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dimanche 21 novembre 2021

Guerre de l’eau : des citoyens ont vidé une méga-bassine pour rendre l’eau à la nappe phréatique --- Marais poitevin : La guerre de l’eau est déclarée ! --- Passe-droit pour les partisans de l’agro-industrie, répression pour les défenseurs des ressources en eau

 Trois articles aujourd'hui

Guerre de l’eau : 

des citoyens ont vidé 

une méga-bassine 

pour rendre l’eau 

à la nappe phréatique

 

 La « bassine de la honte » sur laquelle ont pénétré les manifestants a déjà fait l'objet de cinq condamnations par la justice. Pour éviter l’important dispositif policier déployé, les 3000 participants ont joué au chat et à la souris avec les policiers avant de parvenir à s’introduire sur le site de cette méga-bassine illégale de 5 hectares (180 000 m3).

 


8 novembre 2021 - Laurie Debove 

 

Après une première mobilisation réussie, les opposants aux méga-bassines ont frappé encore plus fort ce weekend. Malgré un important dispositif policier déployé pour les faire reculer, plus de 3000 personnes et 20 tracteurs se sont rassemblés à Mauzé-sur-le-Mignon pour donner un coup d’arrêt immédiat aux chantiers de méga-bassines dans le Marais Poitevin. Ils ont démonté et récupéré la pompe d’une méga-bassine de 5 hectares, qui puisait directement dans la nappe phréatique, et vidé la bassine pour rendre l’eau à la nappe. Une première victoire des opposants à l’accaparement de l’eau par une poignée d’agro-industriels.

Après une première mobilisation importante mercredi 22 septembre, près de 3 000 personnes et une vingtaine de tracteurs se sont retrouvés samedi 6 novembre à Mauzé-sur-le-Mignon (Deux-Sèvres) pour réaffirmer leur opposition à un « hold-up de l’eau » qui profitera à une minorité d’exploitants acquis à l’agriculture industrielle.

Le rassemblement a eu lieu suite à l’appel de Bassines Non Merci, de la LPO, de la Confédération Paysanne et des Soulèvements de la Terre. Les organisations ont réussi à rendre cette mobilisation possible, dans la convivialité, malgré les intimidations de la préfecture qui a voulu interdire l’événement et de la FNSEA qui organisait une contre-manifestation.

 

Lire aussi : Guerre de l’eau : plus de 1000 opposants durcissent le ton face aux méga-bassines des Deux-Sèvres

 

Une centaine de syndiqués de la FNSEA ont effectivement pu s’installer sur le site d’une bassine en construction en toute tranquillité tandis que les citoyens et paysans opposés aux bassines ont été poursuivis par la police.

Au total, les acteurs de l’agro-industriel prévoient de construire 93 méga-bassinesdans l’ancienne région Poitou-Charentes, dont 16 dans le seul Marais poitevin déjà rudement touché par la sécheresse et la diminution des précipitations.

Sur 4 à 18 hectares et d’une profondeur de 15 mètres, ces immenses réserves d’eau artificialisent les sols en perturbant le cycle et la qualité de l’eau, menacent la biodiversité, et cela au profit d’une poignée d’acteurs privés dans le mépris de directives européennes et plusieurs jugements de justice.

 

Début du rassemblement – Crédit : Soulèvements de la Terre

Ainsi, la « bassine de la honte » sur laquelle ont pénétré les manifestants a déjà fait l’objet de cinq condamnations par la justice. Pour éviter l’important dispositif policier déployé, les 3000 participants ont joué au chat et à la souris avec les policiers avant de parvenir à s’introduire sur le site de cette méga-bassine illégale de 5 hectares (180 000 m3).

« Les opposants aux méga-bassines ont ainsi dû couper à travers champs, échapper aux gaz lacrymogènes et aux coups de matraque, traverser à pied un cours d’eau et passer plusieurs barrages de police. » relate le collectif des Soulèvements de la Terre, photos à l’appui


Les manifestants fuient les gaz lacrymo – Crédit : Soulèvements de la Terre
 

Le long de leur trajet, ils sont notamment passé devant deux bras taris du fleuve Mignon, triste symbole de l’assèchement déjà en cours en France, et rebaptisé la commune « Mauzé-sur-Bassines » à l’aide d’une grande banderole déployée sur l’hôtel de ville.

 

Crédit : Soulèvements de la Terre
Lire aussi : En France, la crise climatique est déjà un assèchement climatique
 

 

« La seule chance pour eux de s’en sortir est de suspendre immédiatement les travaux sans quoi nous reviendrons ! Il n’y a que le Ministre de l’Agriculture qui croit que les bassines se remplissent avec l’eau de pluie, or elles se remplissent avec une pompe. Aujourd’hui, un groupe de camarades citoyens paysans a démonté la pompe qui permettait à cette bassine de se remplir et a rendu l’eau à la nappe. » a déclaré Basile, éleveur à Notre-Dame-des-Landes et militant pour les Soulèvements de la terre, sous les vivats et les bravos de la foule

La pompe qui alimente la bassine et puise directement dans la nappe phréatique a effectivement été démontée par des paysan.ne.s qui l’ont emportée. Une fois la foule montée sur le talus de la bassine, la bâche a été enlevée pour mettre la bassine hors service et des arbres ont symboliquement été plantés sur les bords du bassin. La bassine a ainsi été vidée et l’eau rendue à la nappe !



« Pendant que plusieurs syndicats agricoles se regroupent autour d’un cratère vide et sec, autour d’une agriculture morte qui détruit nos territoires et nos paysans, nous on a fait un cheminement joyeux, festif et coloré pour poser des actes forts ! Et on continuera à en poser ! Nous allons garder la pompe qui a été démontée, et s’il faut l’emmener pour la montrer à Julien Denormandie, Emmanuel Macron ou Barbara Pompili, on le fera pour les mettre devant leurs responsabilités ! » a réaffirmé Nicolas Girod, porte-parole de la Confédération Paysanne

Cette mobilisation a eu lieu alors que des militants engagés dans les collectifs en lutte contre les bassines ont été interpellés chez eux et conduits en garde-à-vue. Une démonstration de force qui n’a pas découragé le moral des troupes, au contraire étant donné le plus grand nombre de personnes présentes ce samedi 6 novembre qui restera dans les annales.

Lire aussi : Des militants anti-bassines ont été arrêtés chez eux, puis relâchés : « une tentative d’intimidation indigne »

Cet acte très fort a renforcé la détermination des anti-bassines à se battre pour exiger un partage juste de la ressource en eau. « A Mauzé comme ailleurs, nous continuerons à faire valoir que l’eau est un commun et que les sols ne doivent plus être empoisonnés. » concluent-ils d’un ton assuré


Crédit : Nantes Révoltée 


 

Source : https://lareleveetlapeste.fr/guerre-de-leau-des-citoyens-ont-vide-une-mega-bassine-pour-rendre-leau-a-la-nappe-phreatique/?fbclid=IwAR0VBbpWB5CzuCbWynzz7Z1saHe8_ftPpY6jcRRadewrH_LmPdbUspWvk-0

 

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Marais poitevin : 

La guerre de l’eau est déclarée !

 


Prise de la Bassine et bataille du Mignon, 

récit d’une journée épique


Les soulèvements de la terre

 
paru dans lundimatin#312, le 8 novembre 2021 
 
 

Samedi 6 novembre 2021, des centaines d’habitants, de paysans et d’activistes s’étaient donnés rendez-vous à Mauzé-sur-le-Mignon pour s’opposer à la construction de méga-bassines, c’est-à-dire à la privatisation de l’eau par l’agro-industrie. Le 22 septembre déjà, un chantier avait été désarmé par un troupeau de moutons, 20 tracteurs et 600 personnes. Entre temps, c’est une méga-bassine illégale qui avait été démantelée de nuit. Ce samedi, malgré une forte présence policière, un nouveau rassemblement est parvenu à neutraliser une réserve d’eau et à emporter avec lui sa méga-pompe. Récit d’une journée épique et raisons d’une colère.


Cliquer sur le lien pour voir la vidéo : https://www.youtube.com/watch?v=ovFITgN9H_M



Mauzé-sur-Bassines

Mauzé-sur-le-Mignon. Une commune rurale de 6 000 habitants. A cheval entre deux paysages radicalement antagonistes.

D’un côté, le marais asséché qui est aujourd’hui devenu un désert agricole avec ses interminables parcelles de maïs irrigué et ses exploitations industrielles aussi rentables que dévastatrices du vivant. Un paysage ravagé au point qu’on peine à se figurer qu’il fut, il n’y pas si longtemps, un vaste bocage.

De l’autre le marais mouillé, ses conches et ses frênes têtards, ses loutres et ses kyrielles d’oiseaux, vestige d’un rapport paysan à l’eau, à la terre, au monde animal. Mais il ne faut pas se fier à ces apparences de carte postale. Les frênes têtards sont malades et menacés de disparition rapide. Les lentilles vertes sont laminées par les pesticides. Le marais s’enfriche. A défaut d’éleveurs et d’installations paysannes, le maraîchage, les vaches maraichines et la culture des mogettes ont presque disparu.

Les effets conjugués du ravage agro-industriel et du changement climatique ont bouleversé un équilibre millénaire entre l’eau, la terre, la mer et les habitants du territoire. Les rivières alentours s’assèchent à cause de la voracité d’une agriculture extractiviste qui fait main basse sur notre plus précieux bien commun : l’eau. 

 


La guerre de l’eau est déclarée !

Depuis des années, des collectifs d’habitants, de paysans et de citoyens en lutte s’organisent pour faire entendre leur point de vue et leur expertise sur la question du partage de l’eau et de la sauvegarde de la biodiversité. Illes enquêtent, expliquent, dénoncent, mobilisent, se pourvoient en justice... en vain ! Le démarrage en septembre d’un premier chantier de bassine à Mauzé-sur-le-Mignon a été la goutte d’eau qui a tout fait déborder. Alors que les pelleteuses commencent à commettre l’irréversible au mépris des oppositions farouches au projet, il ne restait plus que la résistance comme seule issue.

A l’appel de ’Bassines Non Merci !’, de la Confédération paysanne et des Soulèvements de la Terre, un premier acte fort avait été posé le 22 septembre dernier, en plein congrès de la FNSEA. Après un banquet à Niort pour accueillir les tracteurs des paysans en lutte venus des bocages de Loire Atlantique et de Gâtine, un convoi de véhicules avait déjoué le dispositif pour parvenir jusqu’au chantier. Le site avait été envahi par 600 personnes, 20 tracteurs et un troupeau de moutons. Les travaux ont été interrompus tandis qu’une pelleteuse a été désarmée. Un premier pied de nez à la préfecture. Ce jour-là, rendez-vous était pris le 6 novembre pour une nouvelle journée de résistance. La guerre de l’eau était déclarée.



Très vite, les évènements s’accélèrent. D’abord, on découvre par voie de presse qu’une bassine illégale a été entièrement démantelée dans la Laigne. Ensuite, des paysans, des citoyens et le porte-parole du collectif 'Bassines non merci' sont perquisitionnés et interpellés par rapport à la journée du 22 septembre. Leurs ordinateurs et téléphones sont saisis. On leur impute des dégradations mineures, des violences présumées ou des propos conséquents. Ils sont dans l’attente d’une possible convocation au tribunal. L’objectif est limpide : intimider les paysans et les locaux. Pour couronner le tout, la FNSEA et la coordination rurale appellent à une contre-manifestation le 6 novembre dans la bassine en construction pour défendre l’avancement des travaux. Le préfet est en panique. Un important dispositif est mobilisé. Des zones rouges sont décrétées en rase campagne avec interdiction de manifester. La cellule Déméter est en alerte. Le contexte est explosif.

Ce 6 novembre 2021 est un jour qui restera gravé dans la mémoire de tous les habitants de Mauzé-sur-le-Mignon. A la lisière entre ces deux paysages, à cheval entre marais mouillé et désert agro-industriel, deux mondes se font face.

Paysans et habitants vs Complexe agro-industriel

A l’est de la N11, les irrigants, les syndicalistes de la FNSEA, les bénéficiaires de ces méga-bassines. Qu’on ne se méprenne pas, ce ne sont pas des paysans mais des patrons de grosses sociétés agricoles arrosées de subventions publiques. Des paysans, des fermes, des cultures diversifiées et du petit élevage ? Dans le coin, il n’en reste hélas presque plus ! Ils ont laissé place aux agris-managers qui pilotent depuis leur smartphone les milliers de m3 d’eau que prélèvent leurs bassines, les hectolitres de pesticides épandus sur leurs champs, l’optimisation fiscale et l’accaparement d’argent public qui fait tourner leur exploitation. Ils sont 500 à tout casser, terrés dans cet immense cratère de plusieurs hectares et protégés par les gendarmes. L’image est une parfaite métaphore de ce complexe agro-industriel qui chaque jour creuse un peu plus notre tombe. 

 


A l’ouest de la N11, sur le champ de foire de Mauzé-sur-le-Mignon, nous sommes un peu plus de 3000 personnes. Il y a des locaux de l’étape et des personnes qui ont traversé la France, des enfants et des ancêtres, des élus et des activistes masqués, des gilets jaunes et des syndicalistes, des paysans enracinés et des urbains précaires, des ornithologues et des artistes... Bref une foule déterminée à passer à l’action et définitivement écœurée par le blabla des gouvernants face au ravage écologique et social. 

 

Entre ces deux mondes, l’Etat. Les gendarmes sont postés sur chaque pont avec des grilles anti-émeutes et des canons à eau. Les routes sont bloquées pour protéger le chantier et la FNSEA et conjurer l’affrontement tant redouté. Le dispositif est délirant et absurde. La préfecture laisse la FNSEA se rassembler au cœur de la zone d’interdiction de manifestation sur présentation d’un laisser passer. Dans le même temps elle barricade l’accès aux opposants et envoie ses émissaires avertir que tout incursion dans la zone rouge sera repoussée manu militari.



A l’abordage de la Bassine de Cram-Chamban

Après un repas, une conférence de presse et des prises de paroles, la manifestation s’ébranle. Le toit de la mairie est investi. Les fumigènes colorent le ciel et la façade du bâtiment tandis qu’une énorme banderole ’Mauzé-sur-Bassines’ est déployée. Le matin même, tous les panneaux de signalisation avaient été ainsi modifiés par des habitants facétieux. Les tracteurs ouvrent la marche. Les musiciens donnent la cadence. La foule franchit le Mignon. Il est déjà à sec alors même que les nouvelles bassines ne sont pas encore construites ! 

 



Le cortège progresse. Deux options s’offrent à lui. A gauche le pont de la 4 voies, l’affrontement frontal avec la police pour pénétrer la zone rouge et aller chercher la FNSEA. Comme convenu, le cortège continue tout droit pour contourner le dispositif. La Confédération paysanne et le porte parole de Bassines Non Merci l’avaient annoncé : le but n’est ni l’affrontement direct avec les forces de l’ordre, ni de s’en prendre aux agriculteurs en tant qu’individus. Il s’agit de résister au système agro-industriel par des actions collectives et massives de résistance et de désobéissance qui visent les infrastructures.

En nous voyant les ignorer royalement, les flics comprennent (trop tard !) que nous nous dirigeons en réalité vers une autre bassine illégale à un kilomètre de là, en dehors de leur zone rouge. Tandis que nous progressons, les gendarmes installent à la hâte une grille anti-émeute et un petit escadron sur notre route. Ils bloquent le pont de pierre qui passe sous la voie ferrée, espérant ainsi nous dissuader d’aller plus loin. Mais nous sommes nombreux. Et nous sommes l’eau. Rien ne nous arrête.

Nous partons à pied sans les tracteurs. Quelques personnes essaient de franchir la voie ferrée en grimpant le talus, tandis que le gros de la foule suit la tête de cortège et s’engouffre dans le champ à droite juste avant le barrage policier. Derrière la haie, un deuxième pont sous lequel coule le Mignon... à sec ! Progressivement, malgré les gaz lacrymogènes, la foule s’y engouffre. Nous avons passé la voix ferrée. La bassine est désormais à notre portée, à quelques champs de là. Mais avant il faut traverser un ruisseau. Il y a donc de l’eau ? Oui... mais c’est celle de la station d’épuration !

Tout le monde se motive et franchit progressivement l’obstacle. Chacun-e avec son style propre. Certaines se jettent dans le ruisseau sans hésitation. D’autres enlèvent leurs chaussures, d’autres encore se déshabillent carrément. Peu à peu la colonne s’organise. Des mains attentionnées permettent à chacun de traverser à son rythme. Le cortège progresse, les gendarmes jettent de nouveau quelques grenades lacrymogènes, mais ça y est : la bassine est en vue !



Au même moment, un autre petit cortège échaudé par la traversée et guidé par des mauzéens fait le tour par l’ancien petit port pour gagner la bassine par un autre chemin. Le dispositif est complètement débordé. Sur place, les gendarmes ne sont pas assez nombreux pour défendre la bassine de Cram-Chaban. Ils finissent par lâcher le blocus du pont de la voie ferrée. La route est libre. Les tracteurs et toutes celles et ceux qui n’avaient pas pris la voie des champs s’engouffrent. De l’autre côté de la 4 voies, le gros des troupes de gendarmes est absolument impuissant et inutile. 

 

Devant la bassine, la situation se tend brièvement. Une personne parvient à y pénétrer seule et gambade sur la digue. Mais voyant les tracteurs et la foule arriver au loin, les gendarmes en sous-nombre finissent par battre en retraite, piteux... Les grilles tombent. Les manifestants pénètrent alors l’édifice. La bassine est partiellement débâchée.



Pendant ce temps, un petit groupe mené par le porte-parole national de la Confédération Paysanne s’attelle depuis de longues minutes au démontage méticuleux de la pompe qui assèche le Mignon pour remplir la bassine. Les clefs à molette et les meuleuses sont de sortie ! Méthodiquement, la pompe est démontée. Au prix d’un peu d’huile de coude et de beaucoup d’ingéniosité l’eau fini par jaillir. La bassine commence à se vider dans le Mignon, il y a du débit, l’eau retourne à la nappe ! Un morceau de la pompe est prélevé en vue d’être remis publiquement aux responsables politiques. Par ce geste la confédération paysanne renoue avec la tradition de lutte des paysans travailleurs et du syndicalisme révolutionnaire.



Peu à peu tout le monde se retrouve dans la bassine noire de monde. Images incroyables. Le ciel orange, un bateau pirate tiré par un tracteur, des enfants et des mamies, le blanc immaculé du géotextile, les bouts de bâches qui flottent, les reflets de la foule dans l’eau, des petites mains qui plantent des saules. Une personne des Soulèvements de la terre, une personne de Bassines Non Merci et le porte-parole de la Confédération Paysanne prennent brièvement la parole pour affirmer le sens et la portée du geste et célébrer la victoire du jour. La foule danse un rock’n’roll endiablé. 

 

Nous repartons tous ensemble en convoi, en musique et sans encombre jusqu’à la salle des fêtes mise à disposition par le maire d’une commune voisine. Le soir, concerts, chants, accordéons et récits enjoués et épiques de la journée viennent clore cette nouvelle bataille victorieuse dans la guerre de l’eau.


Ce qui s’est passé ce 6 novembre à Mauzé-sur-le Mignon est une étape déterminante dans la lutte contre les projets de bassines en Deux-Sèvres et partout en France. La FNSEA et l’État savent désormais qu’ils vont devoir se heurter à une résistance farouche. Jamais, ils ne pourront protéger tous les chantiers de bassines à venir et encore moins toutes les bassines existantes. Aujourd’hui, ils n’ont d’autre choix que de suspendre les travaux ou d’aller au devant de nouvelles batailles dans la guerre de l’eau.

Ce qui s’est passé ce 6 novembre est également très important bien au-delà de la lutte contre les bassines. Plus personne n’attend rien de la COP 26 et des gouvernants qui ont précipité le désastre. Et pourtant plus personne ne peut ignorer son ampleur catastrophique. Tout le monde sait que les marches climats ne suffisent plus. Et pourtant personne ne semble savoir quoi faire. Alors que tout s’accélère, il convient de franchir un seuil. Il ne s’agit plus de marcher pour réclamer au gouvernement telle ou telle mesure écologique. Il s’agit de reprendre en main le destin du monde vivant, de s’organiser pour passer à l’action. De s’organiser pour démonter, désarmer, neutraliser toutes les machines de morts qui ravagent le monde ; pour bloquer la course folle de l’agro-industrie qui empoisonne la terre ; pour reprendre la terre aux machines et remettre la terre aux mondes. C’est la vocation des Soulèvements de la Terre.

C’est ce que nous avons fait une nouvelle fois ce 6 novembre 2021 et c’est ce que nous continuerons à faire dans les mois qui viennent. Pendant que la France jouera à se chercher un homme providentiel détenteur de solutions miracles, alors que l’extrême-droite a imposé ses obsessions identitaires et que la gauche n’a rien d’autre à offrir que le pathétique spectacle de sa division, seules nos actions résolues permettront de remettre les pieds sur terre.

Rejoignez-nous !

https://lessoulevementsdelaterre.org/



Source :  https://lundi.am/Marais-poitevin-La-guerre-de-l-eau-est-declaree 

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Passe-droit pour les partisans 

de l’agro-industrie, 

répression pour les défenseurs 

des ressources en eau

 
Méga-bassines

par Nolwenn Weiler

 

 


 Près de 3000 personnes ont rallié le rassemblement d’opposition aux méga-bassines ce week-end en Poitou-Charentes, ainsi que 500 « pro-bassines ». Si les premiers ont dû contourner des zones interdites par le préfet, les seconds ont pu y accéder.

 

Y a-t-il eu un passe-droit de l’État ce week-end pour des agriculteurs manifestant dans le Marais poitevin en vue de contrer un rassemblement d’opposants à des projets de méga-bassines ? Réunis à l’appel de la FNSEA et des Jeunes Agriculteurs (JA), ces manifestants ont pu accéder au chantier d’une retenue d’eau géante sans heurts avec les forces de l’ordre. Le site était pourtant situé au cœur des zones interdites par le préfet dans un arrêté publié deux jours plus tôt.

 

Les manifestants opposés au chantier parviennent sur le site de la méga-bassine. © Manuel Blanchard


Zones interdites par la préfecture

Prévue depuis plusieurs semaines à Mauzé-sur-le-Mignon dans les Deux-Sèvres, une manifestation d’opposants aux méga-bassines - ces réservoirs d’eau géants destinés à irriguer les grandes cultures, maïs en tête (lire notre reportage) - a dû changer de trajectoire au dernier moment. « On s’est entretenus avec la préfecture le mercredi 3 novembre, explique Julien Le Guet, porte-parole de Bassines Non Merci [1]. Ils ne voulaient pas que l’on s’approche du chantier. Le lendemain, on a proposé un tracé alternatif à celui prévu, en restant à distance de la bassine. Mais en fin d’après midi la préfecture a publié un arrêté annonçant que la zone pressentie serait interdite d’accès. »


Raisons de ces interdictions : la crainte de « graves troubles à l’ordre public » ; et notamment d’ « affrontements entre les parties opposées ». Car entre-temps, la FNSEA a fait savoir qu’elle comptait venir sur le chantier de la bassine de Mauzé pour empêcher toute tentative d’intrusion. « Le 6 novembre prochain, les "anti-tout" ont pour ambition de stopper à nouveau le chantier de la réserve de Mauzé-sur-le-Mignon. Il est hors de question que le travail de concertation effectué par les parties prenantes pour la construction d’un vrai projet de territoire soit anéanti par une minorité d’ayatollah, peut-on lire sur l’appel publié mercredi 3 novembre par le syndicat agricole. Cette mobilisation est bien plus qu’une simple mobilisation départementale, c’est un enjeu national. Ces projets prometteurs doivent pouvoir voir le jour sur le sol français. »

Barrages de policiers face aux manifestants anti-bassines

« En prenant ces mesures [d’interdiction], le préfet des Deux-Sèvres préserve le droit de manifester dans des conditions qui garantissent la sécurité de tous », affirme la préfecture dans un communiqué. « On ne voulait absolument pas provoquer de heurts, intervient Mathieu Durand, de Bassines non merci. Mais on voulait que les manifestants puissent avoir accès au site, pour qu’ils se rendent compte de ce que signifie concrètement un chantier de bassine », à savoir un paysage lunaire. « Nous avons maintenu le rendez-vous initial dans le centre de Mauzé, qui n’était pas interdit, poursuit Julien Le Guet, mais nous avons dû ensuite modifier notre tracé, couper à travers champs, traverser à pied un cours d’eau et essuyer des tirs de lacrymos. »

« Les manifestant.e.s ont ensuite collectivement investi le site d’une méga-bassine illégale de 5 hectares (180 000 m3), et ce malgré un fort dispositif policier, précise la Confédération paysanne, syndicat agricole très engagé dans la lutte. La pompe qui alimente la bassine et puise directement dans la nappe phréatique a été démontée par des paysan.ne.s et emmenée. Une fois la foule montée sur le talus de la bassine, un débâchage a été effectué pour la mettre hors d’état de nuire. La bassine a ainsi été vidée et l’eau rendue à la nappe ! » L’action a été vivement critiquée par les ministres de l’Agriculture et de l’Intérieur ; la préfecture faisant état de trois blessés chez les gendarmes, dont un assez gravement, avec une interruption temporaire de travail de 10 jours.



Laissez-passer et laissez-faire côté pro-bassines ?

Côté pro-bassines, pas d’affrontements avec la police semble-t-il ; alors que le rassemblement s’est tenu au cœur de la zone interdite par la préfecture, sur le chantier de méga-bassine de Mauzé. « On a eu d’un côté des manifestants auxquels on a fait barrage et de l’autre des agriculteurs qui ont réussi à s’introduire sur le site sans aucun problème », s’étonne Mathieu Durand. Comment 500 personnes ont-elle fait pour s’introduire à un endroit où « les cortèges d’engins agricoles et toute autre manifestation [étaient] interdits de 0 h 00 à minuit » ? « Ils ont présenté un laissez-passer que leur ont délivré les syndicats », croit savoir Julien Le Guet.

De fait, l’appel à mobilisation de la FNSEA mentionne en « aspect pratique » les conseils suivants : « Dans ce contexte d’opposition, pour pouvoir accéder au site de la manifestation et passer les barrages des forces de l’ordre, vous devez impérativement présenter cet appel à mobilisation sur votre téléphone ou en version papier. » Contactée par Basta!, la préfecture dément tout passe-droit accordé aux agriculteurs qui se sont rendus sur le chantier. « L’endroit était interdit aux manifestations », résume le service de presse.

De son côté, la FNSEA précise au téléphone que « les gens devaient présenter le laissez-passer pour entrer sur le site du chantier, qui est un lieu privé. Ils devaient simplement prouver aux organisateurs qu’ils étaient bien invités à venir. Ce ne sont pas les gendarmes qui ont effectué les contrôles. D’ailleurs, il était précisé que les gens devaient arriver avant 10h00 car ensuite il y avait des barrages routier ». Les forces de police ont donc attendu que les manifestants rejoignent tranquillement le site avant d’en boucler les accès ? « On a vraiment l’impression d’avoir à faire à des milices privées qui défendent des intérêts particuliers avec la bénédiction de l’État », proteste Mathieu Durand.


Ces agriculteurs seront-ils condamnés, ou au moins rappelés à l’ordre, pour cette appréciation toute personnelle de ce qu’est une zone interdite ? Pour l’instant, cela ne semble pas à l’ordre du jour. Du côté des anti-bassines, on s’attend par contre à de nouveaux signes de répression. La manifestation du 22 septembre dernier s’était soldée par « cinq gardes à vue avec perquisitions des ordis et téléphones », précise Mathieu Durand. Par ailleurs, une centaine de manifestants ont reçu des contraventions pour « défaut de stationnement », suite aux rassemblements de la fin septembre [2].

 

« Cela concerne des stationnements en rase campagne, sur le bas-coté des routes, précise Julien Le Guet. Il n’y avait pas de signalisation de stationnement interdit ; et la sécurité routière n’était absolument pas en jeu. » Une contestation collective de ces contraventions est en préparation. « Nous ne savons pas encore s’ils vont faire de même pour le rassemblement de ce week-end, termine Mathieu Durand. Pour le moment, seuls des agriculteurs de la Confédération paysanne rentrant chez eux avec leurs tracteurs après la manifestation ont été verbalisés. »

Nolwenn Weiler

Photo : Collectif Bassines non Merci.

 

1Bassines non merci est coorganisatrice de la manifestation du 6 novembre avec la Ligue de protection des oiseaux, la Confédération paysanne et les Soulèvements de la Terre

[2Les contraventions concernent des personnes qui se sont rendus à la manifestation du 22 septembre, et au rassemblement du 24 septembre.

 

Source :  https://basta.media/mega-bassines-manifestation-confederation-paysanne-FNSEA-nappes-phreatiques

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