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mercredi 6 mars 2013

Equateur : le Pétrole ou la Vie ?

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L'Equateur met aux enchères l'Amazonie pour le pétrole : la volte-face de Rafael Correa dénoncée par une manifestation à Paris


Forêt amazonienne en Equateur : et au milieu coule une rivière... de pétrodollars... © Avaaz
Manifestation à Paris, 26 février 2013, 11h, pour dénoncer le double langage du Président Rafael Correa (Equateur) - "Le pétrole ou la vie ?" : tellle est la question et tel est le nom que nous, Planète Amazone, avons souhaité donner à une action de protestation contre la "Ronda Sur Oriente", une mise aux enchères par l'Equateur d'immenses parcelles de forêt amazonienne primaire (4 millions d'hectares, l'équivalent de la superficie des Pays-Bas), la plupart en territoires indigènes. Les concessions doivent permettre d'exploiter le pétrole qui, pour le plus grand malheur des peuples autochtones et de la nature, sommeille dans le sol d'une forêt à la biodiversité extraordinaire. 
Double langage. Il y a encore peu, le président Rafael Correa, fraîchement réélu, faisait entrer les droits de la "pacha mama" ("mère Terre") dans la Constitution de son pays et demandait à la planète de l'aider à préserver la parc Yasuni, plutôt que d'y autoriser des forages. Engagée avec Avaaz (qui a recueilli plus d'un million de signatures contre le dépeçage de l'Amazonie équatorienne au profit des compagnies pétrolières) et Amazon Watch, une manifestation autour d'un forage symbolique a eu lieu à Paris, dans la matinée du 26 février 2013, devant un grand hotel parisien de la rive gauche où les officiels équatoriens avaient imaginé pouvoir parler (très) gros sous dans la plus grande discrétion. Raté !   



Bien avant le rassemblement, l'équipe de Planète Amazone s'était mise en place pour infiltrer et perturber la discrète réunion "Ronda Sur Oriente", organisée par le gouvernement équatorien pour leurs acheteurs potentiels. Point d'opération commando comme à Houston quelques jours plus tôt (sous la houlette de nos camarades d'Amazon Watch), mais du velours et beaucoup de culot. La réunion devant commencer à 8h du matin, l'un d'entre-nous s'est présenté devant le petit point d'accueil mis en place par les organisateurs en se faisant passer pour un journaliste non accrédité.
Très méfiants, les délégués du projet Ronda Sur Oriente n'ont pas souhaité délivrer une autorisation d'assicter à la réunion mais ont tout de même accédé à la demande de collecte de documents de présentation posés sur une table et proposé une entrevue avec Andrés Donoso Fabara (voir sa fiche). Les fonctions actuelles qu'occupent Monsieur Donoso Fabara parlent d'elles-mêmes : coordinateur juridique général juridique au Ministère des Ressources non Renouvelables de l'Equateur, vice-président exécutif de Dispetrol S.A., Chef du Département Légal de Petroamazonas EP... 

Sur le verso de sa carte de visite de "Secrétaire adjoint à l'administration des zones affectées, et des contrats Hydrocarbures" au Secrétariat des Hidrocarbures, une magnifique photo du volcan Chimborazo se reflétant dans un lac avec le lien du site de tourisme de l'Equateur et un joli slogan : "Equateur, la vie à l'état pur". L'entrevue dure dix minutes. Alors que nous allons commencer à questionner Andrés Donoso Fabara à partir d'une carte portant le sigle de la compagnie américaine IHS, qui nous a été remise quelques instants plus tôt, celui-ci commence par nous vanter l'initiative Yasuni-ITT, un renoncement à la production de centaines de millions de barils de pétrole pour « préserver la biodiversité unique du Parc Yasuni et ses populations autochtones » à la condition que la communauté internationale finance 50% de la valeur des réserves pétrolières de la zone. Nous lui faisons remarquer qu'il est pour le moins contradictoire d'appeler d'une part, à grand renfort de publicité, à préserver la forêt primaire du pays et de faire entrer (première mondiale) les droits de la nature dans la Constitution du pays et de l'autre d'ouvrir en catimini des surfaces bien plus importantes à l'exploitation pétrolière, alors que d'autres gisements sont déjà en cours d'exploitation. Comment interpréter ce signal autrement qu'une entreprise de greenwashing à très grande échelle ?
Il est bien entendu fait état de la nécessité de développer le pays, dont « la population est pauvre ». Nous rappelons qu'il existe d'autres voies, notamment celle du tourisme responsable. L'argument suivant est de nous expliquer que la biodiversité des 13 blocks mis aux enchères ce jour « est moins intéressante que celle du parc Yasuni ». Notre interlocuteur s'avère quelque peu embarassé lorsque nous lui demandons s'il considère que cette biodiversité est moins importante et donc moins vitale à préserver que celle du parc Yasuni. Il n'entrera pas dans les détails. Il préfère revenir sur l'aspect social et présente à nouveau le projet Ronda Sur Oriente comme une opportunité de sortir les populations de la zone affectée de la pauvreté. Lorsque nous lui demandons s'il prétend que les exploitations vont profiter aux peuples autochtones, il répond derechef : « bien entendu ! Nous avons pour cela un plan social de développement très élaboré ». Sauf que les peuples autochtones ne sont pas pauvres puisqu'ils tirent leur subsistance de la forêt amazonienne, nuance d'importance.
Nous orientons alors la discussion sur les problèmes liés à l'absence ou aux mauvaises conditions de consultation des peuples autochtones vivant dans les parcelles mises aux enchères, dénoncées par des communautés locales et des ONG. « Ces problèmes n'existent pas, les ONG pratiquent la désinformation », affirme-t-il de façon assurée. « Nous avons passé deux ans à consulter les représentants autochtones des zones concernées et tous sont satisfaits des accords trouvés ». Il ajoute que les communautés qui s'opposent au projet sont établies hors des parcelles de la Ronda Sur Oriente et pointe une zone blanche sur la carte, une parcelle qui porte le numéro 74.
Nous abordons enfin la grande inquiétude des écologistes de tout bord à travers la planète concernant la pollution inhérente aux projets d'exploitation pétrolière en forêt. Nous évoquons un précédent absolument désastreux en Equateur, celui de la société américaine Chevron (dont dépend notamment l'enseigne Texaco), qui de 1964 à 1990 a pollué et donc dégradé de façon très notable d'importantes surfaces de forêt amazonienne (pour ce que certains dénomme "le Tchernobyl de l'écologie", la compagnie a été condamnée en première instance en 2011 à une amende record de 19 milliards de dollars). Andrés Donoso Fabara explique que cela appartient au passé et que « les techniques de forage ont fait beaucoup de progrès depuis les années 1970 ». Il assure que les 13 parcelles de la Ronda Sur Oriente ne seront pas polluées et qu'une vigilance accrue du Secrétariat aux Hydrocarbures y veillera. Nous cherchons à savoir la durée d'exploitation des futures cocnessions : « 25 ans. » Vingt cinq années qui coûteront très cher en matière de dégradation irréversible de la biodiversité et dont les effets se feront certainement sentir sur les régions concernées  et leurs habitants pour une durée bien plus longue 

L'entretien s'achève de façon très cordiale et Andrés Donoso Fabara nous déclare que les organisateurs de la Ronda Sur Oriente n'ont rien à cacher et qu'il est ouvert à toute question par email dans le futur. Notre "journaliste" ne sera pourtant pas convié à assister à la présentation de la matinée... nous ne sommes plus à une contradiction près.
Tandis que se déroulait cet entretien les deux autres représentants de Planète Amazone étaient postés dans un couloir de l'hotel, devant l'accès à la salle de conférence, affairés à distribuer aux participants un argumentaire contradictoire à celui de la si belle présentation des organisateurs de la Ronda Sur Oriente. Tenant lieu de mise en garde aux potentiels investisseurs, celui-ci a été préparé par nos amis d'Amazon Watch. Il va sans dire qu'ils ont été repérés assez rapidement et sommés de quitter les lieux dans les plus brefs délais (5 argumentaires ont pu être remis).
Dans le hall de l'hotel où nous nous sommes repliés quelques instants, des équatoriens très agités ont utilisés des stratagèmes dignes des services secrets pour nous photographier. Nos fiches figureront désormais dans les bureaux des services du président Corréa. Quel honneur !

Puisque la contradiction est nécessaire en démocratie, nous proposons, pour conclure, la reproduction de l'argumentaire d'Amazon Watch remis aux participants et aux journalistes. 

Téléchargez l'argumentaire contradictoire d'Amazon Watch sur la Ronda Sur Oriente



Les blocs (parcelles) de la Ronda Sur oriente mis aux enchères à Paris
portent les numéros 22, 29, 70, 71, 72, 73, 77, 79, 80, 81, 83, 84 et 87.
Date de l'article : 28/02/2013
Auteur de l'article : Gert-Peter BRUCH


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