Tempête climatique et judiciaire
sur le golf de Villeneuve-de-la-Raho
Après la tribune de 92 scientifiques de l’université de Perpignan (Pyrénées-Orientales) et la mobilisation d’une centaine de chercheurs pour dénoncer le projet, les opposants vont déposer trois plaintes auprès du procureur de la République. La guerre du golf ne fait que commencer.
Avant d’être un golf dix-huit trous, peut-être un jour, et une zone urbanisée de 600 logements qui domineront le lac de Villeneuve-de-la-Raho (Pyrénées-Orientales), en espérant qu’il ne soit pas à sec, c’est un champ de bataille climatique de 180 ha. Il a été défriché depuis janvier et clôturé par de grandes banderoles orange fluo dont le plastique se désagrège dans la Tramontane. Le projet est ancien et chaotique. Il date de 2003 et a fait l’objet de la signature d’une déclaration d’utilité publique par le préfet Philippe Chopin en 2019 à l’heure où le manque d’eau était encore une blague d’apéro.
En février 2024, on ne rit plus. Le département est en voie de désertification faute de pluies. Il pourrait manquer d’eau avant l’été pour la vie quotidienne de beaucoup : agriculteurs, opérateurs touristiques, particuliers. Les scientifiques de l’université de Perpignan s’insurgent contre ce projet anachronique dont les greens deviendront poussière.
« Le golf se fera et il deviendra même un site pilote pour la problématique de l’eau dans le département et bien au-delà. L’eau de notre station d’épuration permettra l’irrigation à 100 % du golf après retraitement. Jusque-là on rejetait un million de litres par jour dans un étang salé sans la réutiliser », argumente la mairesse LR Jacqueline Irlès.
« C’est un golf mort-né ! »
« L’eau de la station d’épuration ne suffira pas. À telle enseigne que Madame Irlès a passé un accord avec le maire communiste d’Elne, Nicolas Garcia, pour pomper l’eau du lac de la Raho qui appartient au conseil départemental dont il est le premier vice-président », rétorque Joan Nou, président d’Agissons 66, mouvement citoyen opposé à ce programme golfique et immobilier, porté par les opérateurs Belin promotion de Toulouse (qui n’a pas répondu à notre demande d’interview) et GGL de Montpellier qui gèrent le dossier, et notamment les expropriations, depuis 2008. « Sans oublier, ajoute Joan Nou, qu’avec un vent à 15 km/h, on ne peut plus arroser. Et ici la Tramontane, c’est en moyenne 100 jours par an. C’est un golf mort-né ! »
Le 21 décembre dernier, les opérateurs ont obtenu gain de cause sur les expropriations devant le tribunal judiciaire de Perpignan. Mais les opposants instruisent une procédure judiciaire portée prochainement auprès du procureur de la République par Me Philippe Capsié. Dans l’état actuel du dossier, il s’agit de plaintes sur trois motifs : détournement de fonds publics, non-respect des règles des marchés publics et délit de favoritisme. La mairie aurait réalisé et payé des travaux qui incombaient aux opérateurs et une élue municipale aurait bénéficié d’un tarif préférentiel pour céder son terrain, bien supérieur à celui de ses voisins expropriés.
Me Capsié agit pour plusieurs familles de propriétaires fonciers. Mais il n’est pas le seul à ferrailler devant les tribunaux. Me Jean Codognès, président du mouvement Pays Catalan écologie, a déjà saisi le tribunal administratif de Montpellier d’une procédure en annulation de la déclaration d’utilité publique 2019. Et il destine ce brûlant dossier à Christophe Béchu, le ministre de la Transition écologique. Dernièrement, le secrétaire général de la préfecture des Pyrénées-Orientales expliquait que tout était légal et que le projet pouvait continuer son chemin.
Mouvement #Agissons
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