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« Tourists go home ». Depuis ce printemps, en Espagne, le message est clair. Il est apparu dans les mobilisations
qui se sont multipliées aux Canaries, en Andalousie, à Barcelone, ou
encore aux Baléares. Les populations locales en ont assez du surtourisme
qui fait exploser les prix de l’immobilier et ne fournit que des
emplois précaires. Sans compter le désastre écologique
entraîné par cette industrie. Hausse du trafic aérien – le mode de
transport le plus émetteur de gaz à effet de serre –, pression sur les
milieux naturels et la ressource en eau, surconsommation énergétique,
production de déchets… |
Dans le collimateur des villes européennes les plus exposées, il y a les
croisières touristiques, bien plus polluantes que le trafic automobile. À Lisbonne,
c'est l'une des raisons pour lesquelles il y a le plus de locations
Airbnbn par habitant, comparé aux autres capitales européennes. Ces
dernières années, des mouvements
se sont organisés dans les ports de Venise, Majorque et Marseille pour y
limiter les escales journalières. Mais la lutte citoyenne ne suffira
pas, si les politiques continuent de miser sur la manne financière du
tourisme de masse.
C’est pourtant ce que font la plupart des gouvernements. Ainsi de la Grèce, où le premier ministre Kyriákos Mitsotákis, d’un cynisme absolu, considère que le réchauffement climatique est « une occasion pour allonger la période touristique ».
L’an dernier, près de 33 millions de touristes étrangers – trois fois
la population du pays, un record – se sont rendus dans la péninsule
hellène... et la construction d’hôtels et d’infrastructures de luxe a le
vent en poupe. C’est ainsi qu’une loi est passée cet hiver pour
faciliter les constructions sur le littoral.
La France n’est
pas en reste, avec un été olympique qui risque d’alourdir sévèrement la
facture. Officiellement, les JOP2024 promettent d’être les plus
écologiques de l’histoire, avec l’objectif d’émettre deux fois moins de
dioxyde de carbone qu’à Londres en 2012. Selon l’estimation du think
tank The Shifters cependant, le bilan carbone des déplacements des
spectatrices et spectateurs venant de l’étranger devrait être le double de celui prévu par le comité d’organisation des Jeux. Soit autour de 770 000 de personnes et 1,1 million de tonnes de CO2
– pour un pays qui est déjà la première destination touristique au
monde, avec près de 100 millions de touristes internationaux accueillis
en 2023.
Dans son essai paru au printemps, Renoncer aux voyages,
la philosophe Juliette Morice analyse ce paradoxe : aujourd’hui
démocratisé grâce aux vols low cost, le voyage est devenu une norme
sociale. Parallèlement, il n’a jamais été autant remis en cause, à
l’heure des urgences écologiques. Est-il encore compatible avec une
société écolo ?
Sans doute, avec une tout autre devise que la célèbre formule olympique. Moins vite, moins loin, moins massivement.
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