L’urgence de repartir en mer !
Reparti en mer fin juin, l’Ocean Viking a secouru 143 personnes entre le 27 juin et le 7 juillet. Lors du dernier de ces trois sauvetages, des coups de feu ont été tirés par les garde-côtes libyens à proximité de notre canot de sauvetage. La mission s’est achevée par un débarquement des rescapé.e.s le 11 juillet en Italie, suivi d’une inspection du navire qui a conduit à sa détention. Récapitulatif des événements heure par heure.
27 juin : 86 personnes secourues, dont 68 mineurs
12h42 – L’ONG Alarm Phone donne l’alerte : une embarcation surchargée se trouve en détresse à 40 milles nautiques de l’Ocean Viking. Il semble que l’un des flotteurs soit dégonflé.
15h59 – L’embarcation pneumatique bleue est difficilement repérable sur la mer. Mais après trois heures de recherche, l’équipe la distingue et lance ses canots de sauvetage à sa rencontre. 86 personnes sont évacuées vers l’Ocean Viking et placées en sécurité. Parmi elles, on dénombre 68 mineurs non accompagnés.
Depuis la passerelle, on observe un patrouilleur libyen qui navigue à proximité, mais il reste à distance (environ quatre milles nautiques) de la scène, évitant de créer un mouvement de panique pendant le sauvetage. Peu après, les autorités maritimes italiennes désignent le port de Bari comme lieu sûr pour débarquer les personnes rescapées.
« Lorsque j’ai vu l’embarcation, j’ai eu peur : nous étions trop nombreux et nous ne pouvions pas appeler ce truc en plastique un bateau. Mais je n’avais pas d’autre choix que d’embarquer. (…) Après le départ, c’était incroyablement calme, tout le monde était terrifié. Pendant la journée, il faisait très chaud, ils ne nous ont pas donné d’eau ni de nourriture, j’ai commencé à avoir des vertiges. Merci d’être venus à nous, sinon nous ne serions plus là. »
Kebba, 17 ans, originaire de Gambie, nous a raconté sa traversée.
30 juin – L’Ocean Viking débarque 86 personnes à Bari, après trois jours de navigation. Après une brève escale, le navire quitte le port en soirée et retourne en haute mer.
7 juillet : trois alertes, deux sauvetages, 57 personnes secourues et des tirs des garde-côtes libyens
7 juillet, 9h36 – L’Ocean Viking est informé par l’avion Sea Bird de la présence d’une barque en fibre de verre en détresse, avec une dizaine de personnes à bord, dans la Région de recherche et de sauvetage libyenne. Après en avoir informé les autorités compétentes, il altère sa course dans sa direction.
9h50 – L’Ocean Viking est en copie d’un courriel d’Alarm Phone, alertant sur la présence d’une autre embarcation en détresse avec environ 250 personnes à bord, à la dérive dans la zone de recherche et de sauvetage maltaise.
Peu de temps après, le navire reçoit une troisième alerte concernant plusieurs dizaines de personnes en détresse sur une deuxième barque en fibre de verre.
12h – La dernière embarcation signalée est repérée à la jumelle : 46 personnes sans gilets de sauvetage sont entassées dans une petite barque. Parmi elles, quatre femmes, une fillette de quatre ans et onze adolescents non accompagnés. À 12h52, la dernière personne est hissée à bord de l’Ocean Viking, qui poursuit sa course vers l’autre embarcation en détresse.
14h05 – Le port de Civitavecchia est assigné par les autorités maritimes italiennes. L’Ocean Viking informe le Centre de coordination des secours de Rome qu’il répond à un autre Mayday ; le Centre de Rome donne son feu vert pour que nous allions évaluer la situation.
15h35 – La première embarcation signalée dans la journée (une barque à la dérive) est repérée par l’Ocean Viking, qui met à l’eau deux canots de sauvetage, puis porte secours à onze personnes, dont une femme et cinq mineurs.
15h37 – Un patrouilleur des garde-côtes libyens non identifié poursuit nos canots de sauvetage, procède à des manœuvres dangereuses et tire des coups de feu en l’air à moins de 100 mètres des canots qui reviennent vers le navire avec les rescapé.e.s.
« Quand nous nous dirigions vers le grand bateau, nous allions vite. À trois reprises, j’ai entendu des coups de feu. J’ai eu peur. J’ai été très surpris. Pourquoi [tiraient-ils] ? C’était incompréhensible. L’équipe de sauvetage nous a dit de nous baisser. »
Assan, qui était parmi les onze rescapé.e.s, raconte.
15h47 – Équipe et personnes rescapées sont en sécurité sur l’Ocean Viking : personne n’a été touché par les tirs. Le navire se dirige, avec 57 personnes, secourues sur les deux opérations, vers le port de Civitavecchia.
En fin d’après-midi, les autorités maritimes italiennes demandent à l’Ocean Viking de se diriger vers la position de l’embarcation en détresse signalée avec environ 250 personnes dans la Région de recherche et de sauvetage maltaise. Plus tard dans la soirée, ces mêmes autorités italiennes instruisent l’Ocean Viking de renoncer à la recherche de ce bateau en détresse, la coordination de ce sauvetage ayant été prise en charge par les autorités maritimes maltaises. Le soutien de l’Ocean Viking n’est plus requis, le navire est instruit de se rendre directement à Civitavecchia.
L’ONG Sea-Watch publie ensuite l’information selon laquelle l’embarcation a été interceptée par un navire d’une milice libyenne et les naufragé.e.s retourné.e.s de force en Libye, contre les principes du droit maritime, ce pays ne pouvant être considéré comme un lieu sûr.
11 juillet : après le débarquement, la détention de l’Ocean Viking
11 juillet, 6h30 – Le débarquement des 57 personnes secourues le 7 juillet s’achève à 8h10.
7e inspection PSC en quatre ans. Le jour même, un contrôle de l’État du port (PSC) donne lieu à une inspection longue de sept heures de notre navire, menée par les garde-côtes italiens dans le port de Civitavecchia.
Argumentant des « déficiences » administratives et techniques, les autorités italiennes ordonnent la détention du navire pour une durée indéterminée.
SOS MEDITERRANEE fait le maximum, en lien avec l’armateur et les différentes autorités maritimes, pour que soit levée cette détention rapidement et que nous retournions sauver des vies en mer.
Dans un communiqué de presse conjoint, SOS MEDITERRANEE et la FICR dénoncent à la fois le blocage du navire, qui retarde notre retour en mer et compromet notre capacité à sauver des vies en plein été, alors même que les taux de mortalité depuis le début de l’année sont alarmants, mais également les risques répétés qui pèsent sur la sécurité de nos équipes et de notre navire, rappelant que les travailleurs.euses humanitaires et les personnes naufragées ne devraient jamais être pris pour cible.
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