Les prédateurs du béton. Enquête sur la multinationale Vinci
Nicolas de la Casinière
Décembre 2013
L’enquête du journaliste Nicolas de la Casinière sur l’une des plus puissantes multinationales du béton vient défricher un terrain quasiment vierge. « Vinci est partout »,explique l’auteur : d’Alger à Perth, de Madras à Tchernobyl. En France, les partenariats public-privé (PPP), où les pertes sont mutualisées et les bénéfices privatisés, permettent au « numéro trois mondial du BTP [bâtiment et travaux publics], champion du CAC 40 » de « transformer les usagers des services publics en clients ». Le contribuable prend donc sa part dans la rémunération annuelle du président du groupe : 1,4 million d’euros. L’ouvrier gagne « 610 euros par mois pour quarante heures de travail par semaine ». Mais qu’on se rassure : dans les rapports remis aux actionnaires fleurissent les « envolées sur la responsabilité sociale de l’entreprise », qui se dit même prête à vendre des paniers bio aux salariés qui participeront à la construction de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes.
Sébastien Fontenelle
Libertalia, Paris, 2013, 104 pages, 8 euros.
Pour ce Repaire, délocalisé à l'Hostalrich de Prades, nous avions invité Nicolas de la Casinière pour son livre "Les Prédateurs du Béton" une enquête sur la multinationale vinci qui 'devait œuvrer' à Notre dame Des Landes.
Francis nous envoie ces notes. Merci à lui
Francis nous envoie ces notes. Merci à lui
"Compte-Rendu plus ou moins complet du Repaire de mai
L'essentiel de ma prise de notes s'est
concentré sur l'intervention de Nicolas de la Casinière,
journaliste à Nantes
(ainsi que sur l'excellent site http://www.reporterre.net/ ndlr)
Sujet : « les prédateurs du
béton »
Confronté à NDDL, ce journaliste en
vient à s'intéresser à Vinci, n° 1 mondial du BTP et par le biais
de cette multinationale, aux stratégies prédatrices de toutes
celles qui « coulent du béton ».
Il y a une histoire longue de NDDL, qui
débute dans les années 1960. On parle déjà de désengorger
l'aéroport. L'histoire de la résistance à ce projet ne date donc
pas d'hier.
La vision qu'en a Vinci se limite à
deux groupes : les agriculteurs et les riverains. Vinci qui est d'une
création récente, en 2000, fédère sous son chapeau une nébuleuse
d'entreprises de toutes tailles, autoroutes, parkings etc..... Leur
nombre, difficile à évaluer, oscillerait entre 2250 et 2500.
Sa vision du « chantier »
de NDDL se veut optimiste. « On va s'occuper des deux
groupes.... » Il y a une solution pour chacun des groupes, le
plus délicat étant celui des agriculteurs. Mais tout s'achète
n'est ce pas ?
La suite, au Repaire tout le monde connait.
Notre ami va donc élargir le champ. En
quoi ces entreprises se révèlent de formidables sociétés
prédatrices de l'argent public ? Voici son analyse, qui vaut pour
les sociétés du même type.
Vinci se trouve confronté à une
contradiction inhérente à sa nature d'entreprise capitaliste. En
effet, le BTP nécessite beaucoup de main d'oeuvre, ce qui n'est pas
l'idéal pour faire du profit, par le poids des salaires dans la
composition de son capital.
D'où le jeu entre deux échelles de
temps :
1/ on construit des ouvrages
2/ on obtient la gestion des édifices
construits par les partenariats publics privés (PPP).
A ce stade, ne pas oublier que les
fameux PPP sont nés dans l' Amérique de Reagan et le Royaume Uni de
Margareth Tatcher. Ils ont été introduits en France par Alain
Madelin dans les années 90. Ils sont un produit de la « révolution »
néo-libérale.
Actuellement, en France, les rois du
BTP sont trois ; outre Vinci, on trouve Bouygues et Eiffage qui donc
se partagent le marché en pleine expansion des PPP. Il s'agira de
stades, comme dans l'exemple caricatural de la ville du Mans,
d'hôpitaux, de bâtiments publics, de parkings, d'autoroutes
etc.....
Le mécanisme est bien connu, la
collectivité qui y a recours, parce qu'elle n'a pas l'argent pour
réaliser l'équipement souhaité, passe un marché avec l'opérateur
privé qui se charge du financement mais obtient en contrepartie la
gestion de l'ouvrage pour une durée contractuelle (en général
autour des trente ans) moyennant un loyer. Inutile d'ajouter que les
loyers cumulés sur cette durée vont multiplier le coût final du
dit ouvrage, en moyenne par trois, voire plus.
Mais, échelle de temps oblige, celle
de l'élu n'est pas la même que celle du prestataire et encore moins
que celle de l'intérêt collectif.
L'élu est content, il peut faire
rouler les tambours médiatiques et rouler des mécaniques devant le
bon peuple, sans que celui-ci s'aperçoive de l'arnaque. L'opérateur
est assuré d'un revenu constant sur une durée propre à lui faire
gagner beaucoup d'argent et donc restaurer sa marge de profit.
Toutefois, dans un certain nombre de
cas, peuvent se produire des bugs. Celui du stade du Mans évoqué
plus haut reste emblématique des dysfonctionnements de cette
mécanique.
Conçu à l'époque où l'équipe de
foot jouait en première division, le club mal géré est épinglé
par la commission de contrôle qui veille à la bonne gestion des
clubs. Il est rétrogradé en division CFA, le sous-sol pour un club
de cette importance. Le coût du loyer gagé sur la fréquentation du
stade par ses supporters voit ses recettes s'effondrer et le coût du
loyer devenir prohibitif, intenable. Dans cette situation va jouer
la nature du contrat signé entre la collectivité et l'opérateur.
Le cas est prévu, ainsi que les contraintes juridiques qui
permettent à l'opérateur de rentrer dans ses frais. La mairie devra
donc verser un dédit, qui au final, sera moins élevé que prévu,
l'affaire s'étant terminée devant le tribunal.
La cour des comptes de la région PACA
, a révélé récemment que le coût final de la rénovation du
stade de l'OM avait coûté sept fois plus cher que si elle avait été
effectuée en gestion publique.
Notre ami journaliste, nous parle d'un
ingénieur Vinci qui lui fait part de l'énorme ingénierie
juridique, avocats, fiscalistes etc.... de boites comme Vinci pour
« ficeler » les contrats dans les moindres détails afin
de parer à toutes les éventualités.
Derrière cet édifice, on trouvera une
bonne dose d'idéologie. Elle s'appuie sur l'idée, véhiculée à
tous les niveaux, que le privé est plus à même de bien gérer la
société, de part son efficacité sur abondamment auto-proclamée.
Parce qu'il est aiguillonné par la concurrence et que les
administrations sont lourdes à manier.
Ensuite, il s'appuie sur un recrutement
homogène : X Pont, Polytechnique, ENA dont le comportement endogame
via les associations d'anciens élèves est bien connu et qui passent
allègrement du public au privé, après avoir rendu, au passage,
quelques « menus » services. Ils jouent le rôle de
rabatteurs, en quelque sorte.
L'exemple emblématique et dernier en
date, qui nous ramène à NDDL, est celui de l'ancien préfet de
Loire Atlantique qui après avoir piloté une déclaration d'utilité
publique (DUP) entièrement à la dévotion de Vinci, se retrouve n°2
chez....... ? Vinci Autoroutes. Vinci merci.....
Autre exemple qui montre comment, à
partir d'une impulsion politique, pour faire face à une urgence en
restant dans le temps court d'un mandat d'élu, on arrive à de
monstrueuses aberrations.
Tout le monde se souvient de la
politique sécuritaire de Sarkozy. Des prisons, vite ! Donc PPP avec
Vinci. Au passage, petite astuce : des loyers « calmes »
pendant trois ans, bon pour l'élu, mais qui explosent après,
mauvais pour les caisses de l'Etat que l'on prétendait protéger,
ainsi que la population de toutes sortes de voyous, exceptés ceux en
col blanc.
Autre élément à prendre en
considération : les malfaçons. L'épisode de l'hôpital Sud
Francilien par Eiffage a jeté une sacrée ombre sur les pratiques
inhérentes aux PPP. Des malfaçons par millions. Mais qui répare
ces manifestations de l'obsolescence programmée ? Il y a sur le
marché et sur ce créneau une foule de petites et moyennes
entreprises. Très bien.
Mais qui garantit qu'elle ne font pas partie
de cette nébuleuse évoquée plus haut ?
Qu'elles ne travaillent pas
sous le chapeau de la « maison mère » entretenant une
fausse concurrence, entre entreprises du même groupe, aboutissant à
surfacturer le prix des réparations et contribuant à faire
remonter un profit supplémentaire dans les caisses de la dite
« maison mère » ?
Comment s'en assurer ?"
Prochain Café Repaire
le jeudi 19 juin à Fillols Café du Canigo sur la place
19h30
Nous avons invité Enercoop ainsi que Conflent Energie pour répondre à nos nombreuses interrogations.
Merci de venir en nombre avec vos questions bien affûtées...
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