A l'origine de "l'affaire de la yourte", la plainte d'une voisine...
Le 5/10/2012 à 06h00 par Barbara Gorrand | Mis à jour à 08h53
'L'affaire de la yourte' est loin d'être finie.
Jean-Luc Préaux ne cache pas son dépit. Et dire qu'il y a quinze jours à peine, il pensait pouvoir enfin souffler…
"Voilà, ça recommence. Le parquet fait appel. Cela avait été classé sans suite, puis j'ai été relaxé et maintenant on repart pour un tour. Il faudra attendre encore un an pour passer en appel, cela va engendrer des coûts… Je pensais honnêtement que les tribunaux avaient autre chose à faire !".
Pour cet agriculteur, installé dans la zone naturelle de Banyuls-sur-Mer, l'enjeu est terriblement simple : conserver un toit au-dessus de sa tête. Quand bien même ce toit serait celui, précaire, d'une yourte mongole. Mais pour les associations qui le soutiennent, cette affaire locale est bien plus cruciale qu'il n'y paraît…
"Une jurisprudence donnerait des droits aux pauvres"
"Il est capital que nous gagnions cette affaire c'est pourquoi, fait plutôt rare, nous sommes plusieurs structures différentes à travailler ensemble, avec notamment la Confédération paysanne", confirme Clément David, représentant l'association Halem (habitants de logements éphémères ou mobiles) dans le sud-ouest de la France.
"Cette affaire est pleine de paradoxes : on ne peut pas, d'un côté, organiser des Grenelle de l'environnement, favoriser les circuits courts et de l'autre empêcher un petit agriculteur de travailler à son activité de subsistance.
Comme on ne peut pas développer un tourisme 'éthique', avec une 'boboïsation' du territoire permettant de dormir dans une cabane dans les arbres ou sous une yourte… et empêcher un individu de vivre dans la sienne, sur son terrain. Derrière cela, évidemment, se cache une énorme pression foncière. Ce n'est ni plus ni moins qu'une utilisation de l'écologie à des fins commerciales. C'est cette gentrification du milieu rural que nous dénonçons".
Mais surtout, pour Halem, le 'cas Préaux' est déterminant en matière de politique générale. Particulièrement dans un contexte marqué par le démantèlement de nombreux camps de populations venues d'Europe centrale.
"Les différents ministres de l'Intérieur, qu'ils soient de droite ou de gauche, entretiennent cette posture : il faut trouver un fautif, un 'ennemi de l'intérieur', aux problèmes du logement et de la précarité. Cela légitimise la politique défavorable aux populations pauvres. D'où cet acharnement démesuré dans le cas de Jean-Luc Préaux, car ils ont peur que nous obtenions une jurisprudence qui donnerait des droits aux pauvres… Et ils savent que nous les attendons au tournant".
L'an dernier, la mobilisation des associations a permis de retirer le projet de loi Léonard, qui limitait à trois mois le séjour dans un camping. "Or entre 70 000 et 100 000 personnes dans le pays vivent à l'année dans des campings, par nécessité. Ce projet a été pour l'heure retiré, mais pas enterré. Et nous savons que sous la pression foncière, quel que soit le gouvernement, cette loi ou une autre sera présentée…".
Jean-Luc Préaux, le petit agriculteur de Banyuls, ne sera donc pas le seul à retenir son souffle jusqu'à la décision de la cour d'Appel.
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