Carrefour :
jackpot pour les PDG,
la porte pour les salariés
—
D’un côté, le groupe supprime plusieurs milliers d’emplois et se sépare de 243 magasins (ex-Dia). De l’autre, l’ex-PDG va toucher près de 17 millions d’euros, en plus d’une retraite annuelle de 517 000 euros.
Une assemblée générale sous tension s’ouvre ce vendredi
matin pour les dirigeants de Carrefour. En tête de gondole, les
rémunérations des patrons du groupe de grande distribution alors que
plusieurs milliers d’emplois sont appelés à être supprimés, en France,
en Belgique et en Argentine. Il y a plusieurs semaines déjà, la société
de gestion Phitrust, qui représente des compagnies d’assurance
actionnaires de Carrefour, a envoyé à la direction du groupe des
questions qui fâchent en prévision de l’AG. Elle interroge sur le
montant mais aussi le mode de calcul des émoluments de Georges Plassat,
le PDG sortant, qui a quitté ses fonctions à la mi-2017. Et pour cause :
dans son édition du 7 juin, Libération a reconstitué le
millefeuille de ses revenus pour arriver à un total de 13,1 millions
d’euros. S’y ajoute, d’abord, un paquet de 900 000 euros au titre de sa
rémunération variable pour les six mois de 2017. Une enveloppe à
laquelle il faut ajouter 140 000 actions de Carrefour pour une valeur
totale de 3 millions d’euros. Mais là, Plassat devra être patient et
attendre l’an prochain pour en prendre possession. Denis Branche, le
dirigeant de Phitrust et auteur d’une question écrite à ce sujet, y voit
«un montant important, compte tenu de la situation dans laquelle se situe le groupe».
De fait, Carrefour a longtemps misé en France sur le modèle des
hypermarchés et loupé le virage du commerce électronique et du drive, ces entrepôts où les clients viennent récupérer une commande passée par Internet.
Le représentant des actionnaires institutionnels est d’autant plus dubitatif que la rémunération de Georges Plassat bouscule les recommandations des instances patronales que sont le Medef et l’Afep. Ces deux institutions pas franchement subversives préconisent de ne pas verser de prime de départ à la retraite aux dirigeants, compte tenu du montant de leur salaire. Or, Georges Plassat perçoit dans ses 13,1 millions, pour 2017, 4 millions de clause de non-concurrence. Sachant que l’intéressé va sur ses 69 ans, on imagine aisément qu’il se dirige plutôt vers une paisible fin d’activité que la présidence d’Auchan ou d’Intermarché. Cette clause de non-concurrence ressemble donc, à s’y méprendre, à une prime déguisée de départ à la retraite. D’autant plus troublante que pour ses vieux jours, Georges Plassat percevra de Carrefour une rente à vie de 517 810 euros par an.
Pendant ce temps, 2 400 emplois ont été supprimés au siège via un plan de départ volontaire. Dans le secteur des hypermarchés, un plan social est lancé et concerne 485 salariés. Enfin, la fermeture de 240 magasins anciennement Dia qui appartenaient à Carrefour laissera sur le carreau 1 800 personnes dont seulement 89 ont été effectivement reclassées (lire page 4). Ces réductions d’effectifs ne s’arrêtent d’ailleurs pas aux frontières françaises. Les fermetures de magasins en Belgique et en Argentine vont entraîner 2 233 licenciements. En France, il a fallu une grève le 31 mars pour que la prime annuelle des salariés passe de 57 à 557 euros.
Cette différence de traitement entre la haute hiérarchie du groupe et le reste de l’entreprise est précisément ce qui suscite l’opposition des salariés. Sylvain Macé, délégué national CFDT, voudrait y voir la fin d’un cycle : « Ça ne peut plus durer comme ça. D’autant que ce décalage bloque toute transformation dans l’entreprise. » Pour autant, le nouveau PDG de Carrefour, Alexandre Bompard, auréolé par le redressement de la Fnac, n’a pour le moment pas donné de signes de révolution sur ces questions. En 2017 et selon le document qui devra être approuvé par les actionnaires, le nouveau PDG a perçu 1,9 million de rémunération fixe et variable pour… six mois de présence, puisqu’il a pris ses fonctions en juillet 2017. S’y ajoute un plan de rémunération à long terme de 3,2 millions d’euros pour les années 2017 et 2018, s’il remplit les objectifs de performance fixés par le conseil d’administration. Depuis le vote de la loi Sapin 2 en 2016, ces montants doivent être entérinés lors d’un vote de l’assemblée générale des actionnaires. En l’espèce, pour Carrefour, les trois principaux actionnaires, qui sont également représentés au conseil d’administration, sont à même d’obtenir une majorité des votes.
Le système est-il pour autant figé ? Sylvain Macé ne désespère pas que certains actionnaires fassent cause commune avec les salariés : « Nous avons des investisseurs institutionnels qui rejoignent notre action et les salariés via leur participation détiennent 1,54 % des droits de vote. » Loïc Dessaint, qui avec le cabinet Proxinvest conseille les actionnaires pour leur vote, mise sur un projet de directive européenne : « Il s’agit d’un tableau qui mettra en parallèle l’évolution de la rémunération des dirigeants et le salaire médian dans l’entreprise. » A n’en pas douter, un morceau de choix lors de futures assemblées générales.
Le représentant des actionnaires institutionnels est d’autant plus dubitatif que la rémunération de Georges Plassat bouscule les recommandations des instances patronales que sont le Medef et l’Afep. Ces deux institutions pas franchement subversives préconisent de ne pas verser de prime de départ à la retraite aux dirigeants, compte tenu du montant de leur salaire. Or, Georges Plassat perçoit dans ses 13,1 millions, pour 2017, 4 millions de clause de non-concurrence. Sachant que l’intéressé va sur ses 69 ans, on imagine aisément qu’il se dirige plutôt vers une paisible fin d’activité que la présidence d’Auchan ou d’Intermarché. Cette clause de non-concurrence ressemble donc, à s’y méprendre, à une prime déguisée de départ à la retraite. D’autant plus troublante que pour ses vieux jours, Georges Plassat percevra de Carrefour une rente à vie de 517 810 euros par an.
« Décalage »
Pendant ce temps, 2 400 emplois ont été supprimés au siège via un plan de départ volontaire. Dans le secteur des hypermarchés, un plan social est lancé et concerne 485 salariés. Enfin, la fermeture de 240 magasins anciennement Dia qui appartenaient à Carrefour laissera sur le carreau 1 800 personnes dont seulement 89 ont été effectivement reclassées (lire page 4). Ces réductions d’effectifs ne s’arrêtent d’ailleurs pas aux frontières françaises. Les fermetures de magasins en Belgique et en Argentine vont entraîner 2 233 licenciements. En France, il a fallu une grève le 31 mars pour que la prime annuelle des salariés passe de 57 à 557 euros.
Cette différence de traitement entre la haute hiérarchie du groupe et le reste de l’entreprise est précisément ce qui suscite l’opposition des salariés. Sylvain Macé, délégué national CFDT, voudrait y voir la fin d’un cycle : « Ça ne peut plus durer comme ça. D’autant que ce décalage bloque toute transformation dans l’entreprise. » Pour autant, le nouveau PDG de Carrefour, Alexandre Bompard, auréolé par le redressement de la Fnac, n’a pour le moment pas donné de signes de révolution sur ces questions. En 2017 et selon le document qui devra être approuvé par les actionnaires, le nouveau PDG a perçu 1,9 million de rémunération fixe et variable pour… six mois de présence, puisqu’il a pris ses fonctions en juillet 2017. S’y ajoute un plan de rémunération à long terme de 3,2 millions d’euros pour les années 2017 et 2018, s’il remplit les objectifs de performance fixés par le conseil d’administration. Depuis le vote de la loi Sapin 2 en 2016, ces montants doivent être entérinés lors d’un vote de l’assemblée générale des actionnaires. En l’espèce, pour Carrefour, les trois principaux actionnaires, qui sont également représentés au conseil d’administration, sont à même d’obtenir une majorité des votes.
A lire aussi : « Les rémunérations des dirigeants ne font que grimper »
« Tableau »
Le système est-il pour autant figé ? Sylvain Macé ne désespère pas que certains actionnaires fassent cause commune avec les salariés : « Nous avons des investisseurs institutionnels qui rejoignent notre action et les salariés via leur participation détiennent 1,54 % des droits de vote. » Loïc Dessaint, qui avec le cabinet Proxinvest conseille les actionnaires pour leur vote, mise sur un projet de directive européenne : « Il s’agit d’un tableau qui mettra en parallèle l’évolution de la rémunération des dirigeants et le salaire médian dans l’entreprise. » A n’en pas douter, un morceau de choix lors de futures assemblées générales.
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