Merci à l'auteur, membre du Collectif de Soutien NDDL66, pour cette compilation mensuelle
PROJET D’AYRAULT – PORT de
NOTRE DAME DES LANDES (44)
Source : ZAD.nadir.org et médias
Février 2017
Et ailleurs : Paris : Théo - Teckno - Violences policières (75) - Bure (55) - Anti LGV (64) - Anti GCO Strasbourg (67) - Le Testet (81) - Mines en centre Bretagne (22) - Affaire Rémi Fraisse (31) - Kurdistan - Antirep79 (79 et 17)
ZAD
de NDDL - 44
Infos du 1er au 5 mars
Appel depuis les territoires en lutte de la ZAD
de Notre Dame des Landes et de Bure
à soutenir et rejoindre la marche pour la Justice et la Dignité.
Le
19 mars prochain plusieurs familles ayant perdu un des leurs tué par
la Police appellent à une marche pour la justice et la dignité,
contre le racisme, les violences policières, la hogra et la chasse
aux migrant-es. Alors que l’état d’urgence permet d’aller
toujours plus loin dans l’encadrement et la légitimation du
racisme systémique, les violences et humiliations infligées aux
populations racisé-es et dans les quartiers populaires sont
quotidiennes : contrôles au faciès, insultes, coups,
perquisitions, et assignations à résidence. C’est une véritable
guerre de basse intensité qui s’organise, dans le droit héritage
des techniques de maintien de l’ordre colonial. Cette guerre que
mène l’État français contre une partie de la population est
aussi meurtrière : un mort par mois, c’est le nombre moyen de
victimes de la police, dans leur très grande majorité racisées.
Or,
la plupart des policiers responsables demeurent impunis, et
l’assemblée nationale vient même d’adopter un projet de loi
« assouplissant » les conditions d’usage de leurs
armes, leur garantissant par là un véritable permis de tuer, et les
mettant définitivement à l’abri des conséquences de leurs crimes
racistes. On voit des familles se battre depuis des années sans que
justice ne leur soit rendue : les non lieux tombent du coté des
meurtriers en uniforme tandis que la répression s’abat sur celles
et ceux qui organisent leur défense, comme ç’a été le cas pour
la famille Traoré. Plus récemment encore, les tentatives du
gouvernement de minimiser l’agression de Théo à Aulnay Sous Bois,
la négation de son caractère raciste comme la répression
systématique des manifestations de soutien qui y font suite sont une
preuve supplémentaire de la volonté de rendre invisibles ces
réalités.
Depuis
nos territoires en lutte nous avons choisi de nous organiser pour
soutenir et rejoindre la marche. Pour la plupart d’entre « nous »*,
nos luttes nous exposent bien à une répression grandissante, que
l’état d’urgence vient également faciliter, mais nous risquons
bien moins nos vies, et si c’est le cas, ce n’est pas pour ce que
nous sommes, mais pour ce que nous faisons. Nous luttons contre ce
monde, pour en finir avec les systèmes d’oppressions et cela
implique d’abattre le racisme en soutenant l’organisation des
premièr-es concerné-es. Non pas pour les aider, mais, pour
reprendre les mots de Lilla Watson, militante aborigène, parce que
nos libérations sont liées.
Aussi,
nous nous rendrons à la marche pour la Justice et la Dignité, et
appelons massivement les personnes qui nous soutiennent à en faire
autant.
Rendez-vous
le 19 mars !
Des
habitant-e-s de la Zad et la réunion des habitant-es du 16 février
2017
Des
habitant-e-s de Bure
*
à l’exception de Rémi Fraisse, dans lequel « nous »
pourrions nous retrouver parce qu’il était militant, écologiste
et blanc, ce ne sont majoritairement pas « les nôtres »
qui sont tués régulièrement : nos luttes sont majoritairement
blanches et la lutte contre le racisme y est encore trop minoritaire.
Mais ce ne sont pas non plus des espaces totalement blancs, et nous
ne voudrions pas rendre invisibles celles et ceux, dans nos luttes,
qui souffrent de racisme systémique.
À Nantes, la caisse de solidarité est dans le collimateur
d’une juge d’instruction
Au
mois de janvier et février 2017, les trois personnes titulaires du
compte bancaire du comité de soutien aux inculpé.es (la caisse de
solidarité de Nantes) ont été convoquées par la gendarmerie dans
le cadre d’une enquête ouverte par une juge d’instruction. En se
rendant à ces convocations, elles ont appris que l’enquête
portait sur un appel à dons visant à financer, via la caisse de
solidarité, les amendes et frais de justice de personnes condamnées
(1).
L’instruction
pourrait être longue car au-delà de cette poursuite, il est clair
que l’enquête en cours est un coup de pression de l’État contre
des pratiques de solidarité et d’autodéfense de personnes visées
par la justice. Il semble en fait qu’elle ne soit qu’une porte
d’entrée pour cibler d’autres personnes et groupes qui
s’organisent et luttent contre la répression. Il s’agira donc
pour toutes celles et ceux qui ont traîné autour des questions
d’anti-répression ces derniers temps (notamment depuis le
mouvement social contre la loi travail) à Nantes et sur la ZAD de
garder un œil sur cette affaire. Ce sont nos pratiques de legal team
qui sont ici ciblées. Faire de la legal team, c’est à dire se
donner des conseils juridiques pour partir en manif, préparer sa
défense en vue d’un procès, du passage d’un huissier, ou défier
un contrôle de police par exemple, est un élément incontournable
que les personnes et groupes qui sont exposés à la répression
partagent. Cette offensive de l’État ne s’adresse pas seulement
aux caisses de solidarité, mais semble être une intimidation à
l’adresse de celles et ceux aux prises avec l’État
(condamnations pour port de bouclier en manif, procédures contre des
personnes des équipes médic, criminalisation de l’aide aux
migrant.e.s, répression de caisses de soutiens et mutuelles de
fraude…).
Ne
laissons pas l’État nous intimider, renforçons nos outils
d’autodéfense !
(1).
Loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, article 40 :
« Il est interdit d’ouvrir ou d’annoncer publiquement des
souscriptions ayant pour objet d’indemniser des amendes, frais et
dommages-intérêts prononcés par des condamnations judiciaires, des
amendes forfaitaires, des amendes de composition pénale ou des
sommes dues au titre des transactions prévues par le code de
procédure pénale ou par l’article 28 de la loi organique
n° 2011-333 du 29 mars 2011 relative au Défenseur des droits
sous peine de six mois d’emprisonnement et de 45 000 euros
d’amende, ou de l’une de ces deux peines seulement. Le fait
d’annoncer publiquement la prise en charge financière des amendes,
frais, dommages-intérêts et autres sommes mentionnés au premier
alinéa du présent article est sanctionné des mêmes peines. »
Infos
du 6 au 12 mars
NDDL
►La
Confédération paysanne a déposé un recours
au tribunal administratif de Nantes au motif que le Scot ne permet
pas de limiter la consommation des terres agricoles.
►Pendant
ce temps, la maire de Nantes apporte son soutien à Benoit Hamon
malgré son opposition au projet d’aéroport : ça doit être
parce qu’elle prépare son grand
débat : Nantes transition énergétique : y’a
jusqu’au 31 mars pour dire ce qu’on pense de leur greenwashing
pseudo participatif !
►ZAD
Une
journée bien venteuse par ici, parfaite pour une séance de
lecture :
(NDA :
jour de tempête avec rafales
à 180
km/h à Ouessant, 140 à 110 sur les pays côtiers )
►Voilà
un entretien retranscrit dans un journal romand
(Suisse
romande) d’écologie
politique avec un camarade romand actif sur la
►Pendant ce temps, la maire de Nantes apporte son soutien à Benoit Hamon malgré son opposition au projet d’aéroport : ça doit être parce qu’elle prépare son grand débat : Nantes transition énergétique : y’a jusqu’au 31 mars pour dire ce qu’on pense de leur greenwashing pseudo participatif !
►Voilà un entretien retranscrit dans un journal romand (Suisse romande) d’écologie politique avec un camarade romand actif sur la
ZAD
de Notre-Dames-des-Landes : Les
zones à défendre comme refus de pactiser avec le réel
►Et on nous signale la sortie d’un livre sur des luttes en Alsace dans les années 70-80 : qui nous fait revivre les camps d’occupation illégaux mais véritables lieux de vie riches de rencontres et d’expériences démocratiques nouvelles que furent Marckolsheim (1974) ou Wyhl (1975) et décrit la folle aventure des radios libres, au nez et à la barbe des gendarmes, et à travers l’exemple de la pionnière Radio Verte Fessenheim : Une histoire des luttes : L’épopée alsacienne du Dreyeckland
Mardi
7 mars
►Une
nouvelle journée pluvieuse mais déjà les chantiers jardinage
s’activent, entre autres. A ce propos ce WE, une
invitation circule pour participer à un chantier maraichage à l’est
de la zone, avec dans la foulée un
fest noz de soutien à l’Acipa.
Mercredi
8 mars
Des
bus de Nantes et la zad pour la marche du 19 mars
Vous pouvez participer à ce soutien via la cagnotte en ligne https://www.leetchi.com/c/cagnotte-de-bus-zad-nantes-marche-19-mars
►Des
personnes de Nantes et de la ZAD de Notre Dame des Landes
s’organisent pour être nombreux.ses à monter à la marche du 19
mars à Paris contre le racisme, la hogra et la chasse aux
migrant.e.s et pour soutenir les familles des trop nombreuses
victimes de violences policières.
Sans
faire de communication particulière, nous avons déjà l’équivalent
d’un bus presque rempli, et nous voudrions pouvoir en financer au
moins un 2ème, ainsi qu’organiser des covoiturages.
Pour
que ces trajets en bus soient accessibles au plus grand nombre, nous
voulons les proposer à prix libre. Le prix moyen d’un aller retour
étant d’environ 35-40 euros, nous faisons appel à soutien
financier pour prendre en charge une partie de ces frais afin que
l’argent ne soit pas un frein à ce déplacement.
Voir :
_Appels_
http://zad.nadir.org/spip.php?article4384
_Flyers
en pdf_
https://paris.demosphere.eu/files/docs/f-a95e73aa71-empty-filename.pdf
Si
vous voulez réserver une place dans ces bus, surveillez le site
zad.nadir.org, nous publierons prochainement les moyens de
réservations.
Merci
à tou.te.s !
►Violences
policières
Appel
urgent à se rassembler devant le commissariat de Waldeck à Nantes
en soutien aux camarades nassé.e.s et arrêté.e.s lors de la
manifestation de cet après-midi contre les violences policières.
Infos
du 13 au 19 mars
►Fayradiz expulsable ! Appel à soutien - En octobre, à quelques kilomètres de la ZAD de Notre-Dame-des-Landes, un nouveau lieu en mixité choisie MTPGI (meufs, trans, pédés, gouines, intersexes) a vu le jour dans un ancien C.H.R.S (Centre d’Hébergement et de Réinsertion Sociale).
►Casseroles et magouilles :
Une petite casserole pour Bruno Retailleau ? S’il ne peut prétendre égaler son mentor François Fillon, le chantre de " l’état de droit " aurait pataugé dans une affaire de fonds détournés au Sénat. Allez bubu, viens encore nous faire la morale qu’on rigole...
Infos du 20 au 26 mars
►AntiRep :
Mise à jour du guide d’autodéfense juridique. Il y a plus d’un an le collectif CADECOL sortait la 2ème édition du guide d’autodéfense juridique « face à la police / face à la justice » qui a suscité votre intérêt (présentation ici : http://www.actujuridique.com/2eme-edition).Or depuis sa sortie le droit pénal et sa procédure ont déjà fait l’objet d’au moins quatre réformes. Le collectif CADECOL s’est donc attelé à mettre à jour le guide et à publier les modifications sur son nouveau site internet : http://www.actujuridique.com/
Votre guide, en version papier ou numérique, reste donc pleinement utilisable. Il vous suffit de rechercher les mises à jours sur http://www.actujuridique.com/. Elles sont organisées pour qu’il soit facile de les imprimer et de les glisser dans votre guide !
Le
site internet fait peau neuve pour être facile d’utilisation,
n’hésitez pas à le consulter. Le guide, en version numérique
gratuite, s’y trouve également. Pour recevoir une version papier,
le livre est disponible en librairie. Pour les collectifs,
associations, syndicats, bibliothèques auto-gérées, il est
toujours possible de contacter directement notre collectif-auteur
pour d’autres modalités d’acquisitions ou pour envisager des
tournées de présentation/discussion.
►Meuf-Gouine-Trans ZAD :
Ouverture du garage « Clé par clé » sur la ZAD et appel à dons de matériels
"Nous
voulons monter un garage, ouvert à toute personne désireuse de
faire de la mécanique, sur la zad. Cet espace, c’est pour nous
l’occasion de collectiviser des savoirs et du matos, pour les gens
du coin. [...]" " Nous voulons proposer un autre imaginaire
du garage mécanique que celui d’un endroit où seuls les mecs
cisgenre hétéros sont légitimes et écoutés. Nous voulons nous
renforcer sur nos compétences et notre confiance à résoudre des
pannes mécaniques. Et nous préférons faire ça dans un espace où
il est peu probable qu’un mec nous prenne une clé des mains,
remette en question nos diagnostics ou fasse le boulot à notre
place.[...]"
►Fayradiz expulsable ! Appel à soutien :
Infos du 27 au 31 mars
De Bure à NDDL, solidarité face aux interdictions de territoire
Ce lundi 27 mars, Florent, militant contre le projet Cigéo à Bure dans la Meuse vient de braver publiquement son interdiction de territoire et de s’en expliquer. (voir articles du jour dans Reporterre et Mediapart)
Alors
que le mouvement anti-aéroport a été de plus en plus régulièrement
frappé ces dernières années par ce type de répression, voici un
communiqué de solidarité à Florent depuis la zad de
Notre-Dame-des-Landes,
Communiqué du 27 mars 2017 -
De bure à NDDL, solidarité face aux interdictions de territoire.
Depuis
la zad de NDDL, nous apportons notre soutien à la désobéissance de
Florent, interdit de territoire dans le cadre de sa participation à
la lutte contre la poubelle nucléaire de Bure.
Que les juges l’aient souhaité ou non, cette condamnation pourrait avoir pour effet d’intimider tous ceux, de plus en plus nombreux, qui se soulèvent contre le projet de l’ANDRA. Elle peut donc être considérée comme une décision politique, dictée par les intérêts des nucléocrates. Nous appelons à ce que le refus de se soumettre de Florent soit relayée, soutenue, imitée, afin que la peur n’entame pas la résistance.
Au
cours des dernières années de lutte autour de NDDL, des camarades
ont connu des interdictions géographiques de trois types :
consécutives à des condamnations, liées à un contrôle
judiciaire, ou à des mesures administratives prises en vertu de
l’état d’urgence. Nous souhaitons faire part de cette
expérience. Afin que personne autour de Bure ne soit pris au
dépourvu et isolé par une mesure de ce type qui lui serait imposée,
partager l’information au sein de toutes les composantes de la
lutte est crucial.
Nous
invitons par ailleurs tous les groupes et les personnes engagées
contre le projet d’enfouissement de déchets nucléaires à Bure,
y compris depuis NDDL, à soutenir Florent dans la mesure de ses
possibilités. Par un communiqué, une lettre, ou concrètement, par
tous les gestes de solidarité lui évitant d’être interpellé.
Quel
que soit le type de mesures d’interdiction géographique, leur
application à des participants à des luttes comme à Bure ou à
NDDL, où l’attachement à un territoire est essentiel, en fait des
décisions politiques. Constituer les solidarités concrètes
permettant de soutenir ceux qui y désobéissent et ceux qui y
désobéiront, l’affirmer haut et fort, est notre seule chance de
limiter les effets voire de bannir l’usage des interdictions
géographiques dans nos luttes.
Rassemblement
du Corbeau pour célébrer un
an de Nuit Debout à Nantes.
AILLEURS
Infos du 1er au 5 mars
NDA : Avec le souvenir de mes années aux « Comités d’Action Lycéens » en 1970-71 en banlieue parisienne → la lutte continue et une nouvelle arme (de barricade) apparait : la poubelle … Bravo aux parigots !
Le projet de « poubelle nucléaire » de Bure provisoirement gelé par la justice
C’est
une victoire pour les opposants au centre d’enfouissement de
déchets radioactifs (Cigéo), situé à Bure dans la Meuse. Le 28
février, le tribunal administratif de Nancy a annulé la
délibération de la commune de Mandres-en-Barrois, qui a permis à
l’Agence nationale pour la gestion des
déchets radioactifs (Andra) de devenir propriétaire d’une forêt
de 220 hectares, le bois Lejuc, sous lequel doit être construit le
centre d’enfouissement.
A lire sur le sujet : A Bure, habitants et paysans refusent que leur territoire devienne une « grande poubelle nucléaire »
Le tribunal administratif précise que « le vice de procédure qu’il censure est régularisable ». La commune de Mandres-en-Barrois dispose désormais de quatre mois pour adopter une nouvelle délibération approuvant l’échange de forêts. Faute de quoi il faudrait « résilier la convention conclue avec l’Andra ». Cette dernière a réagi en déclarant que cette annulation portait « uniquement sur une question de forme » et que « cela ne signifie pas pour autant le blocage du projet, et encore moins son arrêt » [2]. Le réseau Sortir du nucléaire estime au contraire que « l’Agence n’a plus aucune légitimité pour en expulser les militants et y reprendre des travaux ». Il n’est pas non plus certain que le maire de Mandres-en-Barrois obtienne de nouveau une majorité sur le projet. « Les opinions changent. Si le village au début n’était pas opposé à l’enfouissement, certains habitants reviennent sur leur position », assurent des antinucléaires [3].
Le
dossier est revenu ces derniers jours dans le débat politique. Le
projet de plate-forme présidentielle négocié entre Benoît Hamon
(PS) et Yannick Jadot (Europe Ecologie-Les Verts) prévoit « la
fin du projet d’enfouissement profond de Bure ». L’accord
ajoute que « en l’état, le stockage restera en
sub-surface et des études seront menées pour travailler sur
d’autres options ». Philippe Poutou (NPA) et Jean-Luc
Mélenchon (La France insoumise) sont également opposés au projet
d’enfouissement des déchets à Bure.
Sophie
Chapelle – Bastamag
►Anti-LGV
Un décorticage des arguments des pros LGV Bordeaux-Espagne publié par nos camarades basques : données utiles contre le projet du GPSO LGV Bordeaux / Espagne, édifiant !
NDA :
De plus, ce projet concerne la zad d’Agen (47) avec sa nouvelle
gare TGV (and co) et son triangle ferroviaire entre les lignes Bordeaux-Toulouse et
Bordeaux -Espagne
Infos du 6 au 12 mars
Samedi
11 mars
►GCO
La lutte contre le Grand Contournement Ouest de Strasbourg (Alsace) appelle à plus de mobilisation. Il-les invitent chacun à davantage d’effort sur le terrain pour contrer Vinci qui « ne respecte pas la loi ou s’en arrange. » Plus d’infos "Vinci Geh Heim !"
►Nouveautés du Collectif pour la sauvegarde de la zone humide du TESTET : Méthode et calendrier du projet de territoire du bassin versant du Tescou
Samedi 18 mars
La Bretagne en lutte contre les projets de mines
La géologie du vieux Massif armoricain suscite l’intérêt des entreprises minières, notamment la société Variscan mines. Mais l’opposition des populations complique la conduite des recherches. Un rassemblement est prévu ce samedi, à Guingamp.
Samedi
18 mars 2017, une manifestation est prévue à Guingamp
contre les projets miniers en Bretagne. Trois permis exclusifs de
recherche minière (Perm) ont été délivrés en 2014 et 2015 à la
société Variscan dans le centre de la Bretagne : Loc-Envel,
Merléac et Silfiac. Les recherches y avancent cahin-caha. C’est le
collectif Douar
Didoull (la « terre
sans trou »),
constitué fin 2014 en réponse au permis exclusif de recherche
minière (Perm) de Loc-Envel, qui appelle à manifester, en raison
d’une double actualité. « Variscan
a déposé son programme de travaux pour l’année à la préfecture
et il y est mentionné des sondages dans la forêt de Koad an noz. De
plus, des maires ont pris, au nom du principe de précaution, des
arrêtés interdisant le survol de leur commune en aéronef émettant
des ondes, et la société Variscan assigne en justice ces
communes »,
explique Lamine Ndiaye, de Douar Didoull.
La
première phase de prospection minière sur le terrain consiste à
faire de petits prélèvements, à la main ou à la tarière, et à
mener une recherche géophysique aérienne par électromagnétisme.
Sur ces deux aspects, la société minière rencontre des difficultés
à avancer les travaux en Bretagne. Sur le permis de Loc-Envel,
« nous avons fait signer des refus de prélèvements aux
propriétaires qui le souhaitaient. 80 % du territoire est ainsi
refusé d’accès à Variscan. Dans certaines communes, cela atteint
100 % », explique le collectif Douar Didoull. Cette
stratégie atteint toutefois ses limites avec la forêt domaniale de
Koad an noz, où des prélèvements sont prévus. Contactée par nos
soins, la société Variscan n’a pas pu répondre précisément sur
l’avancée des travaux à Loc-Envel, si ce n’est « qu’il
n’y a actuellement pas de chargé de mission sur les permis de
Loc-Envel et Silfiac et pas d’activité sur le terrain ».
|
Avec
cette manifestation, « on
demande à la population de montrer à nouveau qu’il n’y a pas
d’acceptation sociale »,
résume Lamine Ndiaye. Ce rassemblement s’inscrit dans une série
de mobilisations contre les permis miniers depuis leur attribution à
partir de 2014. Le 5 mars dernier, une chaîne humaine
réunissait 1.500 personnes, d’après Ouest-France,
là où des forages doivent être réalisés sur le permis de
Merléac. En mai 2016, une vente symbolique des forêts de Koad an
noz et Koad an nay, du Perm de Loc-Envel, était organisée par Douar
Didoull afin d’inviter la population « à
se réapproprier la forêt »,
les dons récoltés en échange de « titres
de propriété symbolique »
alimentant la caisse du collectif. En août 2016, un festival
des luttes organisé par Douar Didoull sur le site du Perm de
Loc-Envel comptabilisait 3.000 entrées sur trois jours.
Les capitaux de Variscan viennent d’Australie et du Canada
Depuis
2014, trois permis ont été attribués dans le centre de la Bretagne à
la société Variscan. Celui de Merléac, attribué en novembre 2014,
porte sur 409 km2. Du cuivre, du zinc, du plomb, de l’or, de
l’argent et des substances connexes y sont recherchés. Ceux de
Loc-Envel et de Silfiac ont été attribué en septembre 2015.
Aux métaux recherchés à Merléac s’ajoutent le tungstène,
l’étain, le molybdène et le germanium. Les permis de recherche
permettent à une société d’explorer le sous-sol pendant une
période de cinq ans, avant une possible exploitation, qui
nécessitera l’octroi d’un autre permis.
De
plus, deux demandes de permis sont en cours d’instruction dans le
Finistère : le permis de Penlan, demandé par la société SGZ,
et le permis de Lopérec, demandé par Sudmine. Cette concentration
de recherche en Bretagne s’explique par la géologie des vieux
massifs, comme le Massif armoricain, mais également le Massif
central, les Vosges et les Pyrénées, où se trouvent peut-être des
gisements.
La
société Variscan détient 7 des 10 permis délivrés dans
l’Hexagone depuis 2013. « Il y a un taux de succès de 1
pour 10 : c’est-à-dire que pour 10 projets, un seul mène
à une exploitation. Pour ces raisons, nous déposons plusieurs
dossiers », nous expliquait Michel Bonnemaison, le
directeur général de Variscan mines, dans un entretien accordé en
février 2016.
L’entreprise,
basée à Orléans, a été fondée par deux anciens géologues du
BRGM (Bureau des recherches géologiques et minières) en
décembre 2010. « On s’était dit que l’on voulait
une société française. On a cherché en France des capitaux, mais
personne n’est venu. Alors, on a élargi le cercle. Pour la mine,
c’est vite vu, c’est soit le Canada, soit l’Australie »,
décrivait Michel Bonnemaison. La société Variscan a finalement
trouvé des capitaux australiens.
En
plus de la levée de fonds et de la qualité du gisement, les
sociétés minières doivent composer avec l’acceptabilité sociale
de leur projet. En Bretagne, des associations et collectifs
s’opposant aux projets miniers se sont progressivement constitués
suite à l’attribution des permis.
- Le
permis de Loc-Envel couvre 336 km2.
-
Sur
le permis de Merléac, Vigil’oust a vu le jour début 2016 avec
une quinzaine de personnes « en réaction au manque
d’information, explique une militante. Pendant un an, on a
cherché de l’information et on l’a distribuée. »
Pollutions, risques pour la santé, non-durabilité de l’activité
extractive… ces recherches ont conforté les membres de
l’association dans leur rejet du projet minier. Aujourd’hui,
environ 400 personnes adhèrent au mouvement.
-
|
« Soit la région souhaite créer des emplois miniers, soit elle ne le souhaite pas »
À
Merléac, les travaux sont plus avancés que sur les Perm de
Loc-Envel et de Silfiac, où l’opposition a commencé à se
structurer avant même l’octroi des permis. Trois forages
d’exploration y sont prévus pour les mois à venir. Ils auront
lieu sur la commune de Saint-Martin-des-Prés, qui compte
400 habitants. Son maire, Christian Le Riguier, est favorable
aux recherches actuelles. « Je suis curieux de savoir ce que
l’on a sous nos pieds. Et si on a des richesses, tant mieux. »
Mais « on ne peut pas se positionner sur l’exploitation,
puisque pour l’instant ce n’est que de la recherche »,
insiste-t-il. « Un forage, c’est un trou d’un diamètre
de 10 centimètres », décrit-il.
Pour
Vigil’oust, « les forages sont les prémices d’une
exploitation minière » et l’association s’y oppose.
Elle a mis en place une « alerte foreuse ». « C’est
une liste téléphonique d’environ 500 personnes à qui l’on
enverra un message lorsque les foreuses arriveront pour qu’elles
viennent s’y opposer sur place », explique une militante.
En parallèle, l’association travaille à un recours juridique
contre les autorisations de forage.
« Personnellement,
je n’ai pas de retour négatif de la part de mes administrés, si
ce n’est d’une petite poignée de personnes qui s’opposent plus
par principe que pour autre chose », contrecarre le maire
de Saint-Martin-des-Prés. « S’il y a des difficultés
lors des forages, ce ne sera pas de la part de la population
martinaise. »
Parmi
les 33 communes du Perm de Merléac (avant la constitution de
communes nouvelles au 1er janvier 2017), « 7 ont
délibéré en conseil municipal sur la question et ont voté contre
la poursuite des recherches minières », d’après
Vigil’oust. À St-Martin-des-Prés, « nous en avons
discuté, mais nous refusons de prendre une délibération à ce
sujet, car c’est du domaine de l’État. On n’a pas d’avis à
donner », explique Christian Le Riguier.
Sur
le Perm de Merléac, la population est divisée. « On en a
pour 20 ans de climat tendu. J’aimerais bien qu’un jour
Variscan vienne s’excuser d’avoir mis le bordel dans nos
communes », glisse une militante de Vigil’oust.
Lors
d’une réunion d’information auprès d’élus concernés par le
permis de Merléac, Michel Bonnemaison, le directeur de Variscan
mines, annonçait il y a quelques jours : « Si
nous risquons de nous heurter à une résistance du type
Notre-Dame-des-Landes, nous ne pourrons insister longtemps. Soit la
région souhaite créer des emplois miniers, soit elle ne le souhaite
pas »,
relayait Ouest-France.
Dans un entretien accordé en février 2016, Michel Bonnemaison
estimait qu’une exploitation minière pouvait générer 150 emplois
directs, auxquels il faut ajouter les emplois indirects. Évoquant
l’opposition rencontrée sur le Perm de Tennie, à cheval entre la
Sarthe et la Mayenne, il prévenait : « Il
faut savoir que cette attitude gèle tout projet minier pour les
trente ans à venir. »
La même chose pourrait s’appliquer aux Perm bretons.
A
toutes fins utiles par les temps qui courent et la répression qui
galope, un p’tit tour sur la mise à jour de la deuxième édition
du guide
d’autodéfense juridique.
De liens en liens, les résistances s’agrègent, comme demain à Paris : Fortes et forts de la richesse et de la diversité de nos pratiques,
on
marche ensemble contre le racisme d’état et la répression.
dans
le respect des modalités souhaitées par les familles de
victimes de crimes policiers.
►Ici, un texte du syndicat de la magistrature, qui appelle à rejoindre la marche, et alerte sur " les prérogatives policières et leurs dérives, leur traitement judiciaire et ses impasses."
►Paris : manifestation nationale pour les free-party :
https://taranis.news/2017/03/paris-manifestation-nationale-pour-les-free-party-manifestive/
Dimanche
19 mars
►GCO :
Ça résiste aussi en Alsace, avec une nouvelle édition de la marche des cabanes organisée aujourd’hui contre Vinci et son Grand Contournement de Strasbourg.En marche contre les violences policières
Derrière le
cortège de tête, une foule anonyme et métissée. La préfecture
de police de Paris a compté 7 000 à 7 500 manifestants.
En
tête de la manifestation, les familles des victimes de violences
policières, tuées, blessées ou incarcérées, portent une
banderole déclinant leurs visages et notamment la mère d’Antonin
Bernanos (lire
son blog sur Mediapart),
détenu depuis mai 2016.
Des
membres du collectif Pas
sans nous sont venus de Marseille, Angers, Toulouse, Lyon…
On
croise dans le cortège le collectif afro-féministe MWASI,
« intersectionnel, insurrectionnel ».
Sur
le camion du FUIQP, le Front uni des
immigrations et des quartiers populaires.
Des
sans-papiers clament « Ils ne sont pas dangereux, ils sont
en danger, Refugee Welcome ».
Deux
mains s’enlacent au-dessus d’une banderole.
Amnesty
International avait dépêché des observateurs.
Hommage
à Babacar, tué par la police à Rennes fin 2015.
La
Brigade anti-négrophobie.
Les
militants de l’Action antifasciste (AFA) Paris banlieue.
NDA :
hommage à Clément Méric
©
Yann Lévy
Au micro, place de la République, la sœur de Lamin Dieng, décédé en 2007 après une interpellation, prend la parole.
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Yann Lévy
Place de la République, Amal Bentounsi, du collectif Urgence, notre police assassine, prononce un discours ponctué d’émotion.
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Yann Lévy
Place
de la République, le frère et la mère de Wissam
El-Yamni, interpellé à Clermont-Ferrand dans la nuit du 31
décembre au 1er janvier 2012 et mort après neuf jours de coma.
►Paris :
manifestation pour la dignité, contre le racisme et les violences
policières :
-
→https://taranis.news/2017/03/paris-marche-pour-la-dignite-contre-le-racisme-et-les-violences-policieres/
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Yann Lévy
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Yann Lévy
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Yann Lévy
Place
de la République, le frère et la mère de Wissam
El-Yamni, interpellé à Clermont-Ferrand dans la nuit du 31
décembre au 1er janvier 2012 et mort après neuf jours de coma.
►Paris :
manifestation pour la dignité, contre le racisme et les violences
policières :
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→https://taranis.news/2017/03/paris-marche-pour-la-dignite-contre-le-racisme-et-les-violences-policieres/
→PARIS : UN RG DÉGUISÉ EN JOURNALISTE PÈTE UN PLOMB ET NOUS CRACHE DESSUS
Infos du 20 au 26 mars
À Paris, des milliers de personnes ont demandé la fin des violences policières
-
Dimanche 19 mars, des milliers de personnes ont marché à Paris pour protester contre les violences policières. Unissant, non sans mal, collectifs des quartiers populaires et organisations politiques ou syndicales, mais aussi zadistes de Notre-Dame-des-Landes.
-
-
Paris,
reportage
« Justice et Dignité. Stop à l’impunité policière. » Le slogan encadre les portraits dessinés de Lahoucine Aït Homgar, Lamine Dieng, Morad Touat, etc. C’est derrière cette banderole en noir et blanc qu’ont défilé, unies, les familles de nombreuses victimes présumées des violences policières hier dimanche 19 mars.
- « Un par mois. C’est, en moyenne, le nombre de pères, de frères, de fils que nous perdons à cause de la brutalité des forces de l’ordre », proclamait l’appel circulant depuis fin 2016 sur les réseaux sociaux. Pour les soutenir, environ 7.000 personnes selon la préfecture de police, 10.000 selon les organisateurs, ont participé à la manifestation parisienne qui a marché de la place de la Nation à la place de la République.
- Paris, reportage
Les persécutions, différentes des violences policières
- « On parle de persécutions policières »
Sont aussi venus des habitants de la Zad de Notre-Dame-des-Landes et de Bure. « Nous sommes environ 200 », estime Benji. Faisant toute la largeur du boulevard, tenue bien haute, leur banderole proclame : « Des quartiers à la ZAD, osons nous organiser. Et que crève la suprématie blanche. » Leur venue s’est décidée après un week-end consacré aux violences policières fin février sur la Zad. « On est là pour manifester notre soutien aux personnes qui subissent les persécutions policières, explique Benji. On parle de persécutions parce que dans les quartiers ils subissent la police au quotidien. Alors que nous, militants, nous ne la subissons que ponctuellement, en particulier lors des manifestations, et ce sont donc des violences policières. »
Cheveux
blancs et sourire vif, Catherine a assisté au procès du policier
Damien Saboundjian, condamné en appel à 5 mois de prison avec
sursis pour avoir tué d’une balle dans le dos Amine Bentounsi.
« Si je vous dis que les rapports d’experts ont été
bidonnés, c’est gentil. Et le lieu de sa mort n’a même pas été
considéré comme une scène de crime ! »,
s’insurge-t-elle. Elle a été prof en Seine-Saint-Denis durant
plus de 30 ans. « Je mène cette bataille depuis tant
d’années... » Mais la goutte qui a fait déborder le
vase, « c’est quand j’ai vu qu’on faisait une loi pour
renforcer la légitime défense des policiers et qu’on leur
autorisait le port d’armes hors service. »
Collectifs, associations, syndicats, partis politiques présents dans la marche
Au-delà des collectifs de soutien aux familles, de nombreuses organisations ont répondu à l’appel pour la marche du 19 mars : Collectif contre la négrophobie, Front Uni des immigrations et des quartiers populaires, collectifs de sans-papiers venus demander leur régularisation, Union juive française pour la paix, Union des travailleurs maghrébins de France, Act’up Paris, mais aussi Attac ou encore Droit au logement.
En
fin de cortège, le ballon du syndicat Solidaires et quelques
autocollants FSU, des drapeaux de la CGT, suivis de certains partis
politiques. Les couleurs du mouvement Ensemble (membre du Front de
Gauche), du Parti communiste, du NPA (Nouveau parti anticapitaliste)
et de Lutte ouvrière s’affichent avec leurs drapeaux. Eric
Coquerel, du Parti de gauche ou Philippe Poutou, candidat du NPA, ont
aussi été aperçus.
« Le
19 mars est la journée internationale contre les violences
policières. Je manifeste tous les ans et c’est la première fois
qu’il y a autant d’échos auprès des médias », se
réjouit Elise Languin, du Collectif Vérité et justice pour Ali
Ziri. Le vieil homme de 69 ans est mort le 11 juin 2009 lors
d’une interpellation : son immobilisation forcée aurait
provoqué une asphyxie. Après des non-lieux successifs de la justice
française, l’affaire est désormais devant la Cour européenne des
droits de l’Homme.
Pour
Mme Languin, ce rassemblement est une victoire. « Je
partage les réticences par rapport à certains partis présents,
mais on est arrivé à ce que le mot de violences policières, au
lieu de bavures, soit repris par la presse. C’est désormais
reconnu comme un phénomène, tout comme le fait qu’il y a une
impunité policière », se félicite-t-elle.
Des risques de récupération ?
L’organisation
de la marche n’a pas fait l’unanimité. Celle organisée fin
février à Paris à l’appel de SOS Racisme, du Cran ou encore de
la Ligue des droits de l’Homme avait essuyé les critiques des
collectifs de soutien aux familles des victimes, comme l’avait
noté Reporterre.
Cette
fois-ci, les familles étaient en première ligne et c’est Amal
Bentounsi, sœur d’Amine Bentounsi, qui a coordonné l’organisation
de l’événement avec le Collectif Urgence notre police assassine.
Mais la famille d’Adama Traoré a préféré s’abstenir.
« Dimanche,
des cars vont partir de villes de province pour emmener des militants
à Paris. Mais il n’y en aura aucun pour aller chercher les jeunes
des quartiers populaires. Personne n’est allé les voir. Ils ne
sont pas au courant de cette marche. Ils ne viendront pas »,
a
déclaré sa sœur Assa Traoré au journal Le
Monde.
Par
ailleurs, la participation des partis politiques a refroidi certains
militants des quartiers populaires. C’est ainsi qu’une tribune
publiée par le blog Quartiers libres, s’est inquiétée de cette
mobilisation large allant du « showbizz »,
avec certains artistes, au Parti de gauche (PG).
« C’est
irréel de présenter la présence du PG à la marche comme le signe
d’une victoire politique des tenants de l’antiracisme
structurel », estime le texte, qui dénonce au contraire
une récupération et « la présence massive de la gauche
moralisatrice ». Le « racisme structurel » :
c’est ce que dénoncent de nombreux participants à la
manifestation, citant notre histoire coloniale comme source du
racisme persistant et des persécutions policières qui en découlent.
Les partis politiques sont ainsi accusés de n’avoir jamais voulu
voir le problème en face.
Les
désaccords autour de l’organisation de la marche découlent aussi
des questions qui traversent le mouvement anti-raciste : faut-il
nécessairement faire partie des discriminés pour dénoncer le
racisme ? Quelles convergences entre lutte contre le racisme et
lutte des classes ?
Arrivée
place de la République, une scène et de la musique attendent les
manifestants. La cantine végane de la Zad et le Cartel des cantines
en lutte proposent des sandwichs à prix libre à des manifestants
ravis de reprendre quelques forces après la longue marche. Prises de
paroles et concerts doivent se succéder jusqu’à 23 heures. Puis
les familles de victimes de violences policières montent sur scène.
« Il y a cinq ans, quand on manifestait, on se faisait
insulter et traiter d’antiflics primaires », rappelle aux
côtés d’Amal Bentounsi le frère de Wissam El Yamni, Farid. « On
ne veut pas lâcher, parce que si on accepte les violences policières
derrière ce sont toutes les violences d’État et les processus qui
les permettent que l’on cautionne. »
Face aux dissensions, Benji préfère citer l’appel de la Zad à soutenir la marche, qui précise qu’ils ne sont pas venus pour « aider » mais, « pour reprendre les mots de Lilla Watson, militante aborigène, parce que nos libérations sont liées. »
Bure : pour les juges, l’Andra n’a pas menti sur la géothermie
Jeudi
23 mars, le tribunal de Versailles a refusé de considérer que
le potentiel géothermique de Bure pouvait empêcher le projet Cigeo.
« Un
jugement mi-figue mi-raisin. » Pour Maître Etienne
Ambroselli, l’avocat des opposants au projet d’enfouissement des
déchets nucléaires, dit Cigeo, à Bure, l’arrêt de la Cour
d’appel de Versailles est « un progrès, même s’il est
décevant ». Contre l’avis des millitants, les juges ont
en effet estimé que l’Andra ( l’Agence nationale de gestion des
déchets radioactifs) - dont la mission est d’informer le public -
n’a pas caché l’existence d’une ressource en géothermie sous
le site de Bure.
Même
si la Cour a confirmé que les associations (Réseau Sortir du
nucléaire, Bure Stop 55, Cedra...) avaient intérêt à agir - leur
plainte contre l’Agence nationale des déchets radioactifs (Andra)
est donc recevable - l’arrêt les déboute sur le fond.
Rappel
des faits : pour réaliser son projet d’enfouissement des
déchets nucléaires à Bure (Meuse), l’Andra doit notamment
vérifier l’absence de ressource géothermique potentiellement
exploitable. Comme l’expliquait l’opposant Michel Marie à
Reporterre
en
janvier 2015, « on
ne fait pas d’enfouissement dans un secteur où se trouve une
ressource quelconque, parce que nos descendants, ayant oublié
l’existence d’un tel dépotoir souterrain, risqueraient d’aller
chercher cette ressource et de tomber sur la boîte de Pandore. On
imagine les conséquences. »
Pour
l’Andra, la ressource géothermique à Bure est « faible ».
Pas de soucis, donc.
Mais d’après les associations
anti-nucléaires, cette ressource est au contraire présente et
exploitable : « Pour pouvoir implanter Cigéo à Bure,
l’Andra a cherché, au mépris des règles de sûreté, à
minimiser cette ressource géothermique », estime le réseau
Sortir du nucléaire.
En
mars 2015, le Tribunal de grande instance de Nanterre refuse pourtant
de prendre acte de la faute commise par l’Andra dans sa mission
d’information, déclarant que les associations n’avaient pas
d’intérêt à agir. Ce jeudi 23 mars, la Cour d’appel de
Versailles a pour sa part refusé de prendre acte de la faute commise
par l’Andra. Les associations envisagent de saisir la Cour de
cassation.
Mais d’après les associations anti-nucléaires, cette ressource est au contraire présente et exploitable : « Pour pouvoir implanter Cigéo à Bure, l’Andra a cherché, au mépris des règles de sûreté, à minimiser cette ressource géothermique », estime le réseau Sortir du nucléaire.
Infos du 27 au 31 mars
Florent, militant contre Cigéo: « Je me soustrais à mon interdiction de territoire »
Interdit de séjour dans la
Meuse, en raison de sa participation au mouvement contre le centre
d’enfouissement de déchets nucléaire de Bure, Florent affirme sa
décision de désobéir, pour « faire voler en éclats
la logique de répression qui s’abat sur un seul individu ».
C’est un témoignage lourd de conséquences que Mediapart publie aujourd’hui : à la fois récit personnel et acte de désobéissance civile. Un militant contre le centre d’enfouissement de déchets nucléaires Cigéo, à Bure (Meuse), annonce vouloir briser son interdiction judiciaire de territoire. Florent a été condamné à six mois de prison avec sursis en septembre 2016 pour violence sur une personne dépositaire de l’autorité publique. En juillet 2016, il avait mordu le doigt du gendarme qui l’interpellait en le saisissant par l’arrière, au pied d’une barricade noyée sous les gaz lacrymogènes. Un réflexe malheureux, décrit-il aujourd’hui. Son sursis est assorti d’une mise à l’épreuve de deux ans, qui lui interdit de « paraître » dans le département de la Meuse pendant cette durée.
Habitant de Metz, ancien travailleur social, sans emploi aujourd’hui, il se consacre à la lutte contre le site que l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra) entend mettre en service en 2025 sur la commune de Bure pour y enfouir les déchets les plus dangereux du système nucléaire français. L’été 2016, plusieurs dizaines d’opposants à ce qu’ils appellent une « poubelle nucléaire » ont occupé une partie du bois Lejuc, où l’agence devait conduire des travaux préliminaires. C’est lors de cette action que Florent a été arrêté. Après l’expulsion des militants le 7 juillet, la forêt a été réoccupée quelques semaines plus tard.
Près de huit mois ont passé et ses habitants s’y trouvent toujours, confortés par plusieurs décisions de justice : l’annulation de la délibération accordant à l’agence la propriété du bois, le rejet du mur construit par l’Andra et sa condamnation à le détruire, le refus de la demande d’expulsion des opposants – une nouvelle audience doit se tenir le 5 avril à ce sujet. Le 18 février dernier, plusieurs centaines de personnes (700 selon les organisateurs) ont manifesté contre le projet Cigéo et la présence de l’Andra. À l’issue de la manifestation, les grilles entourant le site du laboratoire ont été renversées. Fait rare, les associations locales habituées à organiser des marches pacifiques ont affiché leur solidarité vis-à-vis de cette action offensive. Des affrontements ont eu lieu avec les gendarmes disposés pour protéger le bâtiment du laboratoire.
Florent,
militant anti-Cigéo, se soustrait à son interdiction du territoire
de la Meuse (DR)
Habitant de Metz, ancien travailleur social, sans emploi aujourd’hui, il se consacre à la lutte contre le site que l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra) entend mettre en service en 2025 sur la commune de Bure pour y enfouir les déchets les plus dangereux du système nucléaire français. L’été 2016, plusieurs dizaines d’opposants à ce qu’ils appellent une « poubelle nucléaire » ont occupé une partie du bois Lejuc, où l’agence devait conduire des travaux préliminaires. C’est lors de cette action que Florent a été arrêté. Après l’expulsion des militants le 7 juillet, la forêt a été réoccupée quelques semaines plus tard.
Près de huit mois ont passé et ses habitants s’y trouvent toujours, confortés par plusieurs décisions de justice : l’annulation de la délibération accordant à l’agence la propriété du bois, le rejet du mur construit par l’Andra et sa condamnation à le détruire, le refus de la demande d’expulsion des opposants – une nouvelle audience doit se tenir le 5 avril à ce sujet. Le 18 février dernier, plusieurs centaines de personnes (700 selon les organisateurs) ont manifesté contre le projet Cigéo et la présence de l’Andra. À l’issue de la manifestation, les grilles entourant le site du laboratoire ont été renversées. Fait rare, les associations locales habituées à organiser des marches pacifiques ont affiché leur solidarité vis-à-vis de cette action offensive. Des affrontements ont eu lieu avec les gendarmes disposés pour protéger le bâtiment du laboratoire.
C’est dans ce contexte conflictuel, marqué par une hostilité grandissante au site d’enfouissement, que Florent, âgé de 33 ans, s’est présenté un matin de mars dans les locaux de Mediapart pour décrire sa situation et annoncer sa décision. « Je souhaite annoncer publiquement que je me soustrais à mon interdiction de territoire. » Cette peine est « complètement absurde. Je n’ai plus envie de valider la logique de la répression. Avec ce type de condamnation, tu te retrouves à être ton propre geôlier. Tu es très enfermé. Tu es très seul. Ça te coupe de tes camarades ».
Pourquoi proclamer par média interposé (il doit tenir une conférence de presse ce lundi 27 mars au matin) cet acte de désobéissance ? « Je suis dans une position privilégiée : cela a plus de portée de le faire depuis Bure, car c’est une lutte sur la pente ascendante, qui fait l’actualité. Je le fais pour faire voler en éclats la logique de répression qui s’abat sur un seul individu. Cette question des interdictions de territoire concerne tout le monde. Si tu ne poses pas des actes forts d’insoumission, le débat ne sera jamais posé. » Depuis 2012 et l’échec de l’évacuation de la ZAD de Notre-Dame-des-Landes, des militants sont condamnés à des interdictions judiciaires de territoire qui les coupent de leur terrain d’action. Dans un communiqué, les opposant.es au projet d'enfouissement de déchets nucléaires Cigéo déclarent «leur soutien total à l'action de Florent» et annoncent relayer« son appel à désobéir massivement aux restrictions de liberté de circulation, qu'elles soient administratives ou judiciaires. »
Pourquoi proclamer par média interposé (il doit tenir une conférence de presse ce lundi 27 mars au matin) cet acte de désobéissance ? « Je suis dans une position privilégiée : cela a plus de portée de le faire depuis Bure, car c’est une lutte sur la pente ascendante, qui fait l’actualité. Je le fais pour faire voler en éclats la logique de répression qui s’abat sur un seul individu. Cette question des interdictions de territoire concerne tout le monde. Si tu ne poses pas des actes forts d’insoumission, le débat ne sera jamais posé. » Depuis 2012 et l’échec de l’évacuation de la ZAD de Notre-Dame-des-Landes, des militants sont condamnés à des interdictions judiciaires de territoire qui les coupent de leur terrain d’action. Dans un communiqué, les opposant.es au projet d'enfouissement de déchets nucléaires Cigéo déclarent «leur soutien total à l'action de Florent» et annoncent relayer« son appel à désobéir massivement aux restrictions de liberté de circulation, qu'elles soient administratives ou judiciaires. »
Début juin 2016, Florent se rend pour la première fois à Bure pour la marche des 200 000 pas, un rassemblement antinucléaire qu’organisent plusieurs associations locales. L’Andra s’apprête alors à défricher une partie du bois pour mener des forages et des relevés de terrain en vue de préparer sa demande d’autorisation de travaux, prévue pour 2018. Parmi les opposants naît l’idée d’occuper la forêt pour les en empêcher.
Le 19 juin, un pique-nique militant se transforme en prise des lieux, ainsi que le raconte Florent : « Environ 250 personnes se retrouvent. C’est une manifestation familiale, avec des gens de 7 à 77 ans, et offensive à la fois. Une bétaillère tirée par un tracteur transporte le matériel nécessaire à l’installation d’un camp et d’une baraque, la Salamandre, préparée en kit pour être montée sur place. Les gendarmes observent à distance. Une palissade barbelée installée par l’Andra pour isoler la parcelle où ils voulaient défricher est cisaillée et poussée à terre. On arrive sur la plate-forme. Une quinzaine de vigiles nous attendent, accoudés à leurs 4X4. Un groupe portant une banderole renforcée va au contact. On les invective. Des copines et des copains commencent à les encager dans la clôture tombée à terre. Le commandant des gendarmes vient voir et demande aux vigiles de partir. On commence à pique-niquer. On sent une énergie collective incroyable. C’est un pique-nique familial et une action directe. J’ai vu des gosses une pince coupante à la main. Dans le cours de l’après-midi, quatre ou cinq barricades se montent. »
Arrive le soir. « Vers 6 ou 7 heures du soir, première assemblée générale. Les flics ne viennent pas. On envisage une première nuit d’occupation. Le temps est suspendu. Une feuille de temps de présence circule : qui peut rester jusqu’à minuit, jusqu’à demain matin ? Une cinquantaine de personnes mettent des croix. C’est suffisant. On reste. Un sleeping de fortune est installé : on jette une bâche et de la paille derrière une barricade. Heureusement, il fait beau. On est assez surpris que les gendarmes nous laissent faire. »
Le 19 juin, un pique-nique militant se transforme en prise des lieux, ainsi que le raconte Florent : « Environ 250 personnes se retrouvent. C’est une manifestation familiale, avec des gens de 7 à 77 ans, et offensive à la fois. Une bétaillère tirée par un tracteur transporte le matériel nécessaire à l’installation d’un camp et d’une baraque, la Salamandre, préparée en kit pour être montée sur place. Les gendarmes observent à distance. Une palissade barbelée installée par l’Andra pour isoler la parcelle où ils voulaient défricher est cisaillée et poussée à terre. On arrive sur la plate-forme. Une quinzaine de vigiles nous attendent, accoudés à leurs 4X4. Un groupe portant une banderole renforcée va au contact. On les invective. Des copines et des copains commencent à les encager dans la clôture tombée à terre. Le commandant des gendarmes vient voir et demande aux vigiles de partir. On commence à pique-niquer. On sent une énergie collective incroyable. C’est un pique-nique familial et une action directe. J’ai vu des gosses une pince coupante à la main. Dans le cours de l’après-midi, quatre ou cinq barricades se montent. »
Arrive le soir. « Vers 6 ou 7 heures du soir, première assemblée générale. Les flics ne viennent pas. On envisage une première nuit d’occupation. Le temps est suspendu. Une feuille de temps de présence circule : qui peut rester jusqu’à minuit, jusqu’à demain matin ? Une cinquantaine de personnes mettent des croix. C’est suffisant. On reste. Un sleeping de fortune est installé : on jette une bâche et de la paille derrière une barricade. Heureusement, il fait beau. On est assez surpris que les gendarmes nous laissent faire. »
Cette première occupation dure 19 jours. « C’est assez stressant. Le soleil se lève vers 5 heures, 5 h 30. On craint d’être expulsés à l’aube. On instaure le “réveil déter”. À 5 heures, quelqu’un crie : “Il est 5 heures, réveil déter !” On s’équipe de masques, de pierres ou de bâtons à portée de main et on se montre à l’orée du bois, car on se sait observés. Puis on se recouche, ou on démarre la vie du campement : cuisine, logistique, autowash [chacun fait la vaisselle tour à tour – ndlr]. Le deuxième matin, des vigiles viennent tester notre défense. »
Le camp s’installe, les premiers reportages médiatisent l’occupation. Un appel à soutien militant est lancé. « Au bout de quelques jours, les premières relèves arrivent. Pendant la semaine, nous sommes entre 30 et 40 personnes à dormir dans le bois. Le week-end, on est entre 80 et 90 personnes. Des associations viennent. Je n’ai jamais vu autant de monde en réunion publique. »
« Un matin, on se réveille à 6 h 20 : les casqués sont là ! »
Pour Florent, militant de longue date et marqué par sa lecture du psychanalyste Félix Guattari, notamment de son livre Les Trois Écologies, « le but de l’occupation de la forêt n’est pas simplement de gripper la machine. C’est aussi un formidable lieu d’émancipation. On discute de la critique du salariat, de féminisme. J’ai vu des copines marcher torse nu, tenir des réunions et des chantiers non mixtes. Des formes de vie apparaissent ». Pour le jeune homme, « il y a une filiation avec l’autonomie italienne et le mouvement contre la centrale de Creys-Malville. Si tu as une préoccupation anticapitaliste, tu es obligé d’être dans la critique du nucléaire. Car le système nucléaire montre de manière criante que le capitalisme est une gestion de crise en permanence. On peut tout valider avec la logique du capital, y compris les déchets dégueulasses pour 100 000 ans. On s’en fout, on continue. C’est dément. Avec Cigéo, ils veulent faire un mausolée du nucléaire. Cela montre le caractère fou du capitalisme. En mettant un grain de sable dans cette logique par l’occupation de la forêt, c’est cette folie qu’on interroge ».
Le campement est survolé par un hélicoptère de la gendarmerie. Au bout d’une semaine, une ordonnance d’expulsion est transmise aux occupants. Ils risquent de se faire évacuer à tout moment. Le 7 juillet à l’aube, deux escadrons de gendarmes investissent le bois Lejuc pour en déloger les militants. « On avait eu pas mal de fausses alertes, raconte Florent. On montait la garde et on avait un code. On crie “les képis !” s’il n’y a pas d’inquiétude à avoir, “les casqués !” si les gendarmes mobiles arrivent. Un matin, on se réveille à 6 h 20 : “Les casqués sont là !” On descend vers les barricades. On voit les visières qui teintent à l’horizon, comme des flashs d’appareil photo. C’étaient les gendarmes mobiles. Ils devaient être 200. Un peloton casqué avançait très doucement, d’une barricade à l’autre. Et en même temps, des PSIG [pelotons de surveillance et d’intervention de la gendarmerie – ndlr] contournaient à travers le bois pour nous interpeller. Notre stratégie était de faire brûler les barricades en nous retirant pour les ralentir et poser une conflictualité, avec un mélange d’essence et d’huile de vidange. Un hélico nous survolait, ainsi qu’un petit drone, à 15 ou 20 mètres au-dessus de nous. Les communications étaient coupées. On ne pouvait plus s’appeler ni envoyer de SMS. »
Le campement est survolé par un hélicoptère de la gendarmerie. Au bout d’une semaine, une ordonnance d’expulsion est transmise aux occupants. Ils risquent de se faire évacuer à tout moment. Le 7 juillet à l’aube, deux escadrons de gendarmes investissent le bois Lejuc pour en déloger les militants. « On avait eu pas mal de fausses alertes, raconte Florent. On montait la garde et on avait un code. On crie “les képis !” s’il n’y a pas d’inquiétude à avoir, “les casqués !” si les gendarmes mobiles arrivent. Un matin, on se réveille à 6 h 20 : “Les casqués sont là !” On descend vers les barricades. On voit les visières qui teintent à l’horizon, comme des flashs d’appareil photo. C’étaient les gendarmes mobiles. Ils devaient être 200. Un peloton casqué avançait très doucement, d’une barricade à l’autre. Et en même temps, des PSIG [pelotons de surveillance et d’intervention de la gendarmerie – ndlr] contournaient à travers le bois pour nous interpeller. Notre stratégie était de faire brûler les barricades en nous retirant pour les ralentir et poser une conflictualité, avec un mélange d’essence et d’huile de vidange. Un hélico nous survolait, ainsi qu’un petit drone, à 15 ou 20 mètres au-dessus de nous. Les communications étaient coupées. On ne pouvait plus s’appeler ni envoyer de SMS. »
Les occupants reculent au fur et à mesure que les gendarmes avancent. « On arrive à un point de fixation. Il y avait une petite tranchée devant une barricade et un pont-levis en palette. Le peloton de gendarmes sature la zone de lacrymos. Je suis accroupi derrière la barricade. Je regarde le peloton. Et soudain je sens une main gantée sur ma bouche. Un gendarme est en train de m’attraper. Par réflexe, je mords son auriculaire. Je l’entends crier. Il retire sa main. Il m’entrave, je tombe. Je crie : “Je laisse faire !” Je le vois retirer son gant et regarder son doigt. Je leur parle : “Soyez cool, je suis cool.” Un autre gendarme : “Il n’est pas cool. Il a chahuté des gendarmes.” Ils me tiennent. Ils me font allonger au sol pour me menotter, me notifient ma garde à vue. »
Selon le compte-rendu d’action des gendarmes, le jeune homme leur a jeté des pierres et des projectiles. Au bout de quelques heures, les forces de l’ordre ont pris possession de la forêt. Très vite, l’Andra fait ériger un mur de béton pour empêcher qu’elle ne soit réoccupée. Il est abattu trois semaines plus tard par des militants lors d’une nouvelle occupation, qui durait encore fin mars 2017.
Après son arrestation, Florent passe 32 heures en garde à vue. Du point de vue des policiers, il était « un anarchiste enragé, genre Hannibal Lecter. Un bouffeur de flics. Ils avaient peur [qu’il leur] saute dessus ». Il se décrit accroché à « un plot » d’une trentaine de kilos. Lors de sa comparution immédiate, il porte une ceinture de contention. C’est son premier passage devant un juge. Il n’a pas de casier judiciaire. « Le RSA, le chômage de longue durée, tout ça influence la condamnation. Ils m’ont demandé ce que je pensais d’un travail d’intérêt général. J’ai dit non. Je ne voulais pas courber l’échine. Je ne travaille plus depuis des années. Je ne veux pas travailler pour travailler, mais si je peux avoir une pratique qui me plaît. »
Selon le compte-rendu d’action des gendarmes, le jeune homme leur a jeté des pierres et des projectiles. Au bout de quelques heures, les forces de l’ordre ont pris possession de la forêt. Très vite, l’Andra fait ériger un mur de béton pour empêcher qu’elle ne soit réoccupée. Il est abattu trois semaines plus tard par des militants lors d’une nouvelle occupation, qui durait encore fin mars 2017.
Après son arrestation, Florent passe 32 heures en garde à vue. Du point de vue des policiers, il était « un anarchiste enragé, genre Hannibal Lecter. Un bouffeur de flics. Ils avaient peur [qu’il leur] saute dessus ». Il se décrit accroché à « un plot » d’une trentaine de kilos. Lors de sa comparution immédiate, il porte une ceinture de contention. C’est son premier passage devant un juge. Il n’a pas de casier judiciaire. « Le RSA, le chômage de longue durée, tout ça influence la condamnation. Ils m’ont demandé ce que je pensais d’un travail d’intérêt général. J’ai dit non. Je ne voulais pas courber l’échine. Je ne travaille plus depuis des années. Je ne veux pas travailler pour travailler, mais si je peux avoir une pratique qui me plaît. »
Interrogé sur la morsure, il explique : « C’est un réflexe malheureux, mais je n’ai rien d’autre à dire. » Le procureur requiert six mois ferme. Le 12 septembre 2016, il est condamné à un emprisonnement délictuel de six mois avec sursis, avec mise à l’épreuve de deux ans. Pendant cette durée, il doit prévenir un travailleur social de tout déplacement excédant 15 jours, de tout changement de résidence, informer au préalable le juge d’application des peines de tout déplacement à l’étranger. Il est également obligé d’exercer une activité professionnelle, de suivre un enseignement ou une formation professionnelle. Il lui est interdit de « paraître » dans le département de la Meuse. Il doit aussi s’acquitter de 400 euros d’amende pour refus de se soumettre au prélèvement biologique destiné à l’identification de son empreinte génétique et verser 1 800 euros au gendarme blessé.
S’il ne satisfait pas à ces obligations, il encourt la révocation de ce sursis. C’est le risque qu’il prend aujourd’hui en brisant publiquement son interdiction de territoire. Pour son avocat, Étienne Ambroselli, « il n’existe aucun rapport entre le fait d’avoir mordu un gendarme et l’interdiction de se rendre en Meuse, qui est extrêmement contraignante et ne se justifie absolument pas. Cette interdiction de territoire l’empêche de manifester et de continuer la lutte à Bure ». Pour Florent, une nouvelle étape de la lutte et une nouvelle vie commencent.
Jade
Lindgaard -
Médiapart
L’interdiction de séjour devient un instrument de répression
Le
code pénal permet d’interdire à une personne de se rendre sur une
partie du territoire. Mais lorsque cette interdiction vise des
militants – notamment zadistes –, porte sur tout un département
et s’étale sur plusieurs années, l’objectif semble être
surtout de briser un mouvement social.
Florent,
le militant anti-Cigéo dont Mediapart
relate la situation, n’est pas un cas isolé. Loin de là.
Selon le chiffre communiqué par le ministère de la justice à
Mediapart, en 2015, la justice a prononcé 1 635 condamnations à
une interdiction de séjour sur une partie du territoire français.
Deux
articles permettent au juge judiciaire d’interdire à une personne
de se rendre sur une partie du territoire français plus ou moins
étendue, pouvant aller d’un simple quartier à tout un
département. Florent a été condamné en vertu de l’article
132-45 du code pénal. Celui-ci autorise « la
juridiction de condamnation ou le juge d’application des peines »
à prononcer, lorsqu’une personne est condamnée à une peine de
sursis avec mise à l’épreuve, toute une série de peines
complémentaires comme l’interdiction de porter une arme, de
conduire, de fréquenter des débits de boissons ou encore « de
paraître en tout lieu, toute catégorie de lieux ou toute zone
spécialement désignés ».
L’article
131-31 du code pénal, lui, dispose une peine d’interdiction de
séjour prononcée comme complément d’une peine principale. Il
précise que l’interdiction ne peut « excéder
une durée de dix ans en cas de condamnation pour crime et une durée
de cinq ans en cas de condamnation pour délit ».
Lorsqu’elle accompagne une peine de prison ferme, elle ne débute
qu’à la fin de celle-ci. Et en cas de violation de l’interdiction
de séjour, le code pénal prévoit une peine supplémentaire de deux
ans de prison et de 30 000 euros d’amende.
Le
but de ces interdictions est généralement d’empêcher la
réitération d’une infraction ou qu’une victime ne se retrouve
face à face avec son agresseur. Dans le cas de Florent, on se
demande pourtant quelle a été l’intention des juges. On doute que
le jeune homme, qui reconnaît avoir mordu un policier mais explique
avoir agi sous l’effet de la surprise, soit prêt à renouveler son
acte de sitôt ou que sa victime soit traumatisée à l’idée de
revoir son agresseur.
L’étendue de l’interdiction de séjour,
sur l’ensemble d’un département, et sa durée, de deux ans, font
plutôt penser à une mesure punitive qui, dénonce Florent, viserait
à le dissuader de poursuivre son engagement.
Le
dossier du jeune homme n’est pas le seul à poser la question d’un
possible détournement de l’interdiction de séjour. Elle s’était
par exemple posée au mois de décembre 2016, lorsque le tribunal
correctionnel de Pontoise avait condamné Bagui Traoré, frère
d’Adama Traoré, pour des violences commises sur des policiers, à
deux années d’interdiction de séjour sur la commune de
Beaumont-sur-Oise, et huit mois de prison. Les magistrats avaient
alors évoqué « le
besoin de sérénité »
de la ville pour justifier cette peine complémentaire.
De
plus en plus, l’interdiction de séjour vise des militants, des
activistes, et avec des conditions d’application qui interrogent
sur le but poursuivi par les juges. « Il
n’existe pas de statistiques précises sur l’application de cette
peine,
explique Laurence Blisson, du Syndicat de la magistrature. Mais
nous avons le sentiment qu’effectivement se développe depuis
quelques année une tendance à l’appliquer à de nouveaux cas, et
notamment des militants. On se souvient, déjà
en 2014, de militants de la Confédération paysanne qui avaient
été interdits de séjour dans la Somme, après l’occupation d’une
installation de la ferme des mille vaches. »
« Jusqu’à
présent, l’interdiction de séjour était principalement prononcée
dans deux types d’affaires, poursuit la magistrate. Tout
d’abord dans les affaires de stupéfiants. Dans ce cas, le but est
d’éloigner la personne d’un lieu de trafic, d’un quartier.
Ensuite, dans les affaires criminelles plus graves, par exemple les
affaires de violences sexuelles. Là, l’objectif est d’éviter
par exemple que l’auteur des faits ne croise sa victime ou que son
retour sur les lieux du crime ne provoque un trouble à l’ordre
public, si le crime avait suscité une vive émotion. Dans ces cas,
l’interdiction de séjour est justifiée par la préservation de
l’ordre public. Il y a une atteinte aux libertés individuelles,
mais qui est naturelle en matière pénale. Le problème, c’est que
son application dans certaines affaires conduit à porter atteinte à
d’autres libertés, qui ne devraient pas être touchées, comme la
liberté de manifester ou la liberté d’expression. »
« Le
principe même de l’interdiction de séjour pose question
lorsqu’elle est appliquée à des militants condamnés après des
affrontements avec les forces de l’ordre, estime Laurence
Blisson. Il y a de nombreuses condamnations pour outrage et
rébellion qui ne font pas l’objet d’une interdiction de séjour.
L’application de cette peine dans le cadre d’une mobilisation,
alors qu’elle ne l’est généralement pas au quotidien, pose tout
de même un certain nombre de questions. Il y a également la
question de la proportionnalité par rapport à la gravité des faits
que le juge est censé respecter. Il ne peut simplement ignorer que
la sanction qu’il prononce porte atteinte à une autre liberté
fondamentale. »
Ce
nouvel usage de l’interdiction de séjour vise notamment les zones
à défendre, les ZAD, que l’ancrage dans un territoire rend plus
vulnérables à ce type de mesures. Stéphane Vallée, avocat de
personnes habitant la ZAD de Notre-Dame-des-Landes, explique ainsi
que la peine est prononcée « massivement » depuis
quelques années. « Ça s’est mis en place
progressivement. À partir de la fin de l’année 2012 et de
l’évacuation de la zone par les gendarmes, le parquet se met à la
requérir systématiquement et les juges à la prononcer,
systématiquement également, raconte l’avocat, qui se souvient
d’une bonne dizaine de cas parmi ses clients. Elles sont souvent
d’une durée d’un an. On sentait qu’ils avaient trouvé le truc
pour vider la ZAD de manière judiciaire, même si c’était à la
petite cuillère. On a observé une évolution en entonnoir : au
départ, l’interdiction portait sur tout le département de
Loire-Atlantique, puis les communes de la ZAD (Notre-Dame-des-Landes,
Vigneux-de-Bretagne, La Pâquelais…), puis des parties de ces
communes. »
Au moins un occupant de la ZAD de Notre-Dame-des-Landes, condamné pour violence en manifestation et sur agent après un défilé offensif à Nantes le 22 février 2014, a vu sa peine complétée d'une mise à l'épreuve conditionnée à une interdiction de séjour de trois ans dans tout le département de Loire-Atlantique. Sur la zone, d'autres personnes se retrouvent sous le coup d'une interdiction de territoire liée à un contrôle judiciaire. Pour Camille, il s'agit « clairement de condamnations politiques, pratiquées dans le cadre des luttes territoriales. Il faut les combattre politiquement. Il est important de ne pas se retrouver au dépourvu : il est possible de s’organiser collectivement pour y désobéir. » Il a interjeté appel de sa condamnation, ce qui a suspendu provisoirement son interdiction de territoire.
« La loi permet de tempérer la liberté d’aller et venir de quelqu’un en cas d’atteintes aux personnes. Ce n’est pas contestable en soi, poursuit Me Vallée. Mais ce qui pose problème, c’est d’interdire l’accès à tout un département à quelqu’un, sans lien direct avec l’infraction commise. Cela porte atteinte à la liberté de circulation et de manifestation. »
Selon l’avocat, « compléter une peine par une interdiction de territoire, c’est une manière de donner un contenu politique à une infraction. Interdire le territoire à une personne condamnée pour violences contre les personnes détentrices de l’autorité publique dans une ZAD ne sert pas à réprimer un comportement mais à épuiser des forces de contestation et à affaiblir un courant militant ». « L’interdiction de territoire ajoute une peine supplémentaire, analyse également Claire Dujardin, avocate de plusieurs zadistes opposés au barrage de Sivens. Cela peut s’apparenter à une atteinte à la liberté de circulation et de manifestation, puisque cela interdit à des personnes de revenir sur les ZAD, alors que le juge judiciaire est le garant des libertés publiques. Il y a là un mélange des genres qui pose problème. »
Cette évolution de la jurisprudence est d’autant plus inquiétante qu’elle s’inscrit dans une tendance plus globale visant non plus seulement à réprimer les mouvements sociaux, mais à les étouffer en agissant de manière préventive. Les mouvements zadistes et écologistes avaient déjà été parmi les premières cibles de l’état d’urgence, dès son adoption au mois de novembre 2015. À l’approche de la COP21, 24 militants avaient été assignés à résidence et plusieurs autres avaient été la cible de perquisitions administratives.
Depuis, l’état d’urgence continue à être massivement utilisé pour interdire des manifestations ou pour assigner à résidence des manifestants, sur la simple base d’informations fournies par les services de renseignement. Lors de la mobilisation contre la loi travail, au printemps 2016, les interdictions de manifester se sont ainsi comptées par dizaines. Et les militants ne sont pas les seuls visés. Plusieurs journalistes ont également fait l’objet d’interdictions d’approcher de certains lieux de mobilisation. Au mois de mai dernier, un photographe s’était ainsi vu notifier une interdiction de s’approcher d’une manifestation parisienne contre la loi travail. Le journaliste Gaspard Glanz, de l’agence Taranis News, s’est vu notifier en octobre 2016 une interdiction de séjour sur l’arrondissement de Calais.
« Il est intéressant de noter que dans le rapport parlementaire qui avait fait suite à la mort de Rémy Fraisse, il avait été proposé d’introduire une procédure d’interdiction préventive de manifester, rappelle Laurence Blisson. Il n’a pas été donné suite à cette proposition, car l’état d’urgence a pris le relais en permettant au gouvernement de prononcer des interdictions de manifester et des assignations à résidence administratives. Mais il y a de fortes chances pour que, dans les mois à venir, l’idée revienne au Parlement, prévient la magistrate. L’interdiction de séjour peut permettre d’empêcher la réitération de l’infraction, mais lorsqu’elle a aussi pour conséquence de remettre en cause la liberté de manifester, cela devient un acte de justice préventive. »
Jérôme
Hourdeaux
et Jade
Lindgaard
-
Médiapart
►Kurdistan
Nouvelles du Kurdistan - Merhaba Hevalno Mensuel #13 - voir article ici
Une requête en suspicion légitime est déposée par les avocats de la famille Fraisse, qui demande que le dossier soit repris par d’autres magistrats que ceux de Toulouse. Orientée dès le départ, l'instruction s'achève en effet sans aucune mise en examen.
La
famille de Rémi Fraisse, le jeune homme tué par la grenade
offensive d’un gendarme le 26 octobre 2014 à Sivens (Tarn), ne
fait plus confiance à la juridiction de Toulouse pour faire la
lumière sur cette affaire. Selon des informations obtenues par
Mediapart, alors que l’instruction toulousaine s’achève sans
qu’aucune mise en examen n’ait été prononcée, une « requête
en renvoi pour cause de suspicion légitime » a été déposée
lundi 27 mars à la Cour de cassation par les avocats de la famille
Fraisse. L’objet de cette requête de la dernière chance (17 pages
dont Mediapart a pu prendre connaissance) est d’obtenir de la
chambre criminelle de la Cour de cassation qu’elle constate
l’existence d’« éléments
objectifs de nature à faire naître un doute sur l’impartialité
de la juridiction d’instruction de Toulouse dans son ensemble »,
et qu’elle désigne une nouvelle juridiction pour reprendre
l’instruction de l’affaire Rémi Fraisse.
Le
premier argument tient à la décision des juges d’instruction
toulousains de saisir la gendarmerie (et non la police) pour enquêter
sur la mort de Rémi Fraisse. « Même
si les gendarmes qui ont effectué les investigations n’appartenaient
pas aux formations en poste sur le site de Sivens, le fait de confier
des investigations à des gendarmes pour enquêter sur des faits
qualifiés de violences volontaires commises par d’autres gendarmes
laisse planer un doute sur l’impartialité de la juridiction
d’instruction »,
écrit l’avocat Pierre Ricard dans sa requête. S’agissant d’une
affaire aussi grave, il est à craindre que « les
gendarmes enquêteurs ne cherchent pas nécessairement à établir la
vérité des faits et des responsabilités pénales, ou à tout le
moins qu’ils recherchent à minimiser le rôle de leurs collègues
ainsi que de leur hiérarchie ».
En décidant de confier l’enquête à des gendarmes, « la
juridiction d’instruction du tribunal
de grande instance de Toulouse a pris le risque de créer et
d’alimenter un doute sur son impartialité », estime
l’avocat.
Plusieurs
témoins ont fait état de « remarques désobligeantes »,
voire de « pressions » de la part des gendarmes lors de
leurs auditions, et ont demandé à être entendus par les deux juges
d’instruction eux-mêmes, un souhait également formulé par de
nouveaux témoins qui s’étaient manifestés auprès des avocats.
Or les juges d’instruction ont refusé. « Malgré ces
craintes expressément exprimées, les juges d’instruction qui
n’ont pas effectué eux-mêmes les actes d’investigation ou n’ont
pas renoncé à confier ces actes aux gendarmes ont fait peser sur
leur propre personne ce même soupçon de partialité »,
soutient la partie civile.
« Le rejet ou l’inexécution de ces nombreux actes, qui étaient pourtant nécessaires pour établir la vérité des faits, mais également les responsabilités pénales encourues, a fait naître un doute sur l’impartialité de la juridiction d’instruction », estiment les avocats. « Au regard de ces refus, il est possible de considérer que la juridiction d’instruction ne s’est pas donné les moyens pour établir la vérité dans ce dossier extrêmement sensible, notamment en raison des conditions dramatiques de la mort de Rémi Fraisse mais également de l’implication des forces de l’ordre. » Ils soutiennent que rien n’a été fait qui puisse éclairer la responsabilité pénale éventuelle de la chaîne de commandement. Le président de la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Toulouse s’étant, en outre, lui-même chargé de rejeter les appels déposés par la partie civile après les refus des juges.
« En
conclusion, écrivent les avocats, les refus
systématiques opposés par les juges d’instruction pour instruire
sur les conditions de la mort de Rémi Fraisse et plus encore sur la
chaîne de responsabilité pénale font naître un doute sérieux sur
l’impartialité de la juridiction d’instruction. »
Sollicité
par Mediapart, Arié Alimi, l’un des défenseurs de la famille
Fraisse, se veut sévère. « On est dans la configuration
classique des dossiers judiciaires intéressant les forces de
l’ordre, avec une problématique d’impartialité. Il y a une
certaine proximité entre les juges, les enquêteurs et les personnes
poursuivies, ce qui nuit à la manifestation de la vérité. La
famille de Rémi Fraisse a droit à un processus judiciaire au-dessus
de tout soupçon », expose Me Alimi.
Consignes contradictoires
Depuis
plus de deux ans, les défenseurs de la famille Fraisse (Arié Alimi,
Claire Dujardin et Étienne Noël) se sont pourtant déjà beaucoup
dépensés pour aiguillonner les magistrats. Le
18 janvier dernier,
ils ont ainsi déposé une plainte à Paris pour « faux
témoignages », qui est pour l'instant au point mort. Cette
plainte vise les dépositions successives effectuées par plusieurs
gendarmes mobiles impliqués à des degrés divers dans la mort du
jeune manifestant à Sivens. Affectés à l’escadron de gendarmerie
mobile de La Réole (Gironde), ces militaires étaient déployés sur
le site du projet de barrage la nuit des faits ; ils ont été
interrogés par leurs collègues de la section de recherches de
Toulouse, puis ceux de l’Inspection générale de la gendarmerie
nationale (IGGN) et, enfin, par les juges d’instruction.
Cette
nouvelle plainte (avec constitution de partie civile) visait à
empêcher un enterrement du dossier Rémi Fraisse, tué
à 21 ans par
la
grenade offensive d’un gendarme mobile à Sivens.
Elle avait été déposée quelques jours à peine après que les
juges d’instruction Anissa Oumohand et Élodie Billot, du tribunal
de grande instance de Toulouse, avaient fait savoir, le 11 janvier,
qu’elles avaient achevé leurs investigations (article
175 du code de procédure pénale).
Les
différentes parties avaient alors un délai de trois mois pour
formuler des observations et faire des demandes d’acte, mais une
prochaine clôture du dossier par une ordonnance de non-lieu des
juges toulousaines semblait déjà très probable. Les toutes
dernières demandes d'acte, déposées le 20 février par les
avocats, ont d'ailleurs été rejetées par les juges le 20 mars.
L'enterrement du dossier est tout proche.
Par
ailleurs, les défenseurs de la famille Fraisse ont également déposé
le 18 janvier un complément de plainte au tribunal de Toulouse pour
homicide involontaire à l’encontre de l'ancien préfet du Tarn,
Thierry Gentilhomme, et de son ex-directeur de cabinet, le
sous-préfet Yves Mathis. Cette plainte vise également un gendarme,
le capitaine M., qui a conduit l’enquête sur la mort de Rémi
Fraisse et qui est accusé de subornation de témoin. Elle n'a
produit aucun résultat de la part des juges.
Aucune
mise en examen n’a donc été prononcée depuis la mort de Rémi
Fraisse, dans ce dossier de « violence par une personne
dépositaire de l’autorité publique ayant entraîné la mort sans
intention de la donner », « meurtre », et
« violence ayant entraîné la mort sans intention de la
donner ». Les deux juges d’instruction toulousaines ont
choisi de placer plusieurs protagonistes sous le statut de témoin
assisté (à mi-chemin entre le mis en examen et le simple témoin).
L’auteur
du lancer de grenade létal, le maréchal des logis-chef J., a été
interrogé sous le statut de témoin assisté le 18 mars 2016. « Je
voudrais vous dire, avant de poursuivre et d'aborder la nuit des
faits, toute la tristesse qui est la mienne suite à cet accident
dramatique et qui me ronge tous les jours, ainsi que le sentiment
d'injustice », a notamment déclaré le militaire. « Ce
drame a touché un jeune de 21 ans qui avait tout l'avenir devant lui
et qui avait trouvé sa voie, j'y repense tous les jours. Je suis
entré en gendarmerie pour protéger les personnes, et c'est quelque
chose qu'on ne souhaite pas voir se produire. »
Après
lui, le major A., le capitaine J. et le capitaine L., tous membres du
même escadron de gendarmerie mobile, ont également été placés
sous statut de témoin assisté. Le lieutenant-colonel Rénier, qui
commandait à l’époque le groupement de gendarmerie du Tarn, ainsi
que son adjoint, le lieutenant-colonel Andreani, ont en revanche été
entendus sous le statut de simple témoin.
Les
avocats de la partie civile estiment que si le gendarme ayant lancé
la grenade mortelle a pu commettre une faute d’imprudence ou de
négligence, c’est en raison des ordres reçus de sa hiérarchie.
Ils soutiennent que la responsabilité pénale des sous-officiers et
officiers qui étaient chargés de la manif de Sivens peut être
recherchée. Or le major A. a d’abord indiqué avoir donné l’ordre
de lancer la grenade offensive, puis a indiqué, dans un second
temps, qu’il ne s’agissait que d’un ordre indirect.
Les
défenseurs de la famille Fraisse estiment enfin que des
contradictions sont apparues entre les consignes de maintien de
l’ordre données ce soir-là par les officiers opérationnels, la
préfecture du Tarn et la Direction générale de la gendarmerie
nationale (ministère de l’intérieur), et que le cadre juridique
d’intervention des gendarmes mobiles à Sivens n’était pas
clairement défini, ce qui pourrait engager la responsabilité de la
préfecture du Tarn.
Selon
plusieurs témoins, Rémi Fraisse avait gardé une attitude pacifique
pendant les incidents violents de Sivens et s'avançait
vers les gendarmes mobiles avec les mains en l'air lorsqu'il a
été tué par une grenade offensive qui a explosé contre sa nuque.
L'utilisation des grenades offensives par les gendarmes a été
interdite peu après.
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