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vendredi 19 avril 2013

NDDL : Rendu de la Commission de Dialogue

 Tout comme l'extension du camp militaire du Larzac, tout comme la centrale nucléaire de Plogoff, le deuxième aéroport à Notre-Dame des Landes ne se fera pas 

(Nous avons reçu cet article de Mediapart)
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Feu 
pas tout à fait vert 
pour l'aéroport 
Notre-Dame-des-Landes

10 avril 2013 | Par Jade Lindgaard 

Nouvelles pièces au dossier de l’aéroport controversé de Notre-Dame-des-Landes, trois rapports d’experts reposent désormais sur les bureaux de Jean-Marc Ayrault, du ministre des transports, Frédéric Cuvillier et de la ministre de l’écologie Delphine Batho : celui de la commission de dialogue, censé remettre à plat les arguments des pour et des contre, un autre consacré au respect de la loi sur l’eau et, enfin, un dernier analysant les impacts du projet sur les agriculteurs.
Aucun d’entre eux ne conclut en défaveur du transfert de l’actuel site de Nantes-Atlantique vers le bocage de Notre-Dame-des-Landes. Si bien que dans la foulée de leur publication (à lire ici, là, et ici), Jean-Marc Ayrault « réaffirme son attachement à poursuivre la conduite de ce projet dans le respect de cette méthode de travail fondée sur le dialogue et l’échange constructif », a fait savoir Matignon dans un communiqué. 


Sur la zone d'aménagement différé de Notre-Dame-des-Landes (JL)
 Mais pour autant, les experts sollicités, des universitaires et des fonctionnaires, refusent d’accorder aux pouvoirs publics et au concessionnaire, Vinci, le feu vert qu’ils attendaient pour enclencher les travaux. 
La principale critique provient des scientifiques consultés pour évaluer les incidences du projet sur les zones humides menacées par le projet.  Conformément à la loi, les maîtres d’ouvrage proposent de compenser les dommages qu’ils vont causer au bocage. Mais la méthode qu’ils ont choisie pour le faire « ne peut être validée en l’état », jugent les experts. Ils lui reprochent ses insuffisances, sa faible traçabilité, sa mauvaise intelligibilité et sa non-prise en compte du risque d’échec. 
C’est le schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux (Sdage) du bassin Loire-Bretagne qui établit les règles d’application de la loi sur l’eau pour le site de Notre-Dame-des-Landes. En particulier, il exige que les zones humides détruites doivent être recréées ou restaurées de manière équivalente « sur le plan fonctionnel » et pour la biodiversité. Ces opérations doivent être réalisées « dans le même bassin versant », aire délimitée par des lignes de partage des eaux. Or la méthode compensatoire adoptée se contente d’évaluer les besoins de compensation et ne garantit pas le respect de ce principe d’équivalence. Si bien qu’un délicat travail scientifique est maintenant nécessaire pour déterminer des critères fiables de compensation fonctionnelle. Et peut-être, y compris la révision du Sdage lui-même. Pour Raphaël Romi, professeur de droit à l’université, « sur le seul terrain de la loi sur l’eau, ce projet est mort, il est le premier dont on peut dire qu’il est mort et noyé ».
Les auteurs du rapport pointent aussi l’insuffisante analyse de l’état du milieu, donnant ainsi raison aux naturalistes qui se sont rassemblés depuis le début de l’année pour réaliser leur propre inventaire du site (voir ici notre article).
Sans enthousiasme

Autre grief majeur, formulé cette fois-ci par la commission de dialogue : le projet avale trop de bocage. La « très importante consommation d’espaces naturels ou agricoles » ne correspond pas à l’exemplarité environnementale à laquelle prétend Vinci. Les experts jugent nécessaire « de rechercher un meilleur équilibre entre le projet et les enjeux agricoles et environnementaux » et donc « de réduire autant que possible les surfaces artificialisées ou neutralisées pour l’agriculture ». Ils demandent ainsi la diminution des parcs de stationnement, le gel d’au moins 250 hectares le temps d’évaluer les nouvelles mesures compensatoires, et la réduction des surfaces destinées à accueillir des activités – 200 hectares sont aujourd’hui promis à cet usage.

Affiche de la manifestation Sème ta Zad du 13 avril 2013.

Alors que la zone réservée à l'origine pour les travaux s'étendait sur environ 1 650 hectares, Vinci l’a revue à la baisse, prévoyant à ce stade de n’en utiliser que 730. « Mais si on change de projet, il faut refaire l’enquête publique et la déclaration d’utilité publique », analyse Raphaël Romi. La restriction des parkings, activité très lucrative, risque de modifier l’équilibre financier de l’aérogare.
Plus généralement, la réévaluation des coûts de réaménagement de l’actuel aéroport, du plan d’exposition au bruit du futur aéroport, de l’impact sur l’emploi, et du coût du transfert que réclament les experts, seront lourds de conséquences. Car si ces données devaient se modifier substantiellement, elles remettraient alors en cause les calculs qui furent à la base du traité de concession et de l’appel d’offres. Un enfer juridique. Pour la fondation Nicolas Hulot, les lacunes du dossier mises en exergue par les experts « justifient a minima l’arrêt des travaux sur le site et des études complémentaires ».

Pourquoi la commission de dialogue défend-elle malgré tout le transfert de l’aéroport actuel vers Notre-Dame-des-Landes ? Contrairement  à ce qu’affirment les partisans du projet, les experts contestent la saturation technique de Nantes-Atlantique aujourd’hui. Mais ils estiment qu’elle « est néanmoins susceptible d’intervenir assez rapidement en fonction de l’évolution du trafic ».
Surtout, ils estiment plausible que le nombre de vols soit plus important au fil des années. Au point de créer « des nuisances difficilement supportables » pour les habitants, notamment au sud de la ville, et de menacer le développement et l’extension de l’agglomération. « Le réaménagement de Nantes-Atlantique n’apparaît donc pas à la commission comme une solution valable à long terme. » Pour un rapport commandé en vue d’accompagner le projet de nouvelle installation, le ton manque clairement d’enthousiasme.

Que va faire l’exécutif maintenant ? Le gouvernement semble croire que la mise en œuvre des recommandations des commissions ne prendra que quelques semaines. Ce scénario paraît très optimiste. D’ici l’été, les maîtres d’ouvrage doivent proposer des solutions en réponse aux rapports, et les élus vont se réunir. Dans un communiqué commun, les collectivités locales concernées se réjouissent de la confirmation de « ce projet d’intérêt général » : « Ce transfert, c’est le désenclavement de tout le Grand Ouest, c’est une dynamique de croissance incontestée. » Avant la publication des rapports, la préfecture avait prévu de prendre rapidement des arrêtés sur la loi sur l'eau, permettant de lancer une nouvelle étape d'interventions sur la zone.

Sur le terrain, seules les fouilles archéologiques devraient se poursuivre d’ici l’été, et aucun bulldozer ne devrait apparaître avant l’automne. Aucune opération d’expulsion des occupants à grande échelle ne semble prévue à court terme. L’exécutif espère que cette confirmation critique de la pertinence du projet de Notre-Dame-des-Landes calmera les passions et diffractera le symbole qu’est devenu l’aéroport de la discorde en de multiples petites scènes politiques locales. Pas sûr pourtant que cette lutte devenue si emblématique soit soluble dans l’expertise, aussi sérieuse soit-elle.


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