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Des manifestants antinucléaires défilent dans les rues de Tokyo (Japon) contre le redémarrage de deux réacteurs nucléaires, le 29 juin 2012.
(KOJI SASAHARA / AP / SIPA )
Dimanche 29 juillet, les manifestants comptent déployer une chaîne humaine autour du Parlement, symbole de leur détermination à peser sur la politique énergétique - à reconstruire - de l'archipel. FTVi revient sur une revendication qui fédère.
• Une mobilisation sans précédent
Seize mois après la catastrophe nucléaire la plus grave de l'histoire du Japon, le traumatisme s'affiche encore sur les panneaux des manifestants qui envahissent régulièrement les rues : "No Nukes" (non au nucléaire),"No more Fukushima" (plus jamais de Fukushima). En avril 2011, ils étaient 300 à Tokyo, 300 aussi à Nagoya. Le 16 juillet 2012 : 170 000, rien que dans la capitale nippone. Entre-temps, le Premier ministre, Yoshihiko Noda, a donné son feu vert à la remise en marche en juillet de deux réacteurs de la centrale de Ohi, sur l'île d'Honshu. En mai, pourtant, protocoles de sécurité, stress test et autres inspections de maintenance avaient mis au point mort toutes les installations nucléaires du pays, lesquelles fournissaient jadis 30% des besoins énergétiques de l'archipel.
A l'annonce de leur progressive remise en marche, en juin, afin de faire face au pic de consommation estival selon l'opérateur Tepco, 70% des Japonais ne croyaient pas les assurances du gouvernement en matière de sécurité, et 55 % étaient opposés à cette mesure, selon Le Figaro.
Pour Kaoru, père de famille originaire de Fukushima, interrogé par Arte, "si on continue à faire confiance à cet état irresponsable, ils vont nous tuer. Je suis en colère contre Tepco et les autorités qui depuis le début nous mentent, poursuit-il. Mais le bon côté, c'est qu'aujourd'hui une solidarité très forte est née entre nous." "La mobilisation augmente mais il faudrait aller plus loin, confirme Mayumi, étudiant de l'université du Tohoku à Sendai (nord-est du Japon), cité par France 24. Pourquoi pas un mouvement social avec des grèves ?"
• Un enjeu politique pour les dirigeants nippons
"La vie humaine doit être notre priorité absolue, et nos régions doivent être réaménagées pour mieux résister aux catastrophes naturelles, a prôné fin juin un éditorialiste du journal de centre gauche Tokyo Shimbun, relayé par Courrier International. Pour ce faire, chacun de nous était prêt à changer de mode de vie", assure-t-il. Une pétition assurant "Nous pouvons survivre cet été en économisant notre énergie et en transférant l’électricité entre les régions" a ainsi recueilli 7,5 millions de signatures. Parmi eux, des membre de la formation politique de Noda, le Parti démocrate (PDJ - centre gauche).
L'ancien Premier ministre Yukio Hatoyama sert la main d'un anti-nucléaire pendant une manifestation organisée devant la résidence du Premier ministre, occupée par Koshihiko Noda, le 20 juillet 2012.
(JIJI PRESS / AFP)
• Des révélations qui exaspèrent la population
Des révélations récentes ont accentué la défiance d'une partie des Japonais à l'égard de cette énergie. D'abord, la publication du rapport de la commission d’enquête parlementaire japonaise sur l’accident de Fukushima (Naiic), début juillet, a mis en lumière la responsabilité de l'Etat et de l'opérateur Tepco dans la catastrophe. Bien que déclenchée par les éléments, cette dernière "fut un désastre profondément causé par l’homme – qui aurait pu et aurait dû être prévu et prévenu. Et ses effets auraient pu être atténués par une réponse humaine plus efficace", assène le pavé assassin, résumé par le site Médiapart.
Un second rapport, publié lundi par une commission saisie par le gouvernement, pointe un "aveuglement" de l'opérateur Tepco et des régulateurs face à la perspective d'une catastrophe.
En trois mois, le Japon a par ailleurs découvert que trois de ses centrales nucléaires étaient construites sur une faille sismique. Mercredi 18 juillet, le gouvernement japonais a annoncé dans l'urgence sa décision de revoir de fond en comble toutes les données sismologiques utilisées au moment de choisir l'emplacement d'un site nucléaire, relate RFI. Objectif de la mission : vérifier si ces failles sont actives ou non. "Le gouvernement a procédé à des tests de résistance de ces centrales aux séismes et aux tsunamis après l’accident de Fukushima, explique la radio. Mais il a évité de vérifier si ces sites nucléaires sont situés ou non sur des failles sismiques." Pour Mitsuhisa Watanabe, professeur de l’université de Tokyo, "cet oubli est volontaire, car il est interdit au Japon de construire des centrales sur des failles actives".
• Fukushima toujours mis en cause
Enfin, l'Asahi Shimbun a révélé cette semaine un nouveau scandale. Cette fois, il ne vise pas l'Etat mais l'entreprise Build-Up, le sous-traitant de Tepco qui travaille sur le site accidenté de Fukushima. D'après l'article, traduit par Courrier International, un responsable de la société a demandé en décembre à une dizaine d'ouvriers de recouvrir de plomb les dosimètres qu'ils portaient pour évaluer le cumul de radiations auxquelles ils étaient exposés lorsqu'ils intervenaient dans les zones les plus radioactives de la centrale nucléaire. L'objectif ? Sous-déclarer leur exposition afin que la société puisse continuer à travailler sur le site, indique le journal, sous peine d'être renvoyé.
La ministre du Travail japonaise, Yoko Komiyama, a annoncé mardi l'ouverture d'une enquête. "Si c'était vrai, c'est l'ensemble du système de contrôle de l'exposition des travailleurs aux radiations qui serait remis en cause", a-t-elle souligné, donnant du grain à moudre aux antinucléaires.
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