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jeudi 20 février 2020

En Allemagne, un laboratoire qui a testé le glyphosate mis en cause pour fraude


En Allemagne, 

un laboratoire qui a testé 

le glyphosate 

mis en cause pour fraude


Accusé de fraude et de torture sur des animaux, le laboratoire agréé LPT a réalisé des études ayant servi dans le dossier de réautorisation de l’herbicide.

Par Stéphane Horel
Publié le 11 février 2020

 Les locaux de la société LPT, à Hambourg (Allemagne), en octobre 2019. BODO MARKS / PICTURE-ALLIANCE /DPA / AP IMAGES


Un chien beagle à l’agonie baigne dans son sang et ses excréments. Un autre, mort, est accroché par la patte à un crochet de boucher. Le cou coincé dans un étau, un singe se débat, terrorisé. Ces images insoutenables ont été tournées par un militant de Soko Tierschutz, une association allemande de protection des animaux, infiltré dans un laboratoire situé à Hambourg, entre décembre 2018 et mars 2019.

On est ici bien loin des abattoirs que filment d’ordinaire les activistes du droit des animaux. Laboratoire agréé par les autorités, LPT (Laboratory of Pharmacology and Toxicology) a pour vocation d’effectuer, pour des clients des secteurs pharmaceutique, chimique ou cosmétique, des tests sur des médicaments et des produits chimiques dans le respect des meilleurs standards. Ces firmes soumettent ensuite les résultats aux autorités dans le but d’obtenir une autorisation de mise sur le marché ou un renouvellement d’homologation pour leurs produits.

Diffusées sur la chaîne allemande ARD le 15 octobre 2019, ces images de torture au sein du « labo de la mort », comme l’a surnommé l’association, ont soulevé l’indignation au point de faire descendre des manifestants dans la rue. Mais, outre ces violations du droit des animaux, le militant infiltré a également été témoin de fraude. Au cours d’une étude menée pour le compte d’un laboratoire pharmaceutique coréen, un singe, mort au bout de six semaines, a été remplacé par un autre, vivant. Ni vu ni connu : les résultats sont ainsi falsifiés. « C’est comme ça que ça marche, ici », lui a expliqué un employé.

La question cruciale de la génotoxicité


Or, un rapport publié conjointement par trois ONG (Corporate Europe Observatory, PAN Allemagne et Global 2000), mardi 11 février, révèle que LPT a réalisé 21 des 150 tests réglementaires qui faisaient partie du nouveau groupe d’études fourni par Monsanto et les autres fabricants réunis au sein de la « Glyphosate task force » pour l’approbation du glyphosate par l’Union européenne en décembre 2017. Trois de ces 21 tests concernaient la question cruciale de la génotoxicité de l’herbicide. C’est-à-dire sa capacité à endommager l’ADN, un processus qui peut induire des cancers.

C’est sur la base de ces études confidentielles que l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA), chargée de la réévaluation de l’herbicide, avait jugé le glyphosate non cancérogène et « peu susceptible d’être génotoxique » en novembre 2015. Dans le chapitre consacré à la génotoxicité de son rapport d’évaluation, aucune des 46 études réglementaires mentionnées ne montrait d’effets génotoxiques. Parmi elles : ces trois tests réalisés par LPT.

Dans son dossier de demande de réhomologation, comme l’exige la réglementation européenne, la Glyphosate task force avait également listé les résumés d’études universitaires indépendantes sur cette question de la génotoxicité, publiées dans les revues scientifiques. Mais elle avait disqualifié la totalité des 72 référencées, les jugeant « non fiables ». Or 54 montraient un effet génotoxique.

Quelques mois avant l’EFSA, en mars 2015, le Centre de recherche sur le cancer (CIRC), une agence des Nations unies, avait classifié le glyphosate « cancérogène probable », estimant le niveau de preuves concernant la génotoxicité élevé. A la différence de l’EFSA, le CIRC n’avait, lui, pris en compte que ces études indépendantes.

Si les fabricants ont jugé celles-ci « non fiables », c’est parce que, contrairement aux tests qu’ils commanditent et financent eux-mêmes pour constituer leurs dossiers, elles ne sont pas conformes aux « bonnes pratiques de laboratoire » (BPL). Cette norme de qualité n’a pourtant pas pour vocation de déterminer la toxicité d’une substance donnée. Elle a justement été conçue… pour empêcher la fraude.

Elaborées par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) depuis 1992, les BPL ont été créés en 1978 aux Etats-Unis à la suite d’un scandale retentissant. Le laboratoire Industrial Bio-Test avait pour habitude de laisser pourrir les animaux dans leurs cages, si bien qu’une grande partie des observations étaient inventées. A l’issue d’une enquête, des centaines de tests de toxicité de pesticides et de produits chimiques connus avaient été invalidés.

Tumeurs devenues de simples « inflammations »


Est-ce là ce qui attend les tests effectués par LPT ? Recueillies dans d’autres reportages de l’ARD, les révélations d’anciens employés du laboratoire allemand témoignent de mauvaises pratiques depuis 2005 au moins. Et jettent le doute sur la qualité et la véracité des études réalisées par ce laboratoire, l’un des plus importants du pays, avec 175 employés répartis sur trois sites. L’un d’entre eux a depuis été fermé par le gouvernement. « Nous garantissons, grâce à notre expertise scientifique d’excellence, que notre travail sera accepté par toutes les autorités régulatrices », promet LPT sur la page d’accueil de son site. Contacté par Le Monde, le laboratoire n’a pas fait de commentaire.

Le remplacement d’un singe mort ne semble pourtant pas inédit. Un ancien employé rapporte un incident identique dès 2005, dans le cadre d’une étude pour un traitement contre le cancer. On ignore si ce médicament est aujourd’hui sur le marché. Un autre dit avoir assisté au remplacement de rats, trépassés quelques jours après le début des tests qui les exposaient à une substance dont le nom n’est pas connu. Une femme se souvient avoir dû falsifier des données. « Si les résultats ne répondaient pas aux attentes, on me demandait de les améliorer », relate-t-elle. Dans un dernier cas, enfin, les tumeurs développées par les animaux sont devenues de simples « inflammations » dans le rapport final.

Comment expliquer que de telles pratiques chez LPT, qui existe depuis quarante-cinq ans, aient pu passer inaperçues ? Quels médicaments, quels pesticides y ont été testés ? L’Institut de gestion des risques allemand, le BfR, a assuré au Monde ne pas disposer d’une telle liste. L’association Soko Tierschutz a pour l’instant réussi à en identifier une vingtaine, dont un anti-inflammatoire du laboratoire Boehringer Ingelheim, une hormone de croissance de Teva, ou encore un vaccin contre la leishmaniose, réalisé sur un financement du 7programme-cadre de recherche de l’Union européenne, qui a fait l’objet d’une publication dans la grande revue Nature. La Commission européenne n’a pas souhaité s’exprimer sur son intention d’enquêter sur les activités de LPT.

Vidéo réalisée par l’association Soko Tierschutz ; attention, certaines images peuvent choquer :

https://www.youtube.com/watch?v=qFjF0Dy3Uh0


Source : https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/02/11/le-labo-de-la-mort-testait-aussi-le-glyphosate_6029218_3244.html

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