à voir arriver textes et analyses des plus intéressants. En voici une sélection.
-Sur l’expulsion de la ZAD, le récit de l’agence des copains. Celui du Tarn Libre, avec son style caractéristique.
Le texte d’occupant-e-s de NDDL est également très intéressant (texte de soutien à Sivens)L’état de droit est de retour, par C. Dujardin, qui défend de nombreux occupants de la ZAD…à faire lire à Valls, qui se gargarise avec cette expression :
-Sur la décision du Conseil Général, énormément de réactions également, dont de nombreuses montrent bien dans le détails que rien n’est réglé, ni fini : Les Eaux Glacées (Sivens, tout est pardonné) avec pas mal de liens à l’intérieur.

Rassemblement à Dijon lundi

URGENT L’ÉTAT RÉPRIME
Vendredi 6 mars la préfecture du Tarn ordonnait l’expulsion de la ZAD de Sivens par 600 gendarmes et la violence qui va avec.
Depuis plusieurs semaines la dizaine d’agriculteurs pro-barrage, aidé par leur organisation syndicale, harcelait et violentait les militants écologistes présents sur la zone.
Contrairement aux déclarations de la ministre de l’Écologie après l’assassinat de Rémi Fraisse, l’État a clairement choisi son camp : ça ne sera pas celui de la protection de la nature.

Partout les appels à solidarité se multiplient, de Toulouse à Lille en passant par Nantes,  Paris, Lyon… Nous appelons donc à un rassemblement lundi 9 mars à 17h30 devant la Chambre d’Agriculture de Dijon, au 42 rue de Mulhouse, pour montrer à la FNSEA (qui a ses bureaux à cette adresse) que  leur profit est moins important que la nature. Nous marcherons ensuite jusqu’à la préfecture pour nous faire entendre de cet État qui reste sourd.
RDV LUNDI 17H30 DEVANT LA CHAMBRE D’AGRICULTURE
Mailing Résistons Ensemble, 8 mars 2015

Communiqué de presse  des « défenseurs unis des derniers espaces sauvages » :

40 militants écologistes ont été expulsés de la Zad du Testet. 800 membres des forces de l’ordre ont été mobilisés pour cette action.
Pourquoi un tel déploiement ? Combien cela à-il coûté aux français ? Pourquoi choisir l’affrontement ? Monsieur Hollande avait fait de la jeunesse la priorité de son mandat, voila comment il la traite, méprisant les enjeux environnementaux qui en premier lieu la concernent. Des centaines de plaintes déposées contre nous, expulsions, destructions, séquestration, persécutions, complicité avec les milices liées à la FNSEA.
Nous sommes des lanceurs d’alerte dénonçant l’illégalité du projet de barrage et la corruption du système.
Nous voulons êtres entendus, c’est pourquoi nous vous invitons à une conférence de presse mardi 10 mars à 14h30, devant le Panthéon.
Des défenseurs unis des derniers espaces sauvages
  • URGENT : appel à photos documents dans vos archives : Stéphane Lamberto porte plainte pour avoir été blessé à la main. Il prétend que cela s’est passé hors zone ! Partisan pour le barrage depuis toujours, il a fait partie des agriculteurs mobilisés et énervés qui tentent des intimidations, voire plus, sur les opposants au barrage depuis leur occupation du site. Situé au Vergat, juste au-dessus de la ferme Lacas « canards », c’est un des exploitants agricoles figurant comme bénéficiaire de l’eau qui aurait été retenue par le barrage de Sivens. Deux copains comparaissent le 24 mars suite à cette plainte. Nous cherchons toute preuve de l’implication active et partisane de Lamberto dans l’accomplissement des travaux du barrage de Sivens, dans les violences et exactions faites aux habitants de la vallée opposés au projet.


Mardi 10 mars
Nous recevons beaucoup de messages nous demandant comment il est possible de venir en aide financièrement aux personnes expulsées. L’association Les Ami-e-s des Bouilles, qui soutient financièrement les personnes inquiétées juridiquement suite à leurs actions de résistance au Testet, peut recueillir vos dons. Ils pourront servir à rembourser les effets personnels des ex-occupants (souvent purement et simplement brulés par les forces de l’ordre), faire réparer leurs véhicules (vandalisés par les milices), etc… Si vous souhaitez une autre utilisation particulière de votre don, indiquez là au dos du chèque ! Merci pour eux !
Toutes les infos sont ici : https://tantquilyauradesbouilles.wordpress.com/aider-la-lutte-du-testet-financierement/

Sivens, Rémi Fraisse : la justice sur les freins

L’enquête sur la mort de Rémi Fraisse avance péniblement : les magistrats ont refusé une reconstitution des faits ainsi que l’audition du préfet du Tarn, responsable du dispositif de maintien de l’ordre à Sivens la nuit du 25 octobre 2014. D’autres plaintes de zadistes sont en souffrance.
Comme très souvent en matière de violences policières, la justice française fait preuve d’une extrême prudence, pour ne pas dire d’une grande frilosité, dans le traitement des événements survenus ces derniers mois à Sivens. L’affaire la plus grave, le décès de Rémi Fraisse, tué à 21 ans ans par une grenade offensive lancée sur lui par un gendarme mobile, n’échappe pas à la règle.
Rémi Fraisse, botaniste de 21 ans.
Depuis le 29 octobre 2014, soit trois jours après le drame, deux juges d’instruction toulousaines, Anissa Oumohand et Élodie Billot, sont chargées d’une information judiciaire contre X pour « violences par personne dépositaire de l’autorité publique ayant entraîné la mort sans intention de la donner ». Or après plus de quatre mois d’enquête, les défenseurs de la famille Fraisse (Claire Dujardin, Arié Alimi et Éric Dupond-Moretti), ont l’impression désagréable de se « heurter à un mur », selon l’expression de Me Arié Alimi.
Le gendarme mobile auteur du tir mortel a été placé en garde à vue, puis relâché sans mise en examen, le 14 janvier dernier. Quant au retour de la commission rogatoire confiée conjointement à la section de la recherche de la gendarmerie et à l’Inspection générale de la gendarmerie nationale (IGGN), il se fait attendre. S’impatientant, inquiète pour la suite de la procédure, la famille a réclamé plusieurs actes d’enquête dont une reconstitution ainsi que l’audition du préfet du Tarn, responsable du dispositif de maintien de l’ordre à Sivens la nuit du 25 octobre. Ces demandes d’actes ont été jugées inutiles ou prématurées par les deux juges d’instruction, qui les ont rejetées le 22 janvier 2015.
Face à ce refus des juges, les avocats se sont tournés vers la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Toulouse, comme ils en ont le droit. En pareil cas, un débat a habituellement lieu, au cours duquel chaque partie peut expliquer pourquoi elle estime que tel acte d’enquête serait utile. Mais, fait rare, le président de la chambre de l’instruction de Toulouse a préféré statuer seul dans ce cas d’espèce, cela sans même réunir la chambre de l’instruction, comme il en a le pouvoir. Et sans surprise, il a rejeté le 5 février 2015 les trois demandes de la famille Fraisse.
Que demande la famille du jeune botaniste ? Tout d’abord l’audition de Thierry Gentilhomme, le préfet du Tarn, ainsi que la transmission de ses communications écrites avec les gendarmes et l’exécutif national la nuit du 25 au 26 octobre 2014. Les avocats ont visé large : Beauvau, Matignon et l’Élysée. Il s’agit de retracer heure par heure les ordres qui ont été donnés cette nuit-là, ainsi que les informations dont disposaient les autorités avant et après la mort de Rémi Fraisse.
Car il subsiste une contradiction majeure dans ce dossier. Alors que le préfet du Tarn, tout comme le ministre de l’intérieur et le directeur général de la gendarmerie nationale (DGGN), ont répété avoir donné des consignes d’apaisement, sur le terrain le lieutenant-colonel L. semble, pour sa part avoir, reçu des ordres contraires, comme l’avait révélé Mediapart.
Entendu comme témoin au petit matin du 26 octobre, cet officier de la gendarmerie mobile avait déclaré avoir régulièrement rendu compte au centre d'opérations et des renseignements de la gendarmerie (CORG) ainsi qu'au lieutenant-colonel Andréani, numéro deux du groupement de gendarmerie du Tarn « qui me confirme ma mission à savoir tenir le site ». « Le préfet du Tarn, par l'intermédiaire du commandant de groupement, nous avait demandé de faire preuve d'une extrême fermeté vis-à-vis des opposants par rapport à toutes formes de violences envers les forces de l'ordre ». Et ce malgré une situation de plus en plus tendue : « Les jets de pierres deviennent de plus en plus virulents, nous recevons des fusées de détresse et des cocktails Molotov », relate le lieutenant-colonel L. lors de son audition (lire notre enquête ici).
Malgré cela, Michel Regaldo-Saint-Blancard, le président de la chambre de l’instruction de Toulouse, a confirmé le refus des juges d’instruction de faire droit à cette demande de la partie civile, estimant – le plus sérieusement du monde – que « le contexte dans lequel les forces chargées du maintien de l’ordre ont agi n’est (…) qu’indirectement lié aux faits objets de l’information ». Il avance également que les juges d’instruction sont là pour « investiguer sur des faits susceptibles de recevoir une qualification pénale », et non pas pour « apprécier de l’opportunité des décisions prises par l’autorité administrative ». Doit-on en conclure qu’il revient donc à l’inspection administrative d’apprécier l’opportunité de ce genre de décision ? Pas de chance, l’IGGN, dans son rapport administratif rendu le 2 décembre 2014, faisait l’impasse sur cette contradiction, et ne parlait que de consignes d’« apaisement »...
La demande de reconstitution effectuée par Me Dupond-Moretti, « afin d’éclaircir la question des distances, de l’éclairage et de la façon dont a été utilisée la grenade offensive », a été tout aussi fraîchement accueillie. Inutile, répondent les juges d’instruction comme le président de la chambre de l’instruction, qui arguent, de façon paradoxale, du caractère « prématuré » d’une reconstitution, du fait de l’occupation et la modification des lieux par les zadistes « qui ont même opéré leur propre "gel des lieux" en dressant des grillages et autres tresses rouges et blanches », ont écrit les magistrats. L’expulsion des derniers opposants au projet de barrage vendredi 6 mars va donc, sans nul doute, donner un coup de fouet à l’enquête !
Dans une autre demande, Me Dupond-Moretti s’est également étonné auprès des juges d’instruction de propos désobligeants sur la famille Fraisse tenus par un des gendarmes participant à l'enquête. L’avocat écrit le 6 janvier : « Mes clients considèrent à juste titre qu’il est déjà surprenant que des gendarmes enquêtent sur des faits reprochés aux gendarmes, surtout lorsque de telles manifestations de partialité leur sont rapportées. »

Des plaintes de zadistes classées sans suite

Un autre avocat de la partie civile, Arié Alimi, s’est également interrogé sur la classification de la grenade offensive OF F1, suspendue puis interdite à la suite de la mort de Rémi Fraisse. Le 6 mars 2012, une loi a simplifié la classification des armes en France, désormais réparties en quatre catégories au lieu de huit. À charge pour le ministère de la défense d’attribuer par arrêté une nouvelle classification à chaque arme.
Or, au moment des faits en octobre 2014, aucun arrêté ne semblait avoir été pris concernant les grenades OF F1 et les grenades instantanées. Dans le tableau listant les armes à feu en maintien de l’ordre, un blanc apparaît en effet en face de leur classification. Si c’est le cas, ces grenades « n’étaient ni classifiées, ni légalement utilisables le jour du décès de Rémi Fraisse », écrit Me Alimi. Les autorités se sont-elles rendu compte de cette lacune aux conséquences potentiellement fâcheuses ? Toujours est-il que le lundi 27 octobre 2014, soit au lendemain du décès de Rémi Fraisse, un décret de Matignon remplaçait le tableau défectueux et classait les grenades OF F1 et les grenades instantanées parmi les armes de catégorie A (dont la détention est interdite sauf pour les forces de l’ordre).
Là encore, l’avocat s’est fait rembarrer par les juges d’instruction et le président de la chambre de l’instruction, qui lui demandent de patienter un peu, « les vérifications sur la classification des grenades OF F1 » faisant partie des « missions confiées aux enquêteurs chargés de l’exécution de notre commission rogatoire ».
La famille Fraisse s’interroge, par ailleurs, sur la légalité d’opérations de maintien de l’ordre à Sivens sur des « parcelles privées appartenant au conseil général ». « L’intervention de la gendarmerie mobile sur des parcelles privées ne peut intervenir d’une part qu’à la demande du propriétaire et d’autre part sur autorisation judiciaire », avance Arié Alimi, en demandant la communication de ces autorisations.
L'avocat se réfère notamment à une décision du défenseur des droits, concernant l’intervention musclée de gendarmes qui avaient gazé des manifestants bloquant un train touristique à Anduze (Gard). Le 2 juillet 2013, le défenseur des droits avait rappelé que la gare, propriété d’un syndicat de communes, était un site privé. « Ainsi, les forces de l’ordre n’étaient pas dans un cadre de maintien de l’ordre, donc ne pouvaient se voir appliquer les règles relatives à la dispersion d’un attroupement, puisque la manifestation ne se déroulait pas sur la voie publique », indiquait le défenseur. Mais les juges d’instruction toulousains n’ont, là encore, pas jugé cette demande « utile à la manifestation de la vérité », ce qu’a confirmé la cour d’appel.
Elsa Moulin a failli perdre sa main après un jet de grenade par un gendarme. © LF
Sans surprise, la justice se montre tout aussi peu empressée s'agissant des plaintes déposées par des zadistes visant les forces de l’ordre. À ce jour, Me Claire Dujardin, avocate toulousaine qui défend les militants, a compté 24 plaintes déposées, la plupart dans le ressort du tribunal d’Albi, dont quatre ont été classées sans suite. L’avocate est sans nouvelle des autres procédures.
Le syndicat de la magistrature (SM) et le syndicat des avocats de France (SAF), via leurs instances régionales, ont écrit fin décembre au procureur de la République d’Albi pour lui demander des éclaircissements sur le traitement de ces plaintes, et l’encourager à déclencher des poursuites, mais ces organisations n’ont pas reçu de réponse à ce jour.
Selon Me Dujardin, seule une information judiciaire est en cours, portant sur l’agression d’Elsa Moulin, une militante de 25 ans gravement blessée à la main, le 7 octobre, par une grenade de désencerclement lancée par un gendarme du PSIG à l’intérieur de la caravane où la jeune femme s’était réfugiée. Mais là encore, comme l’a annoncé Mediapart, il a fallu attendre janvier 2015, plus de trois mois après son dépôt de plainte, pour qu’une enquête pour « violences volontaires ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente » soit enfin ouverte et confiée à la doyenne des juges d'instruction de Toulouse, Myriam Viargues. L’audition de la victime est prévue le 23 mars 2015.
Le rapport de l’Inspection générale de la gendarmerie nationale (IGGN) avait relevé une faute du gendarme du PSIG. Ce dernier a cependant continué à intervenir sur la ZAD en janvier 2015, selon plusieurs zadistes. Le gendarme en question s’était illustré dès le 27 février 2014, lors de la première expulsion opérée par les forces de l’ordre à Sivens (après une décision de justice). Une expulsion qui s’était « dans un premier temps déroulée de manière normale », a relaté Ben Lefetey devant la commission d’enquête parlementaire sur le maintien de l’ordre, jusqu’à ce qu’un manifestant franchisse le cordon des forces de l’ordre pour grimper sur un tas de débris.
Un gendarme du PSIG renverse un zadiste le 27 février 2014 (photo d'un militant)
« La logique aurait voulu que les gendarmes viennent le chercher pour le ramener sur la voie publique, a relaté le militant écologiste. Au lieu de cela, un membre du PSIG – le même que celui qui avait jeté la grenade dans une caravane – est arrivé en courant, l’a saisi par le bras, l’a fait tomber en arrière, risquant de le blesser grièvement sur les débris tranchants, avant de le traîner sur le sol. Cela a évidemment suscité la colère des autres manifestants, qui ont débordé le cordon de gendarmes pour porter secours à leur camarade et ont commencé à escalader les pelleteuses. » 
Photo amateur du gendarme du Psig en question, prise le 27 février 2014.
À l’époque, les opposants n’étaient qu’une dizaine à dormir sur place. D’après Ben Lefetey, joint par Mediapart, ce sont d’ailleurs les images de cette « expulsion violente de militants pacifistes », diffusée sur Internet, qui ont provoqué l’afflux la semaine suivante d’une cinquantaine de personnes « venues occuper le site en renfort ». « Si le procureur avait été réactif sur les violences dès février 2014, on aurait sans doute pu éviter pas mal de dérives ensuite », regrette le militant.
Deux zadistes passeront le 24 mars 2015 devant le tribunal correctionnel d’Albi pour des violences sur un agriculteur auquel ils sont accusés d’avoir donné un coup de serpette (dix jours d’ITT, incapacité temporaire de travail). Une vingtaine de militants ont été interpellés lors de l’expulsion du site le 6 mars. Selon Me Claire Dujardin, plusieurs sont ressortis de garde à vue avec une convocation au tribunal correctionnel d’Albi pour participation à un attroupement malgré des sommations, pour deux d’entre eux « outrage et rébellion » ou « violences sur personnes dépositaires de l’autorité publique ». Encerclés par les agriculteurs de la FNSEA, les militants « ont vécu une dernière semaine de terreur sur le site, mais aucun agriculteur n’est en revanche poursuivi », remarque l’avocate.
Sollicité par Mediapart, le procureur de la République de Toulouse, Pierre-Yves Couilleau, ne souhaite pas s’exprimer, et dit réserver ses explications jusqu’au stade de ses futures réquisitions écrites. Quant à son homologue d’Albi, Claude Dérens, il n’a pas donné suite à notre demande.
Vidéo de l’expulsion filmé par http://taranisnews.com :
Mercredi 11 mars

 Rassemblement de soutien aux expulsés du Testet : samedi 14 mars 14h, devant la mairie de Langon organisé par le Collectif de soutien à la ZAD en Sud-Gironde


Rassemblement  pour dénoncer les pratiques fascisantes des milices de la FNSEA et la complicité de l’état : vendredi 13 à 10H à Foix devant la chambre d’Agriculture (32 av du général De Gaulle)
  • Action de soutien  de la ZAD de  NDDL : perturbation d’une AG des JA à Sautron (44)
  • une autre dans le Calvados : Suite aux exactions commises par des agriculteurs la semaine dernière, sur la ZAD du Testet , à l’appel de la FNSEA  Tarn et Tarn-et-Garonne ; la FDSEA du Calvados (14) s’est faite visiter ce jour. Du courrier s’est envolé dans un nuage (mal-) odorant, pour être ensuite envoyé à ses destinataires, accompagné du tract ci-joint, largement inspiré des indigné-es de Nîmes. Contre le barrage et son monde, en soutien aux zadistes du Testet !
Nous recevons beaucoup de messages nous demandant comment il est possible de venir en aide financièrement aux personnes expulsées. L’association Les Ami-e-s des Bouilles, qui soutient financièrement les personnes inquiétées juridiquement suite à leurs actions de résistance au Testet, peut recueillir vos dons. Ils pourront servir à rembourser les effets personnels des ex-occupants (souvent purement et simplement brulés par les forces de l’ordre), faire réparer leurs véhicules (vandalisés par les milices), etc… Si vous souhaitez une autre utilisation particulière de votre don, indiquez là au dos du chèque ! Merci pour eux !

Vendredi 13 mars

Sivens : des journalistes de Reporterre portent plainte contre

l’homme à la tronçonneuse


Pendant plusieurs jours, des partisans du barrage de Sivens ont pu bloquer les accès de la Zad du Testet et menacer les journalistes ou les zadistes. Ces actes ont été commis sous l’œil passif des gendarmes. Directement menacés, des journalistes de Reporterre ont porté plainte.
Les violences et tentatives d’intimidation de la part de pro-barrages à l’égard des opposants, ainsi qu’à l’égard de certains journalistes, n’ont fait qu’augmenter lors de la semaine précédant l’évacuation de la zone. Constitués en milices, ces personnes ont agi en dehors de toute légalité sans que quiconque n’ y trouve à redire, et ce depuis des mois. Comment dénoncer des exactions lorsqu’elles sont commises avec l’accord tacite et sous le nez de représentants de "l’Etat de droit" ?
Nous avons décidé de porter plainte contre l’homme à la tronçonneuse (que l’un d’entre nous a photographié), comme peuvent le faire toutes les personnes ayant subi violences, dégradations de biens, agressions physiques et harcèlement de la part des pro-barrages.
Rappelons les faits que nous avons déjà rapportés dans Reporterre.
Arrivés à trois journalistes près de la Zad du Testet, dans le Tarn, le jeudi 5 mars à 17 h, nous cherchions un point d’entrée afin d’accéder à la Zad, bouclée de toutes parts en cette semaine sous haute tension.
Au niveau de la Maison de la forêt de Sivens étaient postés trois fourgons de gendarmes mobiles contrôlant les accès. Les gendarmes nous ont fait signe d’arrêter le véhicule, puis ont demandé à voir les cartes de presse. Juste devant nous, autour d’un feu de camp, se trouvait une dizaine de pro-barrages, qui nous ont paru avinés. L’un d’eux était muni d’une tronçonneuse. Il s’est approché, a allumé l’engin et l’a brandi en nous invectivant, alors que ses collègues entouraient la voiture en s’esclaffant. A aucun moment, la tronçonneuse n’a été saisie par les forces de l’ordre, pourtant bien présents.
Un pro-barrage a ouvert le coffre de la voiture et s’est emparé du matériel de protection qui s’y trouvait (casque, lunettes), tandis qu’une autre personne ouvrait la portière arrière droite avec l’intention manifeste d’inspecter l’intérieur du véhicule.
S’en est suivie une discussion entre un gendarme et un agriculteur qui hurlait : "Ici c’est une zone de non droit, on fait ce qu’on veut". Ce à quoi le gendarme n’a rien répondu, et nous a rendu les affaires dérobées avant de nous laisser partir.
A quelques kilomètres, la route D999 croise une entrée de la Zad. Dans le champ desservi par la route, un face à face tendu opposait une centaine de pro-barrages armés de bâtons ou de barres de fer, et des zadistes surveillant une barricade. Entre les deux groupes se tenait un cordon de gendarmes.
Nous sommes restés un moment sur place, avant de devoir traverser le groupe de pro-barrages pour retourner vers la route. L’un d’eux a crié : "Prends-lui son appareil". Un très jeune homme muni d’une barre de fer a alors bondi sur moi et tenté d’attraper mon boitier. Je l’ai vivement repoussé, un de mes confrères est venu en renfort, et après une bousculade, nous avons pu quitter les lieux.
Cette scène s’est déroulée en présence et sous le regard de gendarmes postés à quelques mètres, qui n’ont pas fait un pas en ma direction pour éviter que l’agression ne dégénère. Au "check point" suivant, des voitures de gendarmerie ainsi que des véhicules de tourisme étaient garés des deux côtés de la route. Impossible de passer.
Nous avons arrêté la voiture, et c’est un pro-barrage qui a demandé à vérifier les papiers d’identité et les cartes de presse. Interloqués, nous avons refusé, et c’est finalement un gendarme qui a procédé au contrôle.

« Violences avec usage d’une arme sans ITT »

Le lundi 9 mars, mes deux confrères journalistes Gaspard Glanz et Louis Witter, ainsi que moi-même, avons déposé une plainte contre l’homme à la tronçonneuse à la gendarmerie de Gaillac, qualifiée juridiquement de "violences avec usage d’une arme sans ITT" (incapacité totale de travail). Elle sera transmise au procureur de la République au Tribunal de grande instance d’Albi.
 Le procès-verbal de dépôt de plainte :


Elle s’est vue menacée par des hommes armés de bâtons

Les infractions dont nous avons été témoins ne sont qu’une infime partie de ce qui s’est déroulé quotidiennement dans et aux alentours du périmètre de la Zad. En effet, le blocus de la zone décrété par les pro-barrages la semaine précédant l’évacuation (qui s’est déroulée vendredi 6 mars) a donné lieu à de nombreuses agressions envers des zadistes ou des sympathisants. Certaines ont abouti à un dépôt de plainte, portée par l’avocate Claire Dujardin.
Me Dujardin mentionne le cas de jeunes femmes retenues enfermées dans leurs voitures pendant plus d’une heure et menacées. Ou celui d’un homme blessé par les éclats d’une vitre de la voiture dans laquelle il se trouvait, cassée par des pro-barrages. Ou encore cette femme, au volant de son véhicule, poursuivie sur plusieurs kilomètres. Une fois rattrapée, elle s’est vue menacée par des hommes armés de bâtons, qui s’en s’ont pris aux vitres de sa voiture.
Une autre plainte pour séquestration est également en cours de dépôt : elle concerne les membres d’une famille riveraine de la Zad, très investis dans la lutte contre le barrage, empêchés de quitter leur domicile pendant quatre jours.
Enfin, le lendemain de l’expulsion, des opposants venus récupérer leur véhicule ont vu un camion benne aux plaques minéralogiques cachées sortir de la Zad, rempli d’affaires personnelles. Selon ces témoins, un groupe de pro-barrages a lancé au sol le contenu de la benne en un énorme tas avant d’y mettre le feu. Une des opposantes a alors pris des photos. Des gendarmes sont arrivés et un pro-barrage a crié : "C’est elle". Un gendarme dont le matricule a été relevé a alors tenté d’arracher son téléphone à la jeune femme qui s’est défendue. Elle a également décidé de porter l’affaire en justice.

« Ils ont commis des infractions en présence des gendarmes, restés passifs »

Pour Me Dujardin, "c’est comme si l’Etat avait abandonné une partie de son rôle pour laisser la place à des milices privées qui prétendent incarner l’ordre public. On constate l’absence de poursuites à l’endroit des pro-barrages pendant toute la semaine du blocus, bien qu’ils aient commis des infractions en présence des gendarmes, restés passifs. Dans cette affaire, il y a clairement deux poids, deux mesures : ces agriculteurs qui participaient à des attroupements n’ont pas fait l’objet d’interpellation. Personne ne leur a intimé l’ordre de se disperser, alors que le 6 mars, dix-sept opposants ont été interpellés pour ’participation à un attroupement malgré sommation de se disperser’. Pourtant, on est dans le cas de personnes qui habitent depuis plusieurs mois sur le site, ce qui questionne la notion même d’attroupement."
L’avocat du barreau de Toulouse poursuit : "Il ne faut pas laisser passer cela. L’Etat de droit est en danger lorsqu’on laisse des milices faire régner l’ordre en présence de gendarmes".
Me Dujardin conseille de signaler les infractions commises sous le regard de gendarmes ou policiers qui ne sont pas intervenus, auprès du défenseur des droits. Une des missions de celui-ci consiste à contrôler le respect de la déontologie de la sécurité par les forces de l’ordre.

Infos du 16 au 22 Mars

Lundi 16 mars
Qui  veut  la  peau  des  ZAD  ?

Était-­‐ce  de  l’ironie  ?  Le  6  mars,  jour  même  où  la  Zone  A  Défendre  (ZAD)  de  la  forêt  de  Sivens  a  été une  nouvelle  fois  évacuée  par  la  police,  Manuel  Valls  s’est  inquiété  du  «  silence  de  la  société  et  des intellectuels  »  devant  la  montée  de  l’extrême-­‐droite  (cf.  Le  Monde  du  7  mars).  Vue  du  Tarn,  où  les opposants  à  la  construction  du  barrage  de  Sivens  ont  été  pendant  tout  le  mois  de  février  confrontés à  des  pratiques  d'inspiration  fasciste,  la  déclaration  du  Premier  ministre  apparaît  comme  une insolente  provocation.  Car  c’est  bien  sur  une  frange  de  l'extrême-­‐droite  que  son  gouvernement  s’est appuyé  pour  affaiblir  la  lutte  contre  le  projet  de  barrage  et  faciliter  l’évacuation  de  la  ZAD  du  Testet.
Pour  rendre  intelligible  cette  affirmation,  un  bref  retour  sur  des  faits  peu  médiatisés  est  nécessaire.
A  partir  du  weekend  du  31  janvier  dernier,  de  petits  groupes  d’hommes  commencent  à  bloquer l’accès  de  la  ZAD  à  tous  ceux  qui  veulent  s’y  rendre.  Pour  couper  le  contact  entre  les  zadistes  et  leurs nombreux  soutiens  dans  la  région,  ces  groupes  n’y  vont  pas  de  mainmorte  :  ceux  qui  apportent  des vivres  aux  défenseurs  de  la  forêt  sont  dévalisés  de  leur  chargement  ;  d’autres  se  retrouvent  les  pneus
crevés,  la  voiture  dans  le  fossé  ou  même  renversée  sur  le  toit,  faute  d’avoir  fait  profil  suffisamment bas  ;  tous  sont  ouvertement  menacés,  et  parfois  suivis  quand  ils  s’éloignent  des  barrages  de  ces «  pro-­‐barrages  ».
C’est  ainsi  que  le  maire  d’une  petite  commune  du  Sud  du  Tarn,  Patrick  Rossignol,  venu  participer  à une  discussion  sur  la  ZAD  le  1 er  février,  est  «  filé  »  de  Sivens  jusqu’au  centre-­‐ville  de  Gaillac.  Y  ayant garé  sa  voiture  le  temps  d’une  réunion,  il  retrouve  à  la  sortie  son  pare-­‐brise  éclaté.  Dans  le témoignage  qu’il  a  fait  tourner  sur  internet,  il  relate  aussi  comment  le  groupe  de  militants  gaillacois
venus  l’accompagner  à  la  gendarmerie  pour  porter  plainte,  quelques  minutes  plus  tard,  est  attaqué  à la  barre  de  fer  par  des  «  pro-­‐barrages  »  ;  les  gendarmes  ne  daignant  sortir  de  leur  bâtiment  qu’au dernier  moment,  alors  que  les  faits  se  déroulent  juste  sous  leurs  fenêtres.
Tout  au  long  du  mois,  les  participants  à  la  lutte  contre  le  barrage  sont  fréquemment  menacés  et molestés  en  présence  des  forces  de  l’ordre  (les  zadistes,  eux,  ont  la  chance  de  l’être  sans  témoin dans  la  forêt,  à  toute  heure  du  jour  et  de  la  nuit).  Les  gendarmes  se  présentaient  aux  abords  de  la ZAD  en  mission  d’interposition,  mais  leur  connivence  avec  les  «  pro-­‐barrage  »  était  grossière.
Dimanche  1 er  mars,  un  jeune  homme  tentant  de  gagner  la  ZAD  en  soirée  se  voit  ainsi  barrer  la  route et  sommer  de  descendre  de  son  camion,  lequel  est  promptement  incendié  sous  les  yeux  des gendarmes.  Ceux-­‐ci  se  disant  trop  peu  nombreux  pour  s’y  opposer,  ce  qui  les  empêchera  même  de
dresser  un  procès-­‐verbal…  Mercredi  4  mars,  enfin,  les  forces  de  l’ordre  qui  encerclaient  le  site  pour empêcher  tout  renfort  et  tout  approvisionnement  aux  zadistes  laissent  les  «  pro-­‐barrage  »  (plus nombreux  à  ce  moment-­‐là)  déferler  sur  le  campement  d’opposants,  où  les  témoignages  font  état  de chasses  à  l’homme,  de  saccage  et  d’incendie,  jusqu’à  des  cabanes  abritant  des  animaux  (voir  les
reportages  du  site  Reporterre.net).
Cet  effrayant  élan  de  citoyenneté  active  a  d’abord  été  mené  sans  étiquette  politique  visible,  si  ce n’est  les  brassards  «  anti-­‐pelluts  »  (anti-­‐chevelus)  qu’arboraient  les  «  pro-­‐barrages  ».  Dans  la  presse locale,  ces  petits  groupes  pratiquant  l’intimidation  étaient  présentés  comme  des  «  agriculteurs  du
coin  en  colère  »  ;  mais  les  gens  qui  les  connaissent  les  disent  électeurs  voire  militants  du  Front National,  et  pas  tous  agriculteurs.  Les  sites  internet  revendiquant  ces  actions  tiennent  un  discours  de droite  dure  (anti-­‐chômeurs,  anti-­‐étrangers)  agrémenté  de  menaces  de  mort  contre  les  zadistes.  L'un des  animateurs  du  blog  Testet.sivens.com  serait  contributeur  du  journal  Boulevard  Voltaire.  Sur
place,  certains  4*4  arboraient  des  écussons  du  Front  national.  En  assumant  publiquement l’organisation  d’une  semaine  de  blocage  de  la  ZAD  à  compter  du  2  mars,  la  FNSEA  (qui  avait  depuis plusieurs  mois  encouragé  l’action  de  ces  «  ultras  »  au  niveau  local),  a  apporté  sa  caution  officielle  à des  pratiques  crapuleuses.  En  ne  les  dénonçant  pas,  le  gouvernement  de  Hollande  et  Valls  leur  a aussi  donné  son  approbation.
En  fait,  pour  tous  ceux  qui  ont  été  confrontés  à  cette  offensive,  la  situation  a  ceci  de  troublant  qu’on ne  sait  pas  dire  si  la  police  était  en  soutien  des  «  pro-­‐barrage  »  civils  ou  si  ce  sont  ces  miliciens  qui ont  aidé  la  police  à  réprimer  une  occupation  insupportable,  aussi  bien  aux  yeux  des  barons  du Conseil  général  du  Tarn  qu’à  ceux  du  Premier  ministre.
Par  ailleurs,  le  contraste  est  assez  frappant  entre  l’extrémisme  des  moyens  employés  pour  remettre la  forêt  de  Sivens  à  disposition  des  bétonneurs,  et  le  caractère  consensuel  des  arguments  servant  à justifier  ce  coup  de  force.  Prenons  l’appel  des  Jeunes  Agriculteurs  de  Midi-­‐Pyrénées  aux  agriculteurs FNSEA  de  toute  leur  région  (28  février)  :  «La  comédie  n’a  que  trop  duré.  Il  faut  passer  d’une  phase  ou
les  «anti-­‐tout»  peuvent  tout  bloquer  à  une  phase  de  développement  responsable  où  les  projets économiques  structurants  pour  nos  territoires  peuvent  être  engagés  et  réalisés.  Au-­‐delà  de  cette retenue  sur  le  Tescou,  c’est  l’enjeu  global  de  Sivens».  Voilà  un  mot  d’ordre  auquel  personne  dans  la classe  politique  ne  saurait  s’opposer,  à  part  peut-­‐être  Jean-­‐Luc  Mélenchon  quand  il  va  à  la  pêche  aux voix  en  masquant  son  vieux  fond  productiviste.  Le  secrétaire  d’État  à  la  Réforme  territoriale,  André Vallini,  n’a-­‐t-­‐il  pas  déclaré  récemment  «  Pour  que  la  France  reste  la  France,  nous  devons  continuer  à construire  des  aéroports,  des  barrages,  des  autoroutes,  des  lignes  de  TGV,  des  équipements  de tourisme  »  ?  Mais  cela  pourrait  être  François  Bayrou,  Xavier  Bertrand  ou  Marine  Le  Pen.
Cela  veut  dire  qu’en  allant  bastonner  dans  le  froid  et  la  pluie  les  jeunes  chevelus  qui  tentent concrètement  de  rendre  un  autre  monde  possible,  les  miliciens  du  FN  et  de  la  FNSEA  défendent  les intérêts  de  l’élite  politico-­‐économique  qu’ils  disent  honnir.  Celle-­‐ci  continue  généralement  de  se présenter  comme  modérée  et  démocrate,  mais  elle  peut  apparemment  compter  sur  des  hommes  de
 terrain  pour  empêcher,  par  tous  les  moyens  nécessaires,  qu’émergent  des  alternatives  idéologiques et  pratiques  au  développement  industriel,  à  la  société  de  croissance  et  à  son  inévitable  saccage, humain  et  écologique.  On  est  là  au  cœur  de  l'identité  historique  de  l’extrême-­droite  –  au-­‐delà  de  ce qu’elle  charrie  évidemment  de  chauvinisme  et  de  xénophobie,  au-­‐delà  des  votes  essentiellement
protestataires  qui  font  son  succès  électoral  :  l’extrême-­‐droite  s’enracine  dans  la  société  quand  les classes  dirigeantes  sont  contraintes  de  lui  confier  un  rôle  dans  le  maintien  de  l’ordre,  c’est-­‐à-­‐dire  la répression  de  mouvements  anti-­‐capitalistes  et  la  pérennisation  des  affaires  courantes  (que  le business  puisse  continuer  as  usual).  Ce  rôle  est  en  général  tenu  par  des  individus  et  des  groupes  qui devraient  aussi  s’en  prendre  au  système  économique,  car  celui-­‐ci  s’apprête  à  les  broyer,  mais  qui
pour  tout  un  ensemble  de  raisons,  personnelles  et  sociologiques,  se  rangent  du  côté  de  l’ordre  –  le leitmotiv  des  «  pro-­‐barrage  »  pendant  toutes  ces  semaines  était  «  nous  demandons  à  l’État d’appliquer  la  loi  »...  quitte  bien  sûr  à  exercer  cette  pression  en  piétinant  nombres  de  lois.
Au  moment  où  l’Etat  français  s’engage  dans  une  gigantesque  opération  de  com’  environnementale, qui  culminera  en  décembre  prochain  avec  la  conférence  Paris  Climat,  il  est  crucial  pour  lui  d’étouffer la  voix  qui  se  fait,  poussivement  mais  avec  insistance,  entendre  depuis  quelques  années  en  France  et ailleurs,  notamment  à  travers  les  luttes  contre  les  grands  projets  utiles  au  capitalisme  :  seul  l’arrêt  du
développement  industriel,  suivi  d’un  inventaire  poussé  dans  notre  civilisation  de  machines,  peut nous  rendre  l’espoir  d’un  monde  vivable,  socialement  et  écologiquement.  Cela  implique  bien  sûr  un changement  politique  immense  que  nos  élites  veulent  conjurer  à  tout  prix,  en  jouant  sur  les  peurs  et les  contradictions  au  sein  du  peuple.
Si  l’ambiance  était  plus  légère  ces  temps-­‐ci,  on  pourrait  rire  longuement  de  cette  fanfaronnade  de Manuel  Valls  en  vue  du  sommet  de  décembre  :  «  Comme  la  France  des  Lumières  a  su  montrer  un chemin,  le  modèle  environnemental  français  doit  inspirer  le  monde.  C’est  en  quelque  sorte  un  nouvel
universalisme  que  nous  devons  proposer.  »  Après  les  derniers  rebondissements  du  conflit  de  Sivens et  le  blanc-­‐seing  donné  par  le  gouvernement  à  la  FNSEA,  on  sait  donc  que  le  Diderot  du  XXIè  siècle s’appelle  Xavier  Beulin,  et  que  le  nouvel  universalisme  français  consistera  à  encourager  partout  sur  la terre  l’usage  de  pesticides  dans  les  mêmes  quantités  que  chez  nous.
Trêve  d’ironie  grinçante  :  pour  les  nombreux  habitants  de  la  région  de  Sivens  qui  se  sentent  meurtris par  les  derniers  événements,  comme  ils  l’avaient  été  par  la  mort  de  Rémi  Fraisse  il  y  a  4  mois,  tout n’est  pas  encore  joué.  Le  barrage  reste  à  construire  et  peut  donc  être  empêché.  Mais  nous  savons désormais  jusqu’à  quelles  extrémités  les  défenseurs  de  cet  ouvrage  sont  prêts  à  aller  –  nombre d’articles  de  presse  sur  la  réunion  du  Conseil  Général  le  6  mars  attestent  d’ailleurs  que  certains  élus tarnais  n’ont  aucune  intention  de  construire  un  barrage  plus  petit  que  celui  initialement  prévu.
Célia  Izoard  et  Matthieu  Amiech
Matthieu  Amiech  est  un  des  éditeurs  du  recueil  Sivens  sans  retenue  (La  Lenteur,  2015)  et  Célia  Izoard est  traductrice  et  journaliste.  Tous  deux  habitent  le  Tarn  et  sont  opposés  au  projet  de  barrage  sur  le Tescou.

lettre à France 3 concernant sa couverture récente sur Sivens…

On  peut  être  pour  ou  contre  le  barrage  de  Sivens.  Mais  ce  qu’on  attend  des  médias  c’est une  information  neutre  ou  donnant  la  parole  aux  différents  partis.  Or,  FR3  Midi-­Pyrénées  s’est  illustré  par  le  traitement  ignominieux  de  cette  actualité  régionale.  Les  JT de  FR3  national  étant  souvent  plus  nuancés,  plus  informatifs  en  quelque  sorte.
Le  dernier  exemple  en  date  concerne  Mme  Odette  Maurel,  la  vieille  dame  habitant  une maison  dominant  le  chantier,  donc  la  ZAD.  Si  elle  est  partie  et  a  été  relogée  c’est  d’abord et  avant  tout  parce  que  lors  des  travaux  de  déboisement  indûment   initiés  par  le  CG  du Tarn  et  la  CACG  les  poteaux  électriques  alimentant  sa  maison  ont  été «  malencontreusement  »  abattus.  C’est  certes  beaucoup  plus  facile  de  stigmatiser  les méchants  zadistes.
Et  tous  ces  mercenaires  des  différentes  FDSEA,  pas  la  moindre  critique  de  leur
impunité  ?
Vive  donc  le  retour  de  la  Milice  et  des  collabos,  votre  rédaction  est  prête  à  recevoir  la Francisque

Du mouvement à Sivens (engins de chantier, GMs), la version du préfet, que l’on vérifiera :« J’ai été informé du fait que l’arrivée sur le site de SIVENS de matériel de chantier suscitait un certain émoi au sein des opposants laissant à penser que les travaux du barrage reprenaient. Il n’en est rien. Il s’agit avant tout de nettoyer le site des matériaux qui y ont été accumulés lors de l’occupation et de reboucher les douves qui avaient été établies autour de la base vie. Ces dernières représentent en effet un danger pour les personnes et n’ont plus aucune utilité. Par ailleurs, ces douves qui accumulent de l’eau directement en relation avec la nappe du Tescou seront rebouchées avec la terre extraite lors de leur creusement. Les travaux sont effectués sous le contrôle de la DTT. Les entreprises engagées ont fait l’objet d’une réquisition de ma part et agissent donc dans ce cadre uniquement. Par ailleurs, des travaux de rétablissement des lignes électriques et de la route vont être engagés prochainement. »

Mardi 17 mars
Trois livres qui viennent d’être publiés sur Sivens :
Mercredi 18 mars
La commission spécialisée du Conseil National de la Transition Ecologique (CNTE) présidée par le sénateur Alain Richard et chargée, après la mort de Rémi Fraisse, de proposer des pistes de rénovation du débat public a reçu 13 membres et représentant-e-s de mouvements citoyens opposés à des projets inutiles et
imposés. Bon, nous on ne croit pas trop à ce genre de trucs mais les docs sont intéressants : le communiqué de la coordination et surtout la plate-forme proposée par les « opposants » avec plein d’exemples intéressants. A regarder…
Jeudi 19 mars
  • Auto-congratulation et préchi précha productiviste  suite au blocage de la ZAD, prélude à l’expulsion de la ZAD dans l’étincelle, le journal des JA. Trois docs  scannés: le premier, le second et le troisième.

Samedi 21 mars

Les zadistes sont les héros de notre temps

On y va fort avec ce titre : « Héros de notre temps ». Mais face à l’opprobre que le gouvernement et la presse possédée par les intérêts financiers déversent sur ceux et celles qui s’opposent à la destruction du monde, il est nécessaire de le dire : oui, le mouvement des Zad est un enjeu crucial de l’époque, oui le courage de s’opposer pacifiquement aux ravageurs est exemplaire. Deux semaines après l’expulsion de la Zad de Sivens, voilà ce que disent les zadistes.
- Sivens, reportage
Depuis des mois, à Sivens, zadistes et associations tentent d’alerter sur les collusions entre le pouvoir politique, l’agrobusiness et le maintien de l’ordre. Après l’homicide par la gendarmerie, en octobre dernier, d’un jeune écologiste, Rémi Fraisse, les occupants de la Zad et les opposants au projet de barrage ont subi, au quotidien, les agressions des pro-barrages organisés en véritables milices, sous l’oeil passif des "forces de l’ordre"
Expulsés de la zone à défendre puis des communes environnantes, zadistes et militants n’en ont pas pour autant disparu. C’est là une des forces des Zad. Insaisissables, elles peuvent se désagréger sans dommage, pour se recomposer dans un autre espace temps. Paroles de zadistes :

Après la décision du Conseil Général du Tarn de construire un barrage sensiblement similaire au projet initial, la lutte est loin d’être finie pour les opposants. Et la "deuxième mi-temps" pourrait reprendre avec le « Printemps de Sivens », deux jours de mobilisation populaire attendus les 25 et 26 avril.
Comment voient-ils la situation ? Comment envisagent-ils la suite ? Rencontres avec des militants, trois jours après leur expulsion de la zone à défendre.

Laurent : « Un processus a été amorcé, et ils ne pourront plus l’arrêter »


« Je suis arrivé il y a un an et demi, ce qui m’a permis de faire des aller-retours très réguliers sur la ZAD du Testet. Aujourd’hui, le système impuissant à se débarrasser de nous est allé chercher son bras armé fasciste : des personnes qui profitent des réseaux FNSEA, et dont certains sont connus comme étant de l’extrême droite.
On n’est pas surpris de les voir maintenant traîner autour des barons. Dans cette histoire, nous sommes moins une menace pour l’Etat que pour le système que protège le gouvernement, et qui inclut des gros lobbies, notamment agricoles. Là on attaque une véritable mafia qui est très bien enracinée, avec des élus un peu partout. Ils faisaient ce qu’ils voulaient jusqu’à présent, sans qu’il y ait de réelle opposition.
Pour une fois, ces lobbies n’ont pas pu agir librement, et ils n’ont sans doute pas trouvé d’autres solutions que d’appeler les milices fascisantes, qu’on a vues à l’oeuvre : des intimidations et agressions en tous genres avec parfois la complicité de la gendarmerie (on a des exemples filmés de gendarmes qui protègent des exactions de pro-barrages). Je suppose et j’espère que la majorité des agriculteurs, y compris tarnais, ne cautionnent pas ce qui s’est passé...
Et pour la lutte contre le barrage, on est toujours là, car rien n’a changé. Contrairement aux apparences, ils ne se sont pas débarrassés de la Zad, ils ne s’en débarrasseront jamais. On discute, on se concerte, et dès qu’il y aura besoin de réoccuper, on réoccupera. Nous sommes en lien avec d’autres luttes : un processus a été amorcé, et ils ne pourront plus l’arrêter. Rien n’est fini à Sivens, et nous n’avons toujours pas l’intention de laisser faire ce barrage. 

Camille : « Imaginer des infrastructures qui créent du social et de l’humain »


« Je suis resté presque six mois sur la Zad à partir de février 2014. Puis J’ai fait un break, et je suis revenu en octobre. L’idée, pour moi, ce n’était pas d’occuper la zone de façon pérenne, parce qu’elle est trop petite, et sur le long terme, notre présence aurait été trop impactante pour l’environnement. Ce qu’on veut, c’est faire en sorte que ce projet de barrage soit abandonné.
Pour nous, ça va bien au-delà car il s’agit d’une lutte contre l’incohérence écologique et contre la corruption. J’avais l’espoir que notre détermination permette aux gens d’ouvrir les yeux sur les collusions entre le pouvoir politique en place et les entreprises. Il faut vraiment que la décision soit reconsidérée, le projet repensé. Les porteurs de projet vont devoir tout reprendre depuis le début, l’enquête publique, les études et tout le reste. Je crois encore qu’il est possible que ce barrage ne voit jamais le jour, malgré les pressions de syndicats agricoles. Qui, pour certains, donnent l’impression d’être instrumentalisés.
Je considère qu’on est dans une forme de victoire puisque les buts et les méthodes employées par les politiques pour imposer leur projet ont été mises au grand jour, même si encore trop peu de gens s’en rendent compte. C’est symbolique ce qu’on fait ici : s’en prendre aux gros projets anti-démocratiques. Ce qui m’intéresse, c’est d’imaginer des infrastructures qui créent du social et de l’humain, mais pas de la croissance. »

Gaël : « Un mélange politico-magouillard invraisemblable »


« Je suis venu dans la région il y a longtemps, et revenu avec des amis au mois de septembre 2014. Je n’imaginais pas la quantité de violence qu’il y avait autour de ce projet. Il y a eu la mort de Rémi Fraisse, puis l’escalade de pressions de la part des pro-barrages, adhérents de la FDSEA, des JA ou partisans du FN, et qui viennent là pour faire de l’activisme fascisant. On est dans un mélange politico magouillard invraisemblable.
Sur le projet lui-même, on s’est aperçus que c’était une sacrée mafia qui avait mis ça en place. Je retrouve une ambiance du terroir bien patriarcale. Ce que je souhaite, c’est que la lumière soit faite sur toutes les personnes qui ont commis des exactions à Sivens, et qu’on arrive à ouvrir un peu cette république et cette soi-disant démocratie à des voix qui sont loin d’être majoritaires.
Et que l’on commence enfin à respecter nos ressources premières que sont l’eau, la terre et l’air. Il faut mettre la pression pour que justice soit faite. Justice à tous les niveaux : social, environnemental, humain et politique. Mon but est de continuer à lutter : on est en vie, on a des convictions, et notre combat est légitime !
Ou alors il faudra que l’Etat trouve un moyen d’éradiquer tous les "djihadistes verts", tous les gens qui pensent que l’écologie est une chose incontournable pour que la planète ait une chance de survivre. »

Nadine et Pierre Lacoste : « Un gros gâchis humain et environnemental »


Pierre et Nadine habitent à proximité immédiate de la Zad. Pierre est éleveur.
Pierre : « Tout ça est un gros gâchis humain et environnemental depuis le début : on veut faire un lac là où il n’en faut pas, avec de l’argent public, dans un projet inutile d’un autre siècle.
Et la semaine passée, on a vu, avec les pro-barrages, les rouages d’un système soutenu par des gens dont certains ne savaient même pas ce qu’ils défendaient, mais qui sont capables de tout. »
Nadine : « La FDSEA et les JA ont fait des actions complètement illégales : intimidations, agressions, violences, ont empêché les gens de sortir de chez eux, de circuler sur les routes, ils ont fait des contrôles au faciès, des contrôles d’identité. Le tout en présence de gendarmes qui ne faisaient strictement rien, sur ordre. Aujourd’hui, nous en sommes exactement au même point qu’avant la mort de Remi Fraisse. Avec les tensions en plus. »
Pierre : « Avant de voter quoi que ce soit, il aurait au moins fallu répertorier les agriculteurs qui ont réellement ces besoins en eau, savoir combien d’hectares ils veulent irriguer et pourquoi. Actuellement, c’est le grand flou. En réalité, ce barrage répond aux besoins d’une vingtaine d’exploitants et il ne serait d’aucune utilité pour ceux qui sont le long de la vallée.
Pour moi, la solution était de créer de retenues collinaires en rapport avec des besoins réels. En tant qu’éleveur, je défends une vision respectueuse de l’agriculture, de l’environnement, de l’humain, et j’aimerais que l’argent public soit mieux utilisé. Je veux pouvoir nourrir mes vaches avec du foin et de l’herbe sans avoir recours au maïs et aux compléments comme le soja. Ce projet, c’est aussi le risque de voir arriver dans la vallée la culture intensive du maïs semence. »
Nadine : « La suite de la lutte ? Pour nous rien n’a changé : pas de barrage à Sivens ! »

Rezée : « Rien n’est joué, pas question de perdre espoir »


« J’étais sur zone lors de l’expulsion. On ne s’attendait pas que ça puisse se passer comme ça. Bien sûr, on savait qu’il y avait beaucoup d’entraide et de liens entre les pro-barrages et la gendarmerie, mais là, ça a dépassé absolument toutes les limites. On a eu droit à des menaces de mort, et j’ai entendu de très nombreux récits d’agressions.
Nous, on ne lâchera rien, c’est certain. Mais j’espère surtout que ça va réveiller des gens. Ce qui se passe ici est totalement fou : on se croirait en 1940, on n’a même plus le droit de circuler en ville sans être traqués par deux camions de gendarmerie, même quand on se promène à trois ou quatre. Ce qui m’a le plus marquée cette semaine, c’est le mensonge des gendarmes avec un grand sang-froid. Ils osent dire que non, ils ne font rien d’illégal. La réalité, c’est qu’ils ont brûlé nos affaires et nos pièces d’identité pour nous reprocher ensuite de ne pas les avoir. Ils ont cassé tout ce qu’on pouvait avoir sur la Zad pour dire ensuite qu’on est sales, désordonnés…
Mais cette lutte m’a aussi montré que je ne suis pas seule à voir les choses telles qu’elles le sont réellement, ça fait du bien ! Ça me conforte dans mon engagement, et dans l’idée qu’il y a encore beaucoup à faire. Au final, toute ce qu’on a vécu pendant des mois a permis de montrer et de faire grandir notre détermination. Avec la solidarité, on peut arriver à changer les choses. Rien n’est joué, et il n’est pas question de perdre espoir. Pour la suite, il faut commencer par se reposer un peu après ce qu’on a vécu. Et continuer la lutte de plus belle. »

Hélios : « Continuer à faire de vraies rencontres »


« Je me suis installé sur la Zad le 25 octobre. La rencontre avec les agriculteurs ? A travers le prisme médiatique, on peut avoir l’impression que c’est un échec total. Le message véhiculé souvent, c’est : les zadistes-gauchistes-anarco-terroristes versus les agriculteurs. La réalité est différente : certains d’entre eux, syndiqués ou non, nous soutiennent. Peut-être les prémices d’un succès futur pour une rencontre avec des personnes qui, a priori, ne sont pas de notre côté. Certains ont pris la mesure de la situation sur le terrain, savent que ce projet est absurde pour de nombreuses raisons et que notre mouvement d’opposition est légitime.
Dans la presse, on lit que l’appareil de maintien de l’ordre est une machine puissante et bien organisée, qui a expulsé une trentaine de Zadistes à bout de souffle. Ma version, c’est qu’on fait peur à l’Etat, au vu de l’arsenal déployé. Car sous de nombreux aspects, le droit nous a donné raison. Les idées que nous défendons sont très fortes, notamment au niveau de la démocratie directe contre la démocratie représentative, et de l’autonomie contre une organisation généralisée de la dépendance.
Il y a eu ces dernières semaines un climat anxiogène dangereux. Nous ne voulons pas de nouveaux incidents, donc ce qui a été envisagé collectivement, c’est de passer provisoirement la lutte sous une autre forme, moins visible, en sous-marin, mais tout aussi déterminée, avec des actions ciblées.
Surtout, on est dans un mouvement d’enracinement, beaucoup de gens nous ont soutenu car ils ont compris le sens de cette lutte. Il faut maintenant qu’on leur rende ce soutien, qu’on aille dans les fermes, qu’on aille les aider, aller sur les marchés, discuter avec les tarnaises et les tarnais et continuer à faire de vraies rencontres. »

Pétov, opposant de la première heure : « Une mi-temps après un match nul »


« Manifestement, on est à une mi-temps de cet affrontement, et j’ai l’impression qu’on a fait un peu match nul. Tout est encore possible : le pire, comme le meilleur. Enfin, pas vraiment le meilleur puisqu’une partie de la forêt a déjà été détruite par le début des travaux. Il est clair que le Conseil Général n’a pas renoncé à transformer la vallée de Sivens en un sinistre lac, même s’il est de quelques mètres inférieur au projet initial. Donc, pour nous, le danger reste strictement le même, mais je pense qu’on a gagné du temps et que la mi-temps va durer… longtemps.
On verra avec la nouvelle assemblée départementale, si les élections changent la donne, si l’affaire de Sivens joue un rôle, si Carsenac et ses complices vont être désavoués par les électeurs. J’en doute un peu, mais on peut toujours rêver !
Nous, on se prépare à empêcher le redémarrage des travaux, et à garder cette zone intacte. Ce qui est sûr, c’est que depuis le début, on ne sait pas sur quel pied danser avec nos adversaires : il y a toujours un flou extraordinaire sur cette affaire. Le vote du Conseil général le prouve, ils veulent absolument faire ce barrage, malgré la mort de Rémi Fraisse, malgré notre résistance déterminée, malgré l’avis défavorable du Conseil National de Protection de la Nature, et d’associations écolo, malgré toutes les voix qui s’élèvent. Ils s’entêtent, nous aussi.
D’ores et déjà, nous sommes en train d’organiser un week-end les 25 et 26 avril, "le printemps de Sivens". Ces deux jours auront pour but d’appeler à la vigilance et à la mobilisation, afin de marteler encore et toujours notre opposition au nouveau projet de barrage. »
  • Des ami-e-s d’Angers ont rendu visite à la FNSEA mardi dernier pour y faire un peu de ménage… La vidéo est ici et une chanson chantée sur place est en vidéo là...Dans la presse locale tendance PPA, il est dit que la FNSEA porte plainte, notamment pour le « traumatisme occasionné »…on l’a connue plus vaillante par chez nous….
  •  Un nouveau film militant sur Sivens :  «La lutte contre le barrage de Sivens et la nécessité de désobéir».   Dans une société soit-disant démocratique, des élu-e-s utilisent l’argent public sans concertation pour des projets qui s’avèrent parfois illégaux et surtout contradictoires avec la protection de l’environnement, sous la pression des entreprises privées et d’un modèle agricole intensif.   Ce film dénonce la violente répression policière qu’utilise l’Etat pour faire taire une contestation légitime qui elle de son côté use et usera de l’occupation de terrain comme un moyen fort de résister à ces projets inutiles et nuisibles et à ce monde toujours plus productiviste et destructeur.
  • Un texte sur la situation politique locale à la veille des élections : la Valls des sans-étiquettes

Infos du 23 au 29 Mars

Lundi 23 mars
Un témoignage/analyse pertinent  de Camille, occupant depuis les premiers jours de la ZAD du Testet…



Mardi 24 mars
Assiégeons la FNSEA : un compte rendu de l’action des copains et copines de Nimes et alentours le 10 mars dernier. 5 pages de récit et de réflexions : à lire sans faute

Mercredi 25 mars
A prévoir près de Tarbes ce samedi 28 (Cf. aussi page Agenda), à Bordères sur l’Echez, 10h30, un rassemblement massif sur le site de la future usine de traitement des déchets…un dossier fumeux dont on a déjà parlé sur ce site…

Jeudi 26 mars
« Sivens, rien n’est réglé » sur le site de la Ligue des Droits de l’Homme
Elections départementales et GPII tarnais : le collectif RN126 contre le projet d’autoroute Castres-Toulouse a sondé les candidats sur les cantons concernés  et un électeur désabusé nous envoie sa lettre à P. Verdier et C. Oriol, candidats DVG sur le canton comprenant Sivens.

On ne l’a pas donné jusqu’à présent : le site de la ZAD d’Agen !

Dimanche 29 mars


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