Ce blog rassemble, à la manière d'un journal participatif, les messages postés à l'adresse lemurparle@gmail.com par les personnes qui fréquentent, de près ou de loin, les cafés repaires de Villefranche de Conflent et de Perpignan.
Mais pas que.
Et oui, vous aussi vous pouvez y participer, nous faire partager vos infos, vos réactions, vos coups de coeur et vos coups de gueule, tout ce qui nous aidera à nous serrer les coudes, ensemble, face à tout ce que l'on nous sert de pré-mâché, de préconisé, de prêt-à-penser. Vous avez l'adresse mail, @ bientôt de vous lire...

BLOG EN COURS D'ACTUALISATION...
...MERCI DE VOTRE COMPREHENSION...

vendredi 6 mars 2015

Zones A Defendre - Chronique février 2015 : NDDL, Sivens, Roybon, Agen, Allauch ... LGV Lyon-Turin Val de Susa

Des infos, des liens, des photos, pour tout savoir (ou presque) sur les Zones A Défendre : Notre Dame Des Landes, Sivens, aquiZAD à Roybon, ZAD d'Agen, ZAD d'Allauch

Merci à l 'auteur pour cette compilation


PROJET D’AYRAULT – PORT de NOTRE DAME DES LANDES ( 44 )
Source : ZAD.nadir.org
février 2015
ZAD du TESTET – PROJET DU BARRAGE DE SIVENS (81)
ZAD ailleurs : MaquiZAD à ROYBON (38) – ZAD d’AGEN (47) – ZAD D’ALLAUCH (13)
Projet de Center-parcs à CASTEL JALOUX (47) – LGV LYON-TURIN (TAV) /VAL DE SUSA





Mardi 3 février

NDA : une grande pensée à Ronan OMNES qui nous a quitté ce jour, victime d’une crise cardiaque.
Il fut un des créateurs du collectif NDDL 66 en 2012. Il était né le 4 juin 1949




ZAD de NDDL - 44

Infos du 9 au 15 Février


Mardi 10 février

L’aéroport de Notre-Dame-des-Landes est incompatible avec la biodiversité, jugent des scientifiques


Le Conseil scientifique du patrimoine naturel et de la biodiversité vient de rendre un avis négatif sur les impacts du projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes. C’est le troisième rapport de ce type.

Et encore un. Un avis scientifique de plus qui estime qu’en l’état actuel, le projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes n’est pas compatible avec la préservation de la biodiversité.
Cette fois-ci c’est le Conseil scientifique du patrimoine naturel et de la biodiversité qui s’exprime. Cet organe indépendant, bien que rattaché au ministère de l’Ecologie, rassemble des experts de l’environnement venant à la fois des sciences dures (naturalistes, agronomes, etc) et des sciences sociales (sociologues, philosophes, etc).
Les 1.400 hectares sur lesquels s’étendrait l’aéroport, qui sont pour 98 % une zone humide, « abritent des cortèges floristiques et faunistiques remarquables, présentant une grande valeur patrimoniale », note-t-il dans un avis publié le 2 février.
Le projet d’aéroport prévoit donc une « compensation » : de nouvelles zones humides seraient créées dans les environs de l’aéroport. Mais le Conseil se montre très dubitatif face à cette solution car « les bilans de telles opérations de compensation sur des zones humides restent très insatisfaisants. »
En clair, on ne pourra pas recréer ailleurs une zone humide aussi riche en biodiversité et en services écologiques que celle de Notre-Dame-des-Landes. Le conseil « émet donc un avis défavorable à la destruction de cet ensemble très original par la réalisation de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes ».

Une zone humide « pas compensable »
Cette conclusion ravit le Collectif d’élu-e-s doutant de la pertinence du projet d’aéroport de Notre Dame des Landes. C’est une preuve de plus que « le choix du site de Notre-Dame-des-Landes, fait dans les années 70, n’était pas pertinent compte tenu des problèmes environnementaux qu’il pose », expliquent-ils dans une lettre adressée à la ministre de l’environnement Ségolène Royal.
« Le Conseil n’a pas fait dans la dentelle pour dire non, c’est inhabituel pour des scientifiques », se félicite également François de Beaulieu, naturaliste et historien breton, actif dans la lutte contre l’aéroport.


Selon lui, cet avis vient enfoncer le clou, après toute une série de rapports et d’avis qui émettent de fortes réserves :

La conclusion de l’enquête publique sur le respect de la loi sur l’eau, à l’été 2012. Elle est favorable à la construction de l’aéroport, mais à condition que la méthode de compensation soit validée par un comité d’experts.

Ce comité d’experts rend
un rapport en avril 2013, moins d’un an plus tard. Il émet de nombreuses réserves sur la possibilité de compenser la destruction de la zone humide. « Ces réserves devraient être levées pour que le projet puisse être poursuivi », conseillent les experts.

 Puis c’est au tour du Conseil National de protection de la nature de se prononcer. Il reprend les mêmes réserves, et demande un délai de deux ans pour effectuer des études.

 Enfin arrive aujourd’hui l’avis du Conseil scientifique de la biodiversité. Après avoir invité l’un des auteurs du rapport des experts, Ghislain de Marsily, il se prononce sans ambiguïté contre la destruction de la zone humide.

« Cela confirme ce que disent tous les experts et les opposants à l’aéroport : la zone humide de Notre-Dame n’est pas compensable », estime François de Beaulieu. Seul problème, « aucun des avis de ces conseils n’a de valeur légale, le préfet ou le gouvernement peuvent s’asseoir dessus », déplore le naturaliste.
Éviter de détruire, la meilleure solution

Virginie Maris, philosophe de l’environnement et membre du Conseil, précise : « L’avis ne se prononce pas sur le projet d’aéroport », mais juste sur la préservation de la zone humide. Avec ses collègues, ils s’intéressent depuis quelque temps à la « compensation écologique ». « Et on a des réserves », explique-t-elle. Pour preuve, une fiche rédigée par le Conseil pour la ministre Ségolène Royal, qui l’avertit « d’une grande incertitude quant aux succès de restauration des milieux naturels » et lui rappelle que « la meilleure façon de ne pas perdre de biodiversité reste l’évitement. » En d’autres termes, l’état de nos connaissances scientifiques ne nous permet pas de détruire puis recréer des écosystèmes. Il vaut mieux tout simplement les préserver.

Alors, cet avis peut-il servir aux opposants à l’aéroport ? Au moins, « il apporte la preuve que le ministère a été averti des conséquences d’une destruction », estime la philosophe. « Il peut être utilisé pour les recours devant le tribunal administratif, ajoute François de Beaulieu. Cela montre qu’on a des arguments scientifiques très forts. »
Ce sera donc une pièce de plus dans le dossier des opposants. Ils contestent les arrêtés pris par le préfet sur la loi sur l’eau et les espèces protégées. Rendez-vous devant le tribunal administratif de Nantes fin février ou début mars.
Marie Astier – Reporterre

Ils se plantent, nous plantons : journée de plantation de haie

NOUS PLANTONS : ILS SE PLANTENT

appel à planter des haies sur la Zad
Quoiqu’en disent Valls et Hollande, quelque soit l’acharnement judiciaire de Vinci et de l’etat, nous sommes déterminé-e-s, habitant-e-s de longue date du bocage ou plus récemment arrivé-e-s, opposant-e-s de tous bords, à y lutter et y rester !
Nous invitons à se retrouver sur la Zad pour une journée d’entretien de haies le 10 février.
Lors de l’occupation des 24ha de la zone travaux en octobre 2013, nous avions mis en place un kilomètre de buttes et planté les centaines arbres apportés par chacun-e. Ces arbres ont depuis souffert de l’appétit des chevreuils. Pour ce chantier, nous voulons remettre des arbres plus petits ou des graines, et pailler les buttes.
Cette journée sera aussi l’occasion d’une conférence de presse pour signifier notre volonté déterminée de rester sur le terrain et de le protéger : ces haies, nous voulons les voir pousser des dizaines d’années, nous mettrons tout en œuvre pour les préserver du bétonnage !
Le rendez vous est donné à 10H, le 10 février, sur le chemin au dessus des Planchettes.
Amenez vos potes, vos bottes, un pique nique, des arbres très jeunes et des graines d’arbres.
A bientôt !
A noter d’ores et déjà dans vos agendas : mercredi 25 mars : rassemblement à Saint Nazaire pour le procès de la famille Herbin
A l’appel de l’ACIPA, l’ADECA, ATTAC, Copain 44, les Naturalistes en lutte, des occupant-e-s de la ZAD....

Communiqué de presse lu à l’occasion de cette journée :

Notre Dame des Landes : nous plantons, ils se plantent !
Nous, paysan-ne-s, associations, élu-e-s, occupant-e-s de la ZAD, naturalistes en luttes, réaffirmons notre détermination à mener à leur terme l’ensemble des combats que nous avons engagés contre le projet d’aéroport, que ce soit sur le plan juridique ou sur celui de la résistance sur le terrain.
Le gouvernement s’est engagé l’an dernier à ne pas « débuter les travaux avant l’épuisement de tous les recours juridiques déposés ». Son premier ministre préjuge depuis plusieurs semaines que ces recours seront perdus : il avance de manière répétée que les travaux démarreront quoi qu’il arrive au second semestre 2015. Il revient ainsi sur les engagements pris en laissant entendre qu’il n’attendra pas effectivement l’épuisement des recours, qui est pourtant censé inclure l’ensemble des appels et pas seulement le passage en premier instance. De plus des pressions continuent sur certain-e-s des plus anciens habitant-e-s de la zone comme en témoigne la nouvelle assignation au tribunal pour demander l’expulsion de la famille Herbin.
Face à ces menaces et cette volonté affichée de passage en force nous voulons rappeler que le combat juridique a toute son importance. Contrairement au gouvernement, nous ne présageons pas de l’issue des recours. Nous savons par contre que nous avons des arguments de poids et que nous irons jusqu’au bout de cette bataille juridique.
Ce que nous savons aussi, c’est que ce qui se vit et s’enracine sur le terrain, dans les villages et dans les champs sera décisif. Comme nous l’affirmons depuis plus de deux ans, nous irons aussi jusqu’au bout de cette bataille-là. A ce titre, nous, paysan-e-s, associations, élu-e-s, occupant-e-s de la ZAD, naturalistes en luttes affirmons ici :
que l’occupation de la ZAD continue, que les cultures et habitats se densifient et s’envisagent dans le long terme (comme en témoignent les plantations d’arbres d’aujourd’hui et de multiples autres projets). 
 que nous résisterons ensemble dans toute notre diversité sur les terres de Notre Dame des Landes et bien au-delà face à toute tentative d’attaque de la ZAD et de démarrage des travaux. Nous l’avons déjà fait face à l’opération César en 2012. Nous sommes aujourd’hui plus fort-e-s encore grâce à l’énergie accumulée par le mouvement dans la région et ailleurs, et le soutien de plus de 200 comités locaux.
La multiplication actuelle des résistances face à des projets aussi inutiles que nuisibles nous conforte dans le fait qu’un grand mouvement s’est lancé dans la population face à l’aménagement marchand du territoire, à la privatisation du vivant, ou encore à la disparition des terres agricoles. Ce mouvement porteur d’un immense espoir, laisse augurer de la possibilité de choisir d’autres manières de vivre, d’habiter, de travailler et de cultiver. Elles sont déjà à l’oeuvre et ne se laisseront pas écraser.
Signataires : CéDPa, Adeca, Copain 44, Acipa, des occupant-e-s de la Zad, Naturalistes en Lutte, Union Syndicale Solidaires, NPA, Attac, ...

Infos du 16 au 22 Février

Jeudi 19 février

Relaxe pour Camille à couette et Camille à barbe : A poil Ayrault, à poil Valls, à poil Vinci !

Samedi 22 février

Aujourd’hui manifestations contre les violences meurtrières des farces de l’ordre à Nantes, Toulouse, Turin.
  • 12h30 - Nantes :

  • 14h10 : Pique-nique sur la place Davais

  • 15:15 : Le cortège (Nantes) avec un beau banner signé en plusieurs langues contre la violence policière

Et à Toulouse


 16h00 : Un de la BAC semble être tombé dans leur charge



Première victime de flashball (un journaliste)



  • 16h15 : Un Face à face devant l’Hôtel Dieu aux sons des tambours et hélico.
 18h00 : (Nantes) Quelque personnes courageuses parmi les 1000+ manifestant-es ne se laissent pas intimider par la présence policière.



  • 18h15 : A Toulouse la manif est dispersée
  • 18h30 : Selon Presse océean 10 interpellations et 2 flics blessés ... pas au courant des blessés du coté des manifestant-es. Un journaliste a été arrêté et on lui a obligé d’effacer les données sur son appareil (à confirmer !), un autre a été la cible d’un flashball (voire taranis news)..

Infos du 23 Février au 1er Mars

Lundi 23 février

Nantes : 3 comparutions immédiates liées à la manif de samedi :
  • le 1er 2 mois fermes (sans mandat de dépôt) + 4 mois de sursis + 300 euros pour chaque flic + 400 euros pour payer l’avocat des flics + 3 ans d’interdiction du département.
  • Le 2ème 2 mois fermes avec mandat de dépôt + 4 mois de sursis avec mise à l’épreuve : obligation de soin, obligation de travailler + 250 euros pour les flics.

  • Le 3ème 3 mois fermes sans mandat de dépôt + 3 mois de sursis + 200 euros pour les flics.

  • 3 personnes dont on n’a pas de nouvelles.
    On est sûr qu’il y a 2 comparutions immédiates demain, c’est à 14h00.

Vendredi 27 février

Nantes, capitale des mutilations policières


Communiqué de l’assemblée des blessés suite à la manifestation du 21 février 2015 à Nantes

La manifestation de ce samedi 21 février à Nantes contre les violences policières, sociales et économiques ainsi que la semaine de résistances qui l’a précédé sont des réussites. Bien qu’un important dispositif policier quadrillait la ville, ce sont plus de 3000 personnes qui ont défilé dans des rues qui avaient été interdites lors des précédentes manifestations et l’année dernière.



Des manifestations ont aussi eu lieu à Toulouse, Le Havre, Calais, Montreuil, etc. À chaque fois, les manifestants ont fait face à d’importants dispositifs policiers. À Montreuil, les manifestants ont été encerclé, bloqués pendant des heures et finalement fouillés.
Faut-il le répéter, ce ne sont pas les manifestants mais la police qui détermine le niveau de violence d’une manifestation. Il est normal que la colère s’exprime alors que les morts et les mutilations causées par les forces de l’ordre se multiplient. Il est normal que la colère s’exprime quand nous subissons au quotidien la violence de l’économie, la dépossession des territoires où nous vivons.
Alors même que nous avons été des milliers à défiler contre les violences d’État, la police a encore tiré sur la foule à hauteur de tête avec des Lanceurs de Balles de Défense. Dans la capitale des mutilations policières, les forces de l’ordre continuent de blesser en toute impunité, y compris en s’attaquant délibérément aux journalistes chargés de couvrir la manifestation.
À ces violences s’ajoute une justice implacable qui distribue des peines expéditives et disproportionnées aux manifestants jugés. Un prévenu, blessé par un tir de flashball, a été condamné en comparution immédiate le 23 février. En plus d’une peine de prison il devra payer une amende aux policiers qui lui ont tiré dessus. D’un côté la justice frappe ceux qui luttent, de l’autre elle blanchit les policiers violents.
Nous continuerons de nous organiser pour que ces violences cessent.
Nous appelons les blessés par la police à nous contacter.
L’assemblée des blessés, 24 février 2015

Ci-dessous, le texte lu en début de manifestation
Nantes n’est pas simplement la capitale de la culture et de l’écologie mais aussi celle du Flash-Ball : elle détient le triste record de personnes mutilées. Quatre exactement.
Ce 21 février 2015, un an après la manifestation contre l’aéroport de NDDL, où trois personnes avaient été mutilées par la police suite à des tirs de Flash-Ball, nous sommes venus le rappeler.




Cette manifestation s’inscrit dans une semaine de mobilisation contre le Flash-Ball, contre les violences policières à laquelle participe « l’assemblée des blessées, des familles, des collectifs contre les violences policières ».
Cette assemblée s’est réunie une première fois à Montreuil début novembre 2014. Elle réunit des blessés et mutilés, suite à des tirs de Flash-Ball par la police, venus de toute la France.
Parmi eux  :
• Davy, blessé aux abords du stade de la Beaujoire en 2014  ;
• Yann, blessé lors de l’évacuation d’un squat à Toulouse en 2014  ;
• Emmanuel, Damien et Quentin blessés pendant la manifestation contre l’aéroport de NDDL le 22 février 2014 à Nantes  ;
• Casti, blessé aux abords du stade de la Mosson à Montpellier en 2012  ;
• Ayoub, blessé pendant une intervention policière à Audincourt en 2011  ;
• Geoffrey, blessé lors d’un blocage de lycée contre la réforme des retraites en 2010 à Montreuil  ;
• Joachim, blessé lors d’un rassemblement suite à une expulsion de squat en 2009 à Montreuil  ;
• Clément, blessé pendant la fête de la musique à Paris en 2009  ;
• Pierre, blessé dans une manifestation lycéenne contre la loi LRU à Nantes en 2007.
Depuis 2005, depuis que le Flash-Ball existe, on compte trente six mutilés ou blessés graves (recensés !)
Parmi eux, deux enfants de moins de dix ans  :
• Nassuir, 9 ans, blessé pendant une intervention policière à Mayotte en 2011,
• Daranka, 8 ans, blessé lors d’une intervention policière à Corbeil-Essonnes, en 2011.
Et un mort par Flash-Ball, Mostefa, assassiné pendant une intervention policière à Marseille en 2010.

Pour toutes ces histoires la justice a été saisie.
On compte seulement une condamnation d’un policier contre 37 classements sans suite, non-lieux ou relaxes.
1 contre 37, L’impunité policière est la règle.
Notons qu’après une plainte déposée devant le Tribunal administratif, la responsabilité d’un préfet a été reconnue et l’État condamné à verser des indemnités. D’autres plaintes ont été déposées collectivement et sont en cours.

Face à cette impunité, «l’assemblée des blessés, des familles, et des collectifs contre les violences policières» a pour objectif de :
• Soutenir les personnes blessées par la police.
• Partager et diffuser nos expériences en matière médicale, juridique, médiatique et politique.
• Lancer des initiatives communes.
• Se soutenir mutuellement lors des procès.
• Participer aux luttes en cours.
Pour nous, qu’est-ce que le Flash-Ball et sa nouvelle version, le lanceur de balle de défense (LBD 40)?

Une arme de terreur.
Sa devise est «en blesser un pour terroriser tous les autres».

Une arme mutilante.
Si le Flash-Ball tue rarement, il mutile très souvent. C’est en tant que tel qu’il doit-être interdit.

Une arme punitive.
Dans bien des cas, le Flash-Ball est utilisé comme une arme punitive.
Une punition extrajudiciaire infligée par la police à ceux qui se révoltent, à ceux qui osent emprunter d’autres formes de vie, etc.
Enfin, on peut finir par ce que le Flash-Ball n’est pas, contrairement à ce que disent les fabricants d’armes et la préfecture :
Le Flash-Ball ne se substitue pas à l’arme de service.
• Il ne réduit pas le nombre de personnes tuées par la police.
• Les policiers continuent d’utiliser leurs armes de service.
Les policiers continuent de tuer : de 2000 à 2014, on compte 127 personnes tuées par la police.
Là encore, l’impunité est la règle.
Le Flash-Ball ne se substitue pas à l’arme de service mais bien plutôt à la matraque. En ce sens, il augmente considérablement la violence de la police.

Cette violence (la mort de Rémi Fraisse, les événements de Ferguson entre autres) l’avait remise sur le devant de la scène.
Les attentats de ce début d’année risquent de recouvrir une légitime défiance envers des institutions de plus en plus violentes et faire passer les victimes de la police pour des dégâts collatéraux de la guerre au terrorisme.

Ces derniers mois, combien de manifestations interdites, combien d’arrestations préventives ?
L’État français a beau se présenter comme « le grand défenseur des libertés publiques », il ne se passe pas un jour sans qu’il les remette en cause.
Habitants des banlieues, manifestants, grévistes, zadistes, lycéens, étudiants, migrants, supporters de football “Ultras” : nous sommes de plus en plus nombreux à subir la violence de la police et l’impunité qui l’accompagne.
Nous ne nous laisserons pas gouverner par la peur.

C’est ensemble que nous allons faire face à la militarisation de la police et sa violence, aux mensonges de la préfecture relayés par les médias, au mépris des politiques, à l’impunité quasi-systématique accordée aux policiers par la justice.
Nous le prouvons aujourd’hui par notre présence.
Des collectifs et des blessés au Flash-Ball sont venus de toutes la France pour manifester à Nantes où Pierre, Quentin, Damien, Emmanuel, Davy ont été mutilés par la police.
Face aux armes de la police, 26 février 2015


ZAD du TESTET - 81

Infos du 2 au 8 Février


Lundi 2 février

Barrage de Sivens : première procédure d'expulsion des «zadistes»


INFOGRAPHIE - Après un appel à la mobilisation, les « zadistes » occupant le site du barrage de Sivens arrivent en nombre pour résister à la première procédure d'expulsion. Ils comparaissent lundi et mardi au tribunal d'Albi.
Les «zadistes» du site du barrage de Sivens (Tarn) n'ont jamais été aussi près de la porte de sortie de la ZAD («Zone à défendre») qu'ils occupent illégalement, au moins juridiquement. Alors qu'«aucun arrêté préfectoral d'expulsion» n'a été pris par les autorités, confirme au Figaro le sous-préfet de Castres (Tarn) Jean-Yves Chiaro, ces opposants au barrage - et aux solutions alternatives proposées par les experts mandatés par Ségolène Royal depuis l'abandon du projet hydraulique initial - font l'objet d'une procédure d'urgence qui les conduit dès lundi après-midi et mardi matin devant les tribunaux de la région.
Un huissier de justice est venu samedi sur la ZAD, en forêt de Sivens, pour leur remettre leurs assignations à comparaître au TGI d'Albi, à 25 kilomètres de là. Mercredi dernier, il s'était déjà rendu sur place pour dresser le constat de toutes les parcelles occupées, mettant la puce à l'oreille aux écolo-activistes qui se tiennent prêts à entrer dans la lutte. Cette procédure serait conduite par le Conseil général du Tarn, grand promoteur du projet, et la Compagnie générale des coteaux de Gascogne (CACG), le maître d'œuvre du barrage, mais aussi quelques propriétaires particuliers réunis en collectif.



La zone à expulser concerne la «Métairie neuve»

Cette procédure d'expulsion intervient alors que Ségolène Royal a annoncé, mercredi dernier, que les zadistes seraient délogés dès lors que les élus locaux auront fait le choix du projet à mettre en œuvre, selon les deux propositions recommandées par les experts. Un choix qui, le temps des mille et une études, enquêtes publiques et sésames administratifs nécessaires, prendrait de deux à quatre ans, selon les spécialistes. Mais «seulement» un an et demi, d'après le rapport des experts.
La zone à expulser concerne la «Métairie neuve», une bâtisse où s'organise la communauté zadiste, mais aussi des lieux épars où tentes et cabanes dans les arbres se sont disséminées depuis des mois. Quant au nombre d'«alters» à déloger, il pourrait créer la surprise comme à Notre-Dame-des-Landes au plus fort de la lutte dans le maquis nantais. Si les zadistes étaient une cinquantaine il y a encore une semaine, ils promettent d'être beaucoup plus nombreux, après avoir lancé la semaine dernière un appel à la mobilisation des «forces» venant des autres ZAD de France (Notre-Dame-des-Landes, Roybon, Agen…). «En théorie, le site peut être expulsable dès le 4 au matin…, envisage un opposant au barrage. Il faut être prêt». Ce week-end sur Facebook, la page de «Soutien à la ZAD du Testet» haranguait les internautes : «Toutes et tous au Testet pendant tout février!», afin d'«être intouchables, juste grâce à notre nombre et à notre détermination!»

Des militants pro-barrages venus «encercler» la ZAD

Dimanche, les tensions, déjà très vives depuis des mois entre les zadistes et les pro-barrages de la région (agriculteurs et riverains), redoublaient. Alors que la ZAD entendait fêter la «Journée mondiale des zones humides», en organisant des conférences et des visites avec des spécialistes de la faune et de la flore, tout a été annulé en raison de militants pro-barrages venus «encercler» la ZAD. Des brigades de gendarmes mobiles étaient sur les lieux, pour en interdire les accès. Selon Camille, un zadiste, «des quads ont quadrillé la forêt toute la matinée», leurs conducteurs expliquant défendre les intérêts des agriculteurs car «ils sont nos clients», rapporte-t-il.
Dans l'attente de la décision judiciaire d'expulser ou non, les renforts zadistes commencent déjà à arriver sur place. Les co-voiturages s'organisent sur les réseaux sociaux, et des «djihadistes verts» - comme les surnomment les agriculteurs du coin - apparaissent sur le bord des petites routes de la vallée du Tescou, le pouce levé en direction des automobilistes. Jeudi, les zadistes devraient aussi rencontrer le préfet, pour la première fois.
Delphine de Mallevoüele Figaro.fr
IMPORTANT : des commentaires nous font comprendre que le message n’est pas bien passé sur la situation juridico-politique. Le projet de barrage N’EST PAS ABANDONNÉ ! La zone humide n’est pas du tout sauvée ! Les déclarations de S. Royal ne sont que fumeuses et médiatiques. Le projet sera peut-être arrêté le 6 mars lors d’une plénière du Conseil Général du Tarn. En attendant, il y a une procédure d’expulsion en cours sur la métairie. Dès mercredi 4 probablement, suivant ce que diront les juges (mais on sait déjà ce qu’ils diront), la ZAD du Testet sera expulsable. S’ils nous dégagent, on revient !
           
  • Hold-up financier en Grèce : SYRIZA mon amour ! (Panache Salvetois) : 77% du plan de sauvetage de la Grèce a servi à renflouer les banques (des centaines et des centaines de milliards d’euros). Du déjà vu déjà connu. N’attendons rien de ce côté là…
  • La presse en petit foulard s’en donne à coeur-joie sur les clichés « zadistes » déshumanisant : Barrage de Sivens : première procédure d’expulsion des «zadistes» (Le Figaro) et Sivens : procédures d’expulsion des zadistes (Le Monde). Ils se croyaient tellement certains d’être « dans l’actualité » avec cette expulsion programmée. Mais aujourd’hui, aucune expulsion décidée ! On va donc continuer à réfléchir à « qu’est-ce que ça veut dire de tuer quelqu’un pour faire un barrage pour l’irrigation du maïs en 2015 » ? À vos copies !
  • L’audience d’aujourd’hui au tribunal pour la Métairie Neuve a été repoussée au mercredi 11 février. On verra demain ce qu’il se passe pour les autres parcelles.
  • Demain mardi, soutien aux 3 inculpés qui récupéraient de la nourriture dans les poubelles d’Inter à frontignan! Nous appelons à nous rassembler demain mardi devant le TGI de Montpellier, dès midi pour partager une soupe et exprimer notre soutien aux 3 inculpés par notre présence à l’audience de 14H
  • Sur les événements de hier, les témoignages convergent sur la présence de groupes identifiés extrême-droite, le MAS, qui avait déjà placardé à Gaillac, et qui s’en prend à n’importe qui. Les voilà maintenant avec un sweat noir « anti-pellut » sous le regard débonnaire des gendarmes (voir l’article du 1er février) :


Mardi 3 février

Sivens : les milices pro-barrage agissent dans l’impunité alors que l’expulsion de la Zad se dessine



Le 11 février au plus tôt, le tribunal d’Albi rendra sa décision sur l’ordonnance d’expulsion de la Zad de Sivens. Sur le terrain, les milices pro-barrages entretiennent un climat de violence, sous l’oeil indifférent de la gendarmerie.
 Toulouse, correspondance
« Ce qui se passe est hallucinant » ! Les opposants au barrage de Sivens ne reviennent toujours pas de ce qui s’est déroulé ce dimanche 1er février. Durant toute la journée étaient prévues des activités naturalistes et conviviales sur la zone du Testet, à l’occasion de la Journée mondiale des Zones Humides. Le Collectif Testet et l’association naturaliste APIFERA organisaient l’évènement. Sauf que, dès le matin, des groupes d’agriculteurs et de riverains étaient présents et barraient tous les accès à la zone.
« On sentait une pression qui montait depuis plusieurs semaines mais on ne s’attendait pas à ça », raconte Paul, présent sur place : « Ils ont bloqué les routes, et patrouillaient en quad sur tous les chemins donnant accès à la zone ». Ils, ce sont les pro-barrages, ou plus clairement « anti-zadistes ». Rassemblant agriculteurs favorables au projet, riverains et militants locaux d’extrême droite, ils se rassemblent en demandant le départ de la zone des « peluts », patois de « pelés », désignation péjorative et injurieuse à l’intention de celles et ceux qui ne « sont pas du pays » - les zadistes et leurs soutiens.
Ces riverains ne parviennent pas à concevoir que des habitants « du cru » soient contre le projet de barrage. Durant toute la journée, les accès à la ZAD ont été bloqués, pour une part par ces groupes et d’autre part par les gendarmes. Ces derniers semblaient d’ailleurs s’accommoder de ces opérations pourtant illégales, discutant avec les bloqueurs de manière cordiale sans leur intimer l’ordre de partir.
Des milices violentes et menaçantes
Pourtant, les motifs d’interpellation ne manquent pas. Dès le matin, un opposant a découvert sa voiture, garée à proximité de la zone, les quatre pneus crevés. Plus tard dans la journée, alors qu’une réunion de crise s’organisait chez un particulier à Gaillac, une petite dizaine d’anti-zadistes ont débarqué et tenté de forcer l’entrée, armés d’armes de fortune, barre de fer, pioche, masse… Plus loin, d’autres opposants ont découvert le pare-brise de leur camionnette défoncé à coup de masse.
L’organisation de ce groupe ne laisse aucun doute si l’on en juge par l’habillage commun, treillis militaire ou un sweat-shirt portant l’inscription : « Club anti PLP, soutien aux gendarmes de Sivens ».




Même un élu, agriculteur, producteur de céréales et irrigant, a fait les frais de ces milices. Patrick Rossignol, maire de la commune de Saint-Amancet, a fait partie de ces élus locaux qui ont mis en garde sur de possibles dérives violentes début septembre lors du déploiement massif des forces de l’ordre pour protéger le chantier.
Ce dimanche, il venait sur place pour s’informer sur la zone humide et « apporter quelques vivres aux occupants ». Comme les autres, et malgré sa qualité d’élu, on lui a barré le passage. Il s’est retrouvé ensuite à Gaillac avec les opposants et a assisté à l’arrivée de ce groupe « habillé de treillis militaire et avec des barres de fer et des manches de pioche ». Tentant de rejoindre son véhicule après la réunion, il découvre avec stupeur « le pare-brise et les vitres latérales totalement explosés. On voyait même clairement les marques des barres de fer ». La raison ? « Il semblerait qu’ils aient pris en photo mon véhicule quand j’ai tenté de me rendre sur la zone. »



Une inaction coupable de la gendarmerie locale
Alors que Patrick Rossignol se rend à la gendarmerie de Gaillac pour porter plainte, comme d’autres, le même groupe, toujours aussi équipé, revient et tente de nouveau d‘agresser physiquement les opposants au barrage attendant leurs camarades à l’intérieur de la gendarmerie. Les personnes sur place témoignent « du calme conservé tout le long par les opposants au barrage pour justement éviter que la situation dégénère ». Un journaliste pour un média indépendant s’est alors fait arracher son appareil photo, piétiné et détruit. Une journaliste toulousaine a eu plus de chance et est parvenue à sauver son micro qu’un gros bras tentait de lui arracher des mains.



Tous ces événements se déroulaient devant le commissariat lui-même. Lorsqu’une des personnes a alerté les gendarmes, ceux-ci ont répondu : « Mais non, ils n’ont rien dans les mains ».
Devant la montée de l’hostilité manifestée par le groupe de miliciens, les gendarmes ont fini par sortir, pour séparer les groupes, récupérer une des barres de fer lancée contre la grille du bâtiment… et laisser partir les miliciens pro-barrage comme si de rien n’était. « Comment est-il possible d’avoir des groupes armés et équipés ainsi qui patrouillent dans les rues de Gaillac sans que la police n’intervienne ? » interroge un opposant.
Ce comportement de la gendarmerie a fait réagir des citoyens participants à la coordination et opposants au barrage de Sivens, le Parti de Gauche Tarn et le NPA 81 dans un communiqué : « Pro-barrages et gendarmes, même combat ? ».
Sur ce comportement récurrent des milices et de la gendarmerie, les syndicats d’agriculteurs pro-barrage ne disent mot, ou plutôt avertissent comme toujours que si le projet ne se fait pas et la ZAD n’est pas évacuée, ils ne seront pas en mesure de retenir des velléités violentes de certains agriculteurs et déplorent que l’Etat n’intervienne pas plus rapidement. S’ils n’appuient pas ouvertement ces comportements, ils ne les remettent en cause à aucun moment et nous avons pu observer une certaine bienveillance de la part des responsables agricoles sur de telles actions d’intimidation en décembre dernier.
Ce lundi soir, la Fédération régionale des Syndicats d’Exploitants Agricoles de Midi-Pyrénées annonçait par communiqué un nouveau pas dans leur mobilisation en faveur du projet : « Tant que l’Etat ne sera pas capable de faire respecter sa volonté et le droit à Sivens, il ne sera pas accepté un quelconque contrôle par les agents de l’Etat en Midi-Pyrénées ».
Expulsion de la ZAD attendue dans les prochaines semaines
Parallèlement, la sortie de crise n’est toujours pas claire en ce qui concerne le projet en lui-même. Les occupants de la zone maintiennent toujours leur revendication d’un abandon total du projet. La semaine dernière, un huissier est venu sur la zone du Testet constater l’occupation et notifier les occupants de l’illégalité de leur présence.
Lundi 2 février après-midi, une première audience avait lieu concernant l’expulsion de la ferme de la Métairie Neuve. Me Dujardin, avocate des occupants, nous indiquait que « l’audience a été renvoyée au 11 février, afin que tout le monde puisse disposer d’un avocat et constituer sa défense ». Selon elle, « sans qu’on ne soit sûr de rien, il semble que la justice ne soit pas aussi expéditive qu’elle l’a été à l’automne dernier où elle refusait systématiquement les renvois de jugement ».
Ce mardi 3 février, une nouvelle audience se déroule à Albi concernant les autres parcelles occupées sur la zone, notamment à proximité du lieu de la mort de Rémi Fraisse. Si beaucoup craignent une expulsion rapide dès le rendu du jugement à la mi-février, la ministre de l’Ecologie, Ségolène Royal, ainsi que le ministre de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve ont déclaré que celle-ci interviendrait dès le vote le 6 mars prochain de la décision du Conseil Général concernant l’avenir du barrage de Sivens.
Les conseillers généraux devront alors trancher entre les deux scénarios, élaborés par les experts dans la précipitation entre le mois de décembre et de janvier, et qui nécessiteront dans tous les cas des études supplémentaires et probablement une nouvelle enquête publique. Hasard du calendrier : cette décision interviendra une semaine avant les élections départementales. Dans ce département du Tarn, l’enjeu de Sivens sera certainement central pour en déterminer l’issue.
Camille Martin - Reporterre
Jeudi 5 février

Sivens : Quand la milice pro-barrage fait la loi.

Dimanche 1er février étaient programmés à Sivens des évènements faisant échos à la journée mondiale des zones humides dont un repas partagé ainsi que des conférences et visites à thèmes avec des naturalistes bénévoles.
Seulement voilà, des pro-barrages en avaient décidé autrement. Rassemblés sous prétexte de manifestation de riverains, ils sont venus dans l'intention « ...de mettre une gifle à la journée mondiale des zones humides... » et « ...de bloquer la ZAD pour manifester et surtout pour montrer au gouvernement (leur) détermination pour expulser les zadistes et pour que la zad soit LIBÉRÉE. »
Ce sont là les propos relevés dans l' article « Dimanche 1er février, les riverains ont bloqués la ZAD », sur le site web anonymedes pro-barrages.
Le ton est donné. « ...prêts à faire respecter la loi », ils interdisent tout accès à la zone et par conséquent à la ZAD, en bloquant les routes et en patrouillant en quad sur les chemins.
« Si, après m’être présenté, j’ai pu débattre avec certaines personnes, je me suis fait insulter et menacer par quelques autres. Menaces verbales et menaces physiques. » écrit Patrick Rossignol venu participer à cette journée de découverte.
Devant cet état de fait, la préfecture a dépêché des Gendarmes Mobiles afin d'éviter un affrontement possible. Les comportements observés ensuite, les gendarmes discutant avec les pro-barrages de manière cordiale, la non réaction suite à la crevaison des quatre pneus du véhicule d'un opposant, mettent en évidence un parti-pris des forces de l'ordre (républicain?) contre les défenseurs de la zone humide et en faveur des pro-barrages. Ce comportement ambigu de la gendarmerie a fait réagir des citoyens, des opposants au barrage, le Parti de Gauche Tarn et le NPA 81 dans un communiqué : « Pro-barrages et gendarmes, même combat ? »
Suite au bouclage de la zone, quelques opposants qui en ont la possibilité décident de se rassembler à Gaillac, chez un particulier. Suivis par des manifestants pro-barrages, ils sont menacés par ce qui ne peut être appelé autrement qu'une milice «armée de barres de fer, manches de pioche ». Également à Gaillac, Patrick Rossignol, constatera, de retour à son véhicule, le pare-brise défoncé et la vitre de la portière droite descendue. Son témoignage en document joint est un document qui relate et illustre en grande partie le déroulement de la journée de dimanche. Nous vous proposons également un texte remarquable, qu'il a écrit à froid après les évènements de dimanche, texte exprimant sa position de citoyen, d'élu en tant que maire de St Amancet (Tarn) et d'agriculteur, (maïsiculteur-irrigant) envers le projet de Sivens.
Cette journée sous tension démontre les clivages profonds entre des conceptions radicalement différentes de l'agriculture, entre des perceptions sociales aux philosophies fondamentalement opposées ainsi qu'à la façon d’appréhender les résolutions de ces conflits. Il est à espérer que la violence ne soit pas une fois de plus la méthode retenue par les partisans du barrage de Sivens.
Quelques liens vers des articles en rapport avec les évènements de dimanche :
Collectif pour la sauvegarde de la zone humide du Testet
Samedi 7 février

Lettre ouverte de quelques zadistes de Sivens aux « anti-zadistes » du Tarn.

« Quelques réflexions autour d’un conflit stérile»
Après 15 mois de « guè-guerre » quasi quotidienne entre nous, et avant qu’elle ne débouche sur un nouveau drame que, nous espérons, nous voulons tous éviter, il nous semble important de marquer une pause. Et pourquoi pas, de nous rencontrer autour d’une table afin d’essayer de résoudre ce conflit en adultes responsables autrement qu’à coups d’insultes, de calomnies et de manches de pioches.
Pour lancer le débat, nous aimerions rappeler quelques réalités de base concernant les acteurs en lice et également resituer ce conflit local dans son contexte global.
Vous êtes en majorité des ruraux vivant dans cette région du Tarn et beaucoup, pensons-nous, sont des « petits paysans » confrontés depuis soixante ans à la modernisation accélérée de l’agriculture. Cette dernière vide inexorablement les campagnes en éliminant les faibles au profit des plus forts, comme le veut la logique libérale de compétition incessante, de façon à concentrer le nombre d’exploitations agricoles. Ce terrible processus, à l’oeuvre depuis trois générations, est d’ailleurs en train de s’accélérer avec l’apparition des fermes-usines comme la fameuse « ferme des milles vaches » en Picardie. Comme d’habitude, l’Europe technocratique et l’Etat français de gauche comme de droite favorise cette évolution qui nous prépare un monde sans paysans où toute la production sera assurée par d’immenses exploitations gérées par des sociétés multi-nationales de capitaux. Le barrage de Sivens fait partie de cette dangereuse politique, dont nous serons tous victimes avec le monde rural dans son ensemble. La centralisation du contrôle de l’eau liée à ce barrage mène à une concentration des exploitations où nombres d’agriculteurs sont voués à disparaître. Un barrage crée un robinet qu’une seule main contrôle et vous devrez vous soumettre au bon-vouloir de cette main.
En fin de compte, malgré nos différences culturelles plus ou moins marquées, nous luttons contre le même système. Nous recevons vos problèmes et vos colères légitimes, mais nous vous proposons de discuter ensemble des réelles causes et des vrais responsables des difficultés traversées afin d’en dégager des solutions.
Alors c’est vrai, nous ne sommes pas né-e-s ici, mais nous sommes tombé-e-s amoureux-ses de cette petite vallée sauvage et paisible jusqu’à vouloir y vivre et ainsi empêcher qu’elle soit noyée par un énième barrage que nous estimons nuisible autant d’un point de vue économique qu’environnemental.
Depuis un an, nous construisons peu à peu un village alternatif, basé sur une agricultures vivrière comme des tout-petit-e-s paysans-annes. L’ambiance y est fraternelle et joyeuse et nous vous invitons à venir nous rendre visite sur site.
Dans un souci d’apaisement, nous avons libéré les champs le long de la rive droite du Tescou et nous avons démonté toutes les structures qui s’y trouvaient afin de laisser les parcelles libres d’accès aux riverains pour une utilisation agricole. Nous nous sommes engagé-e-s auprès de la Préfecture à laisser libre accès aux équipes de ERDF pour qu’elles ré-installent la ligne électrique qui avait été détruite par l’entreprise responsable des travaux d’aménagement du site du chantier. Ceci afin de permettre le retour souhaité de Madame Morel et le bon fonctionnement de la Maison de la Forêt.
Nous serions heureux de vous accueillir sur le site (tant que vous n’êtes pas armés d’intentions belliqueuses).
Dans l’attente d’une réponse favorable de votre part, nous réitérons donc notre proposition de rencontre afin d’établir ensemble des relations de bon voisinage et de paix.
Des habitants et sympathisants de la ZAD.

[7-8 février 2015] Ils font un barrage à Sivens, mais sur les routes…

Samedi dans l’après-midi, deux femmes sont sorties de la Zad côté route de Montauban pour se rendre à Gaillac en stop.
ELLES ONT ÉTÉ MENACÉES PAR DES PRO-BARRAGES  avec outils.
Un vieil homme a dit vouloir les trucider avec un gros tournevis et en présence des GM, il s’est avancé jusqu’à 1 m, très déterminé.  Elles se sont réfugiés juste à côté des GM, craignant l’agression imminente.
Morgane a tél à son p’tit copain pour qu’il vienne les chercher.
Il est allé immédiatement sur la D999 en voiture et les a trouvé très choquées, voir paniquées.
C’est assez compliqué de continuer à faire son train comme d’hab dans ce contexte.
Ces grands malades ont réussi à semer la terreur et à faire en sorte que même si tu ne renonces pas, tu t’organises pour ne plus aller et venir librement mais en étant accompagnée.
C’est à vomir
voilà pour le  témoignage




UNE BALLADE EN FORET (07-02-2015)
Zad du Testet Non auX barrageS AG des Bouilles, à 14h.
Aujourd’hui samedi, encore une fois nous avons été empêchés de nous rendre à Sivens par pro-barrage et gendarmes. L’enjeu pour nous était la présentation du livre « Sans retenue » à partir de midi autour d’une soupe. Certes, nous avons pu nous rassembler ailleurs, en tout cas nous avons cédé le terrain aux miliciens qui nous interdisaient l’accès des lieux.
Demain dimanche est le jour de l’AG hebdomadaire des Bouilles. Si vous voulez faire valoir votre droit à vous rendre sur ces lieux, et à ne pas vous en faire interdire l’accès
par une force illégale,
Rendez-vous à Gaillac, place d’Hautpoul (place de la mairie) demain dimanche à midi
De là nous organiserons un co-voiturage afin que nous n’ayons pas à laisser notre voiture à Sivens où elle risquerait d’être dégradée.
Il n’est pas nécessaire d’appartenir à un collectif d’opposants comme les Bouilles pour vous joindre à nous.
Il suffit d’être attaché à la liberté de circulation et d’expression et de vouloir l’affirmer publiquement.
Ça fait maintenant presque un an et demi que nous travaillons à la ZAD pour sauver ce qui peut l’être de nos contingences biologiques environnementales du monde des machines, et faire économiser 10 millions d’euros aux finances publiques. Et notamment, nous y travaillons le week-end.
Là, ça fait deux week-end de suite que des milices cosmopolites comprenant des fascistes, des pro-barrages, de la bourgeoisie élue réactionnaire saucialiste et sarkozyste, accompagnés des Gendarmes Mobiles, bloquent les entrées de la ZAD du Testet.
On peut voir un résumé du blocage du 1er février ici :
http://wp.me/p4a0HO-1k8
Ils cherchent à faire grimper la tension. Ils cherchent la bagarre, les dérapages. Comme on l’a remarqué dimanche dernier, ils ont l’impunité : les gendarmes ferment les yeux sur les agressions et les exactions puis trainent des pieds pour enregistrer les plaintes. Nous assistons donc à une « mexicanisation » de la zone.
La désinformation est relayée par le journal de Vichy La Dépêche du Midi : https://lejournaldetarne.wordpress.com/2015/02/05/gaillac-un-honnete-citoyen-aurait-ete-agresse-par-un-zadiste/
Quelques personnes du collectif d’occupation ont écrit aux énervés :
http://wp.me/p4a0HO-1lX
On comprend mieux ainsi la stratégie du Préfet qui a cherché l’apaisement, discuté avec des gens du collectif d’occupation ce jeudi : il ne veut pas salir les mains des forces de l’ordre, ne pas prendre la responsabilité d’un dérapage avec la force publique, il veut obtenir une situation de conflits privés suffisamment dégénérée pour justifier une intervention générale musclée. On connaît la chanson. Elle s’accompagne d’un rythme de bottes…
Donc aujourd’hui encore, attention aux routes autour de la ZAD.
Plan B pour le livre « Sans aucune retenue »


Infos du 9 au 15 Février

Lundi 9 février

  • BESOINS de toute urgence de compétences en mécanique sur la ZAD ! Transmettre son savoir-faire en partage de connaissances, rémunération envisageable.

 Dimanche prochain :




Pique-nique à Sivens  « pour lui dire je t’aime ! »


Depuis deux week-ends, la zone de Sivens est isolée
par miliciens et gendarmes qui empêchent toute circulation. 
Pour dire non à cette stupide escalade,
pour continuer à nous rencontrer à Sivens,
pour réaffirmer ensemble que nous avons raison de nous opposer à ce projet de barrage,
soyons nombreux au rendez-vous de co-voiturage
dans la bonne humeur et la fierté.

dimanche 15 février à 10 h 30 à Gaillac, place de la Libération

Mardi 10 février

A Sivens, les pro-barrage deviennent fous et renversent les voitures :

Une voiture renversée en représailles

Barrage de Sivens - Lisle-sur-Tarn (81)



Parce qu'elle a pris un zadiste à bord, une sexagénaire raconte que sa voiture a été renversée alors qu'elle était au volant./Photo DDM
La violence peut-elle régler le dossier de Sivens ? Sûrement pas et pourtant, chaque week-end, désormais, apporte son lot de dérapages. Si chacun renvoie la faute vers l'État ou l'autre camp, l'aveuglement dans les propos ou les actes, d'où qu'ils viennent, peut faire craindre le pire. Les faits qui se sont déroulés dimanche, une fois encore en attestent. Et ils concernent une riveraine de la forêt de Sivens qui, selon son témoignage, n'a fait qu'agir en citoyenne. Une riveraine de 60 ans qui, parce qu'elle habite à proximité de la ZAD, dit «avoir toujours veillé à rester neutre, le contexte étant difficile et les représailles monnaie courante». Mais dimanche, elle s'est retrouvée au cœur de cette haine qui monte les uns contre les autres.
«Je venais de quitter mon domicile pour me rendre à Gaillac lorsque j'ai aperçu un premier groupe d'hommes qui semblait assez agressifs. Après les avoir dépassés, j'ai vu devant eux, une personne seule. Manifestement, le marcheur allait se faire mettre à mal par le groupe derrière lui. C'est la raison pour laquelle je me suis arrêté à sa hauteur pour le faire monter. Sinon, c'était non-assistance à personne en danger.»
Mais c'est aussi le début des ennuis pour la conductrice, qui vient de prendre à son bord un anti-barrage : «Le temps qu'il referme la porte, trois hommes étaient devant ma voiture. D'autres sont arrivés et ils ont fait basculer la voiture sur le toit et dans le champ alors que l'on était à l'intérieur. Le temps de sortir par la porte arrière et ils étaient partis.»
L'habitante de Sivens dit ne pas avoir compris ce qui se passait dans l'instant. «Mais maintenant, je ressens de la peur et de la colère. De la peur par rapport à ce déchaînement de violences que je qualifierai de primaire. Une violence gratuite et vengeresse. De la colère aussi car ma voiture va partir à la fourrière».
Une fois sortis, la conductrice et son passager ont alerté la gendarmerie qui est venue constater les faits. La sexagénaire a porté plainte pour dégradation et violences auprès des gendarmes de Lisle (plainte confirmée par la gendarmerie).
Cette habitante a souhaité témoigner pour que ces violences cessent. Mais elle a souhaité aussi garder l'anonymat «de peur des représailles».
Dans la vallée, c'est la quiétude que beaucoup aspirent à retrouver. Mais sans passer par la vengeance.
Patrick Guerrier - La Dépèche.fr

Mercredi 11 février

Infos du 16 au 22 Février

Vendredi 20 février

[Toulouse] Le 21 février nous reprenons la rue


Retour des manifestants anti-Sivens samedi à Toulouse
24 heures avant la grande manifestation nationale des «zadistes» à Toulouse, l’inquiétude grandit en centre-ville, loin des revendications récurrentes des contestataires.

Les «zadistes» sont de retour. Demain, tous ceux qui estiment avoir une «zone à défendre», les anti-Sivens bien sûr, mais également les opposants à la future Technopole d’Agen ou à l’Aéroport de Notre-Dame-des-Landes (Loire-Atlantique), se sont donné rendez-vous derrière la place du Capitole, à partir de 14 heures, dans un square Charles-de-Gaulle qui s’annonce plein comme un œuf.
Combien seront-ils seulement à se rassembler, ces «zadistes» qui auront convergé depuis plusieurs points de France, d’Albi, d’Agen, de Pau, mais aussi de Montpellier ou de Marseille ? Le rassemblement est déclaré en préfecture, et, pour la première fois, la manifestation devant s’ensuivre n’a pas été interdite, même si celle-ci sera fortement encadrée par les forces de police (lire par ailleurs).




Quelques conseils juridiques | VOIR LE TRACT

Les «zadistes» reviennent à Toulouse pour deux raisons officielles majeures : la lutte contre le «monde des bétonneurs», mais aussi celle contre les «violences policières», un point sur lequel la préfecture n’aurait pas été alertée (lire également par ailleurs). Elsa, dont la main avait été atteinte par une grenade policière lancée dans une caravane le 7 octobre 2014 (soit 19 jours avant la mort de Rémi Fraisse), fait spécialement le déplacement depuis Marseille. Elle et ses amis sont signataires de l’appel à la manifestation de demain. Où ils haranguent clairement : «Il est essentiel de rappeler que c’est l’État qui se place en agresseur de par la violence sociale qu’il impose et la répression systématique qu’il met en place. N’oublions pas que souvent des lacrymogènes pleuvent avant les pavés…»

Centre-ville à éviter
Le ton est donné. Tant les promeneurs du samedi après-midi que les commerçants, lassés par les manifs à répétition de l’automne dernier (lire ci-contre), redoutent le retour des «zadistes». Hier, bon nombre de commerçants commençaient déjà à se protéger d’éventuelles échauffourées en installant des panneaux ou des rideaux protecteurs, sur l’ensemble du parcours prévu de la manif [Rue d’Alsace-Lorraine, boulevard de Strasbourg, Monument-aux-Morts, rue de Metz, rue du Languedoc, place du Salin]. «On n’est pas à l’abri d’un défilé musclé en centre-ville», confie ce propriétaire de boutique de prêt-à-porter de la rue d’Alsace-Lorraine. Un centre-ville toulousain où il ne fera sans doute pas bon circuler demain après-midi. Avec en filigrane la menace éventuelle d’un nouvel arrêt du métro, cela avait été plusieurs fois le cas en novembre.


Vers une nouvelle course-poursuite provocation demain entre «zadistes» et forces de l’ordre ?
«On vient avant tout pour faire écho à la grande manif de Nantes de l’an passé, en pensant aussi à l’actualité récente», glisse Camille. Outre une première décision d’expulsion des «zadistes» du 10 février, ceux-ci ont pris comme un camouflet la nouvelle décision du tribunal d’instance d’Albi de lundi dernier de les chasser de la «métairie», lieu emblématique de cette zone du Testet/Sivens, qu’ils occuperont du reste dès le lendemain de la manif de Toulouse. Toujours pour dire «non» au barrage de Sivens.

Le mois de novembre dans le rétroviseur des Toulousains…
Demain, les «zadistes» manifesteront pour dénoncer les violences policières, dès 14 heures, à la sortie de la station de métro «Capitole» (ligne A). Des manifestations aux revendications similaires avaient déjà eu lieu l’automne dernier dans le centre-ville toulousain pour dénoncer ces violences policières survenues sur le chantier du barrage de Sivens, violences qui avaient causé la mort du militant Rémi Fraisse. Ces manifestations, souvenons-nous, avaient causé des dégâts importants, provoquant l’arrêt total du métro et des bus pendant plusieurs heures. Des perturbations qui avaient touché Toulouse durant trois samedis de suite (les 8, 15 et 22), au grand dam des commerçants, qui s’estiment aujourd’hui encore lésés par le manque à gagner subi à quelques semaines des fêtes de fin d’année. Notons qu’au lendemain de leur manifestation prévue ce samedi, les «zadistes» se rassembleront sur la zone du Testet, dès dimanche matin «pour la construction d’un chantier et pour poursuivre nos rencontres», précisent-ils dans un communiqué.
Xavier Hurtevent et P.M.- LaDepeche.fr 
Forte mobilisation policière attendue
Selon la préfecture, «un dispositif policier important» est attendu, demain, dans les rues de Toulouse pour encadrer la manifestation des «zadistes», prévue dès 14 heures, autour du square Charles-de-Gaulle, derrière le Capitole.
Fin novembre, l’un des derniers rassemblements avait mobilisé pas moins de 400 policiers et gendarmes mobiles. Au cours de cette manifestation, seize personnes avaient été interpellées pour des dégradations en tout genre. Certains ont écopé d’une peine de prison ferme.
Demain, un hélicoptère de la gendarmerie, prêt à décoller en cas débordement, viendra se greffer au vaste service de sécurité déployé tout autour de la ville. Avec les CRS et les gendarmes mobiles, des effectifs de la brigade anticriminalité (BAC), de la compagnie de sécurisation et d’intervention (CSI) viendront compléter le dispositif. Des modes d’intervention spécifiques sont prévus pour parer à tous débordements et faire face à tout début d’incidents.
Hier matin, les services de la préfecture ont enregistré le dépôt de déclaration de manifestation émanant du collectif des «zadistes». Ce nouveau rassemblement intervient alors que la justice tarnaise vient d’ordonner l’évacuation partielle d’un terrain occupé par les anti-Sivens, où un projet de construction de barrage cristallise toujours de fortes tensions. Ces manifestants se rassemblent également demain pour afficher leur soutien à toutes les «zones à défendre», en France.
F. Ab. - LaDepeche.fr




Olivier Delcayrou

«Le contexte est très différent de novembre»
Olivier Delcayrou, directeur de cabinet du Préfet de Région, revient sur le dispositif mis en place à l’occasion de cette manifestation. Les forces de l’ordre seront vigilantes mais l’inquiétude est moindre qu’au mois de novembre.
La manifestation prévue demain à Toulouse est-elle interdite par les services de la Préfecture ?
Les organisateurs de cette manifestation ont fait une déclaration auprès de nos services avec un parcours en centre-ville depuis le square De Gaulle, derrière le Capitole, jusqu’à la place du Salin, en passant par la rue Alsace-Lorraine, le boulevard de Strasbourg, le monument aux Morts, la rue de Metz et la rue du Languedoc. Ces personnes se sont engagées, nous n’avions pas de raison de l’interdire.

Doit-on craindre, comme certains commerçants, des débordements similaires à ceux que nous avons connus au mois de novembre ?
Le contexte pour nous est totalement différent. D’une part parce qu’il y a cette déclaration et d’autre part parce que c’est un appel de soutien aux ZAD uniquement. Nous n’avons pas identifié de velléités de manifestation contre les violences policières comme au mois de novembre.

Le dispositif policier sera-t-il pour autant plus léger ?
Il y aura un dispositif important mais je ne peux pas vous donner de chiffres à ce sujet. Nous serons vigilants. Le dispositif sera déployé tout au long du parcours pour assurer à la fois la sécurité des manifestants et celle des nombreux passants qui risquent d’être présents ce samedi en centre-ville. Il y aura du monde sur le terrain. Le Préfet lui aussi sera présent en salle de commandement.

À cet égard, invitez-vous les Toulousains à ne pas se rendre dans le centre-ville ce samedi ?
Non pas du tout, comme je vous l’ai dit, le contexte est différent de celui de novembre.

Combien de manifestants sont attendus ?
Il est difficile aujourd’hui (N.D.L.R., hier) de savoir s’il y aura beaucoup de personnes. Le chiffre de la participation est difficile à évaluer.
propos recueillis par Claire Lagadic – LaDepeche.fr

  • « La Zone humide s’enflamme » : un reportage de Taranis.news :

Dimanche 22 février

Appel à GRAND CHANTIER PARTICIPATIF ce Dimanche 22 février dès 11h sur la Zad du Testet !!!
Pic-nic sur la zone et CONSTRUCTIONS de nouveaux lieux de vie.
Dès maintenant, appel à apporter tout au long de la semaine à la Zad le matériel que vous pouvez offrir (et bien entendu Dimanche 22) Besoin de nombreux matériels, (liste ci-dessous*), de vos savoir-faire en construction d’habitats durables ou légers tels que cabanes, flex-yourtes. Charpentiers et autres artisans bienvenus, ainsi que vous tous-tes !
Appel général à toute votre bonne volonté, bonne humeur et enthousiasme pour réussir ensemble ce chantier de construction.
S’ils ont massacré la forêt, la zone humide est bien vivante, que la vie pousse dessus

Infos du 23 Février au 1er Mars


Lundi 23 février
Mardi 24 février

Cette semaine, deux moments pour soutenir les copains et copines qui passent en justice: mardi 24 à 14h au tribunal d’Albi pour soutenir A. et le jeudi 26 même lieu, même heure pour le procès de Catherine et Manon  coupables de calinades en pleine manif…Alors on remet tous cela ce jeudi : attaque de calins sur Albi ! Le lien internet est ici…



D’actualité aussi, le dialogue que l’on essaie de renouer avec nos voisins  « anti-zadistes ». Ils se laissent désirer alors que l’on souhaite les rencontrer. On vous en a déjà parlé (voir par exemple ici), voici le dernier épisode en date… Dans le même ordre d’idée, un texte qu’un copain de retour des Chambarans nous a fait parvenir : « Retour des Chambarans, quelle guerre voulons nous ? »
A noter le dernier post du blog « Les eaux glacées du calcul égoïste », sur Sivens avec une analyse globale et politique intéressante comme toujours. Vous y trouverez le lien vers le courrier adressé tout récemment par le collectif Testet aux conseillers généraux du Tarn.

Mercredi 25 février

EXCLUSIF - Des vestiges archéologiques retrouvés sur le site du barrage de Sivens


En septembre dernier, Reporterre révélait que les travaux du barrage de Sivens n’avaient pas pris en compte la loi sur l’archéologie préventive, en dépit des indices de présence archéologique au Testet. Nous sommes aujourd’hui en mesure d’affirmer qu’il existe des traces archéologiques effectives sur la zone. Des fouilles devraient être entreprises.
 Lisle-Sur-Tarn, reportage
27 octobre 2014 au matin, sur la zone humide du Testet, près de l’endroit où le jeune Rémi Fraisse a été tué par la police la veille. Alors que partout l’on cherche à recueillir le plus d’éléments possible sur les circonstances de sa mort et que la police scientifique se fait attendre, nous croisons la route de Sabine Puech, habitante de la région et archéologue à l’Institut national de Recherches Archéologiques Préventives (INRAP) de Toulouse.
Aucun diagnostic archéologique n’a jamais été conduit
« J’ai été appelée par une connaissance qui a trouvé des fragments abondants de terre cuite dans les tranchées », dit-elle. Ces tranchées sont les excavations creusées à la pelle mécanique par les promoteurs du barrage. Elles mesurent environ deux mètres de largeur sur trois mètres de profondeur, délimitant les zones de chantier. En y regardant de plus près, la scientifique décèle sur 1,5 mètre de profondeur et plusieurs mètres de large un nombre important de tuiles et de fragments divers.
« Il est très difficile d’évaluer à l’œil la datation d’un fragment et son origine ainsi que le contexte dans lequel il est découvert, c’est-à-dire la fonction du lieu, surtout quand on ne peut observer que des coupes de tranchées écroulées », explique-t-elle. Elle récupère néanmoins quelques fragments qu’elle présente à ses collègues quelques jours plus tard.




L’un d’entre eux, Pierre Marty, assistant d’étude dans le même Institut et spécialiste de la céramique antique, indique à Reporterre avoir repéré dans les échantillons recueillis « des tessons, des fragments de vase ainsi que des morceaux de terre cuite architecturale et des briques d’habitation ». De quand datent-ils ? La réponse est difficile à fournir compte tenu « du mauvais état de conservation de ces vestiges », mais le chercheur se risque néanmoins : « Ils proviendraient soit de la fin du moyen âge, soit de l’époque moderne, à partir de la fin du XVe siècle. »
Le chercheur tient toutefois à rester prudent : « Il est extrêmement rare de pouvoir établir une origine précise avant d’effectuer un diagnostic ». Or, au Testet, aucun diagnostic archéologique n’a jamais été conduit.
Vestiges sous les pieds des gendarmes
Les chercheurs de l’INRAP ne sont pas les seuls à avoir retrouvé des témoins du passé. Philippe, habitant d’une commune voisine, raconte avoir été avec sa compagne sur la zone pour chercher. « Nous avions déjà découvert des vestiges dans notre jardin ».
Le 25 octobre, le voilà sur place « à chercher des fragments tandis qu’en face on voyait des échanges musclés avec la police ». Sur les collines situées au sud de la zone, « là où tout a été décapé et décaissé et où l’on voit les marnes, on a trouvé des morceaux de terre cuite, de tuile ancienne, enfouies à au moins trois mètres de profondeur ».
Plus bas, au milieu de la zone terrassée, Sabine Puech a de son côté trouvé « le fragment d’une anse d’un vase médiéval, ramassé hors contexte », et donc isolé, même si « toute la terre qui a été tassée à cet endroit provient de la zone elle-même ».




Ironie du sort : c’est la destruction en profondeur de la zone humide qui a engendré la mise à jour de ces indices. Sous la zone de vie des gendarmes, lieu de tous les affrontements, dans les tranchées creusées qui délimitent le parking, Sabine Puech a également constaté la présence d’une « structure de type drain ou fossé qui traverse la tranchée à plus de cinquante centimètres en dessous du sol » mais dont la datation est indéterminée.
Dans la même zone, l’archéologue a également recensé un « petit niveau charbonneux, dans une couche où se trouvaient des fragments de terre cuite, au minimum à soixante centimètres en dessous du niveau du sol ». Y aurait-il un lien entre cette présence charbonneuse et les amas de tuiles ? « La seule manière de le savoir serait d’ouvrir et de fouiller mais on voit bien déjà dans ces quelques tranchées que le sol a été occupé par le passé et que nous sommes susceptibles de trouver un site archéologique dans la zone humide du Testet ».
Sans aller aussi loin, il nous a suffi de visiter le musée Raymond Lafage de Lisle-Sur-Tarn pour en savoir plus. Dans la plaquette Voyage archéologique dans le canton de Lisle-Sur-Tarn, on remarque qu’hormis la période de la préhistoire ancienne, on trouve des traces de présence humaine aux environs immédiats de la zone (moins de 500 m) durant toutes les périodes historiques, depuis le paléolithique jusqu’à l’époque moderne. L’un des sites médiévaux recensé est d’ailleurs localisé directement dans la zone, probablement au lieu-dit Testet puisqu’il s’appelle « Saint Pierre d’en Teste ».




Le service régional de l’archéologie toujours aussi peu réactif
Lors de notre précédente enquête, le conservateur régional, Michel Vaginay nous avait répondu : « Nous avons bien été saisis d’une demande de renseignements en 2008. Nous avons évalué cette requête et au regard des éléments fournis à ce moment-là en matière d’archéologie, nous n’avons pas prescrit d’opérations archéologiques. »
Sa réponse d’alors peut aujourd’hui être éclairée à l’aune des statistiques interrégionales des Services Régionaux de l’Archéologie (SRA). Celles de l’année 2013 nous apprennent que si l’inter-région Grand-Sud-Ouest est la plus grande en superficie, elle est aussi l’une de celles qui, en proportion du territoire, opère le moins de prescriptions de diagnostic archéologique préalable.




Corollaire : le taux de fouilles reste lui aussi très faible, comparable à l’Outremer qui dispose pourtant de moyens bien plus restreints, bien que s’y ajoute la concurrence de sociétés privées spécialisées dans le domaine et remettant en cause les missions de service public en matière d’archéologie.
Contacté par Reporterre, Daniel Schaad, ingénieur au SRA, indique « ne pas être au courant de l’existence de ces indices ». A la suite de notre description orale, il dit : « Ces quelques indices ne traduisent pas la présence d’un site, d’autant qu’ils ont l’air plutôt récents. Sans les avoir en visuel, je ne peux vous dire grand-chose de plus ».
Seul moyen pour qu’un éventuel diagnostic archéologique soit établi : « Il faudrait que l’on découvre vraiment un énorme site incomparable, dans le cas présent, je crois qu’il faut être raisonnable ».




La raison du manque d’intérêt du site du barrage : « Ce n’est pas la taille du projet qui détermine le fait ou non de prescrire un diagnostic. La retenue de Sivens se trouve en entrée de vallon, ce n’est pas une zone à grand risque. En revanche, nous demanderons probablement un diagnostic en aval, lorsque, si le barrage se fait, des agriculteurs voudront mettre en place un système d’irrigation ».
Il lui aurait pourtant suffit de regarder les courriers envoyés par ses propres archéologues pour en tirer la conclusion inverse.
La question doit dans tous les cas être reposée avant le 6 mars prochain : le Conseil général veut alors adopter une nouvelle mouture du projet, déplaçant de 300 mètres en amont le chantier du barrage, et le positionnant de ce fait en plein dans la zone susceptible de contenir des traces archéologiques.
Grégory Souchay - Reporterre
  • Menacé par les milices des pro-barrage
La fnsea/fdsea/frsea et les jeunes agri-tueurs vont tenter bloquer la ZAD : http://www.lafranceagricole.fr/actualite-agricole/retenue-d-eau-de-sivens-les-fdsea-et-ja-de-midi-pyrenees-vont-bloquer-le-site-100794.htm « Afin de s’assurer que l’Etat prenne bien ses responsabilités et fasse effectivement évacuer le site, la FDSEA, les JA du Tarn, la FRSEA et les JA de Midi-Pyrénées ont engagé avec les huit FDSEA et JA de Midi-Pyrénées un blocage de la Zad (ndlr : zone à défendre) pendant toute la semaine du 2 au 6 mars. Chaque département bloquera le site sur une journée, ce lundi 2 mars ce sera le tour de l’Aveyron, le Tarn se chargeant de maintenir le blocage pendant les nuits », indique jeudi un communiqué de la FDSEA de l’Aveyron

Pour Sivens, c’est maintenant !!! Semaine déterminante !

Besoin de personnes motivées sur la ZAD du Testet pour résister à la pression policière et milicienne. Ramenez-vous dès que possible !
-Rassemblement mercredi 4 mars à Gaillac, place de la libération à 14h pour un départ en convoi alimentaire vers la ZAD dans l’après midi.-Rassemblement vendredi 6 mars à 10h à Albi devant le Conseil Général pour une soupe populaire et conviviale au moment où sera discutée la relance du projet de Sivens.
La ZAD est en danger, menacée par la collusion entres des milices et les forces de l’ordre. Nous nous attendons à une expulsion à partir du samedi 7 mars ou jours suivants. En attendant, dès le lundi 2 mars, jour et nuit, les pro-barrages, par le biais de la FDSEA et des JA (Jeunes Agriculteurs de la FDSEA) prévoient le blocage des entrées et sorties de la ZAD. Chaque jour, une délégation par département se mobilise, celle du Tarn assurant une présence chaque nuit. La pression se fait de plus en plus forte. Depuis début février, les agressions se sont multipliées. Des blocages se sont mis en place avec voiture retournée (avec des personnes à l’intérieur), pare-brises éclatés, personnes menacées ou frappées, affaires personnelles brûlées avec l’approbation des gendarmes, racket de denrées alimentaires dans les voitures. On a besoin de soutien !! S’il semble acté que le projet initial est abandonné, il n’en reste pas moins que les deux scénarios alternatifs proposés restent inacceptables. En effet, ces deux projets restent sur la zone humide, ces deux projets surévaluent les besoins en eaux, ces deux projets continuent de servir les intérêts des pouvoir locaux et ces deux projets restent dans une logique de destruction. On ne lâche rien !
Pour rejoindre la zone, contacter l’Infozad : 06.78.57.37.60
Les bouilles et les occupants, le 1er mars 2015

ZAD des Chambarans 


- ROYBON – 38

Infos du 2 au 8 Février

Lundi 2 février

[Chambard dans les Chambarans] 2. Les vérités qui dérangent parcourent des chemins difficiles


Les vérités qui dérangent parcourent des chemins difficiles
De l’internement forcé à l’enfermement volontaire dans le Chambaran
Dans leur histoire, les Chambarans ont abrité de nombreux et multiples « indésirables ». Tout le monde connaît ici la Résistance qui s’y organisa dès le mois de juillet 1940 : quelques valeureux dissidents et « indésirables » aux yeux du régime de Vichy y constituèrent un maquis [Cf. Le Bataillon de Chambaran de Pierre Deveaux ou encore le mémorial du maquis du Chambarand qui se trouve près du camp militaire et ancien camp d’internement. La Résistance est très souvent glorifiée. Toutefois on oublie souvent de penser que les résistants comptaient dans leurs rangs des membres et sympathisants nationalistes et royalistes comme par exemple les anciens comploteurs cagoulards qui, en partie, s’engagèrent, dès les premières heures, contre l’envahisseur étranger.]. Mais très peu de personnes savent qu’en l’an III de la République, des « fanatiques » et des « prêtres réfractaires », selon l’agent national de la commune de Roybon, y préparaient la contre-révolution [« […] le fanatisme augmente, l’indiscipline se propage, la contre-révolution se prépare, et bientôt cette commune isolée à l’aide des prêtres réfractaires deviendroit un second noyaux de la Vendée. » (Arch. dép. Isère)]. Cet agent a probablement exagéré, et la situation ne fut sûrement pas aussi insurrectionnelle qu’il ne le laissa entendre. Bien qu’on célébra à Bressieux, non loin de Roybon, une messe en présence de quelque deux milles « fanatiques », en toute illégalité, il ne s’agissait ici que d’un attroupement de femmes qui alla sonner, par deux fois, l’angélus et, de quelques chants contre les prêtres constitutionnels. La mémoire reste néanmoins très sélective.
L’internement des « indésirables » durant la guerre 1939-40 dans le Chambaran est peu connu des historiens. Tal Bruttmann, chargé de mission auprès de la Commission d’enquête de la ville de Grenoble sur les spoliations des biens juifs, nous dit même : « on ignore tout de ces huit camps [Chambaran, Arandon, Saint-Savin, Vif, Roybon, Prémol, Vienne et Bourgoin] ayant existé durant cette première période de l’internement en Isère, notamment parce qu’il ne subsiste guère d’archives. Gérés par l’armée, leur fonctionnement demeure très largement étranger à la préfecture de l’Isère. De plus, en juin 1940, face à l’avancée allemande, préfecture et sous-préfectures du département ont procédé à la destruction des archives les plus sensibles, dont probablement celles traitant de l’internement. ». Nous pouvons toutefois penser que ce ne sont peut-être pas les seules raisons qui ont fait méconnaître l’histoire des Chambarans durant cette période d’internement forcé… Il y a certainement des faits honteux et gênants sur lesquels il fallait savoir se taire.
En 1938, la IIIe République de Daladier décide, à titre préventif, d’enfermer dans les camps les étrangers « indésirables » [L’actualité révèle malheureusement que la République exige une nouvelle fois de rassembler certains « indésirables » étrangers. Une nouvelle fois des fonctionnaires établissent des fiches et des dossiers. Une nouvelle fois des gendarmes viennent chercher les « indésirables » jusqu’à la porte des écoles. Des directeurs d’écoles et de Centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires (CROUS) collaborent aujourd’hui à cette ignominie. Cette fois-ci, il s’agit d’envoyer ces nouveaux « indésirables » dans des centres de rétention et ensuite de les expulser. Cette manière d’agir est bien évidemment honteuse et criminelle.], et notamment, à partir de la déclaration de guerre, les réfugiés allemands ; ceux qui avaient fui, dès 1933, le IIIe Reich d’Hitler. À partir de septembre 1939, jusqu’à sept cent cinquante ressortissants allemands et autrichiens [Le nombre des ressortissants nous est donné par l’ouvrage Les Barbelés de l’exil. Parmi ces exilés qui se retrouvèrent internés dans les Chambarans, il y eu Wilhelm Münzenberg, un des fondateurs du KPD (parti communiste allemand), un idéologue et un théoricien dans l’art de la propagande au sein du komintern durant l’entre-deux guerres. Personnage assez retors, il fut le chef d’orchestre du monde des « compagnons de route », ces intellectuels et artistes non communistes qui combattirent l’anticommunisme. Il est celui qui instrumentalisa l’affaire Sacco et Vanzetti contre les États-Unis et qui par conséquent causa la destruction du mouvement anarchiste américain. Münzenberg « inventa » l’antifascisme pour des raisons tactiques. Avec son Livre brun sur l’incendie du Reichstag et la terreur hitlérienne, il imposa au monde la version du complot nazi dans l’incendie du Reichstag du 27 février 1933. Expulsé du KPD et du komintern au moment des grandes purges staliniennes, on le retrouvera mort une corde autour du cou, au pied d’un chêne, le 17 octobre 1940 (selon le rapport de gendarmerie), dans le bois de Caugnet entre Saint-Antoine l’Abbaye et Montagne, près de Saint Marcellin. La mort de Münzenberg remontait probablement autour du 21 juin 1940, date de la fuite du camp de Chambaran favorisée par la débâcle de l’armée française devant l’avancée de l’armée d’occupation allemande.] rempliront le « camp de concentration de Chambarand » [Ces termes étaient utilisés par un des fonctionnaires de la préfecture de l’Isère chargés des dossiers concernant les étrangers bénéficiaires du droit d’asile dans le camp de Chambaran. Notons que l’on écrivait dans ces années-là indifféremment Chambaran et Chambarand.] à l’intérieur même du camp militaire existant depuis 1881, près du village de Viriville [Le camp de Chambaran accueille « tous les corps de la 5e Région militaire pour l’entraînement et les exercices de tir : régiments professionnalisés y compris gendarmes et CRS » (Histoire des communes de l’Isère – 1988).]. Beaucoup de juifs allemands et autrichiens furent conduits de Chambaran au camp d’Arandon non loin de Morestel toujours en Isère [Cf. Et ils partirent pour la guerre de David Vogel. Selon ce roman autobiographique, 400 juifs autrichiens et allemands furent conduits du camp de Chambaran au camp d’Arandon où se trouvait l’auteur à ce moment là.], qui fut, durant cette période, un des camps des plus durs.
Le pacte germano-soviétique venait d’être conclu (le 23 août 1939) lorsque la France et la Grande-Bretagne déclarèrent la guerre à l’Allemagne (le 3 septembre 1939). Le Parti communiste français fut dissous (le 26 septembre 1939) pour allégeance à Moscou et propagande contre la « guerre impérialiste ». Du fait de l’accord entre Staline et Hitler, il était suspecté d’agir en intelligence avec l’ennemi allemand. Les communistes du PCF seront recherchés et internés en tant qu’« indésirables » français, comme le prévoyait la loi du 18 novembre 1939 [Lire, sur le site http://www.dordogne-perigord.com/fr/histoire_culture_tradition/histoire/sablou/sablou14.asp, l’article sur la Situation du Parti communiste français en 1939 écrit à partir de la thèse de 3e cycle soutenue par Guillaume Bourgeois en 1983 : Communistes et anticommunistes pendant la drôle de guerre.]. Certains de ces « indésirables » français furent envoyés au camp d’internement de Roybon [Ce fut le cas de Nestor Calonne qui, selon le Dictionnaire Biographique du Mouvement Ouvrier Français (1789-1939) de Jean Maîtron, fut interné au camp de Roybon. Nestor Calonne deviendra sénateur peu après la guerre et le restera jusqu’en 1958.]. Après la fermeture du camp de Roybon en 1940, beaucoup furent transférés dans celui de Fort-Barraux, près de Pontcharra [Selon différents dossiers les « indésirables » français affectés à la 5e Compagnie Spéciale de Travailleurs Militaires, plusieurs internés partirent de Roybon le 2 juin 1940 pour Saint Vincent-les-Forts, puis à Luitel pour ensuite rejoindre le camp d’internement de Fort-Barraux le 15 août 1940. Le camp d’internement de Fort-Barraux fut dirigé à partir d’octobre 1943 par le très zélé François Risterucci, qui sera le dernier condamné à mort pour faits de collaboration et sera exécuté le 29 décembre 1946 dans l’Isère.].
Bien des raisons, dont les pressions qu’ils subirent de la part de l’armée française, ont contraint des Algériens à s’engager à ses côtés durant la guerre d’Algérie. En 1962, considérés comme des traîtres dans leur pays, les Harkis durent s’exiler en France. Certains de ces « indésirables » se retrouvèrent à Roybon où deux camps furent mis à leur disposition afin qu’ils travaillent dans les forêts domaniales de Chambaran pour le service des eaux et forêts de l’Office national des forêts.
Terre d’asile et de détention, les Chambarans deviendraient-ils aujourd’hui une région vouée au tourisme industriel ? Il semblerait que cela soit souhaité. Certains opposants au projet de la décharge ont cru voir une aubaine lorsqu’ils apprirent que cette forêt qu’ils avaient défendue contre le pire, devait accueillir un Center Parcs. Ils voyaient là l’épouvantail qui devait éloigner toutes leurs inquiétudes : la décharge ne pourrait exister si la région développait un tourisme de masse ! Il y a chez nos contemporains une manière très particulière de défendre leur opinion. Ils ne raisonnent plus en terme d’idées ou de volontés individuelles et collectives. Ils calculent et rationalisent selon la méthode du lobbying. C’est-à-dire qu’ils iront toujours dans le sens du pragmatisme et en fonction du « réalisme » le plus désastreux. Et ils sont prêts à renoncer à ceci pour peut-être ne pas avoir à supporter cela. Misérable époque !
Misérable époque où l’on considère, aussi paradoxal que cela paraisse, l’enfermement comme étant un refuge, une manière de passer le temps des vacances à l’abri de toutes craintes. L’enfermé n’est pas ici « l’indésirable » bien sûr, mais celui qui cherche à se protéger de ce dernier ; « l’indésirable » étant la société dans son ensemble, c’est-à-dire aussi l’autre, l’étranger, l’inconnu, vous, moi … ceux qui habitent ici dans les Chambarans et qui accueillent les bras ouverts ce Center Parcs.
« Il faut s’imaginer dans une grande réserve d’animaux où les animaux c’est nous. […] Pas de voiture dans l’enceinte. Pour entrer et sortir, il faut montrer patte blanche. On est sur une autre planète et tout est fait ici pour être bien. Pas de tracasserie ; juste un porte-monnaie bien rempli », nous raconte un client du Center Parcs du lac d’Ailette. Le directeur marketing du Center Parcs des Bois Francs près de Verneuil-sur-Avre nous l’expliquait, il y a déjà quelques années : « nous proposons une succession de bulles. Le cottage, le confort d’un chez soi ; la bulle du paradis aquatique tropicale, chaude, sécurisante ; le domaine lui-même, clôturé. Dans ce monde bon enfant, sans violence, on baisse d’autant plus volontiers la garde que l’on côtoie des gens qui viennent habiter là en famille ». « Les enfants peuvent même aller faire les courses tout seuls » nous confirmait une responsable de ce même centre. Ce monde clos et rassurant offre l’occasion de renouer avec une existence familiale, si difficile à l’extérieur. Dans une société parcellaire et sans attaches, où il est de plus en plus impossible aux familles d’exister durablement dans une vie quotidienne morcelée par les obligations et l’urgence, entre le bureau ou la salle blanche, les transports, l’école et les multiples « activités extrascolaires » des enfants, la consommation et la culture de masse, les vacances assistées et son tourisme sans répit, il était nécessaire que le marché proposât à nos contemporains dépossédés de tout, un espace totalement modelé à l’écart de la vie réelle où ils peuvent consommer la représentation d’une manière de vivre harmonieusement en famille. Le Center Parcs nous offre cette « mise en fiction du monde témoignant des difficultés à conjuguer les vraies relations sociales » : « le vélo, les courses, tout baigne, comme dans la bulle tropicale. On joue à la famille parfaite, les parents sont attentifs, les enfants sympas… » Ici la vie est « entre parenthèse » nous dit l’anthropologue Marc Augé. Ces centres permettent à leurs clients de s’isoler, de se « retirer du jeu » nous dit le directeur commercial de Center Parcs… « La réalité est trop peu satisfaisante pour le Français : la vie artificiellement recréée est plus belle et plus sûre, estime le sociologue Gérard Mermet. L’engouement pour ces « paradis artificiels » démontre leur incapacité à se situer dans le monde dans lequel ils vivent. » [Les citations de ce paragraphe sont pour la plupart tirées de l’article Les « mondes artificiels » attirent toujours plus de vacanciers de Pascale Krémer paru dans le journal Le Monde du 22-23 décembre 1996, et de l’article Ces lieux où le réel copie la fiction – Un ethnologue à Center Parcs de Marc Augé paru dans le journal Le Monde diplomatique du mois d’août 1996. La citation du client du Center Parcs du domaine du lac d’Ailette est tiré de la page : http://www.ciao.fr/Center_Parcs_domaine_du_lac_d_Ailette__Avis_1017562]
Cette incapacité à se situer dans le monde dans lequel nous vivons est une caractéristique de notre effondrement social. Une société qui ne partage aucun projet commun, excepté celui de produire et consommer des marchandises, a besoin de se forger une idéologie basée essentiellement sur l’argent et le travail. Il lui fallait toutefois, jusqu’à présent, qu’elle se trouve une identité, des références historiques, une mémoire basées sur d’autres valeurs communes. À l’est, comme à l’ouest, l’histoire officielle glorifiait ses valeurs, mais aussi un passé qu’elle remodelait à sa convenance ; la mémoire reconnaissant certains événements et certaines situations plutôt que d’autres. Aujourd’hui, dans notre société marchande devenue globale et totalitaire, l’histoire officielle magnifie toujours un passé idéalisé ; mais elle ne cherche plus systématiquement à cacher cette vérité qui pouvait apparaître si subversive auparavant. Et puisque la réalité entache et contredit l’histoire officielle, la communication se consacrera à la couvrir d’un voile afin d’amoindrir ses effets néfastes. La vérité et la contre-vérité éclateront en soubresauts, par scoops successifs qui paradoxalement n’auront généralement que peu de conséquence dans le temps. Chaque scoop balayera le précédent, si bien qu’il restera dans la mémoire collective l’illusion que chacun détient une certaine vérité ; qu’aucune vérité n’est réellement tranchée ; qu’elle serait subjective. Mais peut-on se représenter une vérité, si la société ne la reconnaît pas comme telle ? Peut-on avoir raison si personne ne nous donne raison ?
Dans leur folle solitude, nos contemporains se retrouvent sans aucun véritable repère face à leur présent dont ils ne savent plus quoi penser ; prêts à croire qu’une terre forestière chargée de son histoire et de son essence serait semblable à une zone touristique et artificielle. Prêts à admettre que pour protéger les Chambarans, il suffirait de les détruire.
Henri Mora (correspondance), le 29 septembre 2008

[Chambard dans les Chambarans] 3. Des ordures dans un couloir

Des ordures dans un couloir
Il n’est pas fréquent qu’un conflit donne raison aux opposants à un projet d’intérêt public. Et lorsque nous considérons la contestation qui s’est maintenue sans répit durant 15 années contre la décharge d’Izeaux, nous pouvons prétendre que la victoire sourit aux audacieux et aux obstinés.
À partir de février 1989 — date à laquelle la préfecture autorisait la société Lély et fils à exploiter à Izeaux un Centre d’enfouissement technique (CET) [L’appellation a évolué avec la réglementation. Le Centre d’enfouissement technique (CET) de classe 2 est devenu le Centre de stockage de déchets ultimes (CSDU) de classe 2. Suite à l’arrêté du 19 janvier 2006, les CSDU de classe 2 sont désormais appelés Installations de stockage de déchets non dangereux (ISDND) de classe 2.] de classe 2 — l’opposition locale n’a plus baissé sa garde : elle séquestra durant toute une nuit le Conseil municipal d’Izeaux. Elle détourna la circulation automobile sur le site des carrières. Elle bloqua les accès à un rond-point, immobilisa plusieurs TGV, occupa le site et empêcha l’entrée des camions à ordures. Elle manifesta sur place et à Grenoble tandis qu’elle entamait une bataille juridique avec l’exploitant [Cf. l’histoire chronologique de cette opposition sur le site : http://comitedizeaux.free.fr].
Le préfet de l’Isère est allé jusqu’à dire : « À Izeaux on se heurtait à un problème insoluble, qui provoquait de surcroît des troubles à l’ordre public, des conflits tel que la sécurité des personnes n’était pas assurée. » (Le Dauphiné libéré du 5 octobre 2005) [« La décharge d’Izeaux n’aura jamais vraiment tourné, juste quelques dépôts par-ci, par-là, très sporadiques. À peine les camions de la Société Lély se présentaient-ils sur le site pour y larguer quelques tonnes de déchets ultimes qu’une armada de manifestants bloquait les entrées … et parfois les sorties », concluait le journaliste du Dauphiné libéré du 5 octobre 2005 qui annonçait la fermeture de la décharge. « Les échauffourées durent depuis quinze ans entre opposants, exploitants et gendarmes » ajoutait-il.].
Mais les discours des hauts fonctionnaires ne sont que des masques qu’ils appliquent sur leurs actions. Si le préfet de l’Isère a décidé de reconnaître une défaite, c’est qu’il avait un autre lapin dans son chapeau.
Il fallait diluer les responsabilités et impliquer les « acteurs locaux » pour proposer un autre site. L’ordre venait des ministères. Madame Nelly Olin et Monsieur Nicolas Sarkozy, respectivement Ministre de l’écologie et du développement durable et Ministre de l’intérieur et de l’aménagement du territoire, avaient adressé une lettre datée du 16 septembre 2005, à Monsieur Michel Bart, préfet de l’Isère, dans laquelle il était dit :
« Depuis une quinzaine d’années, l’exploitation de la décharge d’Izeaux, autorisée en 1989, s’est heurtée à de très nombreuses difficultés qui ont suscité d’importants problèmes d’ordre public et qui en ont interdit l’exploitation normale.
« […] De l’analyse d’ensemble à laquelle il a été à nouveau procédé de cette affaire, il ressort que la recherche, la création et l’exploitation d’un nouveau centre de stockage sur un ou plusieurs nouveaux sites, ne suscitant pas les mêmes interrogations d’environnement pourraient seules permettre de résoudre ces difficultés.
« […] une solution alternative à la décharge d’Izeaux doit être trouvée dans un délai rapide, et au plus tard dans les six mois à venir, de façon à permettre ensuite l’instruction de la nouvelle autorisation et la réalisation du centre de déchets dans 2 ans.
« […] Bien entendu, le ou les établissements publics compétents susceptibles d’intervenir ne le feront que si ce concours est demandé par les acteurs locaux, dont notamment le Conseil général de l’Isère. Le cas échéant, si d’autres questions le justifiaient, le ou les services de l’État compétents pourraient être sollicités dans les mêmes conditions. » [http://sosdechets.net/IMG/pdf/Letttre_Sarkosy.pdf. La plupart des documents concernant le projet de décharge de Roybon est consultable sur le site de SOS Déchets (http://www.sosdechets.net).]
Une copie de cette lettre fut adressée à Monsieur André Vallini, Président du Conseil général de l’Isère.
Qui voudrait d’une décharge devant chez lui ? Personne évidemment ! Seuls ceux qui ont un intérêt dans cette affaire, et ceux qui ont la responsabilité de la gestion des déchets, les exploitants et les administrateurs au sens large, avanceront qu’il faut sacrifier un territoire pour l’intérêt de tous et celui de l’environnement. Selon le dire des décideurs, nous produisons tous des déchets qu’il convient de traiter et d’enfouir. L’intérêt de la communauté passe, ainsi, avant celui des quelques malheureux qui auront à supporter directement les méfaits de ces nouvelles décharges ; leur soumission dépendant de leur manque de détermination et de leur faiblesse à manifester leur opposition. Pour mener à bien ce dossier, les autorités devaient donc proposer une alternative qui tienne compte de ces différents éléments. Il fallait encore qu’elles se trouvent des alliés et proposent un emplacement assez retiré. « Monsieur le Maire [de Roybon, monsieur Marcel Bachasson] rappelle et précise […] qu’il a été informé officiellement par monsieur le Préfet en juillet 2006 que l’État et le Conseil général étaient conjointement à la recherche (autorisation préfectorale mais compétence départementale) d’une solution alternative à la décharge d’Izeaux (site fermé en cours de démantèlement) [ ; ] que dans le cadre du Plan Départemental d’Élimination des Déchets, un comité de pilotage associant Monsieur le Préfet, la Fédération Rhône-Alpes de Protection de la Nature (FRAPNA) [Totalement intégrée au pouvoir de décision, la FRAPNA reconnaît avoir « travaillé [au sein du comité de pilotage] avec le Bureau de Recherches Géologiques et Minières pour la recherche d’un site sur des critères très restrictifs, de façon à ne pas répéter la même erreur que le choix d’Izeaux (décharge sur une nappe phréatique) » (Isère Nature de septembre 2006).], le Bureau de Recherches Géologiques et Minières (BRGM), la Direction Départementale de l’Agriculture (DDA) … était chargé de cette recherche et que les premières études laissaient entrevoir une possibilité d’implantation sur 7 sites en Isère, dont 3 sur la commune de Roybon » [Extrait du compte rendu de la réunion du Conseil municipal du 20 octobre 2006 (http://pagesperso-orange.fr/mairie-roybon/Centre%20Stockage.htm)].
Roybon se trouve en effet loin de tout axe routier et ferroviaire et loin de toute concentration urbaine. Les probables opposants ne peuvent être que peu nombreux et ne pourront pas mener les mêmes actions que les opposants à la décharge d’Izeaux : pas de TGV ni de grands axes routiers à bloquer !
Le maire de Roybon ne vit pas alors d’un mauvais œil ce projet dans sa commune : « … l’implantation d’un tel centre représenterait pour la commune une rentrée supplémentaire de taxes et des aides diverses substantielles pour la réalisation de nos projets. » [Les membres du Conseil ajoutaient dans leur compte rendu de réunion qu’ils restaient ouverts à la négociation sous conditions : le Conseil se prononcerait favorablement si « des contreparties financières sont données, permettant à la commune de faire face à son développement, avec notamment des aides accrues au financement de certaines réalisations nécessaires, en évitant d’accroître la fiscalité (gymnase des Collèges, déversoir au lac, requalification de la zone de loisirs, mise aux normes des voiries communales, aménagement de la salle des fêtes … de la mairie, des entrées du village, aménagement de la traversée du village et des places, chaufferie bois, mise aux normes de certaines voies départementale si le trafic le nécessite…) et inscription de projets départementaux ou nationaux d’établissements sanitaires demandés par la commune (établissement pour handicapés, établissement pour personnes âgées dépendantes), aménagement de l’hôpital, blanchisserie… » (http://pagesperso-orange.fr/mairie-roybon/Centre%20Stockage.htm). Sans vergogne, ils affichèrent ainsi le prix de leur abnégation.]. Le maire de Roybon et la FRAPNA n’avaient à ce moment là, apparemment, que très peu d’objections à cette décharge. Il leur suffisait qu’elle soit aux normes, que les eaux souterraines soient protégées et que les déchets soient sous contrôle.
Le vent a tourné lorsque le Conseil municipal « a constaté l’opposition marquée d’une grande majorité des maires des communes environnantes et celle de la plupart des associations de défense de l’environnement » (http://pagesperso-orange.fr/mairie-roybon/Centre%20Stockage.htm).
Voyant la colère des maires des communes avoisinantes qui, contrairement à elle, n’avaient rien à espérer de ce projet si ce n’est les nuisances, et voyant l’opposition s’organiser, la municipalité de Roybon fit volte-face et rejoignit cette opposition, donnant finalement le 24 janvier 2007 un avis défavorable au projet d’implantation d’une décharge sur sa commune.
Actuellement une opposition ne paraît recevable que si elle fait des propositions et si elle explique en quoi le projet en question n’est pas acceptable dans le cadre d’une gestion de la société actuelle. On ne pourra sûrement pas condamner un projet pour la seule raison évidente que personne ne souhaite avoir devant ou à côté de chez soi une montagne de déchets, fussent-ils ultimes ou non dangereux, ainsi que la valse incessante des camions que cela engendre. La société industrielle est grande productrice de déchets. De par sa nature même, nous savons qu’elle ne se maintient qu’en produisant toujours davantage, dans une fuite en avant. Par conséquent nous savons qu’elle engendrera toujours plus de déchets. Malgré cela, il semble impossible de la dénoncer en tant que telle. On dira plutôt qu’il faut trier et recycler les déchets et en réduire la quantité [On demande à chacun de réduire ses déchets. Mais on sait que la plupart de nos ordures ménagères sont constituées d’emballages et de contenants : cartons, boîtes de conserve, papiers, plastiques de toute sortes, bouteilles, etc. Ces emballages et ces contenants doivent leur existence au seul fait que les marchandises sont conditionnées par l’industrie, pour le transport et la grande distribution… L’organisation industrielle du traitement de nos ordures ménagères est une vaste tromperie. Les centres de stockage des ordures ménagères ou d’incinération, les services de tri des déchets et les industriels de leur valorisation dépendent essentiellement de la quantité d’ordures qu’ils auront à traiter. Ils ont tout intérêt à ce que nous en produisions davantage. Leur environnementalisme n’est qu’un argument commercial. Avant que l’environnement ne soit devenu la bonne et fausse conscience de notre monde, ne pouvions-nous pas lire sur les conteneurs et les camions de la société Lély environnement actuelle, l’enseigne Évac-ordures ? Il est pourtant indéniable que cette société s’emploie davantage aux ordures qu’à l’environnement.
Jaunes, verts ou bleus, les conteneurs à la disposition des éco-citoyens, disséminés un peu partout sur les places, les parkings et le long des rues, sont autant de verrues qui enlaidissent nos villes et nos villages. Mais n’est-ce point ici le moindre des griefs que l’on puisse formuler contre le recyclage ? La valorisation des déchets est essentiellement critiquable de par le fait qu’elle devienne marchande et technicienne. Par conséquent son
objectif sera purement commercial et technique : pour un problème donné, on cherchera immédiatement une solution technique que l’on voudra commercialiser sans se préoccuper du problème social, humain et même environnemental, dans son sens le plus large. Parfois ces solutions techniques sont précipitées et ne répondent pas tout à fait aux attentes escomptées pour le long terme. L’important est avant tout d’innover afin d’ouvrir une nouvelle niche commerciale avant la concurrence. Les bouteilles plastiques, pour certaines des bouteilles d’eau minérale que l’on consomme parce que les nappes phréatiques sont polluées par les nitrates et les pesticides agricoles, sont recyclées pour devenir de la « laine polaire » qui deviendra impossible à recycler de nouveau. Le recyclage du papier désencré et blanchi au chlore (et oui !) donne des fibres de papier plus courtes et un papier de moins bonne qualité (ce qui ne permet qu’une dizaine de recyclages successifs, grand maximum). Le recyclage du verre pose aussi des problèmes car il est lourd et nécessite donc beaucoup de carburant pour son transport. Il faut le fondre à 1550°C pour le recycler, ce qui demande une grande consommation d’énergie. Il n’y a pas si longtemps les bouteilles en verre étaient consignées. Les industriels ont préféré ne plus organiser ce système de consignes jugé non rentable d’un point de vue commercial.]. On cherchera à formater les enfants à l’école dès leur plus jeune âge, espérant ainsi que les progénitures, nouveaux chiens de garde éco-citoyens, sauront éduquer les parents encore rétifs devant l’organisation si complexe qu’on leur demande de mettre en place chez eux et dans leur poubelle. On cherchera une nappe d’eau, une espèce végétale ou animale rare qu’il faudra à tout prix protéger et qui justifiera l’annulation du projet [L’ensemble de la « biodiversité » est menacé. On voudrait nous faire porter la responsabilité de cette catastrophe et nous montrer du doigt en nous demandant de réduire notre « empreinte écologique » alors même qu’on nous explique qu’il faut travailler plus et produire encore plus. Les contradictions de la société industrielle sont flagrantes. La disparition des espèces est bien plus dépendante de la dévastation et du morcellement des territoires que d’autre chose. Qui décide de construire une décharge ou un Center Parcs, avec toutes les conséquences que cela implique, dans un territoire vierge de tout grand aménagement sait qu’il réduira le territoire de toutes les espèces présentes. Il sait aussi qu’il participera par conséquent à leur extinction dans ce territoire dans un premier temps, et qu’il contribuera, à terme et en général, à l’appauvrissement de la diversité des espèces. Il ne faut pas crier au loup, après l’avoir invité à entrer dans la bergerie.].
L’opposition s’est bien sûr structurée. Un collectif de 18 communes s’est constitué fin décembre 2006, contre ce projet en Chambaran. Une pétition sur le site http://www.sosdechets.org/ compte de nombreuses signatures. Pour protester contre cette décharge, les habitants du petit village de Brion ont boycotté les élections législatives. Ce dimanche 10 mars 2007, aucun électeur de la commune de Brion n’est passé par l’isoloir. L’urne est restée vide [Cf. Le Dauphiné Libéré du 11 juin 2007.]. Le Président du Conseil général, monsieur André Vallini chargé par le préfet et les ministres de trouver et proposer un nouveau site et qui, jusqu’alors, n’avait émis aucun avis défavorable sur le site de Roybon, se prononce clairement contre ce projet. Il adresse un courrier le 21 mai 2007 au préfet de l’Isère dans lequel il déclare : « Je suis attaché à la forêt des Chambarans et à cette région dont il faut à la fois préserver le cadre naturel et développer l’attractivité touristique [c’est moi qui souligne], et je vous demande donc de faire examiner par vos services en toute transparence des solutions de stockage des déchets dans les zones industrielles productrices de ces déchets et bien connectées aux infrastructures routières. » [Cf. document sur http://www.sosdechets.org/.]
C’est peu dire qu’un nouveau projet était en train de naître dans l’esprit de notre élu chargé de l’administration du département. Une véritable politique départementale visant à recycler et à refaçonner un territoire vierge de tout grand aménagement venait de surgir. La presse locale nous apprenait le 15 décembre 2007 que le président du groupe Pierre et Vacances avait écrit officiellement à André Vallini pour lui annoncer que le cinquième Center Parcs de France allait s’implanter dans les Chambarans, à Roybon. Beaucoup se sont réjouis d’apprendre que l’on voulait développer le tourisme dans les Chambarans. Tout d’abord Monsieur Marcel Bachasson, maire de Roybon, toujours alléché par la nouvelle manne que représenteraient les taxes liées au permis de construire, la taxe foncière, la taxe professionnelle et les autres taxes de séjour, se félicite et « mesure à quel point 3500 ha de forêts vont être utiles ». Selon Jean-Michel Revol (conseiller général de Saint Marcellin), « c’est un plus pour la vitalité de nos territoires ». Et selon René Vette (conseiller général du canton de Saint-Étienne-de-Saint-Geoirs) [http://sillon38.com/blog/2007/12/17/roybon-heureux-elu-de-pierre-et-vacances/], « ça va créer un couloir touristique important ». Comment peut-on se flatter de vivre dans un couloir touristique important ?
Le projet de décharge n’a toujours pas été abandonné. Certains, avec André Vallini espèrent jouer la carte du tourisme industriel contre celle des ordures industrielles. Pour
l’instant les deux projets sont d’actualité. Les riverains se sont manifestés contre la décharge. Personne ou presque ne s’est déclaré publiquement contre le
Center Parcs. Peut-être pense-t-on que les nuisances seraient moindres ?
Quant à moi, je souhaite pour les Chambarans avec, je l’espère, ceux qui les aiment pour ce qu’ils sont, ne jamais savoir ce que préserver le cadre naturel veut dire dans la bouche de l’aménageur de couloir touristique.
Henri Mora (correspondance), le 13 octobre 2008

[Chambard dans les Chambarans] 4. On finit par avaler sa salive

Quand on ne cesse de nous dire qu’il n’y a rien à faire, on finit par avaler sa salive
Le monde étant devenu une vaste galerie marchande, il était difficile de penser que les Chambarans pussent passer entre les mailles du filet à provisions. Les lois du marché auront finalement imposé la raison d’être d’un nouveau Center Parcs, dans le bois des Avenières, à Roybon, avec ses bungalows, son équipement aqualudique sous cloche et ses loisirs préfabriqués. On nous annonce toujours les bienfaits des projets proposés. Leurs laudateurs s’abstiennent de nous dire de quoi nous priveront-ils. Ici, il s’agit de 150 ha, et vraisemblablement davantage, qui seront retirés de la libre circulation des promeneurs, des cueilleurs, et des sylvains. La pratique de la chasse y sera naturellement interdite. Probablement d’autres conséquences sont à craindre ; les inconvénients ne sont pas toujours faciles à qualifier et à quantifier a priori. En revanche il est indéniable que la vie et les paysages que nous connaissons aujourd’hui, ne seront plus. Les résultats du tourisme de masse sur le littoral méditerranéen, ou encore dans nos montagnes, témoignent de la désastreuse évolution à laquelle nous pouvons nous attendre.
Le 15 décembre 2007, nous apprenions par la presse locale [Le Dauphiné Libéré du 15 décembre 2007. Selon le communiqué de presse du 17 décembre 2007, du Conseil général de l’Isère : « Pierre et Vacances envisage de consacrer l’année 2008 aux procédures administratives, de débuter les travaux fin 2009 et d’ouvrir le parc au printemps 2012. ». Nous apprenions donc, à la mi-décembre, les intentions de nos décideurs. Mais ceux qui connaissaient le bois des Avenières avaient pu remarquer les mois précédents (septembre, octobre et novembre 2007), l’abattage de nombreux arbres formant une allée de plusieurs centaines de mètres à l’intérieur même du domaine envisagé. Aujourd’hui cette allée est devenue carrossable… Monsieur Marcel Bachasson, maire de Roybon, se serait-il joué de la transparence et des procédures officielles ?] que la société Pierre et Vacances avait choisi la commune de Roybon pour construire un nouveau Center Parcs. Gérard Brémond, président de Pierre et Vacances confirma l’intention du groupe de bâtir ce cinquième complexe en France. Gérard Brémond est considéré comme un pionnier dans le domaine de la réalisation de stations de ski. Il est le premier à avoir développé le principe de la station sans voitures, en 1967 à Avoriaz. Un écologiste avant l’heure, penseront certains. Il est celui qui a développé, dans les années 1980, le concept de « nouvelle propriété » : son groupe fait construire des résidences touristiques qu’il revend ensuite à des particuliers qui bénéficieront de quelques avantages fiscaux. Le nouveau propriétaire loue ensuite son bien au groupe Pierre et Vacances qui est chargé de trouver les locataires. Le groupe Pierre et Vacances fut introduit en Bourse en 1999 ; son chiffre d’affaire annuel étant de plus de 1,5 milliard d’euros, en 2007. En 2005, le groupe Pierre et Vacances rédigea avec la fondation mondiale de protection de la nature WWF, une charte environnementale. Toute la presse adule ce personnage qui, parti de presque rien, se retrouve en Europe, à la tête d’un empire dans le domaine de l’immobilier et du tourisme blanc et vert, respectueux de l’environnement. Il est un symbole de la réussite écolo-libérale.
Sur le terrain, Avoriaz n’enchante vraiment pas tout le monde. Cette station se trouve à 1800 m d’altitude sur le territoire de la commune de Morzine en Haute-Savoie. Elle est effectivement interdite aux voitures ; on s’y déplace à pied ou en traîneau à cheval. Située au centre du domaine des portes du soleil qui compte 14 stations, elle permet aujourd’hui de skier sur un domaine de 650 km de pistes. Chacun pourra imaginer ce que cela signifie : les routes conséquentes et leurs bouchons, les immenses parkings aux abords de la station qui permettent d’accueillir 2500 véhicules, la multitude de remontées mécaniques dont la dizaine de télésièges débrayables débitant 3000 skieurs chacun par heure vers le haut des pistes ; mais aussi le remodelage, le dynamitage, les terrassements et le bétonnage de la montagne qu’impose chaque projet d’extension. Une véritable horreur qui s’est développée à l’ensemble du massif alpin ! On a ainsi offert la montagne aux investisseurs et aux touristes. Les premiers s’enrichissent tandis que les seconds s’adaptent en masse aux modes et consomment selon les saisons. La forêt avait échappé à cette frénésie. Gérard Brémond l’a désormais fait entrer dans la cour des grands.
« La Drôme et l’Isère étaient en compétition pour accueillir l’équipement » pouvait-on lire dans Le Dauphiné libéré du 15 décembre 2007. L’enjeu est en effet de taille : « […], les équipements de loisirs – centre aqualudique, restaurants, commerces, activités sportives… – occuperont la surface de 30’000 m². L’ensemble sera entouré d’aménagements paysagers et [de] 1000 maisons. » Mille maisons !
Les quelque quatre mille sept cents personnes [Selon les estimations des professionnels et en reprenant leur jargon, les 1000 bungalows représentent 5000 lits qui, selon le taux de remplissage annoncé, permettront d’accueillir en moyenne par semaine 4000 touristes. 700 salariés seront présents sur le site pour les recevoir.] présentes continuellement sur le site ne manqueront certainement pas de poser des problèmes dans ce village qui ne compte guère plus de mille quatre cents âmes aujourd’hui. Pourtant, selon les élus, ce projet serait de l’eau bénite : « Si le projet voit le jour, cela profitera à l’ensemble des territoires des Chambarans, du Sud Grésivaudan et de la Bièvre, notamment en terme d’emplois » [Le Dauphiné Libéré du 15 décembre 2007] s’enthousiasme André Vallini, président du Conseil général de l’Isère. Marcel Bachasson, maire de Roybon et conseiller général, s’enflamme aussi : « Avec la présence de près de 4000 vacanciers par semaine, cette implantation va également générer un volume d’achats de près de 12 millions d’euros par an et forcément engendrer de nombreuses retombées pour l’économie locale. On ne pouvait rêver mieux » [Isère Magazine, février 2008]. Un dossier réalisé en 2002 par les services du Conseil général du Territoire de Belfort, pour un projet de Center Parcs dans ce département [Ce projet a depuis été abandonné.], avançait des propos beaucoup moins exaltants : « Il est manifeste que la concentration dans quelques régions de la majeure partie de l’activité touristique a contribué à transformer totalement celles-ci, qui certes en vivent, mais ont vu en contrepartie disparaître une partie de leurs caractéristiques propres. » [Consultation de la population du 15 décembre 2002 – Implantation de Center Parcs. Ce dossier n’est plus consultable sur Internet. Je le tiens à votre disposition.]
Dans ce dossier qui concernait la construction d’un Center Parcs bien plus petit que celui qui est en projet pour Roybon, on s’inquiétait de certaines conséquences :
« La question de l’eau, pour un équipement de type Center Parcs est bien évidemment fondamentale. Au-delà de la consommation journalière d’une population d’environ 3000 personnes, soit une petite ville, et de 500 employés, l’ensemble des loisirs aquatiques, en particulier ceux localisés sous la bulle tropicale, en dépit des efforts de recyclage, nécessite des apports journaliers importants. »
« On estime, sur la base des constats effectués sur les sites existants, qu’un site Center Parcs représente une consommation quotidienne de l’ordre de 650 m³ d’eau .»
Chacun pourra apprécier et méditer en se souvenant peut-être de la campagne de sensibilisation Je sauve une goutte, organisée il y a une quinzaine d’années par le Conseil général de l’Isère.
Les services du Conseil général du Territoire de Belfort qui craignaient un impact notable sur la circulation du gros gibier, et sur les lieux de repos des oiseaux migrateurs, ajoutaient dans ce même dossier : « la présence en permanence sur le site d’environ 3500 personnes ne peut pas ne pas avoir un impact fort ; de fait chacun des sites évolue d’un statut purement forestier à une forêt de type périurbain » [Ibid.].
La question de la circulation et du stationnement engendrée par un Center Parcs est aussi une question préoccupante pour les habitants des communes riveraines, comme pour ceux qui appréciaient cette forêt à l’écart des routes à circulation. Dans les Chambarans, il s’agirait d’un trafic de l’ordre de deux mille véhicules qui se croiseraient lors des rotations, sans compter les véhicules des salariés. Les petites routes de campagne existantes seraient élargies ou encore aménagées en routes à circulation ; des ronds-points apparaîtraient aux intersections. Des parkings seraient construits, non seulement à l’entrée de Center Parcs, mais aussi ailleurs. Ces nouvelles infrastructures routières, mais aussi l’assainissement et le traitement des ordures du site, comparables à ceux d’une ville de près de cinq mille habitants, seraient pris en charge soit par le Conseil général, soit par la communauté de communes, c’est-à-dire qu’ils seraient payés par le contribuable. Il semblerait que cela déplaise. Mais seraient-ils seulement à la charge de Gérard Brémond ou du touriste qu’ils ne seraient pas plus enviables.
Nous ne pouvons pas accepter moralement de travailler à n’importe quel prix, contre notre conscience [Les riverains ne peuvent pas, non plus, accepter moralement de vendre les terrains utiles à ce projet, s’ils ont conscience de ce qui adviendrait.]. Les élus, à l’esprit comptable et intéressé, chantent les louanges du nombre d’emplois créés, du volume d’achats et de toutes les taxes qui seraient engendrés par un Center Parcs à Roybon. Selon les panégyristes de l’argent et du travail à la Shadok, la destruction des Chambarans, les nuisances à supporter et la soumission des riverains à de nouvelles conditions de vie ne devraient pas peser sur la balance des décisions.
Les mécontents finiront-ils par accepter l’idée qu’il ne s’agit là que d’un problème comptable et qu’il leur faudra, malgré tout, avaler leur colère et vendre leur âme au démon ?
Henri Mora (correspondance), le 27 octobre 2008
Publié dans le Jura libertaire
Vendredi 6 février

Des nouvelles du front (ZAD des Chambarans)



Madame, Monsieur,
Ce soir, aux environs de 20 heures 45, la guérite d’accueil de la ZAD Roybon, installée à l’entrée du chemin communal menant à la maison de la Marquise a entièrement brûlée, suite à un jet de plusieurs cocktails Molotov. Cette attaque, n’est pas un simple acte de destruction et fait suite à une série de jets de projectiles sur cette même installation, servant chaque nuit d’habitation, depuis le 30 novembre dernier.
Cet incendie criminel, visant à détruire cette habitation, et à atteindre l’intégrité physique de tiers de manière volontaire, est ni plus ni moins qu’une tentative d’homicide.
Les forces de l’ordre et le CDIS de Roybon se sont rendus sur place suite à notre appel. L’intervention a commencée environ 1 heure après cet appel. Rappelons que la commune de Roybon et la caserne de pompiers sur place, sont à moins de 5 kilomètres du lieu de l’incendie.
À l’arrivée des militaires et des pompiers, nous avions déjà maîtrisé l’incendie, par nos propres moyens, malgré les risques que cela importe. Notre intervention a donc limité la propagation de l’incendie.




En début de semaine, le député de l’Isère, Jean-Pierre Barbier, a interpellé le Premier Ministre, lui demandant d’évacuer la ZAD Roybon et, d’interdire notre rassemblement Open Barrikad. Nous avions fait en sorte de limiter la communication de cet événement. Communication mise à mal par cette intervention.
Dans sa question au gouvernement, le député Barbier a notamment accusé les gouvernants de « complicité » avec notre action de blocus du chantier de Center Parcs. La réponse obtenue de la Ministre de l’écologie laisse à entendre qu’aucune intervention n’aurait lieu jusqu’à nouvel ordre. Cette intervention a provoqué un certain émoi chez les plus extrémistes des pro-Center Parcs.
Suite à ceci, mardi dernier au soir, une réunion de pro-Center Parcs avait lieu dans une salle communale de Roybon, organisée par l’association « Vivre en Chambaran » en présence du Maire du village, M. Serge Perraud. Certaines personnes présentent y auraient, selon plusieurs témoignages, clairement proférées des menaces de violences physiques à notre encontre.
La violence gratuite de ces personnes est intolérable. Nous sommes aujourd’hui inquiets pour le bon déroulement de notre rassemblement du week-end du 7, 8, 9 février.
En effet, les pro-Center Parcs ont décidés d’organiser un contre-rassemblement et promettent une action « spectaculaire ». Le triste spectacle de ce soir ne nous laisse pas indifférents à ce sujet.
De plus, la société Alternative Sécurité, employé pour surveiller la zone de construction du Center Parcs, continue de patrouiller, nous épiant jours et nuits, et ce sur la voie publique. Nous continuons de nous interroger sur la légalité de ces activités de surveillance, les milices privées étant à ce jour toujours interdites sur le territoire.
Nous tenons à rappeler que notre manifestation est ouverte à toutes et à tous. Cet événement se veut festif et familial. Nous souhaitons qu’elle se déroule en paix, mais nous n’oublierons pas la violence des actes de ceux qui s’en prennent à notre intégrité physique, et menacent de fait nos vies.
Pour Demain.
Samedi 7 février

NDA : Chambard dans les Chambarans – 7 – de Henri Mora : passionnant ! mais comme ça fait 10 pages, je ne peux que joindre le lien - l’histoire des Chambarans et de Grenoble de 1939 (avec les réfugiés espagnols, allemands) à la fin de la guerre … et le rapport avec maintenant. Du grand art.

Infos du 9 au 15 Février


Lundi 9 février



7 et 8 février 2015, deux journées mouvementées sur la ZAD de Roybon

7 Février 2015, 10h30. Du monde malgré le froid pour cette journée de construction sur la ZAD de Roybon dans la forêt de Chambaran. Nous sommes près de 200 à avoir passé les barrages assez tôt pour monter ensemble sur la colline, après quelques débats, parfois tendres, parfois houleux, avec les quelques dizaines d’habitants postés dans le village pour faire entendre leur soutien au projet. Nous sommes rejoints toute la journée par de nombreux sympathisants, venus soutenir cette action, et poursuivre la construction des cabanes et des barricades.



Ce qui marquera cette journée, c’est l’attitude d’une minorité parmi les « pro », organisés pour faire monter la tension dans le village : barrages sur les routes d’accès à Roybon et à la ZAD, pression et insultes sur les personnes, 4x4 poursuivant des manifestants après leur départ et deux voitures brûlées en fin d’après-midi. Trois individus ont tenté une intimidation à la tronçonneuse devant une barricade. Sans succès. Aujourd’hui 8 février, les barrages étaient de nouveau en place. Dans la journée, les pro-Center Parcs ont attaqué physiquement plusieurs personnes autour de la ZAD.
Les flics, présents depuis hier matin aux barrages des pro, partagent le café avec eux. Ils ont joué leur rôle : ils ont laissé faire. Des témoignages indiquent qu’ils ont également contrôlé des manifestants dans des villages voisins, où des riverains sont heureusement intervenus. Notez bien : gendarmes et pro-center parcs sont désormais copains comme cochons. Mais ne nous laissons pas intimider. La minorité qui organise ces blocages fait pression sur les habitants comme sur les zadistes pour avoir gain de cause. Ils prétendent défendre cette forêt, qu’ils viennent pourtant de vendre pour une bouchée de pain. À Roybon comme dans les villages alentour, nous avons rencontré bien des personnes qui avouent ne pas oser manifester leur point de vue, de peur des représailles.
Et pendant qu’une poignée d’excités joue les durs, ces messieurs de Pierre&Vacances restent bien au chaud. De notre côté, n’oublions pas notre objectif : nous nous opposons au capitalisme, même repeint en vert, et à ses infrastructures logistiques, industrielles ou touristiques. Comme face au TGV Lyon-Turin, à l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, à la retenue de Sivens, notre lutte n’est pas un conflit de territoire entre bons et mauvais, locaux ou extérieurs, c’est une lutte politique. C’est l’une des formes de l’opposition à la colonisation par l’économie de tous les domaines et tous les espaces. Ce fameux « or vert » que représente l’intérieur du territoire pour le capitalisme, nous comptons bien le défendre.
Les recours juridiques n’y suffiront pas. Plus que jamais, les actions collectives doivent se poursuivre et se multiplier sur la ZAD. Rejoignez-nous.
Lapins et écureuils unis contre Center ParcsCommuniqué suite au weekend des 7 et 8 février 2015 sur la ZAD de Roybon.
Nous appelons à témoigner des actions et agressions sur cette adresse : lapins-ecureuils[arobase]riseup[point]net
  • Le 9 février à 18:49, par #
 2 bagnoles copains cramées dans la nuit du 7 au 8 février par des pros center parcs 2 potes tabassés au visage par les pros 1 guérite de cramée par les pros Crevaisons de pneus par les pros sous l’œil des GMs qui laissent faire les fachos et qui ensuite repartent ensemble pour aller se réunir pour parler ensemble hors zone...
Nous avons les plaques et marques des véhicules, plus les photos qui devraient tourner prochainement.
Rebellyon.info


Un autre récit plus détaillé du week-end avec photos par « les mutins et lutines de la forêt » :

Jeudi 12 février


[ZAD des Chambarans] Des spéculateurs avides d’argent public pour prospérer, soutenus par des élus qui tentent de passer en force en employant la violence, et à coups d’opérations de propagande, devraient être sanctionnés, et le projet de Center-Parcs de Roybon, purement et simplement abandonné

Le collectif grenoblois de soutien à la Zad des Chambarans tient à alerter largement de la gravité des agressions dont les manifestants du week-end des 7 et 8 février ont été la cible à Roybon et dans ses environs.
Alors que la population était invitée à rejoindre la ZAD pour une marche suivie d’un pique-nique et de deux jours d’échanges sur le site occupé, quelques “pro-Center-Parcs” se sont livrés à une série d’actes graves et délictueux : barrages routiers empêchant les manifestants de rejoindre la ZAD, insultes et intimidations (notamment à l’aide d’une tronçonneuse), et pour finir, un passage à tabac et l’incendie de deux véhicules.
Ces méfaits sont le résultat de mois de dénigrement orchestrés politiquement et médiatiquement contre les opposants au Center-Parcs. Alors que des élus de tous bords favorables au projet bénéficient de pleines pages pour diffamer les opposants, les agressions de ce week-end n’ont fait l’objet que de minces entrefilets.
Nous constatons que confrontés à une opposition déterminée mais pacifique à ce projet, des élus se livrent à une campagne de dénigrement et de manipulation des populations locales. Celle-ci a donné libre-cours ce week-end à des pratiques que l’on peut qualifier de fascisantes. Des appels au meurtre à l’encontre des occupants de la ZAD circulent déjà sur internet. Nous exhortons solennellement les médias à faire leur travail honnêtement, et les responsables politiques à cesser ce jeu malsain.
Le collectif grenoblois de soutien à la Zad des Chambarans continuera sans relâche de combattre ce projet de “Center-Parcs” autorisé en dépit d’un rapport d’enquête négatif et retoqué par le tribunal administratif. Des spéculateurs avides d’argent public pour prospérer, soutenus par des élus qui tentent de passer en force en employant la violence, et à coups d’opérations de propagande, devraient être sanctionnés, et le projet de Center-Parcs de Roybon, purement et simplement abandonné.
Collectif grenoblois de soutien à la Zad des Chambarans

Infos du 16 au 22 Février


Mardi 17 février


Communiqué du 17 février 2015

Bonjour,
Ici la neige fond, mais la motivation ne diminue pas. Les constructions se complexifient autant que la surveillance et les contrôles des forces de gendarmerie. L’agence «   Alternative Sécurité » fidèle à son poste continue de nous imposer sa présence qui n’a d’éblouissante que la lumière de ses phares.    



Coucher de soleil sur la forêt des Chambarans


Lorsqu’ils ne bloquent pas les routes, en procédant à des fouilles, aidés de leurs chiens renifleurs, les gendarmes se baladent, niant le droit à la circulation, afin de constater, au même titre que l’huissier, que nous sommes toujours là, et que nous ne bougerons pas.
Après un week-end voulu violent par les anti-zadistes et répressif par les arrêtés préfectoraux et municipaux bloquant les accès à la ZAD Roybon ; après une semaine de réflexions avec les gens des environs et de travaux d’avenir de notre côté, nous nous étonnons de l’engouement soudain de nos opposants pour cette violence physique.
Une coïncidence des calendriers avec des prochaines élections départementales (ex-cantonales) où seront élus les futurs conseillers généraux, si importants à notre quotidien, notamment lorsqu’il s’agit de voter les subventions aux grandes entreprises… Une coïncidence aussi sans doute avec les récentes attaques des pro-barrages sur le site de Sivens et le rapprochement, sur les réseaux sociaux, des pro-barrages et des pro-Center Parcs (surtout anti-zadiste)…


Capture d’écran du groupe FaceBook « Oui au Center Parcs »

L’heure est donc à l’abus de pouvoir autour de la ZAD Roybon. Notamment avec l’annulation, à Viriville, de la location d’une salle des fêtes à l’organisation du Carnaval des Grenouilles, dans le cadre de la journée mondiale pour les zones humides.
Cette annulation s’est faite quelques jours à peine avant la tenue de l’événement, via une annonce sur les différents sites de la mairie. Considérée comme une action d’opposition au projet de Center Parcs, cette manifestation pédagogique et ludique devait porter sur la question des zones humides de la région en général.
Nous apportons notre soutien aux organisateurs et nous nous indignons de ce coup porté à la liberté de réunion, d’association et d’expression. Nous tenons à rappeler que l’association Vivre en Chambaran n’avait, elle, pas eu les mêmes problèmes pour organiser sa réunion anti-zadistes dans une salle communale de Roybon. Deux poids, deux mesures et un même faux semblant de démocratie…
Nous continuons cependant à recevoir autant de visiteurs, comme hier après-midi, où 7 véhicules occupés par des curieux sont venus faire demi-tour dans le champ du voisin de la Barricade Sud. Surpris par notre superbe Château Fort de Camp à Gnole, ils ont demandé en passant ce que c’était que ce « bordel »… ?
Nous vous invitons vous aussi à venir contempler nos constructions et participer à cette nouvelle expérience de vie qui tend la main à une autonomie qui, nous l’espérons, fleurira avec le printemps…
À bientôt dans les bois…


ZAD d’AGEN à 

Ste COLOMBE-en-BRUILHOIS - 47

Infos du 2 au 8 Février

Mercredi 4 février

Près d’Agen, une Zad pour que « les bulldozers n’aillent pas plus vite que la justice »



Près d’Agen, la guerre qui oppose l’économie à l’écologie est livrée autour d’un projet de zone d’activité. Les promoteurs y voient la promesse d’emplois, les opposants un gaspillage de terres agricoles et un déni de démocratie. Une ZAD a vu le jour sur le terrain d’un des agriculteurs concernés tandis que des procédures judiciaires sont en cours.

- Agen, reportage
Agen est économiquement sinistrée et déplore un taux de chômage de 18,6 %. Les élus de l’agglomération ont trouvé la parade : le Technopole Agen Garonne (TAG). Cette zone d’activité économique « haute qualité environnementale » viendrait selon eux créer 4000 emplois en vingt ans. Le chantier, dont le coût estimé est de 65 millions d’euros, devrait commencer à l’été 2015 sur la commune de Sainte-Colombe-en-Bruilhois.
Mais il y a un hic : le technopole viendrait recouvrir de béton 220 hectares de terres agricoles particulièrement fertiles. Une dizaine d’agriculteurs et une vingtaine d’habitations sont concernées. Depuis 2010, l’association Très grande vigilance en Bruilhois et en Agenais a été créée pour s’opposer au projet.

Des élus EELV, la Confédération paysanne, le Modef (Mouvement de défense des exploitants familiaux) et même la FDSEA (branche départementale du syndicat agricole majoritaire), ont rejoint le mouvement. Et, depuis le 13 décembre, des zadistes occupent légalement le terrain d’un des agriculteurs menacé d’expropriation (voir encadré ci-dessous).
- Sur la Zad de Sainte-Colombe-en-Bruilhois -

Le syndrome de l’élu bâtisseur
Pour justifier la création du TAG, l’agglomération assure que la dizaine de zones d’activités entourant Agen sont saturées. Jean-Marc Gilly, maire d’Estillac, favorable au projet, explique que dans l’Agropole, la zone économique située sur sa commune, « tout est plein. Il y a urgence à ouvrir des terrains économiques ». Pour lui, l’Agropole est un « succès » qui assoit la légitimité du projet de TAG.
Bernard Péré, conseiller régional EELV relativise : « Il a fallu vingt ans pour remplir soixante-dix hectares de l’Agropole alors que la situation économique était tout autre. Combien en faudra-t-il pour remplir 200 hectares ? »
Pour lui, le projet est surdimensionné. « J’espère qu’on sera un jour en nécessité de construire de nouvelles zones pour faire face au développement économique, mais pour l’instant, j’aurais préféré qu’on optimise au fur et à mesure ce qui existe déjà. »
Il s’appuie sur un rapport du cabinet CODE, rendu en 2009, qui estime que 55 ha sont encore à commercialiser sur les zones existantes et que 290 ha peuvent être dégagés dans l’agglomération en requalifiant l’existant. « Les promoteurs du projet pensent que les infrastructures créent de l’emploi. Je pense plutôt que c’est en fédérant les acteurs économiques et en mutualisant que l’on crée de l’activité », dit l’élu.
À l’instar des opposants, le Conseil général demandait, lors de l’enquête d’utilité publique, une « étude détaillée des disponibilités foncières sur le territoire et notamment sur les espaces à proximité des pôles économiques existants ». Sans s’opposer au projet, son président, Pierre Camini, a émis « des réserves sur la taille et le calendrier de réalisation prévisionnel de cette zone ».




Un an plus tard, il estime avoir été entendu : « J’avais milité pour un phasage, en cela on a été suivi. Le déploiement sera progressif en fonction de l’activité. Je n’avais pas d’opposition de fond à ce que le technopole se fasse. Je mettais un bémol sur la communication de l’Agglo. Ils voulaient tout aménager tout de suite alors que c’est ridicule. Je ne crois pas à un aménagement de 200 hectares dans les cinq ans qui viennent ».
La première tranche de 60 hectares doit être livrée à l’été 2016. Le calendrier prévoit ensuite un aménagement en cinq phases qui devrait s’étaler jusque 2029 et au-delà. Mais ce phasage ne répond pas aux attentes des opposants qui réclament toujours un aménagement de l’existant.
« C’est le même débat que pour la LGV où l’on veut construire du neuf alors qu’il y a des lignes à rénover. C’est le syndrome des élus qui veulent montrer qu’ils font des choses. Ils veulent du visible, des nouveaux projets, et les intégrent sur une carte sans se soucier de la réalité du territoire et des gens qui vivent dessus », dénonce Christian Crouzet, porte-parole de la Confédération Paysanne 47.

Un projet démesuré
On pourrait s’étonner du fait que Serge Bousquet-Cassagne, président de la Chambre d’agriculture, soutienne ce projet gourmand en terres agricoles. Mais il le justifie au nom de l’emploi : « En tant qu’agriculteur, voir des terres s’artificialiser me plaît moyennement. Mais on est aussi des citoyens. Demain, les écoles se videront des gosses s’il n’y a plus d’ouvriers. Je défends l’avenir de mes enfants et de la ruralité en laissant faire cette zone », plaide cet agriculteur fort en gueule. Il s’insurge contre « ces écolos qui sont contre tout », « vivent dans un monde de Bisounours » et « veulent laisser mourir le département ».
Suzanne, riveraine et opposante de la première heure fait partie de ces écolos "Bisounours" et dénonce les arguments des défenseurs du TAG : « Ils partent de problèmes réels mais apportent de fausses solutions. Bien sûr que l’emploi est un enjeu. Mais il y a d’autres moyens d’y faire face », pense-t-elle.
Les opposants craignent qu’en voulant relancer l’industrie, les élus pénalisent l’agriculture : « Il ne faut pas oublier que l’emploi agricole existe. C’est la première force économique du territoire. Il est très difficile pour les jeunes de s’installer. Et il y a peu de foncier disponible. Dès qu’il y en a qui se libère, les gens sautent dessus. Que les pouvoirs publics créent des réserves foncières d’accord. Mais qu’ils les mettent à disposition des jeunes agriculteurs », défend Jean-Luc Poli de la FDSEA. Christian Crouzet renchérit : « L’agriculture péri-urbaine est créatrice d’emplois de proximité à faible impact environnemental. C’est ce qu’ils veulent non ? »
Il ajoute que « si on continue à détruire des terres agricoles de qualité, on va faire travailler les jeunes agriculteurs qui veulent s’installer sur des terres ingrates, et dans un contexte de concurrence, ce sera compliqué pour eux. Il faut que les élus locaux prennent en compte cette réalité ».




En outre, les opposants doutent de la réalité des créations d’emplois. L’Agglomération s’est engagée à ne pas délocaliser d’entreprises locales pour les installer sur la nouvelle zone. Pourtant, Bruno Dubos, le maire de Foulayronnes, annonce qu’une des entreprises de sa commune a été contactée par l’agglomération afin de délocaliser son activité.
« Mon inquiétude est que ce projet débouche sur un transfert de richesses d’une commune à l’autre. Je me demande s’il ne va pas falloir prendre du recul », réfléchit l’élu qui pourtant n’était pas opposé au projet au départ. Surtout que ce démarchage d’entreprises locales n’est pas un cas isolé. « Je ne suis pas le seul élu de l’agglomération à être dans cette situation », affirme Bruno Dubos.
Un peu plus loin, à Pont-du-Casse, un membre de la coopérative De Sangosse affirme également que son entreprise a été approchée dans le même but. « Ils n’arrivent pas à remplir la zone alors ils démarchent des locaux pour justifier sa création », analyse-t-il.
Une situation anticipée par le Conseil général pendant l’enquête publique : « La superficie de cette zone [...] pourrait amener des entreprises endogènes à se déplacer sur ce site en générant des friches industrielles sur d’autres sites de l’agglomération d’Agen ». Contactée à plusieurs reprises, l’agglomération n’a pas donné suite à mes demandes d’entretien. Elle a néanmoins annoncé à Sud-Ouest qu’une entreprise avait déjà signé un compromis de vente et qu’une autre était en pourparlers.

Artificialisation à marche forcée
Les opposants dénoncent en premier lieu l’artificialisation des terres agricoles liées au projet. Selon le ministère de l’Ecologie, la progression des surfaces artificialisées est quatre fois plus rapide que la croissance démographique. Rien que dans le département, 17 900 hectares agricoles ont disparu entre 2000 et 2010. Des chiffres qui ne semblent pas émouvoir le président de la Chambre d’agriculture.
« Nous sommes face à des écolos qui sont dans le déni de réalité et souhaitent qu’on ne touche pas à la nature. Mais la nature est faite pour que les hommes qui sont là la domptent et la façonnent. » Il argue qu’il existe au bas mot 20 000 hectares de friches agricoles sur le département. « Alors, qu’est ce que vous voulez que représentent deux-cents hectares de terres qui vont entre guillemets s’artificialiser ? Ça va produire autre chose que des légumes, des boulons par exemple », raille-t-il.
Un argument qui fait bondir Jean-Luc Poli de la FDSEA : « Justement ! Quitte à artificialiser, autant le faire sur des terres médiocres et inutilisées plutôt que d’exproprier des agriculteurs en activité et d’utiliser des terres alluviales de Garonne, de première catégorie et de haute qualité agronomique. »



L’agglomération assure que les exploitants concernés par la zone sont dédommagés ou se voient proposer d’autres terres à proximité. Jean-Luc Poli affirme « qu’ils n’arrivent pas à retrouver du foncier pour tous ceux qui vont être expropriés. Pour ceux qui veulent arrêter leur activité, ce n’est pas un problème, mais pour les autres ? »
« Il y a une concurrence pour les terres au niveau planétaire, les Chinois achètent des terres en Afrique et nous on les gaspille », dénonce Christian Crouzet. Surtout que les 220 hectares en question ne sont pas n’importe quelles terres. « C’est un trésor que l’on a sous nos pieds », dit-il.
Jean-Christophe Robert, président de Filière Paysanne, association engagée dans la préservation des terres agricoles, rappelle que ces terres reposent sur une des plus importantes nappes phréatiques du département et met en évidence un paradoxe : « À Sivens on veut construire un barrage pour irriguer des champs, et ici on veut artificialiser des terres qui sont naturellement irriguées. »

Incertitudes autour de la LGV
Le technopole est partout présenté comme étant un élément d’un projet plus global qui comprend le passage de la ligne LGV, la création d’une nouvelle gare et de ses infrastructures ainsi qu’un nouvel échangeur autoroutier, un pont et un barreau routier.
Pour les défenseurs du TAG, ces infrastructures rendraient la zone facilement accessible par train et par route, dynamiseraient l’économie et, regroupées sur un seul espace, elles limiteraient les nuisances et l’emprise au sol.
« C’est un projet d’aménagement et de développement global », explique le président du Conseil général. Sauf que les infrastructures sur lesquelles s’adossent le projet sont remises en question, et notamment la ligne LGV Bordeaux-Toulouse. « La pertinence de ce projet est, dans les circonstances actuelles, très incertaine », déclarait la Cour des comptes dans un rapport récent.
Lors de l’enquête d’utilité publique, le président du Conseil général faisait également valoir que le nouvel échangeur autoroutier en projet « ne trouvera sa pleine utilité que lorsque la gare LGV sera en service, l’échangeur actuel n’étant pas saturé ». Quant au barreau routier et au pont, le Conseil général indiquait, toujours dans l’enquête d’utilité publique, que « aussi bien la contrainte financière liée aux capacités budgétaires des collectivités que les nécessités techniques rendent l’objectif d’une réalisation à court terme peu réaliste, sinon complexe ».

Malgré tout, Pierre Camani affirme aujourd’hui que « cela ne remet pas en cause l’économie du projet ». Dans leurs prises de paroles, les défenseurs du projet s’expriment toujours comme si la réalisation de ces infrastructures étaient évidente et continuent de s’en servir pour justifier la pertinence du TAG.
En outre, si toutes ces infrastructures voyaient le jour, c’est selon les opposants près de six-cents hectares qui seraient artificialisés selon les opposants. L’agglomération conteste le chiffre mais, à ma connaissance, n’en propose pas d’autres.
Une concertation pour la forme
Le projet de TAG est passé à travers tous les filtres administratifs et a reçu le blanc-seing de toutes les autorités compétentes. Des réunions de concertation ont également été organisées. Mais les opposants dénoncent un « simulacre de démocratie ». « Lors d’une réunion publique, on nous a dit : ‘Le projet est acté, on va vous l’expliquer’, se rappelle Suzanne. Je n’ose même pas appeler ça de la concertation. »
Néanmoins, les opposants ont joué le jeu de l’enquête d’utilité publique. Des dizaines de contributions ont été déposées comprenant notamment des propositions alternatives. Mais comme le conclut le commissaire enquêteur : « Aucune des remarques formulées lors de l’enquête publique ne remet en cause le projet. »
« Comme d’habitude, l’enquête d’utilité publique va dans le sens de ceux qui la demandent », note Bernard Péré. Quant à la concertation, pour lui, « il n’y en a pas eu. Il y a concertation quand les propositions alternatives sont étudiées avec autant de sérieux que la proposition initiale. Ici, elles ont été ignorées au mieux, sinon ridiculisées ».


Conflits d’intérêts
La bataille autour du projet de TAG se joue aussi sur le terrain judiciaire. Les opposants soupçonnent les élus de Sainte-Colombe-en-Bruilhois d’avoir tiré personnellement profit des opérations foncières réalisées dans le cadre du projet.
« Le PLU [plan local d’urbanisme] fait l’objet d’un contentieux pour prise illégale d’intérêts : au gré des opérations d’urbanisme, un certain nombre de conseillers ont rendu leur terrains constructibles alors que des habitants ont vu leur terrain devenir non constructibles », raconte Etienne Tête, avocat qui suit le dossier (et par ailleurs conseiller régional EELV).
La municipalité n’a pas donné suite à mes sollicitations afin de « ne pas alimenter la polémique ». À noter qu’ils n’ont pas non plus voulu me communiquer le dossier de l’enquête d’utilité publique, probablement afin de « ne pas alimenter la polémique ».
Mais ce n’est pas tout. La procédure elle-même est mise en cause. « Les élus municipaux ont cru que pour ne pas être considérés comme intéressés, il suffisait de ne pas participer au vote. Je n’ai jamais vu ça ! Mais comme ils sont tous partie prenante d’un système mafieux, ils n’étaient pas assez nombreux pour atteindre le quorum [nombre de présents nécessaires pour que le vote soit valide] ».
En plus de la procédure au pénal pour prise illégale d’intérêts, l’annulation du PLU est donc demandée. La déclaration d’utilité publique est également attaquée. En cause, le caractère démesuré du projet et la non prise en compte des alternatives.
Mais outre la bataille juridique, c’est une bataille idéologique qui est en cours. D’un côté les porteurs du projet défendent l’emploi et ne voient réglementations et terres agricoles que comme des obstacles à la croissance. De l’autre des opposants qui, non sans se soucier du dynamisme économique de leur territoire, refusent que l’écologie soit sacrifiée sur l’autel de l’emploi.

JOSEPH BONOTTO, L’IMPROBABLE ZADISTE


- Au centre, Joseph Bonotto –

« Je me sens moins seul, heureux, soulagé », déclare Joseph Bonoto, 64 ans, solide gaillard au ton bourru, à la nuée de journalistes qui l’entourent. Et pour cause, une soixantaine de personnes ont répondu à son appel à occuper la dizaine d’hectares de terres qui lui appartiennent et qui sont menacées par le projet de TAG. Sur son terrain, des élus, des responsables syndicaux mais aussi des zadistes, venus des alentours ou d’autres zones de lutte pour donner un second souffle à la mobilisation qui peinait jusque là à décoller.
L’affaire avait pourtant bien commencé. Dès 2010, l’association TGV BA (Très Grande Vigilance en Bruilhois et en Agenais) qui réunit une vingtaine de propriétaires concernés par le projet de Technopole, est créée. Mais le collectif d’opposants devient peu à peu une coquille vide.
« Les propriétaires ont progressivement accepté le rachat de leurs terres. L’agglo est d’abord allé voir les plus fragiles : un agriculteur avec un enfant handicapé, un couple en instance de divorce... », raconte Joseph Bonotto qui dénonce des « procédés écœurants ».
Deux ans plus tard, les offres de rachat ou de compensation ont eu raison de la plupart des opposants. Avec sa femme, ils se retrouvent seuls ou presque à lutter. La grande gueule de Joseph Bonotto n’arrange pas les choses. Un voisin me dit qu’il « soutient la lutte mais pas le personnage ».
Dans le voisinage, l’ambiance n’est pas à la révolte. Même si parmi la quinzaine de riverains que j’ai pu rencontrer, tous sont opposés au projet, la plupart semblent s’être fait une raison. « Ils ne feront pas marche arrière », résume une cinquantenaire.
Les Bonotto, eux, ne renoncent pas. Faute de trouver suffisamment de soutien dans la commune, ils font appel à Filière Paysanne qui a déjà sauvé des terres agricoles du bétonnage dans d’autres départements. C’est son président, Jean-Christophe Robert, qui souffle l’idée d’un appel à occupation. Quinze jours plus tard, les zadistes débarquent et le premier tipi est monté, légalement, sur les terres de l’agriculteur.
Zadiste inattendu
Pourtant, Joseph Bonotto n’a rien d’un révolutionnaire. Pendant trente ans, il a été un entrepreneur dans le négoce de fruits et légumes avant de devenir agriculteur il y a une vingtaine d’années. Sur ses douze hectares de terre, il employait une dizaine d’ouvriers agricoles qui logeaient dans des maisons qu’il avait fait construire pour louer afin de « palier aux aléas du métier d’agriculteur ».
Dès l’annonce de l’occupation, les promoteurs du projet ont dit que les zadistes étaient manipulés par Joseph Bonotto en rappelant qu’il y a peu, celui-ci voulait lui-même bétonner en devenant « promoteur de ses terres ». Il est vrai que sa position est ambigüe.
Interrogé par les zadistes au cours d’une assemblée, il ne nie pas et explique que « comme beaucoup d’agriculteurs, je voulais me protéger des aléas du métier et préparer ma retraite. À l’époque j’étais seul, je faisais ce que je pouvais pour défendre mes intérêts. Aujourd’hui, la donne est différente, je ne suis plus seul à décider », précise-t-il, en assurant que les occupants seraient associés aux discussions futures.




Recontacté quelques semaines plus tard, il précise : « J’ai fait une première proposition à l’agglo de garder mes terres, elle a été refusée. Une deuxième qui était de garder six hectares et de leur vendre le reste : refusée également. Là, l’avocat m’a dit qu’il fallait négocier, qu’il ne savait plus quoi demander, alors je leur ai dit : laissez-moi mes terres, je vais les vendre moi-même pour qu’on les lotisse ».
Aujourd’hui, en cas d’abandon du projet, il s’engage à garder les terres agricoles : « Je garde les trois hectares autour de ma maison et je donne les sept autres pour faire des jardins partagés ou un projet agricole alternatif ».
Deux des personnes qui faisaient partie des premiers occupants ne doutent pas de sa bonne foi. Les zadistes eux aussi sont confiants. « On reste vigilants, mais je doute qu’il ait envie de se mettre des zadistes à dos », glisse un occupant.
Pour l’instant, Joseph Bonotto est toujours propriétaire de ses terres et la ZAD continue de s’installer dans la légalité. Trois tipis, une tente, une caravane et un hangar isolé et aménagé ont poussé sur la zone. Suzanne, opposante d’une soixantaine d’années, se réjouit qu’une ZAD prenne racine à Sainte-Colombe en Bruilhois afin que « les bulldozers n’aillent pas plus vite que la justice ».
Emmanuel Daniel – Reporterre


ZAD ailleurs


Infos du 9 au 15 Février

Lundi 9 février
Mercredi 11 février

Dans le Lot-et-Garonne, un projet de Center Parcs accueilli comme

« le veau d’or »


Le Conseil Général du Lot-et-Garonne et Pierre & Vacances annoncent la création d’un nouveau Center Parcs, avec force « retombées économiques ». Les élus sont unanimes pour soutenir le projet. Mais des voix commencent à remettre en cause les chiffres mirobolants avancés par le groupe et soulignent l’aberration écologique d’un tel parc.
Le 16 décembre, le Conseil général du Lot-et-Garonne et la direction de Pierre & Vacances ont rendu public le site choisi pour l’implantation d’un nouveau Center Parcs. Il s’agit d’un ensemble de 127 hectares, principalement couvert de forêt, à cheval sur les communes de Pindères et de Beauziac, dans les Landes de Gascogne, près de Casteljaloux. Les travaux ne doivent pas commencer avant 2017, pour une ouverture prévue en 2019. Le projet a jusqu’à présent été porté à l’unisson par tous les élus du département. Quant aux habitants, ils se réjouissent des « retombées économiques » annoncées.
Dans le département, on parle de l’arrivée de Pierre & Vacances depuis 2011. Si des discussions ont lieu depuis cette époque entre Jean-Michel Klotz, directeur général développement de Pierre & Vacances, et Pierre Camani, président du Conseil général du Lot-et-Garonne et sénateur socialiste, ce n’est que fin avril dernier, qu’une conférence de presse les officialise : un Center Parcs doit être construit dans le département. L’annonce s’appuie alors sur de nombreux chiffres, issus de la communication de Pierre & Vacances et regroupés dans le diaporama présenté au Conseil général le jour de la conférence de presse.
Chiffres magiques
Depuis cette date, les déclarations d’élus et de responsables de l’entreprise se fondent systématiquement sur certains de ces chiffres, assénés sans l’ombre d’un doute : « Un investissement de 170 millions d’euros », « (environ) 300 emplois directs » créés ainsi que « 250 à 500 emplois locaux pendant les travaux », « 1,3 million d’euros de retombées fiscales » et « 5 millions d’euros de retombées économiques » par an.
- Gérard brémond, PDG de Pierre et Vacances -
Seule une chose parait alors incertaine : le lieu d’implantation du centre. Le calendrier de Pierre & Vacances prévoit six mois pour en décider. Les candidatures se multiplient, atteignant la dizaine. Chaque maire cherche à séduire Pierre & Vacances, voyant dans l’arrivée d’un tel projet un vecteur de richesse et de développement. « C’est le sujet du siècle pour notre communauté de communes ! » déclare par exemple Michel Ponthoreau, maire de Fargues-sur-Ourbise (Sud Ouest, 5 mai 2014).
Une compétition bien entretenue par la presse locale, qui en fait un feuilleton. « Casteljaloux : Center Parcs s’invite au conseil » (2/05), « Projet Center Parcs en Lot-et-Garonne : les communes fignolent leurs dossiers » (5/05), « Center Parcs en Lot-et-Garonne : six communes en lice » (7/05), « Déjà sept candidats » (13/05), « Center Parcs : ‘Si le meilleur des sites n’est pas à vendre, on fait quoi ?’ » (21/05), « Center Parcs : une dizaine de dossiers déposés » (11/06), « Center Parcs en Lot-et-Garonne : s’il n’en restait qu’un » (10/09). Soit sept articles à propos du choix de l’emplacement, sur le seul site web du quotidien Sud Ouest.
De son côté, Pierre & Vacances fait le tri en fonction de son « cahier des charges ». Le site doit d’abord être facile d’accès en voiture : moins d’une demi-heure de trajet depuis un échangeur autoroutier, et des routes pouvant supporter un trafic de 400 voitures par jour. Mais il faut surtout un lieu à la fois aménageable (120 hectares plats, dont 39 000 m² constructibles, « de préférence propriété de collectivités territoriales ») et « naturel » (« espace à dominante boisé », « site de qualité », et « absence de contraintes environnementales sensibles telles que Natura 2000, zones humides […] »).
"Choix stratégique" du Conseil Général
Finalement, mi-décembre, le choix du domaine du Papetier, sur les communes de Pindères et Beauziac, est rendu public. Il s’agit de 127 hectares de forêt appartenant à trois particuliers et servant surtout, aujourd’hui, de réserve de chasse.
Raymond Girardi, président communiste de la Communauté de communes des Coteaux et Landes de Gascogne ainsi que vice-président du Conseil général chargé de l’agriculture, de la forêt et de l’environnement, s’est particulièrement impliqué dans ce projet. « Nous prenons de plus en plus conscience de la vocation touristique de notre département, l’arrivée du Center Parcs conforte cette orientation à laquelle il faut donner de l’ampleur parce qu’elle est porteuse d’emplois, de développement économique », déclare-t-il au Républicain (25 décembre 2014).
Tout est dit. Développer le tourisme pour créer des emplois. Cela correspond au « choix stratégique » du Conseil général présidé par le socialiste Pierre Camani. Il s’agit de profiter de la proximité des grandes métropoles que sont Bordeaux et Toulouse (la « zone de chalandise » selon le vocabulaire des entrepreneurs). Le projet de Center Parcs vient par exemple s’ajouter au parc d’attraction Walibi (1992) ainsi qu’à la Résidence du Lac ouverte en 2003 à Monflanquin par… Pierre & Vacances.
Et la petite ville de Casteljaloux (un peu moins de 5 000 habitants) est déjà bien équipée en ce qui concerne l’accueil de touristes. Outre la station thermale spécialisée dans la rhumatologie, elle possède une piscine olympique de 50m, ainsi que, sur le site de Clarens, un lac de baignade, un casino et un golf 18 trous !
- Sur la zone du projet de Center Parcs à Roybon -
Si le projet aboutissait, il faudrait donc y ajouter une « bulle Aquamundo », espace aquatique chauffé reproduisant une atmosphère « tropicale », ainsi que 400 « cottages », des habitations de 40 à 90 m² en bois – achetées par des particuliers qui en confient la gestion à Pierre & Vacances, bénéficiant au passage d’une niche fiscale.
Voté à l’unanimité
Pour cela, un partenariat entre l’entreprise et les collectivités locales doit être mis en place. En effet, une société d’économie mixte (SEM) sera prochainement créée, comprenant Conseil régional, Conseil général, Caisse des dépôts et consignations, Communauté de communes des Coteaux et Landes de Gascogne, et organismes bancaires. Cette SEM a pour vocation de devenir propriétaire des bâtiments de loisirs et services. Pierre & Vacances en serait locataire, signant un bail sur vingt ans.
Dans le même temps, ce partenariat prévoit l’achat par le Conseil général du Lot-et-Garonne de 45 des 127 hectares du site, pour 900 000 euros (soit 20 000 euros l’hectare), afin de « créer un espace naturel protégé au titre de la compensation environnementale qui sera accessible à la clientèle de Center Parcs, mais aussi à la population locale », d’après le président Camani, cité par Sud Ouest.
De plus, il investirait dans les travaux de voiries et réseaux pour 3 millions d’euros maximum. Au total, la participation des collectivités serait plafonnée à 35 millions d’euros. « Une opération blanche pour les collectivités au terme de ces deux décennies », selon Camani.
Réuni le 23 décembre, le Conseil général a voté à l’unanimité le choix du site et l’achat des 45 hectares. Les 15 élus de l’opposition (UMP, divers droite, centristes, et un sans étiquette) rejoignent donc entièrement la majorité socialiste sur ce projet. Pour Alain Merly, président UMP du groupe d’opposition, la construction d’un Center Parcs correspond pleinement à « l’intérêt du Lot-et-Garonne et des Lot-et-Garonnais » (cité par La Dépêche du Midi). Aucun écologiste ni membre de la gauche du PS ne fait partie de l’assemblée. Le débat ne peut donc avoir lieu qu’en-dehors de l’institution.
"Chantage à l’emploi et peinture verte"
C’est par un communiqué de presse, au même moment, que le Parti de Gauche (PG) du Lot-et-Garonne exprime sa vision des choses, demandant l’abandon du projet. Il dénonce le subventionnement par les collectivités du projet d’un groupe privé, « entreprise cotée en bourse ». Selon lui, les élus pratiquent le « chantage à l’emploi », alors que « les emplois promis se révèlent être partout ailleurs des emplois précaires, à temps partiels […], quand ça n’est pas des emplois subventionnés ou des stages ».
- Aqua mundo, l’attraction de Center Parcs -
Quant à l’aspect environnemental, le PG dénonce la communication « à grand renfort de peinture verte », tandis que le projet consiste à chauffer une serre aquatique « à 29 degrés, 365 jours (et nuits) par an ».
A côté de cela, aucune association écologiste ou environnementaliste ne s’est pour le moment prononcée. Les discussions au Conseil régional d’Aquitaine pourraient s’avérer plus animées, du fait des dix élus EELV.
Le département du Lot-et-Garonne possède déjà deux projets d’aménagement qui suscitent des oppositions : la LGV Bordeaux-Toulouse, et la zone industrielle de Sainte-Colombe-en-Bruilhois près d’Agen qui fait l’objet d’une Zad depuis peu. Faut-il pour autant assimiler ces différents projets ?
Peut-être pas si l’on suit Raymond Girardi : « Je me suis battu contre la LGV parce qu’elle bousillera 3000 ha sur un tronçon de 80 m de large sur 150 km, un saccage environnemental pour un gain de temps ridicule. Mais je soutiendrai ce projet de Center Parcs parce qu’il représente un enjeu déterminant pour l’avenir de notre secteur » (Le Républicain, 25 décembre).
Un "veau d’or" ?
Chez les habitants de Casteljaloux et ses environs, les voix discordantes sont très rares. Pour Christine Bento, une citoyenne qui a joint Reporterre, le Center Parcs est vu par beaucoup de gens comme « le veau d’or », devant apporter emplois et argent : « Ce qu’ils voient, c’est les emplois, 300 emplois ». Or rien ne prouve que le projet sera bénéfique sur le plan économique, puisqu’il « entrera directement en concurrence touristique dans un rayon de 6 km » avec les trois autres structures aquatiques (thermes, piscine et lac).
Aberration écologique aussi : « L’eau va devenir rare et chère et on s’autorise à en dépenser sans compter ». Le projet ne correspond donc ni aux « défis liés au changement climatique et à la crise du capitalisme », ni aux « attentes et besoins des citoyens ».
Jean-Pierre Marot, qui vit sur un terrain tout proche du site choisi, a le même point de vue. « Ils pensent que les gens qui viennent en vacances à Center Parcs vont aller faire leurs courses à Casteljaloux. Mais ils vont prendre un forfait tout compris une semaine et ils ne mettront pas le nez dehors », explique-t-il à Reporterre.
- En Isère, contre le Center Parcs de Roybon -
Il critique aussi le choix du lieu : « Je trouve scandaleux de détruire une forêt naturelle pour en faire une forêt artificielle, un site marécageux, avec des bois, très beau naturellement. On ne reconstruit pas la campagne à la campagne, qu’ils le fassent dans un lieu totalement artificiel. »
Il émet également des doutes sur l’achat des terres par le Conseil Général, qui doit se faire au prix de 2 euros le m² soit 20 000 euros l’hectare. « Personnellement, je suis sûr qu’il y a eu des dessous de table considérables. Le terrain vaut 1 000 euros l’hectare et pas 20 000. Y’a que du bois de merde dessus. » Lui possède vingt hectares, sans arbre, achetés 750 euros l’hectare. Mais il ne cherchera pas à empêcher les choses de se faire, ayant pris la décision de partir depuis longtemps déjà : « Ça ne me concerne plus, je suis trop vieux et je m’en vais ».
Etudes et concertation
Quoi qu’il en soit, le projet est loin d’aboutir. Les travaux ne commenceront pas avant 2017, pour une ouverture prévue en 2019. D’ici là, des études et concertations doivent avoir lieu, via notamment la mise en place d’un comité de suivi associant l’Etat, les collectivités, les associations environnementales et les acteurs socio-économiques locaux.
Un temps de préparation que les quelques opposants vont suivre avec attention, s’attendant à devoir fournir un « gros travail » de recherche et de vérification.
Baptiste Giraud – Reporterre

NDA : ca sent la Zad en devenir cette histoire ! ( Casteljaloux est à 50 km de la Zad d’Agen )

Samedi 14 février 

Ouverture d’une nouvelle ZAD à Allauch CONTRE LA ROCADE (LINEA) qui menace plusieurs hectares de terres fertiles pour les remplacer par de l’asphalte, menaçant la faune et la flore locale dans cette ceinture verte de Marseille.




LGV LYON-TURIN – VAL DE 

SUSA


Infos du 23 Février au 1er Mars

Mardi 24 février

Erri de Luca : « La ligne ferroviaire Lyon-Turin doit être sabotée »
François Hollande et Matteo Renzi vont annoncer ce mardi à l’issue du sommet franco-italien à Paris leur engagement définitif en faveur de la ligne ferroviaire Lyon-Turin. « Il y a deux ans, Matteo Renzi était résolument contre ce projet », relève Erri de Luca qui comparaît depuis janvier devant le tribunal de Turin pour « incitation au sabotage ». L’écrivain continue d’affirmer ses convictions et défend avec détermination sa liberté d’expression.

Rome, correspondance. – « Je comparais pour incitation au crime, parce que j’ai dit que le sabotage du chantier de la ligne Lyon-Turin – la TAV (Treno Alta Velocità) – est nécessaire », tient à préciser d’emblée, en français, Erri de Luca. « Au crime », marmonne-t-il en m’accueillant dans sa cuisine, pièce principale de cette maison qu’il a construite de ses mains, il y a trente ans, dans la campagne romaine.
Poursuivi depuis septembre 2013 par la société franco-italienne LTF (Lyon Turin Ferroviaire), Erri de Luca risque jusqu'à cinq ans de prison. Ayant refusé que le procès se déroule à huis clos, l’écrivain a déjà affronté une audience publique le 28 janvier 2015. La prochaine audience aura lieu le 16 mars : le juge entendra alors cinq témoins – deux de l'accusé et trois de la défense – puis procédera à l'examen de l'accusé et annoncera la date de l'audience suivante, pour les plaidoiries. 
Au jour de notre rencontre, le 22 février, le silence de la demeure de l’écrivain et alpiniste italien contraste avec la clameur de la foule qui défile dans les rues de Turin. 10 000 personnes – 4 000 selon les forces de l’ordre – dénoncent l’accord devant être signé ce mardi 24 février à Paris entre le président de la République française François Hollande et le président du conseil des ministres italien Matteo Renzi engageant la France et l’Italie dans la phase de travaux définitifs du tunnel de la ligne Lyon-Turin.
À 64 ans, Erri de Luca, ex-activiste d’extrême gauche, vit seul et passe ses journées à lire et traduire des textes sacrés de l’hébreu ancien. Sa traduction du livre d’Esther a été publiée en même temps que La Parole contraire, ce pamphlet qu’il a rédigé pour préparer sa défense suite à la plainte déposée par la LTF, et publié notamment en France et en Italie en janvier dernier.
Depuis sa convocation en justice, il ne parvient pas à se plonger dans l’écriture et attend impatiemment le verdict dont la date est à ce jour inconnue.

Mediapart.- Erri de Luca, quand vous avez qualifié le sabotage du chantier de la ligne Lyon-Turin de « nécessaire », étiez-vous conscient des conséquences de ces mots ?



Erri de Luca

Erri de Luca.- Je suis de près la lutte du Val de Suse depuis une dizaine d’années. Je suis allé dans des manifestations, je suis souvent intervenu en public et j’ai à chaque fois répété que ce projet doit être saboté dans le sens politique du terme : il faut tout faire pour entraver les travaux. « Saboter ». Voilà l’idée que j’exprimais le plus souvent. Mais en 2013, pour la première fois, je le disais à un journal. On m’a téléphoné pour avoir une réaction. Je n’ai fait que répéter ce que je disais depuis des années dans les assemblées et qui n’avait jamais posé de problème jusque-là. Le fait de le dire à la presse apparemment devenait un problème.   
Et vous persistez.
« Saboter » est un verbe noble, utilisé par Gandhi et Mandela. Je continuerai à le dire, car je suis convaincu qu’il faut empêcher ce chantier. Pour réaliser cette ligne Lyon-Turin, il faudrait percer des montagnes bourrées d’amiante, ce qui causerait une pollution gigantesque. Lutter contre ce projet, c’est une défense légitime contre l’agression physique, politique, chimique… C’est la vie de toute une vallée qui en dépend. Sans compter que cette infrastructure est inutile !

Pourquoi cette ligne Lyon-Turin est-elle inutile ?
Parce qu’il y a déjà une ligne ferroviaire qui fonctionne en sous-régime, à seulement 30 % de ses capacités ! Cette nouvelle ligne de 57 km qu’ils veulent construire ne sera d’ailleurs même pas une ligne à grande vitesse ! Les trains circuleront à une vitesse normale. Et même si elle était indispensable, il faudrait l’empêcher car il est criminel de perforer des montagnes qui contiennent des gisements de pechblende, un matériau hautement radioactif et d’éparpiller de l’amiante.

La résistance contre la ligne Lyon-Turin est plus forte du côté italien des Alpes qu’en France. Pourquoi ?
La ligne Lyon-Turin est un projet italo-français. C’est un projet énorme, dont personne ne parvient d’ailleurs vraiment à comprendre combien de milliards d’euros il pourra coûter, ni quelle sera la participation de l’Union européenne à ce projet. La cour des comptes en France a déjà émis des objections à ce sujet. En France, les rapports entre les coûts et les bénéfices d’un ouvrage sont très clairs et plus évidents. Mais ici, en Italie, le rapport coût-bénéfice, c’est : des coûts pour l’État et des bénéfices pour les entreprises privées. C’est pour cela qu’il n’y a aucun intérêt à faire des ouvrages utiles, l’important c’est juste de les faire ! En Italie, il y a des centaines d’ouvrages, d’infrastructures inachevées. Jamais de coupables, personne ne rembourse. Ces grandes infrastructures sont une façon de gaspiller de l’argent public au profit des entreprises privées qui sont, bien entendu, liées aux partis politiques. Ce ne sont pas des entreprises lambda qui gagnent les appels d’offres, non, ce sont toujours des entreprises liées aux partis politiques. Parce que chez nous, il y a tout un usage de contournement des règles et de favoritisme.

La société LTF qui a porté plainte contre vous est une société franco-italienne : elle a son siège social à Chambéry en France et son siège opérationnel à Turin. Dans votre pamphlet La Parole contraire, vous soulignez qu’il n’y a rien d’étonnant à cela, parce que « les normes antimafia ne sont pas les mêmes en France et en Italie ». Expliquez-nous.
En Italie, il existe toute une procédure de contrôles antimafia avant d’accorder un appel d’offres à une entreprise. En créant une société en France, on contourne ce problème. Il y a évidemment des entreprises liées à la mafia – plus précisément de la n’drangheta calabraise – qui travaillent sur le chantier de la ligne Lyon-Turin, comme sur les chantiers de l’Expo 2015 à Milan. C’est une forme de « normalité » chez nous. Il faut savoir que l’Italie est le pays où l’on construit des autoroutes en enfouissant dessous des déchets toxiques, grâce à un système de complicité entre la mafia, les partis politiques, les entreprises de travaux publics, y compris ceux qui sont chargés de faire les contrôles sur les travaux publics ! C’est un système de corruption à l’état pur qui jouit d’une impunité totale.

Début février, l’Olaf – l’Office antifraude de l’Union européenne – a ouvert une enquête sur la ligne Lyon-Turin afin de voir si des fraudes ou des irrégularités avaient eu lieu. Des soupçons d’irrégularités, de fraudes, de conflit d’intérêts et même d’infiltrations mafieuses pèsent sur le projet… 
Le projet de la ligne Lyon-Turin, la TAV comme on l’appelle ici, a d’abord été « saboté » par la lutte des citoyens du Val de Suse. Maintenant, il va peut-être être « saboté » par une enquête ! Ce serait curieux… [il sourit] mais raisonnable ! Je souhaite même que le projet soit aussi saboté par le manque de financements. S’il devait se poursuivre malgré tout, j’espère qu’un jour les responsables seront condamnés pour catastrophe environnementale.

Sauf que, pour l’instant, c’est la « parole contraire » des citoyens qui est poursuivie en justice au tribunal de Turin…



Manifestation en janvier 2012 © Reuters

Le tribunal de Turin a produit des milliers de chefs d’incrimination contre des militants « No Tav » du Val de Suse. Les magistrats ont profité de mes mots pour réprimer, pour tenter de réduire à néant ce mouvement de masse et briser ses soutiens extérieurs. La société française LTF qui a porté plainte contre moi avait le droit de le faire. En revanche, le tribunal de Turin n’aurait jamais dû la juger recevable. Je suis le premier écrivain incriminé pour ce qu’il a dit… pour incitation à commettre des crimes ! Mais je suis extrêmement déterminé à me défendre, même si je suis le dernier.

Le 27 janvier dernier, les militants  « No Tav » ont été lourdement condamnés…
En première instance du maxi-procès à Turin, les militants « No Tav » ont été condamnés à un total de 140 ans de prison, sans que soient prises en compte les circonstances atténuantes obligatoires pour ceux qui avaient un casier judiciaire vierge. Il y a eu une volonté politique d’éliminer ces circonstances atténuantes et c’est sans doute ça le plus grave. Je connais l’un de ces condamnés, c’est un barbier, habitant de Bussoleno. Il a été condamné à trois ans de prison pour avoir soi-disant blessé sept policiers en lançant des pierres à une distance de 57 mètres. Cette performance lui aurait valu la médaille d’or olympique au lancer de poids ! C’est absurde !

En réponse à la « parole contraire » de ses habitants, la vallée a été militarisée…  
La militarisation de cette vallée a été une immense violence d’État. Ce projet a été déclaré « ouvrage stratégique », ce qui signifie que l’on ne peut pas protester contre sa réalisation. La première fois que cette disposition d’Opera Strategica a été utilisée, c’était pour construire un incinérateur de déchets dans la région de Naples, contre l’avis des riverains. Il a finalement été construit grâce à l’emploi de la force militaire. Dans le Val de Suse, l’armée contrôle les lieux. C’est une force d’occupation, comme si le Val de Suse était un autre pays.

L’État se défend contre ses propres citoyens ?



Juin 2011. Durant une manifestation anti-TAV © Reuters

L’État opprime ses propres citoyens qui s’opposent. Ceux qui résistent sont traités comme des criminels. Cela ne vaut pas seulement pour le Val de Suse. À Lampedusa par exemple, une loi interdisait aux pêcheurs de venir en aide aux migrants sous peine d’être poursuivis pour complicité d’immigration clandestine. Une loi absurde, horrible et contre laquelle la population et les pêcheurs se sont battus et ont finalement obtenu de pouvoir faire leur métier tout en conservant leur dignité humaine en apportant de l’aide à ceux qui sont en mer. La loi de la mer, qui vaut depuis toujours, ne peut pas être reniée par des législateurs ivres.

Vous êtes poursuivi pour une phrase publiée et répétée dans les médias… Qu’en est-il de la liberté de la presse en Italie ?
L’Italie a la pire liberté d’information d’Europe, ce n’est pas moi qui le dis mais les observatoires de la liberté de la presse [selon le classement Classement mondial de la liberté de la presse 2014 de Reporters sans frontières, l’Italie arrive au 49e rang sur 180]. En Italie, les journalistes ne sont pas des professionnels de l’information, ce sont des employés d’entreprise. Ils doivent obéissance au comité, au PDG de l’entreprise qui les emploie. Les journalistes italiens sont des employés, des « embedded », ce sont les subordonnés d’un quartier général de l’information qui a une structure militaire. La grande presse italienne est liée aux partis, aux entreprises et donc à la ligne Lyon-Turin. C’est un système bien huilé, et je n’ai donc pas reçu de soutien particulier de la part de la « grande presse ». Mais j’ai pu exprimer mes convictions dans certains médias, à la radio ou dans des programmes télévisés.

Ce procès intenté contre vous, un écrivain, n’est-ce pas surdimensionné ?
Il faut savoir qu’au tribunal de Turin, depuis quelques années tous les procès contre les activistes No Tav ont été déclarés prioritaires sur tous les autres. Des procès de corruption géants ont ainsi été repoussés ! Ce procès contre mes mots est un gaspillage d’argent et de temps, et c’est aussi pour cela que je ne ferai pas appel si je suis condamné. 

Craignez-vous d’être condamné ?
Je pense que je serai condamné, car sinon ils n’auraient pas fait ce procès qu’ils ont monté de toutes pièces. La plainte est bien réelle, mais les magistrats ont inventé un procès sur le « droit de parole ». Je crois donc qu’ils vont poursuivre sur cette voie avec l’intention d’incriminer la Parole contraire. Car c’est une question de liberté de parole contraire. Il n’y a pas de problème de liberté d’expression en Italie : les paroles favorables au pouvoir sont toujours bien acceptées.

Si vous êtes condamné, ferez-vous appel ?
Je défendrai mes mots jusqu’au verdict, parce que je n’ai que ça. Je suis fier de pouvoir et de devoir défendre mes mots et mon droit de parole. Je ne suis pas une victime de cette affaire. La victime pour le moment, c’est l’article 21 de la constitution italienne qui garantit au citoyen la plus large liberté d’expression, et c’est la première fois qu’elle est mise en doute, qu’elle conduit à un procès.

Si vous êtes acquitté, crierez-vous victoire ?
Non, si je suis acquitté, il n’y aura pas de victoire. Une erreur aura été évitée.

Vous dites que ce procès, c’est votre premier prix littéraire…
Je n’aime pas les prix littéraires et en Italie je n’en ai reçu aucun, c’est d’ailleurs une virginité que je veux maintenir. Mais le fait que mes mots aient pu être considérés comme dangereux, capables de susciter des réactions même criminelles, c’est une exagération que je prends comme un prix littéraire.
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Le précédent français
L’an dernier, côté français, Daniel Ibanez, fervent opposant français au projet – auteur de Trafics en tous genres, le projet Lyon-Turin –, a été cité en justice par la société LTF. Cette société Lyon Turin Ferroviaire (LTF) – dont le siège social est à Chambéry et le siège opérationnel à Turin – avait porté plainte contre lui pour injure publique auprès du tribunal de Chambéry. La société LTF reprochait à ce militant écologiste des propos tenus lors d’une réunion publique le 21 février à Modane et rapportés par Le Dauphiné Libéré. « Les derniers à dire qu’ils travaillaient pour des siècles, c’est quand même le IIIe Reich », aurait déclaré le militant écologiste selon la plainte, propos qu’il contestait par ailleurs avoir tenus. En juillet 2014, le tribunal de Chambéry a finalement jugé irrecevable la citation à comparaître. « S’il y a injure dans cette affaire, c’est une injure au bon sens en voulant continuer à construire des infrastructures inutiles », avait commenté Daniel Ibanez à la sortie du tribunal, saluant une centaine de militants français et italiens venus lui témoigner leur soutien.
Mathilde AUVILLAIN - Médiapart


Vendredi 27 février

Lyon-Turin, un conflit sur toute la ligne



François Hollande et Matteo Renzi, le premier ministre italien, ont signé un accord sur le tunnel ferroviaire Lyon Turin. Négligeant les cas avérés de conflits d’intérêt qui gangrènent ce projet.
Le 23 août 2013 le premier ministre Jean-Marc Ayrault signait un décret au Journal officiel déclarant « d’utilité publique et urgents les travaux nécessaires à la réalisation de l’itinéraire d’accès au tunnel franco-italien de la liaison ferroviaire Lyon–Turin entre Colombier-Saugnieu (Rhône) et Chambéry (Savoie) ».
Mardi 24 février, lors d’une conférence de presse à l’Elysée avec le président du Conseil italien Matteo Renzi, le président François Hollande a annoncé le lancement des travaux du tunnel à partir de l’année prochaine. Les deux ministres des Transports, Alain Vidalies pour la France et Maurizio Lupi pour l’Italie, ont signé un « engagement définitif des travaux de la section transfrontalière ».
La décision a été prise aussi sur la base du rapport remis le 2 juillet 2012 au préfet de la Savoie par la Commission d’enquête publique qui avait donné son avis favorable au projet de ligne à grand vitesse. Toutefois, ce document est depuis longtemps dans le collimateur des opposants, « à cause d’évidents conflits d’intérêts, d’absence d’impartialité et d’indépendance », explique à Reporterre Daniel Ibanez, porte-parole de la coordination des opposants en France.
Le doigt est pointé notamment contre le commissaire Philippe Gamen, actuel maire du Noyer et ancien président du CPNS (Conservatoire du patrimoine naturel de la Savoie, rebaptisé aujourd’hui CENS, Conservatoire d’espaces naturels de Savoie), une association qui a formalisé des partenariats par convention avec plusieurs collectivités et sociétés, parmi lesquels la société LTF (Lyon-Turin Ferroviaire, filiale de RFF et de Rete Ferroviaria Italiana) chargée de la phase de préparation du chantier. Aujourd’hui, M. Gamen fait toujours partie du conseil d’administration du CENS.
Gamen s’est défendu en disant qu’il ne pouvait pas imaginer, alors qu’il était commissaire, que LTF lui proposerait ensuite ce travail. En réalité, il apparaît que RFF avait déjà rencontré le CPNS en 2011. Plus précisément au mois de mars, écrit la Commission elle-même à page 28 du rapport, alors que Gamen présidait encore l’association.
« Ce document, poursuit Ibanez, démontre que la totalité de la commission d’enquête savait qu’un des treize commissaires avait déjà eu des contacts avec Réseau Ferroviaire de France afin de préparer l’enquête publique ».
Le 19 février, Politis a révélé un compte-rendu du bureau du CPNS, daté du 31 janvier 2012, où on affirme que « dans le cadre des rencontres entre LTF et CPNS, LTF a proposé que soit constitué un groupe de travail sur les mesures compensatoires ‘patrimoine naturel’ en lien avec le projet de LGV ». Pour l’hebdomadaire, cela permet d’affirmer que « Philippe Gamen, maire du Noyer, et commissaire enquêteur lors de cette enquête publique menée du 16 janvier au 19 mars 2012, a menti sur ses activités et ses liens avec RFF et LTF ».
« Des rencontres avec LTF, poursuit l’hebdomadaire, ont débuté avant le lancement de l’enquête publique et se sont poursuivies pendant celle-ci avec le promoteur de la LGV Lyon-Turin, alors que Philippe Gamen, président de l’association, était aussi commissaire enquêteur ».
Le CPNS est de nouveau cité dans le rapport de la Commission d’enquête publique, à page 212, alors que les commissaires donnaient leur avis final sur la question des zones humides : « RFF devrait se rapprocher des conservatoires d’espaces naturels départementaux (le ’CREN’ pour le Rhône, ’Avenir’ pour l’Isère et le ’CPNS’ pour la Savoie) afin de définir les travaux de création et de réhabilitation des zones humides et signer des conventions de gestion à long terme. Un budget devrait être prévu sur 30 ans pour la gestion des milieux créés ou réhabilités ».
La nécessité de se rapprocher au CPNS est rappelée encore page 240, dans les 22 recommandations avancées par la Commission, qui demande d’adopter « une stratégie de compensation des zones humides respectant les principes suivants : (...) un rapprochement devra être engagé avec les conservatoires d’espaces naturels (le ’CREN’ pour le Rhône, ’Avenir’ pour l’Isère et le ’CPNS’ pour la Savoie) pour définir les travaux de création et de réhabilitation des zones humides et les conventions de gestion à long terme ».
Le cas de Philippe Gamen a été précédé par d’autres cas de conflits d’intérêt dans le projet Lyon Turin. Le 3 octobre 2012, Le Canard Enchaîné révélait que la Commission avait passé un marché avec une entreprise de travaux publics dirigée par le frère d’un des commissaires d’enquêteurs.
A la page 124, le rapport invitait en effet RFF « à étudier le mémoire de l’entreprise Truchet TP, qui propose de mettre à disposition du projet un terrain de 9 hectares, dans la zone artisanale d’Arbin, pour y stocker de manière définitive 950 000 m3 de déblais, après autorisation d’extraction de matériaux alluvionnaires ». Cette société est présidé par Roger Truchet, frère du commissaire Guy Truchet.
Coté italien, l’architecte Mario Virano a été désigné directeur général de la nouvelle société TELT (Tunnel Euralpin Lyon-Turin), choisie pour construire et gérer la section transfrontalière de la LGV. Or Virano a été déjà membre de la délégation italienne de la Conférence intergouvernementale pour le Lyon-Turin, président de l’Observatoire technique et commissaire extraordinaire du gouvernement italien.
« C’est au moins inopportun, dit à Reporterre Monica Frassoni, co-présidente du Parti vert européen, que la même personne qui a été protagoniste de toute l’histoire de l’ouvrage, depuis plus de dix ans, soit choisie pour cette fonction. Il personnifie désormais ce projet inutile et destructeur qui a déjà fait gaspiller 1,2 milliard d’euros en études et analyses menées par amis et amis des amis, sans aucun respect de l’intérêt général ».
Enquête européenne sur la fraude
En février 2014, les opposants français au Lyon-Turin ont déposé un recours devant le Conseil d’Etat en demandant l’annulation de l’enquête publique ainsi que de la déclaration d’utilité publique de l’ouvrage.
Le 6 février, l’Office anti-fraude européen a décidé d’ouvrir une enquête après la saisine en décembre dernier de deux députées européennes écologistes, Michèle Rivasi et Karima Delli, qui contestent « des pratiques douteuses et de nombreux conflits d’intérêt ».
Selon Monica Frassoni, il y a « un problème majeur au niveau des instruments de contrôle de la part de l’Union européenne sur les grands ouvrages, pour vérifier comment l’argent publique est utilisé. La décision de l’Office anti-fraude européen d’ouvrir une enquête montre que les documents fournis ont été jugés pertinents, et qu’il faut enquêter ».
Andrea Barolini - Reporterre






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