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dimanche 10 décembre 2023

Récupérer les eaux de pluie, un vrai casse-tête

 

Récupérer 

les eaux de pluie, 

un vrai casse-tête

 
6 décembre 2023

 Très peu de cuves ont été installées en France, notamment parce que les règlementations sont contraignantes.

 

Peu de foyers récupèrent et réutilisent leurs eaux de pluie. La faute, notamment, à des réglementations contraignantes et peu claires. Explications.


Récupérer l’eau qui tombe du ciel, l’idée paraît couler de source. Et pourtant, il n’est pas si facile en France de recueillir et de réutiliser la pluie. À peine 30 000 cuves installées en 2020 d’après l’Atep, une organisation professionnelle du secteur. Une goutte d’eau dans un océan de tout-à-l’égout. En cause : des politiques peu incitatives et une règlementation contraignante.

Le gouvernement a timidement tenté de lever certains freins cet été. Las, son décret, mal fichu et mal écrit, a suscité l’ire des aficionados de la citerne. Dès septembre, une large communauté d’internautes s’est mobilisée contre ce document, sous l’étendard de « Touche pas à mon eau de pluie ! ». Au début du mois, les Industriels français du secteur (Ifep) ont même attaqué le texte devant le Conseil d’État, afin de stopper ce « véritable retour en arrière » : « [Il] jette un flou sur la possibilité de continuer à réutiliser les eaux de pluie pour certains usages comme l’alimentation des chasses d’eau », nous précise Madeleine Babès, avocate des requérants.

L’exécutif a finalement publié une « Foire aux questions » pour clarifier sa position : non, le décret ne change « rien pour l’utilisation des eaux de pluie ». « C’est une sortie positive », estime Jérémie Steininger, de l’Atep, même si des incertitudes subsistent sur le terrain. Peut-on alimenter sa chasse d’eau avec les ondées récupérées ? Quid des écoles et des collèges ? Reporterre fait le point.

Pour les particuliers, arrosage, nettoyage et chasses d’eau

Pour récupérer le précieux liquide, il s’agit de connecter les gouttières à une cuve, qui peut être enterrée ou en extérieur. Un récupérateur permet de collecter en moyenne 600 litres d’eau de pluie par mètre carré de toiture, chaque année [1]. De quoi couvrir une large partie de notre consommation en eau — estimée entre 150 à 300 litres par jour.

Attention cependant, vous ne pouvez pas faire n’importe quoi. « Grosso modo, on a le droit de faire ce qu’on veut en dehors de la maison, arroser, laver la voiture… liste Jérémie Steininger. À l’intérieur, c’est plus limité. » Remplir la chasse d’eau des WC, laver les sols et laver du linge, « à condition d’utiliser un dispositif de traitement de l’eau assurant notamment une désinfection », selon le site Service-public.fr.

« L’eau de pluie collectée n’est pas potable, car elle est contaminée chimiquement (pesticides dans la pluie, métaux ou amiante présents sur le toit) », rappelle ainsi l’exécutif, qui avait listé dès 2008 un certain nombre de conditions à remplir pour l’utilisation des pluies en intérieur. Plaques de signalisation, déclaration auprès des autorités…

Un récupérateur permet de collecter en moyenne 600 litres d’eau de pluie par m2 de toiture. Pexels/CC/Sururi Ballıdağ
 

En résumé, il est aisé de réutiliser l’eau dans son jardin, mais c’est plus compliqué dans la maison. De fait, « la plupart des installations sont aujourd’hui de petits réservoirs extérieurs, remarque Jérémie Steininger. C’est un premier geste, mais ce n’est pas suffisant : le vrai cœur du problème, ce sont les chasses d’eau. » Les toilettes constituent en effet le second poste de consommation d’eau des ménages — derrière les douches et bains. Pour celles-ci, « il faut des systèmes plus grands, avec des cuves enterrées et des réseaux, ajoute l’expert. Ces installations complexes se font plutôt sur du neuf, au moment de la construction ».

Côté prix, comptez entre 50 et 500 euros pour une cuve extérieure, et entre 500 et 7 000 euros pour un réservoir enterré. À cela s’ajoute le coût de l’installation. Outre un taux de TVA réduit, des aides existent dans certaines communes ou régions.

Pour les collectivités, attention aux « établissements à risque »

Avant tout, une précision s’impose : « On différencie les eaux pluviales, qui touchent les sols, et sont plus chargées en matières polluantes, pour lesquelles il n’existe pas de cadre règlementaire quant à leur réutilisation, détaille Claire Forite, du réseau Amorce. Les eaux de pluie sont celles qu’on récupère depuis les toitures. » Ces dernières peuvent être employées pour l’arrosage des espaces verts, des terrains sportifs et autres parcs, « en dehors des périodes de fréquentation du public ».

« De plus en plus de collectivités réfléchissent aussi à laver les sols et à évacuer les chasses d’eau avec cette ressource », précise la chargée de mission. Ces usages intérieurs sont cependant interdits dans un certain nombre de lieux « à risque » : établissements de santé ou sociaux, Ehpad, crèches, écoles maternelles et élémentaires.

Sollicité à plusieurs reprises par des élus locaux, le gouvernement n’entendait pas, jusqu’à récemment, changer cette règle : « Les eaux de pluie ne satisfaisant pas aux normes de qualité règlementaires pour l’eau potable, leur usage est interdit à l’intérieur des bâtiments qui abritent des populations sensibles, écrivait-il en 2020. Aussi, pour des raisons sanitaires évidentes, il ne paraît pas opportun de modifier ces dispositions. » Ces établissements peuvent cependant stocker le surplus des averses pour les espaces extérieurs.

Il est autorisé d’utiliser l’eau de plus dans son jardin, mais les règles sont plus strictes pour des usages en intérieur. Unsplash/CC/Roman Synkevyc 

Problème, les services sanitaires semblent réticents à ouvrir les vannes, et appliquent parfois une interprétation restrictive de ces prescriptions. Un lecteur de Reporterre, par ailleurs agent en mairie, nous alertait ainsi en septembre dernier sur « les difficultés à faire installer des récupérateurs d’eau de pluie par les architectes dans les programmes [de construction d’école], qui se retranchent derrière un arrêté de 2008 ». Espérons que les prochains décrets, à paraitre fin 2023- début 2024, viendront éclaircir la situation.

Changer de paradigme

Les acteurs du secteur espèrent ainsi de nouvelles évolutions règlementaires, plus claires et plus audacieuses. Car « on n’exploite pas suffisamment le potentiel » des ondées, à en croire Jérémie Steininger. « Très clairement, on gère très mal les eaux pluviales puisqu’on les envoie à la mer très vite, abonde Jean-Jacques Hérin, de l’association Adopta. Alors qu’on pourrait les infiltrer davantage dans le sol, et aussi en récupérer une partie pour nos usages. »

Selon ce spécialiste, nous héritons d’une vision de « l’eau comme vecteur de maladie », très présente au XIXe siècle, et qui a conduit à considérer la pluie comme un déchet « dont il faut se débarrasser au plus vite ». « Il faut changer de paradigme », nous invite-t-il. « Les politiques ne prennent pas assez en compte cette ressource, complète Jérémie Steininger. Il faudrait que l’eau soit enfin une composante à part entière de la transition écologique. »

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Notes

[1Ce volume dépend de la pluviométrie dans la région où l’on habite.

 

Source : https://reporterre.net/Recuperer-les-eaux-de-pluie-un-vrai-casse-tete?utm_source=newsletter&utm_medium=email&utm_campaign=nl_quotidienne

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