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dimanche 28 août 2022

Un parc éolien d’une multinationale canadienne va détruire la deuxième plus grande forêt bretonne

Un parc éolien d’une multinationale canadienne va détruire la deuxième plus grande forêt bretonne

 

La durée légale d’exploitation du parc éolien s’élève à 20 ans, au terme desquels le démantèlement des plates-formes en béton est laissé à la discrétion du propriétaire, qui pourra les conserver « pour contribuer à l’activité sylvicole future », comme le stipule le permis de construire.

 


13 juillet 2022 - Augustin Langlade

 L’impression d’un immense gâchis. Le samedi 2 juillet, une poignée de manifestants se sont rassemblés devant la mairie de Mohon, dans le Morbihan, pour protester contre la construction d’un parc éolien en pleine forêt de Lanouée. Après sept ans de bataille judiciaire, la cause du deuxième plus grand massif forestier de Bretagne semble aujourd’hui désespérée.

Pour comprendre ce dossier à tiroirs en passe d’être définitivement refermé, un peu de chronologie s’impose. En mai 2007, la forêt de Lanouée est acquise par Louis-Dreyfus. Ce groupe français spécialisé dans les matières premières agricoles crée alors une filiale, Les Moulins du Lohan, afin d’engager la construction d’un grand parc éolien au milieu des arbres.

Le projet comprend 17 éoliennes de 186 mètres de haut capables d’alimenter, avec leur puissance cumulée de 64,6 MW, environ 32 000 foyers en électricité, selon le promoteur. Établi au sud-est de la forêt, le futur parc éolien couvrira un périmètre de 331 hectares (soit 8,7 % du massif), dont une quinzaine seront défrichés pour les socles des turbines et les voies d’accès.

En 2014, l’industriel obtient ses permis de construire, d’exploitation et de défrichement auprès de la préfecture ; et en 2015, le massif et la filiale Les Moulins du Lohan sont revendus à la multinationale canadienne Boralex, qui entame les travaux.

Saisi par des riverains et la Société pour la protection des paysages et de l’esthétique de la France (SPPEF), le tribunal administratif de Rennes annule cependant, deux ans plus tard, toutes les autorisations délivrées au promoteur, invoquant la richesse écologique de la forêt et les dimensions « hors d’échelle » du parc éolien.

Pour remporter cette procédure judiciaire, la SPPEF a fait valoir la présence, sur le site des travaux, d’au moins 60 espèces protégées, parmi lesquelles le hérisson d’Europe, l’écureuil roux, des rapaces comme le busard Saint-Martin et l’épervier, des passereaux tels que le pipit des arbres ou le pouillot siffleur, tous nicheurs, ainsi que des reptiles, des amphibiens et de très nombreuses plantes.

Crédit : Vent de Forêt

Sévère décision du Conseil d’État

En 2019, nouveau retournement de situation : alors que le projet paraît au point mort, le jugement de première instance est cassé par la cour d’appel administrative de Nantes. La SPPEF porte le dossier devant le Conseil d’État, mais la décision de celui-ci, rendue le 15 avril 2021, douche toutes les espérances des défenseurs de l’environnement.

Soulignant « le caractère fragile de l’approvisionnement électrique de la Bretagne », qui importerait 90 % de son électricité, la plus haute juridiction administrative estime, de concert avec les juges nantais, que l’implantation de sources d’énergies renouvelables prévaut réglementairement sur la protection de la biodiversité.

Selon le Conseil d’État, l’emplacement de la forêt de Lanouée serait par ailleurs pleinement justifié, dans la mesure où le parc éolien se trouverait de ce fait « à plus d’un kilomètre des habitations, situation particulièrement rare en Bretagne où l’on observe un étalement de l’urbanisation et un habitat dispersé ».

Panorama des espèces menacées – Crédit : Vent de Forêt

 

Mise en service prévue pour 2023

Jugée « très sévère » par maître Sébastien Collet, l’avocat des requérants, cette décision fera sans doute jurisprudence dans les conflits qui opposent de plus en plus souvent les promoteurs des énergies renouvelables – éolien et photovoltaïque en tête – et les citoyens refusant que les derniers espaces naturels soient sacrifiés sur l’autel de la transition.

En attendant que d’autres projets voient le jour, celui de Lanouée va bon train : ayant repris en septembre dernier, les travaux devraient s’étendre jusqu’en 2023, si l’on en croit le calendrier de Boralex, date où les turbines seront mises en service.

 

Crédit : ZAD Lanouee

La durée légale d’exploitation du parc éolien s’élève à 20 ans, au terme desquels le démantèlement des plates-formes en béton est laissé à la discrétion du propriétaire, qui pourra les conserver « pour contribuer à l’activité sylvicole future », comme le stipule le permis de construire.

Bien que toutes les possibilités de recours soient épuisées, les riverains et les opposants essaient tant bien que mal de montrer leur désaccord. Depuis le début de l’année, trois manifestations ont eu lieu autour de la forêt de Lanouée, avec une nette décrue, toutefois, du nombre de participants.

La première, en février, a réuni 80 personnes sur les lieux du chantier, et a été émaillée de heurts avec les forces de l’ordre. Certains manifestants exhortaient alors à créer une zone à défendre (ZAD) aux Forges-de-Lanouée, sans succès face aux forces de l’ordre.

La seconde manifestation, en avril, a attiré une trentaine de personnes ; et la troisième, enfin, ce samedi 2 juillet, à Mohon, n’a rassemblé qu’une quinzaine d’irréductibles, soit 85 personnes de moins que le nombre de gendarmes mobilisés par la préfecture du Morbihan, qui avait également affrété un hélicoptère de surveillance…

L’avenir de la forêt de Lanouée semble plus que jamais compromis.

Crédit photo couv : GoogleMaps

13 juillet 2022 - Augustin Langlade

 

Source : https://lareleveetlapeste.fr/un-parc-eolien-dune-multinationale-canadienne-va-detruire-la-deuxieme-plus-grande-foret-bretonne/?fbclid=IwAR3gLECPwV4iDL_syEZ9mWUBKBkpLl92rvO-LLmyNDmzkSEHQOcWb8X_EWI

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