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lundi 20 mai 2024

Israël condamné à la guerre pour toujours


 Là-bas si j'y suis

 

Israël condamné 

à la guerre 

pour toujours


C’est un israélien qui parle ainsi, un des plus célèbre, Moshe Dayan, figure politique et militaire, héro de la guerre des Six Jours, l’homme au bandeau sur l’œil.

La scène se passe en 1956 soit huit ans après la création de l’État d’Israël qui a été suivie par la Nakba, c’est-à-dire l’expulsion de 700 000 palestiniens de leurs maisons et de leurs terres par des paramilitaires sionistes.

La Nakba - la catastrophe en arabe - est vécue comme un prolongement du colonialisme occidental au moment même où celui-ci va commencer son sanglant déclin. La Nakba n’est pas seulement un évènement, pour les palestiniens c’est le début d’un processus qui reste présent, un traumatisme qui se transmet de génération en génération.

Cette année-là, donc, le 28 avril 1956, Moshe Dayan, alors chef d’état-major de l’armée israélienne, arrive dans le kibboutz Nahal Oz, situé près de la frontière avec la bande de Gaza. Déplacement officiel suite à un meurtre qui bouleverse Israël. Roi Rothberg, un des membres du kiboutz ,vient d’être assassiné par des palestiniens infiltrés depuis Gaza où ils vivent comme réfugiés.

Moshe Dayan va prononcer alors un éloge funèbre resté dans l’histoire et qui a un écho terrible avec la tragédie actuelle. Il commence par évoquer les meurtriers de Roi Rothberg :

« Aujourd’hui ne maudissons pas ses assassins. Que savons-nous de leur haine sauvage envers nous ? Ils vivent depuis huit ans à Gaza dans des camps de réfugiés, tandis que nous nous emparons sous leurs yeux des terres et de leurs villages où ils vécurent et où vécurent leurs ancêtres. Ce n’est pas aux Arabes de Gaza qu’il faut demander le prix du sang, mais à nous-mêmes ».

Et Moshe Dayan précise : « Au-delà du sillon qui marque la frontière, s’étend un océan de haine avec un désir de revanche. Nous sommes une génération de colons, et sans casques ni canons nous ne pourrions pas planter un arbre ni construire une maison. »

Terrible rapprochement, 67 ans plus tard, le 7 octobre 2023, le kibboutz Nahal Oz sera la cible de massacres et de destructions lors de l’attaque terroriste du Hamas.

Une colombe, ce chef d’état-major ? Un islamo-gauchiste antisémite ? Pas vraiment, selon l’historien Shlomo Sand : « Dayan était un adepte de la force, au plus mauvais sens du terme, mais il était moins hypocrite que la plupart des dirigeants et des habitants d’Israël passés et présents. En tant que chef du Commandement sud de l’armée, de 1948 à 1950, il a incité et pris l’initiative de l’expulsion des habitants autochtones d’al-Majdal. Dayan connaissait parfaitement les raisons de la frustration et de l’hostilité des Palestiniens, et il n’a pas éprouvé le besoin d’inventer un récit mystificateur et justificateur. »

Quelques mois plus tard, en novembre 1956, les troupes israéliennes occupent la bande de Gaza, histoire de liquider la présence des « fedayins » selon le terme qui qualifiait les combattants palestiniens. Les quatre mois d’occupation ont fait un millier de morts dans la population de Gaza, soit un habitant sur trois cents, selon l’historien Jean-Pierre Filiu , qui précise :

« Dayan a représenté, surtout jusqu’à la guerre d’octobre 1973, la tendance dure et intransigeante à l’égard des pays arabes. Sa politique est cependant pragmatique, et il est convaincu que le conflit israélo-arabe s’enracine dans l’hostilité profonde d’un peuple spolié de sa terre au bénéfice d’un autre. »

Il n’est pas le seul à faire ce constat d’évidence. En 1967, après la guerre des Six Jours, en pleine gloire, il revient sur son analyse :

« Nous sommes venus dans un pays habité et nous y construisons un État juif. Les Arabes n’acceptent pas notre entreprise. Nous sommes condamnés à une belligérance éternelle. Nous sommes un corps étranger transplanté dans cette région que les autres organes repoussent. »

Un constat qui résume tout le colonialisme et qui peut s’appliquer aujourd’hui à la Kanaky dont la France « a pris possession » en 1853 et dont le délicat et patient processus de décolonisation vient d’être mis à bas par le subtil Macron et les plus malins de son entourage partisans de la fermeté.

Que peut la force contre le droit ? Contre ce droit physique et tangible qui est la terre et la mémoire d’un peuple ?

Il est capital de comprendre et de faire comprendre que les massacres du 7 octobre 2023 qui justifient pour beaucoup la vengeance génocidaire infligée au peuple de Gaza, sont l’épisode d’une longue et lourde histoire en forme d’impasse. Les voix simplement lucides ont été étouffées par des aveuglements fanatiques les plus criminels assortis de chantages à l’antisémitisme envers quiconque dénonce la course à l’abîme et au génocide.

Un phénomène évoqué sur un autre ton par Jonathan Duong cette semaine à propos d’un certain « filousophe » dont on hésite de moins en moins à oser supposer qu’il fait bénéficier de ses conseils éclairés la nouvelle direction de France Inter, dont il faut reconnaitre le discernement dans son choix de virer les meilleurs. Une chasse aux sorcières à bas bruit. Le « filousophe » on le retrouve d’ailleurs parmi les élites unanimes pour dénoncer avec perspicacité le manque d’humour de Guillaume Meurice, qui n’est rien d’autre qu’un bien piètre militant.

À reprendre en choeur cette semaine « Bread and Roses » racontée par Olivier Besancenot. Pas de lutte sans beauté ni émotion, c’est à dire sans la poésie. Mais quelle chanson pour accompagner l’idée de Gérard Mordillat qui propose cette semaine de rétablit l’esclavage. Ne manquez pas non plus les films que tante Zoé vous a dégotté en supplément GRATOS pour ces privilégiés que sont nos abonnées et abonnés modestes et géniales et géniaux.

Et le mieux pour savourer tout ça, c’est de se trouver un coin d’herbe tendre et de savoir se fendre de quelques baisers tendres sous un coin de ciel bleu.

Quelques baisers tendres ce n’est qu’un début, continuons les ébats !

Daniel Mermet

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De Shlomo Sand lire : Deux peuples pour un État ? Relire l’histoire du sionisme, Seuil, 2024, Paris

De Jean-Pierre Filiu lire : Comment la Palestine fut perdue. Et pourquoi Israël n’a pas gagné. Histoire d’un conflit (XIXe-XXIe siècle), Seuil, 2024, Paris

 
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dimanche 19 mai 2024

Place nette pour les JO : exclure plus vite, plus loin, plus fort

JO 2024 : 

Paris lave plus blanc 

que blanc

Paru dans CQFD n°230 (en kiosque)
Par Émilien Bernard
Illustré par Gwen Tomahawk
Mis en ligne le 03.05.2024

 

Cela fait désormais plus d’un an qu’un nettoyage social est en cours à Paris et en Seine-Saint‑Denis. L’objectif des autorités ? Envoyer en province les personnes considérées comme malvenues dans le décor des Jeux olympiques, essentiellement des exilées et exilés, à la rue. Une scandaleuse opération de tri urbain, qui a des conséquences sociales désastreuses, de Marseille au fin fond de l’Alsace.

                                                    Gwen Tomahawk

Faubourgs de Marseille, fin avril 2024. Le portail d’entrée est défoncé, ouvert à tous les vents, ça m’arrange. Jonchée d’ordures les premiers mètres, l’allée goudronnée s’avance entre des grilles vertes, délimitant d’un côté un centre social dans la cour duquel des gamins se déhanchent sur « Suavemente » de Soolking, de l’autre un parc envahi de poussettes et d’adeptes de la sieste printanière. Une grosse centaine de mètres et l’ambiance se fait moins bucolique. Surplombant un grand parking désert, deux gros bâtiments jaunis de huit étages dressent leur laideur fonctionnelle à l’écart des regards, gérés par le prestataire social Adoma – ex-Sonacotra. Pas un bruit, tout semble dépeuplé. Je fais le pied de grue au bas des tours, quand un jeune homme finit par sortir. Très timide, il confie s’appeler Lamine et venir de Gambie. Il vit dans les lieux depuis quelques semaines. La suite ? Il ne sait pas trop. Encore quelques jours ici, et il ne bénéficiera plus de ce foyer, sera dispatché dans les environs ou partira pour Paris. C’est d’autant plus flou qu’il n’a pas l’air en forme et tousse comme un damné.

La capitale, Lamine l’a quittée dans un bus affrété par la préfecture de Paris, direction Marseille, « comme les autres », dit-il. Je le suis vers un petit bâtiment qui sert de QG administratif. Venant à notre rencontre, un salarié d’Adoma s’étonne de me voir là : « C’est une zone privée ! » Après m’avoir confirmé que sont logées ici pour trois semaines une cinquantaine de personnes récemment arrivées de Paris l’Olympienne (cela constituerait un tiers des personnes installées ici plus durablement 1), il me demande de partir. Croisés devant le portail, deux jeunes hommes d’origine subsaharienne visiblement de mauvaise humeur rechignent à discuter, me disent juste qu’ils veulent repartir à Paris, qu’ici c’est pourri.

De Marseille à Geispolsheim

Ici c’est un coin paumé du quartier de la Capelette, dans le 10e arrondissement de Marseille, loin du centre-ville, loin des regards. Le bâtiment où vivent temporairement les personnes affrétées de Paris fait partie du dispositif mis en place dans une dizaine de régions françaises pour opérer un « désengorgement », via des « sas de desserrement régionaux ».

Logés pendant trois semaines, ils seront ensuite, selon leur situation administrative, remis à la rue ou placés dans des dispositifs d’accueil locaux déjà débordés

Logés pendant trois semaines, ils seront ensuite, selon leur situation administrative, remis à la rue ou placés dans des dispositifs d’accueil locaux déjà débordés.

Régi par une circulaire de mars 2023, ce type de dispositif fait évidemment réagir les associations suivant les personnes précaires. Quatre-vingts d’entre elles, dont ATD Quart Monde, Médecins du Monde ou la Ligue des droits de l’Homme, se sont regroupées dans un collectif intitulé Le Revers de la médaille 2 et appellent à cesser le «  nettoyage social » en cours, qui se fait dans la plus grande discrétion. « Les sas ont été activés et mis en place sans prévenir la ville et les élus, sans aucune construction avec les acteurs associatifs locaux et les ressources possibles », explique Jean, qui bosse pour Médecins du Monde. Un amateurisme qui a des conséquences : « Gérés par le réseau Adoma, ces lieux sont assez vite dépassés sur les situations complexes, notamment en matière de consommation de drogues, sachant qu’il y a par exemple des personnes venant de la porte de la Chapelle où il y a une présence du crack.  »

Marseille n’est pas la ville accueillant le plus de personnes délocalisées, sans doute parce que la ville a aussi des sites olympiques, notamment pour les épreuves de voile. Fin mars, le ministre du Logement Guillaume Kasbarian annonçait que 3 800 personnes avaient déjà été déplacées hors de Paris. Selon une enquête de StreetPress 3, les lieux d’accueil sont généralement fort peu adaptés à leur mission : « Comme souvent dans l’hébergement d’urgence, les personnes sont placées dans des hôtels bas de gamme au fin fond de zones industrielles, loin de tout. StreetPress a identifié quatre sas dans ces configurations : Rennes-Montgermont, Beaucouzé en périphérie d’Angers (49), Olivet à dix kilomètres d’Orléans (45) ou Geispolsheim, à 12 km au sud de Strasbourg (67). Gabriel, membre du collectif des migrants de Strasbourg, connaît bien le dernier endroit. Il résume : “Un hôtel miteux très difficile d’accès. Il y a un bus qui passe une fois par heure, et pas tout le temps, qui vous dépose à l’entrée d’un chemin lugubre. Il faut marcher 15 minutes le long de l’autoroute.” » Royal.

Paris, capitale des expulsions

Les images sont connues, de Calais à Paris : une armée de bleus caparaçonnés entourant les tentes de personnes exilées et les sommant plus ou moins gentiment de décamper. Mais depuis quelques mois elles s’accompagnent généralement d’une proposition, qu’ils seraient pour l’instant libres de décliner : monter dans un bus les conduisant dans l’un de ces sas de desserrement évoqués plus haut, pour trois semaines de logement garanti. Cela se fait généralement au très petit matin, comme le 30 mars sur un quai de Seine, quand 150 exilés, pour la plupart mineurs non accompagnés, sont réveillés par des CRS. L’un d’eux témoigne avoir déjà fait l’expérience de cet exil temporaire avant de se retrouver à la rue dans une ville inconnue – retenter le coup ? Très peu pour lui 4.

Ces opérations d’expulsion, qui s’accélèrent ces derniers temps, concernent aussi des squats, dont certains servaient de refuge à des centaines de personnes. Le dernier en date était situé à Ivry. Considéré comme le plus grand de France et abritant environ 450 personnes, il a été évacué au matin du 17 avril. Un exemple parmi d’autres.

Un nettoyage social des personnes considérées comme indésirables, exilés et SDF, sommées de ne pas faire tâche quand les touristes débarqueront

Alors que la capitale a vu le nombre de SDF augmenter de 16 % en 2023 (coucou Macron et sa promesse de zéro personne à la rue), que les résidences Crous vont mettre à la porte 2 000 étudiants et que de nombreux hôtels autrefois dévolus à l’hébergement social se recyclent en vue des lucratifs JO, cette vague d’expulsions accroît encore la précarité et le traitement inique des indésirables, ballottés au gré des rues et des villes selon les bons vouloir d’un pouvoir accro à l’autoritarisme. « Plus on va s’approcher des JO, plus on va saturer l’espace public de policiers  », s’est enflammé le préfet de Paris Laurent Nuñez en avril 2023. La fête s’annonce grandiose. Alors que des associations dénoncent des intimidations lors des maraudes, que des vidéos de CRS gazant les affaires de personnes à la rue sont récemment sorties, que le harcèlement policier semble grimper d’un cran de jour en jour 5, on peut se demander si la politique « zéro point de fixation » appliquée à Calais depuis quelques années, pour des résultats désastreux, n’a pas été importée à Paris. Qu’elle soit totalement inefficace en matière de réduction du nombre de candidats au passage n’y change rien. Quand il s’agit de harceler les plus faibles et les plus précaires, la police française répond toujours présente. De vrais champions, pour le coup, portant haut les valeurs de l’Olympie, et notamment le slogan officiel choisi par le comité Paris 2024 : « Ouvrons grand les jeux ! » Médaille d’or de novlangue olympique.

Par Émilien Bernard 
 
migrants », 13/12/2023.

4  Migrants : un “nettoyage” social à Paris avant les JO 2024 ? », vidéo de France 24, 09/04/2024.

 
 

samedi 18 mai 2024

Le géant Limagrain derrière le plus grand projet de mégabassines de France


Le géant Limagrain derrière le plus grand projet de mégabassines de France

par Sophie Chapelle

 

Deux nouveaux projets de mégabassines sont à l’étude dans le Puy-de-Dôme. 36 agriculteurs en bénéficieraient, pour la plupart adhérents de Limagrain, quatrième groupe semencier mondial. Une mobilisation est prévue le 11 mai.

 Ils représentent l’équivalent de 600 piscines olympiques en volume d’eau et de 46 terrains de football en surface. Deux projets de mégabassines pourraient recouvrir la plaine céréalière de la Limagne, à l’est de Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme). 36 exploitations agricoles réparties sur quinze communes et regroupées dans l’Association syndicale libre des Turlurons veulent ainsi irriguer 800 hectares.

Parmi ces exploitations figurent celles du président et de cinq administrateurs de Limagrain, coopérative agricole fondée en Auvergne en 1965. L’entreprise est devenue aujourd’hui le quatrième plus gros producteur de semences au monde, via sa filiale Vilmorin. « Les bassines sont une solution court-termiste », a reconnu le président de Limagrain lui-même, Sébastien Vidal, le 6 octobre dernier. Le projet avance malgré tout.

Les emplacements étaient initialement prévus à Saint-Georges-sur-Allier (sur dix-huit hectares) et à Bouzel (sur quatorze hectares). Pour comparaison, la mégabassine en projet à Sainte-Soline (Deux-Sèvres) couvre dix hectares. Les études menées ont finalement validé un seul des deux sites. Celui envisagé à Saint-Georges-sur-Allier n’a pas été retenu en raison de la nature des sols. Les agriculteurs n’ont pas abandonné le projet, la recherche d’un nouveau site d’implantation va toutefois retarder l’instruction du dossier et le démarrage des travaux.

Quoi qu’il en soit, les porteurs de projet se savent appuyés par le gouvernement. Le 27 avril, le Premier ministre Gabriel Attal a réaffirmé sa volonté de faciliter la construction des retenues d’eau, en réduisant les délais de recours menés par les opposants.

« Modèle agricole non durable »

Le coût de ces infrastructures – bassines, pompes et canalisations – est estimé entre 18 et 20 millions d’euros, financés à 70 % environ par des fonds publics européens. La région Auvergne-Rhône-Alpes a pour l’heure subventionné à hauteur de 115 000 euros la réalisation de l’étude de faisabilité.

En revanche, l’Agence de l’eau ne participe pas au financement. « L’agence finance des retenues de substitution dont l’objectif est de remplacer des prélèvements existants en étiage par des prélèvements à d’autres moments de l’année, a précisé à Mediapart le directeur de la délégation régionale de l’Agence de l’eau. Pour ce que je connais du dossier, il ne s’agit pas ici de réduire le volume d’eau prélevé mais de mise en place d’irrigation sur des terrains qui ne sont pas irrigués aujourd’hui », a-t-il ajouté.

Quel est le rôle de Limagrain, deuxième employeur privé d’Auvergne ? Le groupe coopératif affirme ne pas participer au financement, mais indique qu’il « cautionne pleinement la démarche des agriculteurs engagés dans des créations de retenues d’eau ».

Des mégabassines pour l’export ?

Limagrain cultive essentiellement du blé et du maïs dans ce territoire, transformés localement mais tournés vers l’export. C’est là l’une des critiques du collectif Bassines Non Merci 63, qui rassemble des habitants, des écologistes et des syndicalistes de la Confédération paysanne départementale. Ils reprochent à la coopérative « la pérennisation d’un modèle agricole non durable qui épuise l’environnement et n’a d’autres issues que la fuite en avant dans la productivité et le gigantisme au motif de la compétition internationale ».

Les agriculteurs impliqués dans le projet assurent au contraire défendre « une agriculture à taille humaine, principalement pour l’alimentation et transformée localement » et ne pas être tous affiliés à Limagrain.

« Si on pouvait se passer d’irrigation, on le ferait volontiers, car c’est un investissement très important » plaident-ils auprès du média local Tikographie, dans un contexte où les épisodes de sécheresses s’accentuent.

Des cultures maraichères ou d’ail devraient ainsi bénéficier de ces projets, mais elles demeurent marginales selon les opposants. « On dit favoriser le local, mais c’est une hypocrisie, considère Sylvie Léger, conseillère départementale écologiste du Puy-de-Dôme dans un entretien à Reporterre.

Des bassines jamais pleines ?

Contrairement à des projets de bassines comme celle de Sainte-Soline, il ne s’agit pas ici de puiser dans la nappe phréatique, mais dans l’Allier, durant la période hivernale, quand la rivière aura atteint un débit minimum de 47,3 mètres cube par seconde. Le pompage ne pourrait en outre pas dépasser une proportion de 1 % du débit. « Nous souhaitons prélever une eau qui irait vers la mer sans rester dans les sols. Il semblait logique de prélever quand elle est abondante et en quelque sorte perdue pour le territoire », indique un des agriculteurs impliqués dans le projet.

Pourtant, les données du site hydroportail pour l’hiver 2022/2023 montrent que le débit a été en dessous de ce seuil la majeure partie de l’hiver. « Si les bassines de Billom avaient été construites en 2023, en respectant les règles de pompage définies par la direction départementale territoriale du Puy-de- Dôme, elles n’auraient été remplies qu’à 44 % de la capacité », soulignent les opposants dans une brochure. « Sur les vingt dernières années, ils n’auraient pu remplir que six fois les volumes prévus, ce qui fait penser qu’ils s’attendent à fonctionner sur des dérogations préfectorales et donc, le milieu naturel en pâtira encore plus », appuie le représentant de la Confédération paysanne 63 auprès de Reporterre.

Pour contrer les critiques liées à l’évaporation et à l’apparition de cyanobactéries, les porteurs de projet envisagent d’installer des panneaux photovoltaïques flottants sur la surface des bassines. « Ce n’est pas ça qui va empêcher l’eau de s’échauffer, estime Christian Amblard, directeur de recherche honoraire au CNRS et spécialiste des écosystèmes aquatiques, auprès de Mediapart. Les bassines de ce type connaissent des pertes d’eau phénoménales par évaporation. On peut parler, en moyenne, de 30 à 40 % de perte de la ressource en eau sur un été. »

Avant même le début des travaux, le collectif Bassines Non Merci 63 appelle – aux côtés d’Extinction rebellion, de la Confédération paysanne du Puy-de-Dôme, des Faucheurs volontaires et des Soulèvements de la Terre – à « une randonnée pédagogique, festive et artistique contre ces deux gigabassines » le samedi 11 mai (toutes les informations ici). Leur mot d’ordre : « Il faut s’orienter vers un autre modèle agricole ».

Sophie Chapelle

Photo de une : Bâtiments de l’entreprise Limagrain dans le Puy-de-Dôme. Sylenius, CC BY-SA 3.0 Deed

 

Source : https://basta.media/le-geant-limagrain-derriere-le-plus-grand-projet-de-megabassines-de-france

vendredi 17 mai 2024

CONCERT DE SOUTIEN : BARRUT FORFAIT, VOICI LAURENT CAVALIÉ + DE LA CRAU !!!

 
Que cela ne nous empêche pas d'être solidaires !

Le foyer Laïque relaie cette info :

CONCERT DE SOUTIEN : 
BARRUT FORFAIT, 
VOICI LAURENT CAVALIÉ
 + DE LA CRAU !!!

Les Barrut décimés par des pépins de santé et forfaits de dernière minute, nous avons en toute urgence concocté un programme de substitution, et quel programme ! 
 
 
 
Jugez plutôt :

SOIRÉE-CONCERT DE SOUTIEN
AUX LUTTES CONTRE LA BÉTONISATION
FILLOLS- SAMEDI 18 MAI - Salle des Fêtes


17h00 - Palabres pour une assemblée populaire de l'eau
19h00 - Apéro avec cantada et chorale Les Revolution'Airs
             Cantine, buvette, expo...

21h00 - Concert : Laurent Cavalié + DE LA CRAU

Entrée : PAF 5 euros et + en soutien !

DE LA CRAU est un groupe marseillais aux influences Rock, Folk, Punk, mâtiné de poésie moderne. Un univers sobre, à la puissance contenue, des mélodies traversées de poésies aux mille visages. Sam Karpienia chante un provençal rugueux et hors-sol distordu par des riffs en boucle de guitares électriques. Thomas Lippens martèle la transe à coups de percussions et de bois ferraillés. Manu Reymondà la contrebasse fait grincer et mordre son archet dans des séquences rythmiques syncopées amenant à l’extase. Le trio nous emmène dans sa transe poétique post-rock… Musique ainsi nommée puisque qualificatif et genre, il faut apposer. Mais De La Crau est du genre inclassable : c’est une vague d’émotions entre rage et passion, un souffle musical rauque qui vous transporte là où vous n’auriez même pas imaginer vagabonder. A découvrir sur scène pour se laisser complètement électriser !
 
https://www.youtube.com/watch?v=Ldoi8qLFE58


LAURENT CAVALIÉ n’est pas de ceux qui attendent l’inspiration sous un clair de lune pour transformer leurs états d’âme en création. Loin de tout nombrilisme, il exprime sa vision du monde en musique et en mots pour la partager avec ceux de son entourage, de sa contrée et de son pays. Dans sa poésie, les questions sociales et politiques ne sont jamais loin.

Laurent Cavalié, chanteur, percussionniste et accordéoniste trouve sa voie en prenant conscience de la culture et de l’histoire locale. Il réapprend la langue occitane avec ses premières chansons. Il approfondit cette recherche en se lançant dans le collectage de chants traditionnels oubliés et réunit un trésor de 300 chansons, qu’il met en partage avec d’autres musiciens de l’Aude.
 
https://sirventes.com/artiste-3-laurent-cavali-.html
https://www.youtube.com/watch?v=WiiRiBlWEbM


Suite au rassemblement qui avait retardé l'ouverture de l'édition 2022 du Festival Pablo Casals, une douzaine de membres du Collectif des Brulls ont été poursuivis pour entrave à la circulation. Le 16 janvier dernier, le tribunal de Perpignan a relaxé l'ensemble des personnes poursuivies. C'est une victoire, certes, mais celle-ci a un coût : frais de justice et d'avocat portent la note à près de 5.000 euros. Une collecte a été lancée il y a quelques mois sur une plateforme, mais nous sommes loin du compte. Nous vous invitons donc à une soirée d'échanges et de musique pour soutenir notre lutte, nos luttes : pour que nous puissions faire face aux effets matériels de la répression, pour faire face aussi aux nécessités et conséquences des actions à venir. Car une chose est sûre, face à l'avancée du béton, le combat sera long, semé d'embûches et de joie... Mais n'en doutons pas, nous serons de plus en plus nombreuses et nombreux à nous mobiliser !

Retrouvons-nous le samedi 18 mai à Fillols pour nous donner du cœur à l'ouvrage et partager un beau moment de chants et de palabres !

Depuis plus de dix ans, le collectif des Brulls se bat contre la bétonisation et l'artificialisation des sols en Conflent et soutient les luttes pour la préservation des terres agricoles et des espaces naturels sur le territoire des Pyrénées Orientales.

  

Solidarité Palestine Perpignan 18 mai 14h

 Solidarité Palestine

Castillet - 18 mai 2024 - 14h

mercredi 15 mai 2024, par cnt66

 


 

Le « Collectif 66 

pour une paix juste 

entre Palestiniens et Israéliens » 

communique :

 

Samedi 18 mai, à partir de 14h au pied du Castillet de Perpignan, nos associations, organisations syndicales et politiques, organisent un « Forum solidaire avec Gaza », pour faire entendre plus que jamais les voix de la paix à Perpignan : celles qui exigent sans relâche depuis 6 mois un Cessez-le-feu immédiat et permanent, le respect du droit international, la libération des otages israéliens et des prisonniers palestiniens, une paix juste et durable entre Palestiniens et Israéliens.

Les civils ne doivent plus payer le prix de cette guerre coloniale qui dure depuis 76 ans et ne peut que mener à des catastrophes toujours plus terribles. Pour cela, l’appel de la Cour Internationale de Justice de l’ONU pour empêcher un génocide à Gaza doit être enfin entendu ! Nous sommes à plus de 6 mois de bombardements sur la bande de Gaza, des dizaines de milliers de morts dont la moitié d’enfants et de femmes, plus d’1 million de personnes déplacées, des foules de blessés graves, la destruction systématique des infrastructures vitales, la coupure de l’accès à l’aide humanitaire, la famine provoquée, et maintenant l’assaut de l’armée israélienne sur Rafah et son cortège de nouveaux drames. Les mobilisations pour le cessez-le-feu se développent dans le monde entier, notamment dans la jeunesse. Nous vous convions à vous joindre à cette exig ence citoyenne de justice et de paix.

Au programme : commémoration de l’expulsion des Palestiniens de leurs terres en mai 1948, stands d’information, artistes solidaires avec arts plastiques et musique, atelier pour enfants, espace convivial avec boissons et petite restauration. Les dons récoltés iront à l’aide humanitaire d’urgence à Gaza.

 

Soutenu par : Association France Palestine Solidarité, Association de Soutien à Tous les Immigrés, Confédération Générale du Travail, Confédération Nationale du Travail, Fédération Syndicale Unitaire, Gauche Démocratique et Sociale, Génération.s, L’Alternative en d'avant!, Les écologistes-pays catalan, le Mouvement de la paix, Ligue des Droits de l’Homme, La France Insoumise, Mouvement contre le Racisme et pour l’Amitié entre les Peuples, Nouveau Parti Anticapitaliste, Parti Communiste Français, Parti Ouvrier Indépendant, Union Juive Française pour la Paix, Urgence Palestine.

 

 

jeudi 16 mai 2024

En France, la bétonisation fait de la résistance

Illustration anonyme


Dans l’œil de Télérama

 

En France, 

la bétonisation fait de la résistance


Xavier de Jarcy

La fin de la France moche, on l’espérait, mais ce n’est pas pour demain. 
Comme l’a relevé Le Monde du 8 mai, un rapport publié fin avril par un organisme public nommé Cerema (Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement) constate que 20 000 hectares de forêts ou de terres agricoles, soit deux fois la surface de Paris intra-muros, ont disparu dans notre pays sous le bitume des parkings, le parpaing des lotissements et la tôle des hangars. 
Or, 2022 est la première année d’application de la loi Climat et résilience de 2021, qui vise à diminuer de moitié l’artificialisation des sols d’ici à 2031, pour arriver à zéro en 2050.

Il va donc falloir passer de 20 000 hectares bétonnés à 10 000 mille en quelques années.

L’enjeu est de taille, car dans certaines régions, comme la Bretagne, la périphérie des villes finit par s’étendre à l’infini, créant une banlieue continue et uniforme qui détruit la biodiversité autant que la sociabilité. Sans parler de la laideur, mais c’est là un jugement subjectif.

Il faut pourtant croire que certains aiment subjectivement ce paysage taillé pour la bagnole, symbole, comme l’a dit notre président, de la culture française.

Quel plaisir, en effet, de détruire un chemin creux, de bétonner une prairie, de grillager une zone d’activités.

Quoi de plus enviable que de prendre sa voiture garée contre sa maison cubique et de slalomer d’un rond-point à l’autre pour se rendre au supermarché acheter des salades gorgées de pesticides, en s’arrêtant au passage dans un fast-food pour savourer un succulent burger ?

Il reste encore des élus attachés à défendre et à étendre ce mode de vie.

Mais qu’ils l’assument donc, et ne viennent pas se plaindre de la sécheresse, des inondations, de l’eau en bouteille polluée et du prix de l’essence. 
Source : newsletter de Télérama du 10 mai 2024

mercredi 15 mai 2024

[info_brulls] Soirée-Concert de soutien - samedi 18 mai - Fillols

 



Le collectif des Brulls présente :

 

SOIRÉE-CONCERT DE

SOUTIEN
AUX LUTTES CONTRE

LA BÉTONISATION


FILLOLS

SAMEDI 18 MAI 

Salle des Fêtes


Suite au rassemblement qui avait retardé l'ouverture de l'édition 2022 du Festival Pablo Casals, une douzaine de membres du Collectif des Brulls ont été poursuivis pour entrave à la circulation. Le 16 janvier dernier, le tribunal de Perpignan a relaxé l'ensemble des personnes poursuivies.

C'est une victoire, certes, mais celle-ci a un coût : frais de justice et d'avocat portent la note à près de 5.000 euros. 

Une collecte a été lancée il y a quelques mois sur une plateforme, mais nous sommes loin du compte. Nous vous invitons donc à une soirée d'échanges et de musique pour soutenir notre lutte, nos luttes : pour que nous puissions faire face aux effets matériels de la répression, pour faire face aussi aux nécessités et conséquences des actions à venir. 

Car une chose est sûre, face à l'avancée du béton, le combat sera long, semé d'embûches et de joie... Mais n'en doutons pas, nous serons de plus en plus nombreuses et nombreux à nous mobiliser !

Retrouvons-nous le samedi 18 mai à Fillols pour nous donner du cœur à l'ouvrage et partager un beau moment de chants et de palabres !

Depuis plus de dix ans, le collectif des Brulls se bat contre la bétonisation et l'artificialisation des sols en Conflent et soutient les luttes pour la préservation des terres agricoles et des espaces naturels sur le territoire des Pyrénées Orientales.



AU PROGRAMME :

17h00 - Palabres pour une assemblée populaire de l'eau
19h00 - Apéro avec cantada et chorale Les Rêvolution'Airs
             Cantine, buvette, expo...
21h00 - Concert : BARRUT
Entrée : PAF 8 euros et + en soutien !


Le « BARRUT », qu'es aquò ?

Barrut, c'est une bête composée de trois femmes et quatre hommes qui font de la polyphonie et qui tapent très fort sur des tambours.


Une bête sonore, sauvage, qui pleure parfois, rugit souvent, une bête qui a grandi dans la garrigue montpelliéraine et dont l'insatiable appétit l'a conduite à s'abreuver à la table de nombreux étrangers, qui ne le sont plus dès lors qu'ils acceptent de nourrir l'estomac prodigieux.


Si la bête mange et boit tellement, c'est pour pouvoir irradier ensuite du feu qui la fait chanter, car telle est sa raison d'être. La bête du Barrut est un animal poétique. Elle met en mouvement des stances dans sa langue maternelle, l'occitan.

 
 
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Le Collectif des Brulls agit pour la défense des terres agricoles et contre l'artificialisation des sols et des espaces naturels.

Le Collectif des Brulls participe au large mouvement des Soulèvements de la Terre.

Pour nous écrire : laterrecestnosoignons@riseup.net

mardi 14 mai 2024

France Inter coupe le micro à l’écologie et aux luttes


France Inter coupe le micro 

à l’écologie et aux luttes


 Lien vers la pétition pour soutenir Guillaume Meurice
https://tinyurl.com/mwmcp4ff

 

7 mai 2024

Plusieurs émissions écolos de France Inter, dont « La Terre au carré », disparaîtront à la prochaine rentrée ou seront transformées. Moins de luttes, plus de science : la radio prend un virage qui ne plaît pas à tous.

Il est 14 heures, le lundi 6 mai. À l’antenne de France Inter grésille la voix teintée de tristesse de Jean. Puis celle de Martine, « scandalisée », ou encore Suzanne, « abasourdie ». « Au moment même où les médias ont le devoir de mieux et plus parler d’écologie, on supprime une émission phare sur le sujet », déplore-t-elle. Un brin agacé, Dominique ponctue : « Force à vous, et longue vie ! »

D’ordinaire joyeux et mobilisateur, le répondeur de « La Terre au carré » a changé de ton lundi. Avant que ne débute un nouvel épisode de l’émission écolo de France Inter — à laquelle participe chaque mois Reporterre —, son présentateur Mathieu Vidard a déclaré : « À l’heure où je vous parle, il a été acté que “La Terre au carré” sous sa forme actuelle disparaîtrait à la rentrée. Ça n’est pas un choix de notre part. »

Trois jours plus tôt, le journal Le Monde dévoilait l’atmosphère tempétueuse régnant dans les couloirs de la Maison ronde de Radio France. Convoqués tour à tour, plusieurs journalistes de France Inter ont appris la diminution ou la suppression de leurs émissions ou chroniques, à compter de la saison prochaine. Et l’équipe de Mathieu Vidard n’échappe pas au grand ménage orchestré par la directrice de la station, Adèle Van Reeth.

Si la tranche horaire de l’émission est maintenue, quelques voix disparaîtront des ondes. À commencer par Anaëlle Verzaux et sa chronique hebdomadaire « Le Jour où », et Giv Anquetil, dont les grands formats mensuels emmenaient les auditeurs aux quatre coins du monde. Plus surprenant encore, Camille Crosnier, en binôme avec Mathieu Vidard, voit aussi son micro coupé. Jusqu’ici la journaliste intervenait à chaque épisode, en plaçant dirigeants, patrons et élus face à leurs contradictions sur l’écologie. Contactés par Reporterre, les journalistes de l’émission n’ont pas souhaité s’exprimer.

France Inter au tempo de Bolloré

Le nom et le contenu éditorial de ce rendez-vous quotidien risquent par ailleurs d’être bouleversés. Toujours dans Le Monde, un porte-parole de France Inter assure que l’évolution du programme « vers davantage de récits écologiques et scientifiques » est un souhait de Mathieu Vidard. Faux, a rétorqué en direct l’intéressé, le 6 mai. S’il ne cache pas le désir de l’équipe « de faire évoluer l’émission en imaginant une nouvelle formule, [...] avec une structure et une narration différente », celle-ci devait comprendre « tous les ingrédients ayant construit l’identité de “La Terre au carré” ».

Malheureusement, cette proposition n’a pas été retenue. Du moins, pour le moment : « Nous n’avons pas parlé de vos luttes sur le terrain depuis cinq ans pour nous arrêter au premier obstacle venu », précise-t-il. Le producteur affirme son envie, plus forte que jamais, « de défendre l’émission pour qu’elle conserve sa colonne vertébrale, sa force, sa vitalité et surtout son engagement au cœur de la crise écologique que nous traversons ».

L’autre justification, évoquée par la direction, est la nécessité de rendre l’information « moins anxiogène ». Un argument douteux dès lors que l’on écoute les auditrices et auditeurs témoigner du bonheur et de l’envie d’agir que leur confère l’émission : « C’est cela qu’il nous faut aujourd’hui, assure à Reporterre l’activiste Mathilde Caillard, connue pour ses techno-manifs. Nous n’avons pas besoin que le service public lisse les informations dramatiques pour préserver notre confort. Nous ne cherchons pas à être confortables vis-à-vis de la crise climatique. Ce que l’on veut, c’est agir. »

Aux yeux de la militante, France Inter « se met au diapason d’une nouvelle ère, dictée par un milliardaire à l’agenda politique clair » : « Le service public ne doit pas tomber dans le tempo de l’extrême droite et de Bolloré », alerte-t-elle. Car bien au-delà de « La Terre au carré », d’autres figures voient approcher le clap de fin à grands pas. Charlotte Perry, et ses portraits de héros du quotidien peint avec sensibilité dans « Des vies françaises », ou encore Antoine Chao et son instantané sonore de 18 minutes à la découverte des luttes environnementales et sociales, baptisé « C’est bientôt demain », s’apprêtent à fermer leur micro.

« Ces émissions ont bercé mon enfance, poursuit Mathilde Caillard. Je les écoutais avec ma mère, sur le chemin de l’école ou à la maison, dans son transistor. Pour beaucoup, ces voix sont comme des amies. Elles tirent parfois de la solitude, donnent de la force et offrent des bouffées d’espoir. D’autant que la direction s’attaque à des émissions engagées, parlant de lutte et de résistance face à des projets climaticides. » Charlotte Perry, Antoine Chao, Anaëlle Verzaux et Giv Anquetil ont d’ailleurs tous les quatre appris leurs gammes aux côtés de Daniel Mermet, dans l’emblématique émission — penchant à gauche — « Là-bas si j’y suis » - qui avait elle aussi, en 2014 , été supprimée de France Inter.

Mobilisation générale

L’écologie et les luttes ne sont pas les seules victimes de cette séquence : la satire politique, incarnée par Guillaume Meurice, encaisse aussi les uppercuts. Le 2 mai, sur son compte X, l’humoriste révélait être convoqué à « un entretien préalable en vue d’une éventuelle sanction disciplinaire ». D’ici là, interdiction pour lui de s’exprimer sur les ondes. La direction de Radio France reproche au chroniqueur d’avoir à nouveau qualifié Benyamin Netanyahou, le Premier ministre israélien, de « sorte de nazi sans prépuce », le 28 avril dans l’émission « Le Grand dimanche soir ».

 Lien direct :
https://www.youtube.com/watch?v=OrUXKtMoK2Y

Une décision déroutante, alors que les plaintes déposées contre Guillaume Meurice pour cette phrase avaient été classées sans suite par la justice. Dans l’émission du dimanche 5 mai, l’humoriste Djamil Le Shlag a ainsi démissionné en direct : « Il y a plus de liberté sur CNews que sur France Inter, a-t-il ironisé. Je vais envoyer mon CV à Pascal Praud. » Les sociétés des producteurs (SDPI) et des journalistes (SDJ) de la station entendent aussi sonner la rébellion : « Nous refusons ce qui nous apparaît comme une atteinte grave au pluralisme de l’antenne », ont-ils déclaré dans un communiqué commun inédit, diffusé le 3 mai en interne.

Les prémices d’une mobilisation inédite à la Maison ronde ? Une chose est sûre : les prochains jours seront déterminants. Le 6 mai, en fin de journée, la SDPI rencontrait la direction pour dénoncer ces dérives. Si le contenu des échanges n’a pas encore été dévoilé, un producteur de France Inter déplore auprès de Reporterre que les échanges ne se soient pas bien déroulés. Dans la soirée, un préavis de grève intersyndical a été déposé pour le dimanche 12 mai par les syndicats de Radio France, « pour la défense de la liberté d’expression ».

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Nous avons eu tort

Quand nous avons créé Reporterre en 2013, nous pensions que la question écologique manquait de couverture médiatique.

Nous nous disions qu’il suffirait que la population et les décideurs politiques soient informés, que les journaux et télévisions s’emparent du sujet, pour que les choses bougent.

Nous savons aujourd’hui que nous avions tort.

En France et dans le monde, l’écrasante majorité des médias est désormais aux mains des ultra-riches.

Les rapports du GIEC sont commentés entre deux publicités pour des SUV.

Des climatosceptiques sont au pouvoir dans de nombreuses démocraties.

Nous savons aujourd’hui que l’urgence écologique n’a pas besoin de presse  : elle a besoin d’une presse indépendante de toute pression économique.

Chez Reporterre, nous faisons le choix depuis 11 ans d’un journalisme en accès libre et sans publicité.

Notre structure à but non lucratif, sans actionnaire ni propriétaire milliardaire, nous permet d’enquêter librement. Personne ne modifie ce que nous publions.

Mais ce travail a un coût.

Celui des salaires de nos 26 journalistes et salariés.

Celui des reportages menés sur le terrain, au plus près des luttes.

Celui des centaines de milliers de lettres d’info envoyées chaque semaine pour vous informer.

En 2023, 39 257 donateurs ont soutenu Reporterre : ces dons représentent 98% de nos revenus.

Du plus modeste au plus important, ils sont les garants d’un travail journalistique sérieux et indépendant, capable de faire avancer la cause écologique.

Quels que soient vos moyens, nous travaillons pour vous.

Ensemble, nous pouvons agir.

Si vous le pouvez, choisissez un soutien mensuel, à partir de seulement 1 €. Cela prend moins de deux minutes, et vous aurez chaque mois un impact fort en faveur d’un journalisme indépendant dédié à l’écologie. Merci.

Soutenir Reporterre

Source : https://tinyurl.com/9x9vadvp

lundi 13 mai 2024

France Inter, te laisse pas faire

11 mai 2024

 Là-bas si j'y suis

 

France Inter, te laisse pas faire

Si tu jettes une grenouille dans l’eau bouillante, elle s’échappe d’un seul coup, mais si tu la mets d’abord dans l’eau froide et que tu fais monter la température progressivement, elle va s’engourdir pour finir parfaitement cuite.

C’est ce deuxième procédé qui s’est imposé peu à peu.

On t’enlève un peu de ça, on te ferme un peu de ci, on assure ta sécurité, on réduit tes déficits, on renforce tes frontières, l’eau tiédit, tu te rends compte de rien. On te fait pourtant des grands débats : PSG ou OM ? Sardou ou Nakamura ? L’eau est un peu plus chaude, tu somnoles doucement. Tu as le choix : Bolloré ou Bernard Arnault ? Marine ou Zemmour ? Des sujets qui fâchent mais pas trop, faut pas de vague dans la casserole.

L’eau chauffe comme il faut, on va pouvoir passer à table.

Sauf que, ah, là, non ! Tout d’un coup, il y a quelque chose qui coince. Un évènement considérable : sur Radio France, un humoriste a fait de l’humour ! Il incite tes enfants à se déguiser en Netanyahou, un nazi sans prépuce. Une blague pourrie ou un trait de génie ? Peut-on rire de tout ? Avec n’importe qui ? Mais cette fois, non, ce débat ne marche pas. Il y en a un autre, un vrai débat qui secoue toutes les mémoires, qui déchire en profondeur, entre les partisans du boucher de Gaza et celles et ceux qui ont du mal avec les cadavres d’enfants entassés dans des sacs blancs.

Et voilà le bouffon traîné en justice au pays de Voltaire, des caricatures de Charlie et de la liberté d’expression. Mais la justice n’envoie pas le clown aux galères, au contraire le procureur dit tu peux continuer tes blagues pourries. Et ça bien sûr, l’humoriste le fait savoir. Et ça bien sûr, ça ne plaît pas vraiment à la direction de Radio France qui, malgré le jugement, suspend le petit rigolo et le convoque la semaine prochaine pour le foutre (peut-être) à la porte.

Mais ça, ça passe de travers dans la gorge des couloirs de France Inter. Le petit personnel se dit qu’après tout les bons résultats d’audience c’est un peu à cause de leur talent et qu’ils ont peut-être leur mot à dire. Peut-être.

D’autant que c’est pas seulement le rigolo qui a la tête sur le billot, c’est aussi quelques journalistes en même temps qui se font congédier d’un claquement de doigt. C’est une tradition quand vient le mois de mai à France Inter, on coupe des têtes. Une méthode connue dans le management : la précarité mène à la docilité. Sauf que là, c’est pas vraiment au hasard. Les journalistes visés sont des reporters qui vont sur le terrain, attentifs aux gens, au mouvement social comme aux effets du réchauffement du climat, c’est à dire des islamo-wokistes antisémites.

Certain ont même fait remarquer qu’ils viennent toutes et tous de « l’école Là-bas si j’y suis ». Un hasard évidement.

Sauf que ces rejets ne passent pas, le petit personnel de France Inter n’avale pas ce virage éditorial et ce mépris. Pas cette fois-ci. Du coup, il se mobilisent et réussissent même à faire front commun, une première ! Dans leur intérêt mais aussi dans l’intérêt des quelques millions d’auditeurs.

Vous imaginez, la grenouille ne veut pas se laisser cuire, le mouton ne veut plus se laisser tondre, le pigeon ne veut plus se faire pigeonner… où va-t-on ?

D’ici là, et pour se donner toutes les chances d’y arriver, vous avez le meilleur de la semaine de Là-bas. Ne loupez pas Djamil le Schlag qui découvre qu’il y a moins de censure chez Bolloré que chez France Inter, ne manquez pas l’analyse anar-marxiste de Besancenot sur Brassens, et surtout ne loupez pas ce qu’il faut rappeler sans arrêt et que Dillah rappelle cette semaine, l’imposture sociale du RN, ce qui n’est pas sans rapport avec l’anniversaire du CNR, le Conseil national de la Résistance, une bande de gaucho-wokistes qui avaient triomphé des ancêtres des Zemmour, des RN et des fachos de l’époque et qui avaient trouvé le plus beau titre du monde pour tous nos demains, Les Jours heureux !

Daniel Mermet

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