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samedi 31 décembre 2022

Ce SDF a bâti un « château de hobbits » pour dormir, il est sommé de le démonter

Ce SDF a bâti 

un « château de hobbits » 

pour dormir, 

il est sommé de le démonter

 

 

 Un homme sans domicile fixe a construit un abri fait de mousse recyclée près d’un sentier fréquenté à Tournefeuille (Haute-Garonne), près de Toulouse. La cabane, qui ressemble a un décor de conte de fées ou à une maison de hobbits, captive les promeneurs. Mais son constructeur a été sommé de la démonter.

 

Un homme sans domicile fixe a construit un château digne d’un conte de fées près d’un sentier public fréquenté à Tournefeuille. | VALENTINE CHAPUIS / AFP

 

Les passants voient dans l’habitation une « maison aux hérissons », une cabane de « lutins » ou « de hobbits », ces créatures imaginées par Tolkien, l’auteur du Seigneur des anneaux. Un château miniature de deux mètres fait de mousse recyclée captive les promeneurs à Tournefeuille, près de Toulouse (Haute-Garonne).

Mais comme le raconte l’AFP mercredi 28 décembre 2022, son créateur, un SDF qui y vit, a été sommé de le démonter. Il a reçu la veille de Noël une mise en demeure de la mairie pour évacuer les lieux. L’homme refuse de se plier à cette décision.

Chaque dimanche, le créateur de la petite maison organise des ateliers créatifs pour les enfants. | VALENTINE CHAPUIS / AFP

 

« Cela fait râler, il ne dérange personne, et c’est joli, franchement », peste Laurent Mahout, 38 ans, un habitant de cette banlieue résidentielle de Toulouse, qui a l’habitude d’emmener sa fille de 6 ans sur place le dimanche. Ce jour-là, David, le SDF de 53 ans, organise bénévolement des ateliers de création pour les enfants.

À la rue après le squat de son appartement

La cabane aux allures de décor de conte de fées est apparue sur les rives de la rivière Touch, au printemps, jouxtant un sentier public fréquenté par des sportifs et les promeneurs. La construction, bordée d’arbres et de réverbères factices et d’un arbre à peluches, est en réalité une maison de fortune pour le sans-abri, ancien animateur en camping ou centre de loisirs.

 

Un décor factice entoure la petite maison de Tournefeuille. | VALENTINE CHAPUIS / AFP


Dans la rue depuis un an et demi, après que son appartement a été squatté, il espère rester dans son logis jusqu’à la fin de l’hiver et peste contre la méthode employée par la mairie pour le déloger.

Fabriqué uniquement en mousse, récupérée dans une benne de déchets, puis découpée et repeinte par ses soins, l’abri s’est petit à petit transformé en un véritable château miniature. « J’ai fait ça pour les passants. C’est quand même plus agréable à voir qu’une tente », a expliqué le sans-abri auprès de l’AFP.

Un risque en cas d’incendie, selon la mairie

« C’est en mousse, donc si cela prend feu la personne peut mourir et cela pourrait se propager », redoute de son côté une porte-parole de la mairie, précisant qu’en cas d’incendie, « la responsabilité du maire pourrait être engagée » car la cabane se trouve sur le domaine public.

 

Un joggeur passe devant la maison de David, à Tournefeuille. | VALENTINE CHAPUIS / AFP 

Pour autant, la municipalité se défend de pousser l’homme à la rue. « La mise en demeure est prorogée jusqu’à ce qu’on trouve une solution », indique-t-elle, précisant vouloir « traiter le volet social » avant de statuer sur le sort de l’abri de fortune.


Source : https://www.ouest-france.fr/region-occitanie/tournefeuille-31170/en-images-ce-sdf-a-bati-un-chateau-de-hobbits-pour-dormir-il-est-somme-de-le-demonter-6981461e-8767-11ed-9105-0edf1d3343be

vendredi 30 décembre 2022

La préfète protège les bois ? L’État la vire


La préfète protège les bois 

L’État la vire


29 décembre 2022 à 09h21

 


 Marie Lajus, préfète d'Indre-et-Loire, a été limogée le 7 décembre 2022. Une éviction politique : elle s'opposait à un projet immobilier destructeur.

La préfète d’Indre-et-Loire Marie Lajus a été limogée car elle voulait... faire respecter la loi. Elle s’opposait à un projet immobilier destructeur de terres. Ses soutiens, dont moult élus, dénoncent une « injustice ».

« Vive la presse... vive la presse libre ! » C’est une vidéo publiée sur le réseau social Twitter et massivement relayée qui a contribué à mettre en lumière cet événement. On y voit l’ex-préfète d’Indre-et-Loire Marie Lajus brandir un article du Canard enchaîné mis sous verre et offert par ses collègues. Cette enquête parue le 14 décembre dans le journal satirique révèle les conditions obscures pour lesquelles Marie Lajus a été évincée de son poste de préfète une semaine plus tôt. On y apprend qu’une banale affaire d’urbanisme aurait provoqué sa chute et que ce sont certains élus locaux qui auraient fait pression pour démettre l’ex-préfète de ses fonctions.

Au cœur de cette affaire, le projet de construction d’un incubateur de start-up « deeptech » de 4 000 m2 dans l’ancien domaine d’une maîtresse de Louis XIV, Madame de la Vallière, dans la commune de Reugny, en Indre-et-Loire. Le domaine appartient à l’homme d’affaires Xavier Aubry, qui a fait fortune en Suisse et qui souhaite désormais y implanter le DaVinci Lab, un centre de recherche sur les nouvelles technologies. Le problème, c’est que l’entrepreneur souhaite construire cet incubateur sur un terrain non constructible et boisé, adossé à un château qu’il a déjà transformé en hôtel de luxe il y a quelques années. Certains élus tourangeaux y voient pourtant une opportunité pour redynamiser la région. « C’est un investissement de 15 millions d’euros, pour un département comme le nôtre c’est extrêmement important », déclare à Reporterre Bernard Gaultier, président de l’association des maires ruraux d’Indre-et-Loire.

 

 

Le Da Vinci Labs doit être construit sur un terrain non constructible et boisé, adossé à un château transformé en hôtel de luxe. Da Vinci Labs

En sa qualité de préfète sur le territoire, Marie Lajus, accompagnée par les services de l’État et notamment des Bâtiments de France, avait émis des réserves à plusieurs reprises sur le projet. Dans un échange de courrier que Reporterre a pu se procurer entre Nicolas Toker, le maire de Reugny qui accompagne le projet Da Vinci Lab sur sa commune et l’ex-préfète Marie Lajus, cette dernière souligne que « l’intérêt scientifique, économique et territorial du projet [...] doit être établi sans laisser place au doute » et émet une réserve sur la justification du bien-fondé du choix de l’implantation en milieu boisé non constructible.

Certains maires auraient « envoyé des SMS sans arrêt à Darmanin »

Selon le Canard enchaîné, ce sont ces réserves et cette rigueur concernant la loi qui ont poussé certains élus locaux à demander le départ de Mme Lajus. Certains maires auraient « envoyé des SMS sans arrêt à Darmanin » pour demander la révocation de la préfète selon le journal satirique. La nomination ou la cessation de fonction d’un préfet sont en effet à l’initiative du ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin et de la Première ministre Élisabeth Borne.

Bernard Gaultier, le président des maires ruraux d’Indre-et-Loire, même s’il reconnaît « certaines tensions » avec l’ex-préfète, assure qu’aucun maire de la région n’a, à sa connaissance, fait pression pour l’éviction de Mme Lajus. « C’est vrai qu’il y avait un manque de confiance entre certains élus et la préfète, on souhaitait être plus soutenu dans nos projets », assure le maire de Perusson. « Elle paraissait comme une personne très stricte et rigoureuse, qui se retranchait souvent derrière la loi. Elle restait dans sa tour d’ivoire à la préfecture et on la voyait rarement. » Un avis partagé par les maires du département selon Bernard Gaultier. La presse locale affirme même qu’un élu déclarait en 2021 « qu’elle nous fait chier avec son cul pincé » lors d’un congrès des maires d’Indre-et-Loire. Les tensions entre la préfète et certains maires étaient « connues et avérées », confirme au téléphone Emmanuel Denis, maire écologiste de Tours, qui a salué « l’exemplarité » de l’ex-préfète lors du dernier conseil municipal de la ville.

Cette éviction est une « honte pour le gouvernement »

Peu de temps après le décret du 7 décembre annonçant la fin des fonctions de Marie Lajus et les révélations dans la presse, une pétition en ligne et une tribune parue dans le journal Le Monde ont mis en avant le caractère « injuste » de la décision. Pour Nicole Bonnefoy, sénatrice en Charente et membre du parti socialiste qui a travaillé avec Marie Lajus lors de son affectation en tant que préfète de la région entre 2018 et 2020, l’éviction de la préfète est « une honte pour le gouvernement. On a fait voter la loi Climat et Résilience en 2021 en fixant notamment le ZAN — zéro artificialisation nette d’ici 2050 — et quel est le message du gouvernement ? Il limoge une préfète qui tente de faire respecter la loi. Cela démontre bien la faiblesse de l’État en matière de protection de l’environnement » regrette Nicole Bonnefoy. La sénatrice, qui a signé la tribune a également envoyé un courrier au ministre Darmanin pour évoquer sa « consternation »


« À quoi cela sert de faire voter des lois si elles ne sont pas appliquées ? »

 

À Reporterre, elle affirme que « cette éviction me fait me poser beaucoup de questions. À quoi cela sert d’être parlementaire, de faire voter des lois, pour qu’au final elles ne soient pas appliquées ? » Nicole Bonnefoy pense également que les élus locaux ont joué un rôle dans l’éviction de Marie Lajus. « Il existe des pressions c’est certain, qu’elles proviennent de lobbys ou d’élus locaux. Il ne faut pas oublier non plus que Marie Lajus est une femme, et je constate tous les jours dans ma chaire que la parole d’une femme en politique ne vaut pas celle d’un homme », poursuit la sénatrice.

Christophe Monteiro, directeur de centres sociaux à Angoulême et créateur de la pétition en ligne en soutien à Marie Lajus souligne le professionnalisme de l’ex-préfète et sa proximité avec la population. « Elle était préfète en Charente durant deux années. C’était une personne très dynamique, très proche des citoyens. Les gens avec qui je travaille ici, dans les quartiers et les centres sociaux se rappellent du nom de la préfète, c’est quand même assez rare ! Avec cette décision, le gouvernement envoie un mauvais signal. On ne peut pas parler d’exemplarité ou de valeurs en bafouant à ce point l’honneur d’une femme », dit-il au téléphone.

« Si des élus locaux ont pu faire démettre la préfète de ses fonctions en envoyant des messages au ministre Darmanin, c’est un sujet d’État. » Wikimedia / CC BY-SA 4.0 / Pierrot75005
 

Christophe Monteiro, comme les élus et les différents acteurs de la société civile qui ont manifesté leur incompréhension, attend désormais des explications sur les raisons qui ont poussé Gérald Darmanin et Élisabeth Borne à mettre fin aux fonctions de Marie Lajus au milieu de l’année, sans préavis et sans point de chute. « Si les faits sont avérés et si certains élus locaux ont pu faire démettre la préfète de ses fonctions en envoyant des messages au ministre Darmanin, c’est un sujet d’État », assure au téléphone Emmanuel Denis, le maire écologiste de Tours.

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jeudi 29 décembre 2022

Dans la métropole de Grenoble, les déchets alimentaires sont collectés pour faire du compost et du gaz

 

Dans la métropole de Grenoble, 

les déchets alimentaires 

sont collectés 

pour faire du compost 

et du gaz


« Nous voulons éviter que ces déchets ne soient brûlés, et on demande aux habitants de nous aider à faire ce tri. C'est une aberration d'incinérer ces déchets qui sont très humides. »

 


Depuis 2019, la métropole Grenoble-Alpes distribue à ses habitants des seaux de compost. En 2022, après Meylan, Corenc et La Tronche, la Métropole distribue en faisant du porte-à-porte les derniers 100 000 seaux qui n’ont pas été donnés dans la commune de Grenoble.

Selon Francebleu, les « bio-seaux » permettent de trier tout ce qu’il reste des repas, des préparations de plats, des épluchures ou des produits périmés.

Loan, étudiant, commente leur mise en place : « C’est quelque chose qui manquait, c’est le genre de déchet qu’on ne savait pas trop où jeter, je vais essayer de faire cet effort. »

Cette collecte va permettre de limiter les déplacements des camions et donc les émissions de gaz à effet de serre. Elle approvisionnera également un centre de compostage transformant les déchets en fertilisant naturel pour les agriculteurs locaux.

La métropole estime que chaque métropolitain produit annuellement 60 kilos de déchets alimentaires. Lionel Coiffard, le vice-président de la métropole, en charge de la valorisation des déchets, explique :

« C’est énorme. Nous voulons éviter que ces déchets ne soient brûlés, et on demande aux habitants de nous aider à faire ce tri. C’est une aberration d’incinérer ces déchets qui sont très humides. »

En 2026, une usine de production de gaz sera rajoutée sur cette échelle industrielle. Elle produira du combustible qui alimentera les camions poubelles. En France, le dispositif n’a encore jamais été mis en place pour une agglomération.

 

Le futur centre de méthanisation – Crédit : Grenoble Alpes Métropole

Bémol de l’opération : l’utilisation de sacs biodégradables, dont la dégradation totale des matériaux n’est pas garantie, selon l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses).

La cheffe du projet, Véronique Berger, estime : « On ne va pas se mentir, il peut y avoir des nuisances olfactives, ou des moucherons, des asticots. Mais c’est le cycle de la vie, et selon nous, ce sont des nuisances acceptables. »

Pour ceux qui descendent régulièrement leurs déchets dans la poubelle prévue à cet effet, aucun souci à déplorer heureusement.

 

Les poubelles de collecte – Crédit : Grenoble Alpes Métropole

Dans les foyers déjà équipés, la Métropole estime qu’un tiers de déchets sont pour l’instant récupérés. La métropole a l’objectif d’en récupérer au moins 50 %. Pour cela, il faut convaincre les habitants de changer leurs habitudes. Les messagers du tri de Grenoble distribuent les seaux et interviennent pour informer.

Antoine Mercier, l’un d’entre eux, estime : « Il faut avant tout qu’ils comprennent à quoi ça sert, comment ça fonctionne et où vont aller les déchets, il faut que l’explication soit claire et que les gens aient envie de le faire. »

D’ici à l’automne 2023, tous les logements de la métropole devraient avoir reçu leur bio-seau. Au 1er janvier 2024, les collectivités territoriales devront avoir proposé une solution de tri pour les déchets alimentaires, qui ne pourront plus être mis en décharge. La métropole grenobloise est la première à l’avoir mise en œuvre.

23 décembre 2022 - Maïté Debove

 

Source : https://lareleveetlapeste.fr/dans-la-metropole-de-grenoble-les-dechets-alimentaires-sont-collectes-pour-faire-du-compost-et-du-gaz/

mercredi 28 décembre 2022

Douze arguments pour répondre aux anti-écolos durant le réveillon

 

Douze arguments 

pour répondre 

aux anti-écolos 

durant le réveillon

 

24 décembre 2022 à 10h27  

Mis à jour le 26 décembre 2022 à 09h42

 



Viande, chasse, avion « vert », nucléaire... Que répondre aux arguments anti-écologistes entendus dans les dîners en famille ? Suivez le guide de Reporterre.

Fêtes de Noël oblige, vous allez peut-être être confronté à un oncle climatosceptique, à une tante écoanxieuse ou à un beau-frère technosolutionniste. Votre famille pourrait mettre vos nerfs d’écolo à rude épreuve. Pour survivre à ces moments difficiles, Reporterre vous livre quelques arguments pour lutter contre les lieux communs anti-écologistes. 


« Les chasseurs sont les premiers écologistes de France »

Votre oncle chasseur n’en démord pas : quoi qu’en pensent les « bobos », ses camarades et lui sont les premiers écologistes de France. C’est d’ailleurs son président en personne, Willy Schraen, qui le dit. Alors que lui rétorquer ? Déjà que, chaque année, leurs armes dispersent pas moins de 6 000 tonnes de plomb dans la nature, intoxiquant les sols et certains animaux. Que plus d’un tiers des espèces chassables en France sont menacées ou quasi menacées de disparition d’après l’Union internationale pour la conservation de la nature. Ou encore que de nombreuses techniques de chasse sont peu soucieuses de la souffrance animale. Quelques images du déterrage des blaireaux ou d’un cerf épuisé par des heures de chasse à courre devraient finir de l’en convaincre.

 

Chaque année, leurs armes dispersent pas moins de 6 000 tonnes de plomb. © Frederic Scheiber / Hans Lucas via AFP

Mais les chasseurs sont indispensables à la régulation des espèces, répondra votre oncle. Rappelez-lui alors que ce sont eux les responsables de l’explosion des effectifs de sangliers. À la fin des années 1960, avec la disparition du petit gibier délogé par l’agriculture moderne, les chasseurs ont perdu leurs proies de prédilection. Pour y remédier, ils ont élevé, relâché et nourri un nombre colossal de sangliers… et le font encore, pour le seul plaisir cynégétique. Sachez-le, les seuls régulateurs d’espèces, ce sont les grands prédateurs.


« Les scientifiques ne sont pas tous d’accord sur l’origine humaine du changement climatique »

C’est un grand classique des climatosceptiques : la planète se réchauffe mais rien ne prouverait la responsabilité des humains. À les entendre, la communauté scientifique serait même divisée sur la question. Mais une étude publiée en 2021 montre qu’il n’en est rien. Elle a analysé plus de 88 000 articles scientifiques publiés depuis 2012 et les résultats sont sans ambiguïté : 99,9 % montrent que les activités humaines, via l’émission de gaz à effet de serre, altèrent le climat. « Les explications alternatives […] sont extraordinairement rares », observent les scientifiques. À titre de comparaison, les origines anthropiques du réchauffement climatique font autant consensus au sein de la communauté scientifique que la théorie de l’évolution ou la tectonique des plaques.


« C’est la faute des Chinois. Nous, on n’y peut pas grand-chose »

Innocente, la France ? Pas vraiment. Afin d’avoir une vision réaliste de son empreinte carbone, il faut inclure les émissions « importées », c’est-à-dire celles générées à l’étranger pour créer des produits consommés sur le territoire. Par exemple, les émissions pour la fabrication d’un Iphone sont comptabilisées en Chine alors qu’il sera utilisé en France. En 2018, selon un rapport du Haut Conseil pour le climat, l’empreinte carbone « complète » de la France s’élevait à 749 mégatonnes d’équivalent CO₂, ce qui correspond à 11,5 tonnes d’équivalent CO₂ par habitant. Cependant, le calcul a été revu et est maintenant évalué à 8,9 t. Cela reste plus élevé que la moyenne mondiale, qui s’élève, selon la climatologue Valérie Masson-Delmotte, à environ 7,5 tonnes d’équivalent CO₂ par personne.

 

Le 3 février 2021, l’État français a été reconnu coupable d’inaction climatique par le tribunal administratif de Paris. © Mathieu Génon/Reporterre

La notion de responsabilité, en matière climatique, s’étend par ailleurs aux émissions historiques. Le dioxyde de carbone persiste en effet pendant une centaine d’années dans l’atmosphère. Depuis 1850, la France a émis plus de 38,5 gigatonnes de CO₂ sur son territoire. Elle se hisse ainsi au treizième rang des nations les plus émettrices de gaz à effet de serre. Pour le moment, les mesures mises en place par la France pour réduire ses émissions de gaz à effet de serre sont insuffisantes — ce qui lui a valu d’être condamnée en justice pour inaction climatique.


« Les énergies renouvelables sont inutiles. On a déjà le nucléaire »

L’EPR de Flamanville n’est pas achevé après plus de seize ans de travaux, et celui de Finlande n’a toujours pas démarré, après lui aussi dix-sept années de chantier - il devrait enfin démarrer en mars prochain. Même en cas de renouvellement du parc nucléaire et de prolongation de la durée de vie des réacteurs existants, l’énergie atomique ne pourrait jamais répondre qu’à 50 %, au maximum, des besoins en électricité des Français à l’horizon 2050. C’est ce qu’a montré le Réseau de transport d’électricité (RTE) dans un rapport de 2021. « Tous les scénarios supposent un effort substantiel sur toutes les technologies d’énergies renouvelables, sans exception », concluait-il. Le parc nucléaire est en effet vieillissant et de nombreux réacteurs devront fermer dans les trente prochaines années. Si elle veut atteindre la neutralité carbone, la France devra quoi qu’il arrive développer ses sources d’énergie renouvelable… et économiser drastiquement la consommation d’énergie.

 

L’EPR de Flamanville n’est pas achevé après plus de douze ans de travaux. © Sameer Al-DOUMY / AFP

« Les nouveaux réacteurs vont résoudre la crise climatique »

Le design des EPR2 n’est pas achevé et ils n’ont pas encore reçu l’aval de l’Autorité de sûreté. Imaginons quand même que tout aille bien : les deux premiers EPR2 seraient alors prêts en… 2035, au mieux. Or, la priorité face au réchauffement climatique est de réduire très rapidement les émissions de gaz à effet de serre. La France a accepté l’objectif européen de diminuer les émissions de 55 % d’ici 2030 par rapport à 1990. Il nous faut diminuer de 4,7 % par an… dès maintenant, pas en 2035 ! Et à court terme, la politique la plus efficace est de réduire la consommation d’énergie, et de mettre en place des énergies renouvelables, qui demandent moins de temps de construction.


« L’avion, c’est pas si grave car ils seront bientôt écolos »

Les avions « verts » sont pour le moment un mirage. Il faudrait, a minima, attendre encore vingt ans avant le décollage du premier avion électrique. La lutte contre le changement climatique ne peut pas attendre aussi longtemps. De plus, ces avions nécessiteraient de grandes quantités d’électricité pour fonctionner, au détriment d’autres usages. 

Quant aux agrocarburants, leur utilisation à grande échelle pourrait avoir des conséquences environnementales catastrophiques, et augmenter la déforestation. L’Organisation de l’aviation civile internationale (Oaci) promet d’utiliser 50 % (soit 285 millions de tonnes par an) de « carburants d’aviation durables » d’ici 2050. Problème : selon les Amis de la Terre, il faudrait près de 3,5 millions d’hectares de terres — la taille de la Belgique — pour produire ne serait-ce que 2 millions de tonnes d’agrokérosène par an. La filière mise beaucoup sur les biocarburants de seconde génération, fabriqués à partir de déchets agricoles ou végétaux, pour remédier à ce problème. Mais la filière est encore balbutiante, et ces combustibles alternatifs doivent être mélangés à du kérosène, souligne Le Monde.

 

La canne à sucre peut être utilisée pour produire des agrocarburants. Ces derniers peuvent donc être responsables de déforestation.

À ce jour, l’aviation est responsable de 4 % de la surchauffe anthropique de la planète, selon une étude publiée en 2021 dans la revue Environmental Research Letters. D’ici 2050, s’il continue de croître, le trafic aérien aura augmenté la température globale de 0,1 °C. C’est loin d’être négligeable.


« Si tu ne manges pas de viande, tu vas tomber malade »

Les végétariens sont soupçonnés d’être en mauvaise santé. C’est pourtant le contraire. Non seulement les personnes qui ont abandonné toute nourriture carnée sont en meilleure santé grâce à des habitudes alimentaires plus saines mais surtout, elles sont moins sujettes aux cancers colorectaux. Plusieurs études scientifiques ont en effet démontré le lien entre la consommation de viande rouge et de charcuterie et l’apparition de ces maladies. Enfin, il est important de rappeler l’impact carbone de l’élevage, responsable de 14,5 % des émissions de gaz à effet de serre dans le monde.


« Abîmer des œuvres d’art est un scandale »

Votre famille n’a pas supporté les jets de soupe sur les tournesols de Van Gogh et autres tableaux visés par le mouvement Just Stop Oil. Pour défendre cet acte politique, vous pouvez commencer par rappeler que les œuvres, protégées par des vitres, n’ont pas été endommagées. Puis enchaîner sur les financements des musées, largement subventionnés par les énergies fossiles et donner l’empreinte carbone de l’art (70 millions de tonnes de CO₂ par an).

« Qu’est-ce qui a le plus de valeur ? L’art ou la vie ? »

Enfin, vous pouvez expliquer que l’art est devenu un marché spéculatif totalement déconnecté des réalités sociales et écologiques. Et finissez avec sur la question posée par les activistes : « Qu’est-ce qui a le plus de valeur ? L’art ou la vie ? » 


« Quelques degrés de plus, c’est chouette. On pourra déjeuner en terrasse à Noël »

Une augmentation de 2 °C de la température globale ne signifie pas qu’il fera, par exemple, 22 °C au lieu de 20 °C. Il s’agit d’une moyenne : dans les faits, le dérèglement du climat entrainera encore plus de canicules, sécheresses, tempêtes, inondations… que le monde en connaît déjà.

Côté biodiversité, le manque de froid trouble certaines plantes, comme le blé et l’orge, qui produiront moins d’épis — et devrait altérer la production agricole mondiale. Plusieurs espèces animales ont leur cycle de vie déjà bouleversé. Prenons l’exemple de la marmotte. Cela semble contre-intuitif mais en hiver, la neige fait office d’édredon en recouvrant leur terrier pour maintenir une bonne température d’hibernation. Si la couche de neige est trop fine à cause de la chaleur, les marmottes pourraient mourir de froid.


« Vous les écolos, vous voulez tout interdire »

Le barbecue, les voitures, l’avion… les écolos, des rabat-joie ? Certes, pour rester sous 1,5 °C (ou même 2 °C) et éviter la sixième extinction de masse, il nous faudra changer radicalement nos modes de vie : manger beaucoup moins de viande, réduire nos déplacements, limiter les achats de vêtements neufs. Plutôt que de dénoncer un absurde « autoritarisme vert », multiplions les alternatives : le troc et les ateliers de réparation ; les recettes gastronomiques véganes ; les vélocargos et autres véhicules alternatifs

 

Septembre 2021. Dans l’Assam, au nord-est de l’Inde, les champs étaient noyés, les villages engloutis par des crues imprévisibles. © Côme Bastin / Reporterre

Et posons-nous la question : la liberté de quelques-uns (globalement, celle des Occidentaux) justifie-t-elle la privation de liberté de tant d’autres ? Nous consommons près de 20 kg de vêtements neufs par an et par personne en France : où est la liberté pour les ouvrières et ouvriers qui travaillent dans des conditions désastreuses ? Où est la liberté pour les habitants de territoires pollués par cette industrie ? Ce qui nous « interdit » bien des choses, ce ne sont pas les écologistes, mais le dérèglement climatique (et les dirigeants qui ne le freinent pas). Rationnements alimentaires à la suite de pertes de rendement agricole, prolifération de maladies, obligation de rester confiné dans une salle climatisée en cas de forte chaleur, perte de sa maison et de tout ce qu’on possède après des catastrophes dites naturelles… Alors, vous reprendrez un peu de salade ?

« L’écologie n’est ni de droite ni de gauche »

Voilà que votre voisin de tablée vous assure que la droite en a fait bien plus que la gauche pour le climat : loi moratoire sur les OGM, Charte de l’environnement dans la Constitution… Sauf que : « Il faudrait confronter ce qu’a fait la droite et ce qu’auraient fait les Verts ou La France insoumise à leur place », dit le politologue Florent Gougou. Autrement dit, la droite a beaucoup gouverné mais peu fait pour contrer la crise écologique. Si l’on se base par exemple sur les programmes de chaque parti pour l’élection présidentielle, le constat est sans appel : les plus à même de nous sortir de la crise écologique étaient les politiques ancrés à gauche. Pourquoi ? Parce que la droite, dont les macronistes, entend résoudre le chaos climatique sans changer le système — productiviste, néolibéral, capitaliste. Or, comme le disait Albert Einstein : « On ne peut pas résoudre un problème avec le même mode de pensée que celui qui a généré le problème. »


« De toute façon, c’est foutu »

Puisqu’on va tous mourir un jour autant en profiter avant ! Pour contrer les arguments de votre beau-frère climatodéfaitiste, utilisez la métaphore de la maison en flammes chère à Jacques Chirac. Imaginez qu’un incendie se déclare dans votre cuisine. Tentez-vous d’éteindre les flammes pour sauver le reste de votre appartement ? Ou partez-vous en courant sous prétexte que « tout est foutu » ? Pour la crise climatique, c’est la même chose : chaque dixième de degré compte. Très concrètement, si nous dépassons les 2 °C de réchauffement global, tous les coraux vont disparaître. Le nombre de personnes qui manqueront d’eau va presque doubler. En France, les plages où vous avez passé votre enfance vont disparaître, englouties par les eaux. Cela vaut pour un réchauffement de 2 °C par rapport à l’ère préindustrielle, mais certains scientifiques prédisent qu’il pourrait atteindre 4 °C, avec des conséquences encore plus graves. Alors le mieux est d’agir pour arrêter les émissions de gaz à effet de serre rapidement.

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Précisions

Auteurs de l’article : Lorène Lavocat, Hortense Chauvin, Emmanuel Clévenot, Laury-Anne Cholez

Photos du montage :
Chasse : © Sébastien Bozon / AFP
Nucléaire : Pexels
Avion : Pxhere
Action militante : Rich Felgate / @finitedoc

 

Source : https://reporterre.net/Douze-arguments-pour-repondre-aux-anti-ecolos-durant-le-reveillon

mardi 27 décembre 2022

Assurance-chômage : l’injustifiable réforme


 

C’est officiel, 

la réforme de l’assurance-chômage 

a fait beaucoup de perdants


Selon le bilan de l’Unédic, enfin rendu public, les coupes dans les droits des demandeurs d’emploi ont abouti à une baisse moyenne de 16 % des allocations versées, et à un recul jamais atteint du nombre de chômeurs indemnisés. Et la prochaine réforme aggravera la situation.

Dan Israel

22 décembre 2022 à 18h28 

 

 Les chiffres ont mis des mois à être rendus publics, et ils sont aussi sombres qu’anticipé. C’est une poignée de jours avant Noël que l’Unédic – l’organisme, géré par les syndicats et le patronat, chargé du régime d’assurance-chômage – s’est résolu à communiquer aux partenaires sociaux son bilan de la réforme de l’assurance-chômage, qui est entrée entièrement en vigueur en octobre 2021.

Jusque-là, et en violation flagrante avec les promesses initiales du macronisme, aucune donnée précise n’était disponible pour comprendre les effets de la réforme, dont tout laissait penser qu’elle était désastreuse pour les plus précaires des demandeurs d’emploi.

« Une évaluation sera faite. Il faut se laisser plus de temps pour que ces analyses soient fiables », expliquait encore en juin 2022 Patricia Ferrand, la présidente de l’Unédic. Au printemps 2020, l’organisme avait pourtant été en mesure de publier un bilan précis et détaillé des premières mesures entrées en vigueur six mois plus tôt (et finalement suspendues en juillet 2020, pour cause de crise sanitaire).

Pour obtenir enfin les informations précises concernant la réforme, il aura donc fallu patienter le temps que le gouvernement fasse voter une deuxième réforme, qui réduira d’un quart la durée d’indemnisation des chômeurs, à partir du 1er février.

Sans surprise, les chiffres de l’Unédic sont désastreux pour les demandeuses et demandeurs d’emploi. Jamais la part des inscrit·es à Pôle emploi touchant une indemnisation n’a été aussi faible : seulement 36,6 % de l’ensemble des inscrit·es en juin 2022, contre 40,4 % en décembre 2021.

Et pour qui réussit à les percevoir, les allocations revues et corrigées par les nouvelles méthodes de calcul ont baissé en moyenne de 16 % – un chiffre conforme aux anticipations de l’Unédic, qui prévoyait en avril 2021 une baisse moyenne des droits de 17 %.

Les économies d’ores et déjà réalisées sont substantielles : plus de 2 milliards d’euros par an, avant une réduction supplémentaire des dépenses qui devrait dépasser les 4 milliards annuels lorsque la deuxième réforme sera en régime de croisière.

Dans un communiqué, la CGT a dénoncé « un saccage » « La réforme de 2021 a non seulement exclu un très grand nombre de travailleurs privés d’emploi de l’indemnisation mais elle a particulièrement touché les jeunes ainsi que les travailleurs ayant perdu un CDD ou un contrat d’intérim. »

Baisse des droits 

La réforme de 2021 a joué sur trois paramètres : un nouveau mode de calcul du salaire journalier de référence (SJR), à partir duquel est calculée l’allocation-chômage ; la nécessité de travailler au moins six mois, et non plus quatre, pour y avoir droit ; et un recul de 30 % du montant versé au bout de 6 mois pour les salarié·es qui touchaient les plus hauts salaires (plus de 4 500 euros brut).

Le premier effet de ces mesures a été de faire reculer le nombre d’ouvertures de droit au chômage, ou de rechargement de ces droits. L’Unédic en compte 39 000 de moins en juin 2022 qu’en juin 2019, soit une baisse de 20 %.

Un peu plus de 50 % des inscrit·es à Pôle emploi se voient verser moins d’allocations à cause de la réforme. 15 % des demandeuses et demandeurs d’emploi ont même vu leurs droits fondre de 20 % à 50 %.

On ne peut lier toute cette baisse à la réforme, parce que la conjoncture économique a été bonne en 2022, et que le nombre d’inscrits à Pôle emploi était orienté à la baisse. Mais il faut noter que la baisse est plus marquée chez les allocataires les plus fragiles, qui sont précisément celles et ceux qui sont visé·es par la réforme : moins de 25 ans (– 26 % d’ouvertures de droits), allocataires ayant perdu un CDD (– 30 %) ou un contrat d’intérim (– 37 %).

Un peu plus de 50 % des inscrit·es à Pôle emploi se voient verser moins d’allocations à cause de la réforme, qui cible principalement celles et ceux qui alternent période d’emploi et d’inactivité. 15 % des demandeuses et demandeurs d’emploi ont même vu leurs droits fondre de 20 % à 50 %, par rapport à ce qu’ils auraient pu attendre avant 2021.

Autre effet, collatéral cette fois, de la réforme : le cumul entre chômage et petits boulots peut se révéler moins rémunérateur qu’auparavant. Alors même qu’un allocataire sur deux travaille, « une proportion moindre est indemnisée » pour ce cumul, note l’Unédic. Et ce sont les profils moins qualifiés qui en bénéficient moins.

Quant à la réduction de 30 % du montant de l’allocation-chômage au bout de six mois pour les cadres, cette règle touchait déjà 31 000 personnes en juin dernier, « et 52 000 autres pourraient voir leur allocation baisser les mois à venir », a calculé l’Unédic.

L’objectif n’est pas atteint

Ces coupes radicales dans les droits des allocataires sont-elles au moins utiles pour remplir les objectifs officiels du gouvernement, à savoir réduire drastiquement l’utilisation des emplois courts par les entreprises et leur personnel ? Pas du tout, si l’on en croit la synthèse, également présentée aux partenaires sociaux, de quarante entretiens menés par l’Unédic avec des demandeurs d’emploi impactés par la réforme.

Ainsi, l’enjeu « de limitation des contrats courts n’est qu’assez partiellement perçu par les allocataires », indique pudiquement le gestionnaire de l’assurance-chômage, qui signale que « très peu [des personnes interrogées] évoquent des choix personnels les amenant à privilégier des contrats courts ».

Sans surprise, les allocataires expliquent que dans leur secteur professionnel ou à leur niveau de qualification, on ne propose simplement pas de contrats pérennes. Et d’ailleurs, même après la réforme, leur recherche d’emploi reste « majoritairement dans la continuité de leur parcours professionnel récent, donc souvent en CDD ou intérim », note l’Unédic. La durée des contrats de travail proposés ne fait pas plus « partie de leur considération pour reprendre un emploi ».

"Je ne peux pas aller en formation parce que je ne pourrai pas travailler pendant ce temps et l’indemnité qui me serait payée ne me permet pas de vivre."

Un demandeur d’emploi interrogé par l’Unédic 

 

Les allocataires ne perçoivent pas non plus de changement « dans les comportements et pratiques de recrutement des employeurs en lien avec la réforme ». Et les rares personnes estimant disposer d’un pouvoir de négociation avec un futur employeur l’utilisent pour demander un plus haut salaire, pas un CDI.

« On est en position de force car il y a une pénurie de main-d’œuvre », indique ainsi un professionnel de la restauration, qui travaille pour des traiteurs. Mais ces derniers « ne sont pas en mesure d’embaucher sur des contrats stables car avec leur activité en dent de scie, ils n’ont pas [d’autre] choix que d’avoir des contrats d’usage », précise-t-il aussitôt.

D’autres allocataires soulignent par ailleurs que le faible niveau d’indemnisation les empêche de se déplacer pour trouver du travail plus loin de leur domicile, ou même d’entamer une formation : « Actuellement, je ne peux pas aller en formation parce que je ne pourrai pas travailler pendant ce temps et l’indemnité qui me serait payée ne me permet pas de vivre », dit l’un de ceux qui cumulent chômage et petits boulots.

La deuxième réforme ne sera pas plus positive 

Ces constats moroses ne seront pas égayés par la première évaluation, à gros traits, menée par l’Unédic sur les effets de la future réforme qui entrera en vigueur en février. Si, comme cela est prévu par le gouvernement, la durée d’indemnisation maximale baisse d’un quart (sans pouvoir passer sous les 6 mois), « en moyenne, le nombre d’allocataires indemnisés diminuerait de 12 % en année de croisière, soit environ 300 000 personnes pour 2,5  millions d’indemnisés ».

Et si le gouvernement assure que ce rabotage de 25 % des droits ne s’appliquera qu’en cas de conjoncture favorable, et disparaîtra si le chômage remonte, les anticipations de l’Unédic se chargent de balayer ce discours : il faudrait que le taux de chômage dépasse 9 %, alors qu’il est de 7,3 % aujourd’hui, ou qu’il augmente de plus de 0,8 point sur un trimestre. Or, « une augmentation de 0,8 point du taux de chômage ne s’est produite que deux fois dans le passé relativement récent » : en 2009 après la crise des subprimes, et en 2020, avec le confinement lié à la pandémie de Covid.

Là encore, l’efficacité de la mesure voulue par l’exécutif est remise en question : même s’il est établi que réduire la durée d’indemnisation pousse les demandeurs d’emploi à retrouver plus vite un travail, cela « n’implique pas forcément une augmentation du volume d’emplois créés par les entreprises », avertit l’Unédic.

« Y a-t-il plus d’emplois créés ou une rotation différente dans les offres d’emploi pourvues (emplois pris par des chômeurs indemnisés au lieu de chômeurs non indemnisés, inactifs, etc.) ? », interroge l’organisme, qui insiste sur le fait que « ces effets dits de “bouclage macroéconomique” n’ont pas été étudiés à ce jour ».

Les effets positifs de la future réduction de la durée d’indemnisation sont donc loin d’être établis. Mais d’autres conséquences négatives sont en revanche très probables : parce qu’ils seront couverts moins longtemps par l’assurance-chômage, « les allocataires impactés par la réforme acquerront moins longtemps des droits à la retraite et moins de points de retraite complémentaire ». Et une hausse du nombre de bénéficiaires du RSA « devrait s’observer consécutivement à la réduction de la durée des droits ».

 

 Dan Israel


Source : https://www.mediapart.fr/journal/economie-et-social/221222/c-est-officiel-la-reforme-de-l-assurance-chomage-fait-beaucoup-de-perdants