Voilà, dit-on, ce que disait la grande
rebelle Emma Goldman (1869-1940). On dit même qu’elle l’a dit à Lénine
en personne, c’est dire.
Danser ! Voilà un programme de rentrée.
Oui la révolution, mais danser !
Et même chanter !
Rentrer pour replonger dans les intestins des luttes intestines,
ça
vous tente ? Revoir tourner les mêmes bobines, le pompeux filousophe, le
camelot de plateau, le caniche faux-cul,
la marchande de haine, tous
les rabâcheurs du pas possible,
ça vous va ?
Renfiler le vieux paletot de l’impuissance et de la déprime,
encore un coup ?
Nous déprimer est l’idée fixe des pouvoirs établis,
économique,
politique comme médiatique.
Nous angoisser, nous persuader de notre
impuissance,
nous déposséder de notre histoire, nous voler nos
victoires,
c’est leur guerre la plus obstinée, leur propagande
la plus
insidieuse et la plus puissante,
c’est notre dressage le plus réussi.
Ils n’ont pas besoin de nous réprimer,
il leur suffit de nous déprimer.
C’est la grande idée du philosophe Gilles Deleuze.
« Les pouvoirs établis ont besoin de nos tristesses
pour faire de
nous des esclaves.
Le tyran, le prêtre, les preneurs d’âmes ont besoin
de nous persuader que la vie est dure et lourde. »
(Gilles Deleuze et Claire Parnet, Dialogues,
Flammarion, 1977, Paris)
Et même, il leur suffit « d’administrer et d’organiser
nos petites terreurs intimes », ajoutait Paul Virilio.
Et Deleuze continue : « nous vivons dans un monde
plutôt
désagréable, où non seulement les gens,
mais les pouvoirs établis ont
intérêt à nous communiquer
des affects tristes. La tristesse, les
affects tristes
sont tous ceux qui diminuent notre puissance d’agir. (…)
Les
malades, de l’âme autant que du corps,
ne nous lâcheront pas, vampires,
tant qu’ils ne nous auront pas communiqué leur névrose
et leur
angoisse, leur castration bien-aimée,
le ressentiment contre la vie,
l’immonde contagion. »
Oui, bien joli, mais est-ce que tout ça ne fait pas de vous
un ravi
de la crèche mou du genou, un « indignez-vous »
qui tend l’autre joue ?
Pas du tout, au contraire, dit Tonton Deleuze :
« tout est affaire
de sang. Ce n’est pas facile
d’être un homme libre : fuir la peste,
organiser les rencontres, augmenter la puissance d’agir, s’affecter de
joie,
multiplier les affects qui expriment
un maximum d’affirmation.
Faire du corps une puissance qui ne se réduit pas
à l’organisme, faire
de la pensée une puissance
qui ne se réduit pas à la conscience. »
Et Deleuze dit aussi : « on a beau dire "dansons",
on est pas bien
gai. On a beau dire "quel malheur la mort ",
il aurait fallu vivre pour
avoir quelque chose à perdre. »
Voilà le programme de rentrée :
augmenter la puissance d’agir
et s’affecter de joie !
Daniel Mermet (et Tonton Deleuze)
P.-S. S’il faut des figures pour dire tout ça,
en
voilà une, en voilà deux, en voilà trois.
Trois femmes comme par hasard.
Valerie Tarazi, nageuse palestino-américaine,
était porte-drapeau de la
délégation de Palestine
aux Jeux olympiques d’été de 2024 à Paris :
Catherine Ribeiro, 1941-2024 :
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