Aide aux migrants :
Cédric Herrou
définitivement relaxé
après une décision
de la Cour de cassation
Cédric Herrou devant la cour d'appel de Lyon le 11 mars 2020 afp.com - PHILIPPE DESMAZES |
Une victoire finale du "principe de fraternité", selon ses avocats : la Cour de cassation a rendu définitive mercredi la relaxe de Cédric Herrou et mis un point final à une longue procédure pour ce militant devenu un symbole de l'aide aux migrants en France.
Après trois procès et une saisine du Conseil constitutionnel, l'agriculteur des Alpes-Maritimes avait été relaxé en 2020 à Lyon et la plus haute juridiction de l'ordre judiciaire a déclaré "non-admis" le pourvoi du parquet général de Lyon, un "véritable camouflet" salué par la défense de M. Herrou.
"Cela met fin à l'acharnement du parquet à l'encontre de Cédric Herrou", s'est félicitée Me Sabrina Goldman, qui le défend avec Me Zia Oloumi. Elle "permet de reconnaître enfin de manière définitive que celui-ci n'a fait qu'aider autrui et que dans notre République, la fraternité ne peut pas être un délit".
Le paysan de la vallée de la Roya était poursuivi pour avoir convoyé successivement en 2016 200 sans-papiers, en majorité érythréens et soudanais, de la frontière italienne jusqu'à son terrain, puis improvisé avec des associations un accueil de fortune dans un ancien centre de vacances désaffecté.
Il a été condamné en 2017 à une simple amende en première instance, puis à quatre mois de prison en appel, notamment pour "aide à l'entrée, à la circulation et au séjour irrégulier d'étrangers en France".
- "Liberté d'aider" -
Au côté d'un autre militant, il a alors saisi le Conseil constitutionnel pour lui demander l'abolition du "délit de solidarité" dont ils s'estimaient tous deux victimes.
Dans une décision historique en juillet 2018, les "Sages" ont consacré, au nom du "principe de fraternité", "la liberté d'aider autrui, dans un but humanitaire, sans considération de la régularité de son séjour sur le territoire national".
Le Parlement a ensuite modifié la loi et la condamnation de Cédric Herrou a été annulée avant que la cour d'appel de Lyon, invitée à rejuger le dossier, ne le relaxe le 13 mai 2020.
Cette décision "est un déshonneur pour la +justice+ française, qui encourage ainsi la violation de nos lois et l’activisme pro-clandestins, complice des réseaux mafieux de passeurs", a réagi sur Twitter le député RN Bruno Bilde.
Le secrétaire national d'EELV Julien Bayou a lui salué ce dénouement. "Alors que les différents ministres de l'Intérieur se succèdent pour salir notre belle devise liberté égalité fraternité, ton courage, ta ténacité et ton humanité la traduisent en actes et font l'honneur de notre pays", a-t-il déclaré à M. Herrou dans un tweet.
Dans son arrêt, la Cour de cassation a estimé qu'"après avoir examiné tant la recevabilité du recours que les pièces de procédure", elle "constate qu'il n'existe, en l'espèce, aucun moyen de nature à permettre l'admission du pourvoi".
- Aide "désintéressée" -
"Il est désormais définitivement acquis dans notre droit qu'aucune poursuite pénale ne peut être engagée à l'encontre d'une personne qui aura aidé un migrant en situation irrégulière lorsqu'il agit de façon désintéressée, qu'il appartienne ou non à une association ou bien qu'il veuille revendiquer son acte", s'est réjoui l'avocat à la Cour de Cédric Herrou, Patrice Spinosi.
Le militant s'est lui-même félicité de cette décision depuis Breil-sur-Roya, où il a fondé en 2019 une communauté Emmaüs.
"Le ministère public a voulu mettre tout en œuvre pour dire qu’il avait été jusqu’au bout, c'est une position politique plus que pénale de sa part", a-t-il affirmé à l'AFP.
"On a bien fait d'avoir confiance dans la justice et des juges. Ce qui a dérangé le ministère public, ce n'est pas le fait qu'on aide les gens mais qu'on dénonce les irrégularités d'Etat", a-t-il estimé, "l'histoire montre bien qu'il y a un problème démocratique et une volonté de nous empêcher d'agir".
A la frontière, ces derniers jours, entre 120 et 150 migrants passent quotidiennement à Vintimille pour demander de l'aide à l'ONG catholique Caritas. La préfecture des Alpes-Maritimes de son côté refusé de préciser le nombre d'interpellations.
Cédric Herrou n'en a pas fini avec la justice : il reste mis en examen à Grasse après son interpellation le 23 juillet 2017 en gare de Cannes avec 156 migrants qu'il accompagnait pour s'enregistrer et déposer une demande d'asile à Marseille.
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