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jeudi 20 octobre 2022

Des nuits sans lumière : ces villes qui coupent l’éclairage public

 

Des nuits sans lumière : 

ces villes qui coupent 

l’éclairage public

 
15 octobre 2022

 

Depuis 2018, Strasbourg éteint certains éclairages publics. Ici, en 2016.

 

La nuit, l’éclairage public s’éteint peu à peu dans les villes françaises. De quoi faire des économies d’énergie et protéger la biodiversité. Mais la démarche n’est pas simple partout.

Samedi 15 octobre, c’est la 14e édition du Jour de la Nuit. Un événement national de sensibilisation à la pollution lumineuse, à la protection de la biodiversité nocturne. À cette occasion, Reporterre publie une série d’articles pour comprendre pourquoi il faut préserver notre ciel étoilé.



À Chambéry, Colmar, Agde ou encore Nevers, ce week-end de la mi-octobre est celui de la transition. Comme dans de nombreuses communes françaises, les élus ont choisi d’éteindre l’éclairage public la nuit. Dans certains quartiers de Metz, la bascule a eu lieu le 12 octobre. À Trouville-sur-Mer c’était le 9 et à Saint-Brieuc le 5. Dans la Vienne, 240 communes (sur les 260 du département) ont aussi coupé la lumière le 3 octobre. Et la liste est encore longue.

D’autant que d’autres agglomérations pratiquent l’extinction nocturne de longue date, comme Saint-Nazaire depuis 2018 ou plus récemment Strasbourg (depuis mars). Selon un rapport de l’Agence de la transition écologique (Ademe) de 2021, 40 % des communes métropolitaines éteignent certains éclairages une partie de la nuit.

Économies d’énergie, santé retrouvée, biodiversité préservée

L’objectif premier de ces nouveaux adeptes : les économies d’énergie. Car l’heure est à la sobriété. L’éclairage public pèse pour un tiers du budget électricité des collectivités (32 %), a souligné Maud Lelievre, déléguée générale de l’association Les Éco Maires, à l’occasion d’un point presse le 13 octobre. Et face à la flambée des prix de l’énergie, les économies envisagées devraient permettre de se maintenir à flot.

« Depuis que nous travaillons cette question, notre facture est restée stable alors qu’en parallèle le prix du kilowatt-heure (kWh) n’a fait qu’augmenter », explique Pierre Ozenne, adjoint au maire de Strasbourg. Alors que la consommation électrique de la ville a chuté de 17 GWh en 2010 à 11,76 GWh en 2021, la facture, elle, est passée de 1,4 million d’euros à 1,7 million d’euros, alors que le prix du kWh a quasiment doublé entre-temps. En clair, l’extinction a permis d’éviter l’explosion du budget.

 

À Colmar dès le 14 octobre et à certaines heures, l’éclairage public sera éteint la nuit. Wikimedia Commons/CC BY-SA 3.0/Lionel Allorge 

Mais les vertus de l’obscurité ne sont pas seulement pécuniaires. Celle-ci est aussi essentielle à la santé et à la préservation de la biodiversité. Ainsi, de nombreux travaux ont montré que l’alternance de phases d’obscurité et de lumière accompagne notre horloge biologique et nos productions hormonales, pour un meilleur sommeil et une activité physique et cérébrale optimisée.

Côté faune, « 30 % des vertébrés et 60 % des invertébrés vivent partiellement ou totalement la nuit, a expliqué l’Association française de l’éclairage. En conséquence, faune et flore sont parfois touchées par les nuisances lumineuses. Elles peuvent perturber les déplacements de certaines espèces, fragmenter leur habitat et affecter le rythme biologique des végétaux, lorsque l’éclairage nocturne n’est pas maîtrisé et adapté ». Conséquence : avec les pesticides, la pollution lumineuse constitue l’une des principales causes du déclin des insectes. Et le phénomène est désormais bien documenté.

Mais éteindre ou réduire son éclairage public est un travail de longue haleine. En France, on comptait près de 10 millions de points lumineux en 2010, soit près de 3 millions de plus qu’il y a trente ans. Et selon l’ANPCEN [1], l’intensité des seuls éclairages publics aurait doublé (+94 %) en vingt ans.

Se rapprocher des usages

« Les petites communes pratiquent plus facilement l’extinction des lumières », note le géographe Samuel Challéat. Celles-ci disposent de budgets plus limités, d’un moindre nombre de luminaires. En outre, les activités sociales, notamment touristiques ou étudiantes, y sont souvent moins développées et la demande d’éclairage moins prononcée. Sans oublier que « de nombreuses petites communes se situent à proximité de parcs nationaux, et disposent sans doute d’une sensibilité environnementale accrue », analyse-t-il.

En théorie, l’extinction semble d’une déconcertante facilité. La décision revient au conseil municipal qui choisit d’appuyer (ou non) sur l’interrupteur. En pratique, la question est plus compliquée : pour l’extinction de ses 28 000 points lumineux répartis sur ses 700 km de rues et boulevards, la collectivité de Strasbourg y réfléchit depuis 2015. Car il convient de se rapprocher des habitants et de travailler finement sur les usages sociaux de la ville : qui se déplace, où et quand.

 

Chaque ville dispose de caractéristiques spécifiques. Pxhere/CC/Roman Boed
La tâche est d’autant plus ardue que la ville est grande. « L’essentiel est de ne pas mener une politique descendante, souligne Samuel Challéat. Et de travailler avant tout sur les besoins. » Chaque ville, chaque village, chaque hameau dispose de caractéristiques spécifiques et donc de besoins particuliers : de grands boulevards très fréquentés ont davantage besoin d’être éclairés que les rues résidentielles. Une place du village, elle, peut s’animer le samedi soir, pour s’assagir en semaine.

À Saint-Nazaire par exemple, l’extinction des feux est plus bref dans la zone portuaire qui concentre une forte activité économique sur des horaires élargis. De même sur le front de mer, les grands axes ou à proximité des bars. « Mais 70 % de la ville est éteinte entre minuit et 4 heures du matin », raconte Christophe Cotta, adjoint à l’urbanisme pour la ville de Saint-Nazaire.

« La ville n’est pas moins sûre la nuit »

Il faut donc travailler rue par rue, quartier par quartier. Et en concertation avec les habitants. Car si l’on allume les rues, c’est avant tout pour une question de sécurité, avancent les élus. Selon un sondage de 2015, 91 % des Français déclarent que l’éclairage public la nuit joue un rôle important sur leur sécurité. « Une crainte renforcée par la crise du Covid », estime Maud Lelievre. De fait, l’éclairage public dispose de trois rôles fondamentaux : assurer la sécurité des déplacements, des personnes et des biens.

Pourtant, « les statistiques sont claires, la ville n’est pas moins sûre la nuit, pointe Samuel Challéat. Ces données ne montrent pas plus de criminalité dans les villes non éclairées ». Par exemple, 80 % des cambriolages ont lieu le jour et pour les 20 % restants, aucune différence n’est observée que la lumière soit allumée ou pas, avance le chercheur. À Saint-Nazaire, en près de quatre ans, « police et pompiers n’ont pas rapporté de hausse des interventions ou des dégradations, la nuit », rapporte Christophe Cotta.

Reste que ce n’est pas demain que toutes les villes seront complètement éteintes la nuit. Certaines d’entre elles misent ainsi ailleurs : rénover leur parc d’éclairage. Disposer d’équipements adaptés, qui éclairent suffisamment (mais pas trop) et dans la bonne longueur d’onde. À l’échelle nationale, « le potentiel de rénovation de l’éclairage pourrait permettre d’économiser 25 TWh, ce qui représente l’équivalent de la consommation de deux villes comme Bordeaux et Marseille », explique François Darsy, du syndicat de l’éclairage. De quoi soulever quelques complémentaires économies d’énergie.

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Notes

[1Association nationale pour la protection du ciel et de l’environnement nocturnes.

 

Source : https://reporterre.net/Des-nuits-sans-lumiere-ces-villes-qui-coupent-l-eclairage-public?utm_source=newsletter&utm_medium=email&utm_campaign=nl_quotidienne

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