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samedi 5 octobre 2024

Les enfants métis sacrifiés

Les enfants métis sacrifiés

 Emission à écouter ici : https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/les-pieds-sur-terre/les-enfants-metis-sacrifies-6401481

Vendredi 27 septembre 2024

 

Monique, aujourd'hui - Monica Fernandes

Monique et Léa avaient 4 et 2 ans quand "Papa l'État" est venu les arracher à leurs parents dans leur village du Congo Belge. Les deux petites filles sont métisses : un crime pour les uns, un péché pour les autres. Elles ont porté plainte pour "crime contre l'humanité "contre l'État belge.

Monique est née au Congo d'un père belge et d'une mère congolaise, alors que la loi coloniale belge interdisait aux blancs du Congo d'avoir des enfants avec des femmes noires. En 1953, Monique est enlevée à sa famille et placée dans une institution religieuse dans une ville à 300 kilomètres de chez elle, par des fonctionnaires de l'État belge colonial. Elle change de nom de famille et devient, comme les autres enfants métis, un "enfant de l'État".

C'est aussi le sort que connaît Léa, dont la mère est congolaise et le père portugais. Elle décrit les conditions de vie des jeunes enfants métis au sein de cette institution : "Non seulement tu ne comprends pas la langue, tu ne connais pas la nourriture, tu ne connais personne, on t'enlève tous tes vêtements et on te laisse pieds nus, tu ne manges pas..." Léa.

"Tu es enlevée de ton milieu familial et tu n'es plus rien."

Lors de l'indépendance du Congo en 1960, les prêtes et les sœurs de l'institution religieuse sont évacués par les Nations Unies. Jusqu'à la dernière minute, Monique, 11 ans désormais, pense faire partie du voyage. "La pirogue est venu chercher les sœurs, pour aller prendre l'avion, et pas les enfants." Monique.

"Mon père savait qu'il avait laissé un enfant au Congo et qu'il fallait venir me chercher. Mais mon nom avait changé alors il ne pouvait pas me trouver."

Ce sont les enfants de Monique qui, en 2014, trouvent des traces de sa famille paternelle en Argentine, pays d'origine de sa nouvelle femme. Monique décide d'y aller, avec ses enfants. "Quand nous sommes arrivés, il y avait une foule. Je vois mon frère qui me ressemblait beaucoup. Il y avait des enfants avec des fleurs. [...] J'ai compris que "papa l'État" m'avait privé de tout ça." Monique

Le parcours de Léa est un peu différent : "Quand j'ai eu huit ans, les sœurs m'ont donné 50 francs pour partir seule et aller chercher ma maman." Léa. Sur sa route, elle rencontre une femme dont le fils avait aussi était enlevé. De fil en aiguille, elle parvient à trouver sa mère, Alphonsine. Le bonheur est de courte durée, car l'enfant est sous la tutelle de l'État belge, et ne peut rester avec sa mère.

Comme Monique, elle part s'installer en Belgique avec ses enfants. "Je n'ai jamais raconté cette histoire ni à mon mari, ni à mes enfants [...] je ne voulais pas les traumatiser" Léa.

"L'État belge doit reconnaître ses crimes. Regarder ça en face et réparer."

Léa, Monique et leurs "sœurs de cœur", rencontrées au Congo chez les religieuses, ont décidé d'assigner l'État belge en 2020. Elles l'accusent de crime contre l'humanité. Leur demande a été rejetée en première instance le 8 décembre 2021, et les juges de la cour d’appel rendront leur arrêt d’ici début décembre. "Être métisse, c'est l'union entre blanc et noir. C'est merveilleux, c'est un honneur. Je suis contente d'être métisse, mais je l'ai payé très cher" Léa..

  • Reportage : Stéphanie Thomas
  • Réalisation : Somany Na
  • Mixage : Jordan Fuentès et Dali Yaha

Musique de fin : "All Your Sisters", Mazzy Star - Album : Among My Swan (1996)

Merci à Monique, Léa, Monica, Solange et Nicolas Engelet.

Pour aller plus loin

"Le drame oublié des métisses des colonies belges", Le Monde, 13 octobre 2021

"Les métis sacrifiés de l'ex-Congo belge en quête de justice", Le Monde, 24 mai 2023

Pour en savoir plus sur la question de la qualification de la politique de placement des enfants métis dans des institutions religieuses de "crime contre l'humanité", voir Vervoort J., "La Belgique face à son passé colonial : l'affaire des enfants métis et la qualification de crime contre l'humanité", Revue des droits de l'homme, n°23, 2023

 

Source : https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/les-pieds-sur-terre/les-enfants-metis-sacrifies-6401481

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