IMPRESSIONS du FORUM
SOCIAL MONDIAL
Tunis, du 27 au 31 Mars 2013
d'Anne Gaudron
Membre de la délégation d’Attac et de la Ligue
des Droits de l‘Homme
1 – Impressions sur Tunis et les tunisien-nes
2 – Impressions générales sur le FSM
3 – Instantanés des ateliers auxquels j'ai
assisté
· les multinationales en
Afrique : l'exemple des plate-formes téléphoniques
· Economie sociale et
solidaire : Témoignages, expériences
· Quelles actions
concrètes collectives à mettre en place dans les luttes ?
· La transition
énergétique pour quel nouveau modèle de développement ?
· Les droits sociaux
comme vecteurs de changement
4 – Intermède
théâtral : "D'un retournement l'autre", de Frédéric Lordon
5 – Les assemblées de convergence et la
manifestation de clôture
Notes
1 – Impressions sur Tunis et les tunisien-nes
A l'arrivée : quelques
badges altermondialistes sur les sacs ou les vestes de certaines personnes dans
l'avion venant de Paris. Un stand d'accueil pour le forum, très discret dans le
hall de l'aéroport, surtout fréquenté par quelques policiers en civil qui
engagaient très courtoisement la conversation !
Les petits taxis jaunes
qui mènent aux hôtels du centre ville, pour moi le vieux "Salammbô",
derrière le théâtre national et à 100 m. des allées Bourguiba, avec au fond la
tour de l'horloge (photo ci-dessous) de la place du 14 Janvier 2011 : date d'une
très grande manifestation en 2011 et de la fuite de Ben Ali. Sous la dictature
Ben Ali, elle s'appelait place du 7 Novembre, date de sa prise de pouvoir en
87.
... et les barbelés qui "protègent" le
ministère de l'Intérieur des éventuels débordements populaires (photo).
Ambiance très calme, cafés
très fréquentés, quartier touristique et plutôt "occidental", tout
autant qu'emblématique des défilés révolutionnaires, qui se poursuivaient
ensuite dans les avenues très larges bordées par les ministères, et surtout
devant le luxueux immeuble de 20 étages, siège du parti de Ben Ali, le RCD
(Rassemblement Constitutionnel Démocratique), siège de l'arrogance du didacteur
et de ses émules, détesté par le peuple. Les traces du "passage" de
la révolution „Dégage“ y sont bien visibles ... On y voit aussi la fin du
chantier d'un immense et superbe Centre Culturel National, jouxtant des immeubles
de grandes sociétés du golfe et transnationales.
Je n'ai pas vu de comportement de
discrimination envers les femmes dans les rues ni dans les commerces, comme
j'ai pu en vivre à Alger 6 ans plus tôt : les femmes peuvent marcher seules ou
avec d'autres femmes sans répréhension visible. De très rares hijab, encore
moins de niqab, un peu plus rencontrés dans les quartiers populaires.
>A noter qu'une
association de femmes était présente sur le campus du Forum, qui revendiquait
et argumentait sur le fait que pour elles, le port du hijab était aussi une
liberté d'expression.
En ville, le fait pour
beaucoup de militants de porter un badge en mémoire de l'assassinat de Chokri
Belaid un mois plus tôt avait tendance à encourager les échanges de regards
bienveillants, parfois de permettre à un dialogue de s'engager.
Même si cela peut paraître un optimisme très
extérieur à la réalité quotidienne des tunisiens, que l'on n'a pas le temps
d'approfondir en 5 jours, on "sentait" dans cette ville que
l'attitude des personnes étaient "libres", ou tout au moins libérées
de contraintes et d'inquiétudes que j'ai rencontrées dans d'autres pays arabes.
Ce qui ne veut pas dire que la révolution a tout résolu, loin s'en faut.
Le soir entre 19h et 22h, une
scène musicale était installée au milieu des allées Bourguiba, avec des groupes
tunisiens d'électro, de chants et musiques traditionnelles, de rock....
Ambiance jeune et détendue.
Devant le théâtre national très
"art nouveau" du début du 20ème siècle, et près de la scène musicale
Ce
que j'ai ressenti de plus fort lors des échanges avec des Tunisien-nes
rencontré-es hors et dans le forum : ils/elles sont rempli-es à la fois
d’interrogations, de colère, de courage, d’espoir, de détermination à trouver
une nouvelle voie dans la dignité et la démocratie. Une pensée émue pour eux,
pour elles, qui, comme nous occidentaux - mais quoiqu'il en soit dans des
conditions plus difficiles - ne doivent "rien lâcher".
2 – Impressions sur le FSM de Tunis
Du 26 au 30 mars dernier, Tunis a donc été la
capitale de la société civile altermondialiste.
À l’occasion de ce 12e Forum social mondial, 4 000
organisations et plus de 40 000 participants venant de 127 pays se sont
rassemblés à l’Université El Manar, « lumière » en arabe (photo).
Les
crédits débloqués pour l’occasion par le ministère de l’Enseignement supérieur,
en vue d’améliorer le campus, doivent profiter officiellement par la suite à
l’ensemble des étudiants... Mais nous n'avons vu comme travaux récents que 2
emplacements nivelés par des pelleteuses pour que s'installe un village de
tentes et quelques scènes de musique, qui n'ont pas vraiment été très
fréquentés.
D'une
manière générale, ni les salles de cours ni les couloirs n'étaient en très bon
état. Des petites salles de restauration rapide étaient installées un peu
partout dans la fac, avec des menus très "occidentaux" et quelques
heureuses exceptions de cuisine tunisienne.
950
ateliers étaient prévus, environ 200 par jour.
Les
thèmes les plus importants étaient : la Dette, le Climat, la transition
énergétique, les Droits des Peuples, le Droit à la Terre, les luttes des
Femmes, les Révolutions arabes, la lutte du Peuple Palestinien.
A
ma grande surprise de "débutante", une dizaine d'ateliers étaient
consacrés à l'Economie Sociale et Solidaire.
Les
stands associatifs étaient tous à l'extérieur, dans les allées du campus. Des
"points d'orientation" tenus par de jeunes étudiants nous aidaient à
trouver une salle de cours ou un amphi pour rejoindre nos ateliers. Les tentes
qui protégaient les stands avaient été fournis par le CHCR ... et l'Arabie
Saoudite !
Une
grande tente traditionnelle attirait vite l'attention à une des entrées du
campus : celle de la République Sahraouie qui lutte pour son indépendance
depuis 1975 sur des territoires occupés par l'armée marocaine (voir notes à la
fin), cette dernière y commettant des exactions et des atteintes aux droits des
personnes (arrestations arbitraires, tortures, viols ...). Ces militants
sahraouis avaient pu arriver à Tunis grâce à des passeports délivrés par
l'Algérie, avec laquelle leur territoire a une frontière qui ne leur est pas
fermée comme celle du Maroc.
J'ai
assisté personnellement et de très près à des incidents initiés par des
"sbires" du gouvernement marocain, présents assez nombreux au forum,
et qui ont perturbé régulièrement les ateliers qui avaient lieu dans cette
tente : ils se glissaient entre les participants et leur chuchotaient à
l'oreille des phrases du genre : "vous ne devriez pas être là, ce que
disent les Sahraouis ne sont que des mensonges", ... Ils ont brûlé et
piétiné un drapeau sahraoui en fin de forum et ont été expulsés par les
organisateurs.
A
partir du 2ème jour du forum, des stands islamistes se sont installés (sans autorisation
?) et des personnes vous abordaient pour vendre des Corans dans toutes les
principales langues parlées au Forum. Des tunisiens "pro Assad" se
sont également "infiltrés" dans le forum, comme dans la manifestation
finale du samedi, et il y a eu quelques provocations et de rares confrontations
parfois physiques.
L'assassinat
de Chokri Belaid début février avait failli remettre en cause la tenue du FSM,
et heureusement il n'en a rien été, car pour les organisateurs tunisiens, « Le
Forum social mondial est la meilleure réponse à ceux qui ont commis ce crime.
La révolution tunisienne était d’ordre social à 100 %. L’objectif du forum
est de faire réapparaitre ces questions. »
Ils
espéraient que le Forum allait redonner du souffle à « une révolution
trahie » : il est difficile de dire si le but a été vraiment atteint, une
fois les lumières de ce grand rassemblement altermondialiste éteint.
S'il
est une chose sûre, c'est que tous les participants ont salué une organisation
remarquable pour ce premier FSM dans un pays arabe en pleine transition
démocratique.
3 – Instantanés des ateliers auxquels j'ai
assisté
Atelier "les
multinationales en Afrique : l'exemple des plate-formes téléphoniques"
Participants : représentants de syndicats de
travailleurs des centres d’appel au Maroc, UGTT, très puissante centrale
syndicale tunisienne (50% de tous les travailleurs y sont adhérents) Sud
Solidaires, (dont un représentant de l’île de la Réunion).
Les Stés offshore de Plate Formes téléphoniques
pratiquent la précarité des salaires, la collusion avec les mafias locales ou
les gouvernements corrompus comme sous Ben Ali.
Pourquoi sont-elles très implantées en Afrique ?
Beaucoup de jeunes diplomés y sont sans emploi.
Répartition géographique des centres suivant la
langue des colonisateurs, et maintenant des opérateurs.
Elles génèrent de l’emploi sous-payé, mais pas de
retombées économiques pour le pays d'accueil, qui n'est qu'un
"sous-traitant" : le chiffre d'affaires est déclaré dans le pays
d'accueil pour cause de moindre coût fiscal, mais les mouvements financiers
repartent en Europe.
Les jours de travail ou fériés sont ceux des pays
européens, et ne respectent pas ceux du pays d'accueil : il y a une une
dé-culturation forcée des salarié-es, et pire une dé-personnalisation car
ils/elles doivent prendre un nouveau prénom, qui "sonne bien" pour des
clients occidentaux, même si l'accent de la voix trahit bien sûr l'origine de
la personne qui appelle !
Les PF sont très souvent implantées dans des zones
franches en Afrique, qui sont bien sûr défiscalisées.
Ce maillage de Call centers inter-étatiques ne
respecte pas les lois du travail même minimes du pays d'accueil, ni les normes du BIT, et il n'existe pas
de "gendarmes mondiaux" contre les crimes économiques : à inventer ?
Chaque droit national pourrait et devrait analyser les liens entre la filiale du
pays d'accueil des PF et la maison mère, et rendre obligatoires les mesures
d’impacts sociaux et environnementaux. Invoquer la convergence mondiale des
normes OCDE, ISO …
Mettre en place un Tribunal Russel sur les multinationales, construire un nouveau modèle de régulation.
Atelier
"Economie sociale et solidaire : Témoignages, expériences"
Animation
par des jeunes de 9 pays différents, appartenant à l’association "Rencontres du Mont Blanc",
qui se veut être un Forum International des Dirigeants de l'Economie
Sociale et Solidaire, une sorte de "Davos" (de think tank ?) de
l'ESS, et qui est à mon avis loin du travail de terrain, en tout cas de celui
de l'Economie Solidaire.
2
jeunes tunisiens seulement présents, et (entre autres) un très jeune
représentant d'un Réseau brésilien de coopératives qui recyclent les déchets à
Salvador de Bahia
Le
Pdt de Max Havelaar France était également là, un monsieur assez âgé et qui n'a
pas su expliquer ce qu'étaient les fondamentaux de la coopération ....
Militantes
du Québec : connexion de l'ESS avec les structures d'insertion, au sein
d'un réseau autogéré.
La
RSE est mise en place en Tunisie depuis quelques années, mais comment ???? Pas
de réponse claire. L’ESS est un grand espoir pour la Tunisie, présence d’un
représentant de la Jeune Chambre Economique de Tunis, il va présenter au
gouvernement une offre de monnaie locale pour tout le pays …
Je
suis intervenue à plusieurs reprises pour re-définir les notions d'Economie
Sociale et d'Economie Solidaire, et plaider le fait que seuls les circuits
courts et les petites structures auto gérées démocratiquement avaient une
chance de perdurer et d'oeuvrer pour un mieux vivre ensemble, sur le modèle
"el buen vivir" des mouvements sociaux d'Amérique Centrale et du Sud.
Les
grands réseaux et une tendance à une communication très "marketing"
de l'ESS engendrent des dérives et l'oubli des fondamentaux.
J'ai
pu échanger après l'atelier avec des participants français qui voulaient en
savoir plus, et qui m'ont donné leurs coordonnées pour que je les contacte au
retour.
Atelier "quelles actions concrètes
collectives pouvons-nous mettre en place pour mieux vivre ensemble ?"
Représentant
d'une Plate Forme sénégalaise composée d'entités associatives coordonnées :
c’est l'Assemblée Générale qui définit les orientations de la PF et la
composition du CA, avec un bureau
et une équipe salariée qui exécute les décisions de la base.
Représentant
japonais explique :
Depuis les années 1960, il existe au Japon plus de
660 partenariats entre producteurs et consommateurs, la tradition coopérative
est omniprésente, cela irrigue quelques 10 millions d’habitants sur une
population totale de 125 millions d’habitants environ !
Aujourd’hui
au Japon, 30% des biens alimentaires proviennent directement des producteurs à
travers ces circuits.
Le
Seikatsu Club, le plus important regroupement de ce type, fonctionne selon un
système de commandes passées en général, sur une seule variété d’un produit
(par exemple : soja vendu uniquement en bouteilles d’un litre). Sur
l’initiative de femmes au foyer, ces regroupements ont pu se créer à travers le
Japon, pour permettre, non seulement une baisse des prix de la nourriture, mais
aussi un plus grand respect de l’environnement et de la santé des
japonais. Depuis 1968, cette coopérative est arrivé à 360.000 adhérents pour se
nourrir local et négocier les prix. Sans produits chimiques ni OGM, et sans
qu'aucun producteur ne dépende majoritairement de la coop pour ses revenus.
Réutilisation des emballages, essaimage pour créer d'autres coop, non
agro-alimentaires.
Elles
préconisent aussi les énergies douces, surtout les éoliennes.
Elles
se sont présenté à des élections locales, sans avoir créé de parti, et
certaines ont été élues. Installation de crèches dans les villages. Contrôle
très strict des produits après Fukushima, suivant des normes non
gouvernementales émises par la coop. Mise en oeuvre d'une coopération internationale
: APPEL MONDIAL POUR QUE NOTRE MODE DE PRODUCTION ET DE CONSOMMATION soit
repensé et modifié.
Représentants
tunisiens : les exploitations agricoles ont une moyenne de 2 ha par
personne. Le pays s'ouvre à la coopération et à l'ESS, surtout dans les régions
isolées qui s'organisent pour une production plus respectueuse de l'homme et de
l'environnement, mais ils ont des problèmes pour commercialiser leur
production.
Représentant
(breton) pour la Confédération Paysanne, qui a décrit longuement les fondamentaux
et les actions de son syndicat, et son appartenance à Via Campesina.
Atelier
"La transition énergétique, pour quel nouveau modèle de développement
?"
Beaucoup
de monde dans cet atelier, public très jeune.
Animation
RITIMO/ATTAC (Evelyne Perrin)/CRID/Les Jeunes Ecologistes (EELV)
Présence
de Samir MEDEB, secrétaire général du parti Vert tunisien.
S.
Medeb introduit en indiquant que les nouvelles notions d'un développement
soutenable et concerté réunissant les producteurs et les consommateurs et
intégrant les circuits plus courts, tournés en tout cas vers le marché
intérieur, apparaissent en Tunisie.
Phénomène
économique depuis le début des années 2000 : la production de biens et services
tunisiens est inférieure à la consommation, et de plus en plus de biens sont
importés des pays du Maghreb, et surtout d'Asie. Les savoirs-faire locaux sont
de moins en moins employés.
Les
secteurs les plus consommateurs d'énergie sont le BTP, les transports (voitures
individuelles), et l'industrie, qui a tendance à baisser.
Particularité
: une grande part du prix de l'énergie (du carburant notamment) est
subventionnée par l'Etat, et représente 14% de la part des dépenses du PIB.
Il
fait un parallèle entre le déclin de la Tunisie et du Maghreb/Machrek en
général et le déclin de l'empire romain.
Les
intervenantes du RITIMO et du CRID ont traité des besoins utiles ou
inutiles, et s'engagent pour des politiques qui arrêteraient de produire et de
vendre les besoins spéculatifs. Les citoyens et leurs élus (qui doivent être
régulièrement contrôlés en cours de mandat), doivent se réapproprier les solutions.
Exemples
: volontés politiques à Londres et Séoul sur l'organistion des transports
urbains : maîtrise de la demande, et non l'offre qui invente ou pousse la
demande. Régie communale de Montdidier, qui produit et fournit son électricité
depuis 1925 ... (http://www.regiecommunaledemontdidier.fr/)
S. Medeb reprend la parole pour souligner que la transition ne doit pas être seulement énergétique mais globalement écologique
Atelier
"Les droits sociaux comme vecteurs de changement, impact des politiques
d'austérité sur les droits sociaux"
Animé
par 5 intervenants de 5 pays différents, et des représentants de la FIDH et de
la "Coalition des ONG pour un protocole facultatif au Pacte international
relatif aux droits économiques, sociaux et culturels."
Intervenant
du Vénézuela (grosse délégation au Forum) : leur Constitution a été
distribuée et expliquée à toute la population avant le vote. L'Amérique
Centrale et du Sud sont passées de 280 millions à 190 millions de pauvres. 60
millions sont encore dans l'extrême pauvreté. D'après lui dans son pays, on
assiste à une véritable transformation de la démocratie, avec plus de pouvoirs
participatifs donnés ou pris par les habitant-es, un recul de
l'analphabétisme,... Il a la "certitude forte" que le Vénézuela est sur la
bonne voie.
Intervenante
de l'Association pour les Droits des Femmes au Maroc : expérience marocaine
du respect de "l'approche genre". Cette asso existe depuis les années
80, à partir du démarrage de la crise économique et des ajustements structurels
du FMI. Les premières victimes ont été les plus pauvres, et surtout les femmes
pauvres. Création du journal "les femmes du Maroc", atypique dans le
Maghreb. Ce groupe a analysé l'impact des budgets "sensibles"
(éducation, recherche, santé ...) au problème de genre (exemple de l'Afrique du
Sud). En 98, le gouvernement a mené une enquête socio-économique auprès des
femmes sur le temps qu'elles passaient à effectuer toutes leurs tâches : 17 h
par jour en milieu rural, 12h en ville, et ce temps de travail féminin est
invisible socialement parlant (et pas qu'au Maroc !). Elle préconise la mise
en place de budgets participatifs sur le modèle de celui de Porto Alegre.
Depuis 2005, elles ont obtenu une "traçabilité" des budgets de certains ministères pour les Femmes, qui rendent public un rapport "genre", un rapport socio-économique et un rapport "ressources humaines" pour leur fonctionnement interne, ce qui n'avait jamais existé.
Depuis 2005, elles ont obtenu une "traçabilité" des budgets de certains ministères pour les Femmes, qui rendent public un rapport "genre", un rapport socio-économique et un rapport "ressources humaines" pour leur fonctionnement interne, ce qui n'avait jamais existé.
Elles
ont créé aussi un collectif de 30 associations pour réformer la loi organique
des Finances, vers une approche "genre" et la justice fiscale entre
femmes et hommes mariés.
Elles
agissent aussi dans les territoires ruraux. Les élus locaux disent "on n'a
pas les moyens". Leur réponse : le budget, même faible, doit être réparti pour une amélioration du
sort des Femmes. 20 formateurs et formatrices à cette approche genre sont
répartis sur 153 communes. Elles ont mené une campagne pendant 2 ans pour
arriver à ce que la réforme 2009 des chartes communales reconnaisse l'approche
de genre, grâce à des outils de diagnostic participatif basés sur le genre.
"Un
budget, ce sont des chiffres, mais aussi un projet politique. Les politiques
publiques doivent être porteuses de changement. Les Femmes sont des avocates de
l'Egalité, pour les Hommes, les territoires, les enfants, ..."
Intervenant grec pour
la FIDH Grèce. Etat des lieux : depuis 3 ans, l'austérité est absolue :
-
mesures
de baisse des dépenses publiques (40%), dont les prestations sociales
-
mesures
pour augmenter les recettes publiques : la taxe foncière est prélevée sur la
facture d'électricité
-
mesures
pour détruire le marché du travail = plus de convention collective,
interdiction pour les partenaires sociaux de négocier les conditions de travail
....
Chômage
27% - 2ème rang après l'Espagne et 60% pour les moins de 30 ans. 3ème pays
européen le plus pauvre après la Roumanie et la Bulgarie.
Ce
n'est plus un Etat social qui respecte les droits sociaux, notamment du
travail, des migrants.
Montée important de l'extrême-droite.
Montée important de l'extrême-droite.
Dette
2010 : 120% du PIB – Début 2013 : 170%.
"L'austérité
n'est pas un médicament, c'est un poison". Il faut empêcher la
déconstruction de l'Etat social, qui est une catastrophe pour le quotidien des
peuples. On assiste à une augmentation du fossé entre le nord et le sud de
l'UE, qui n'ont pas de destination politique commune, pas de vrai projet d'un
front de résistance, de solidarité contre les attaques libérales : il reste à
construire. Il n'y a plus de consensus pour une politique des Droits humains,
alors qu'il faudrait revendiquer une indivisibilité des droits. Toute violation
des droits sociaux crée un effet domino, pour limiter les droits démocratiques
et entraîne une destruction de tout Etat de Droit. Dans le sud de l'UE, on est
en pleine transition anti-démocratique, en pleine démolition d'un système basé
sur les droits. Attention ! "Les droits humains deviennent des notions
obsolètes, et déjà remis en cause dans de nombreux pays".
Présentation
du "Protocole facultatif au Pacte international relatif aux droits
économiques, sociaux et culturels (référence site et documents papier) par
une intervenante belge : il est important, car on part du respect des droits
individuels et on interroge les Etats sur ce point, pour leur montrer la voie
afin qu'ils deviennent des droits collectifs.
Intervenant
du Mali : rien n'est clair dans ce pays, il n'y a plus aucun droit
démocratique ou politique. Aucun lien n'est tissé avec les habitant-es du Nord,
confusion ... Tous les élus sont responsables et coupables de cette situation.
L'intervention de la France peut pousser à la guerre civile, alors que le
conflit pour laquelle elle est intervenue militairement n'était pas une guerre
civile, mais une riposte à une
intervention extérieure.
Un
travail remarquable a été fait par un groupe du Nord Mali, en lien avec la
FIDH, qui a pu recueillir des preuves de la responsabilité des politiques et
des militaires. Ils veulent dénoncer ces comportements sur place, puis
interpeller l'UE, les pays africains, et aller jusqu'à une plainte à la Cour
Pénale Internationale.
Intervenant
de Côte d'Ivoire, secrétaire général de la 2ème confédération syndicale du
pays, avec 150.000 cotisants. Il a fait 22 mois de prison. Il interroge : "c'est
très bien toutes ces luttes des citoyens, mais quid de l'ONU ? Comment se
révolter mondialement contre le FMI ?"
Réponse
du représentant du Vénézuela : arriver à faire échouer les échanges
libéraux, (expérience de "Allianza social continentale"). Il faut
absolument mutualiser et unifier les revendications des ONG, des syndicats, des
mouvements populaires, ...
Ne
pas oublier les droits à la Paix, au même niveau que la justice et l'égalité.
> A
noter que je n'ai assisté à aucun atelier de l'Espace Climat, malgré mon
intention de le faire, car les interventions se déroulaient en anglais, avec
des traductions aléatoires sinon inexistantes. Je donne ci-dessous un passage
de l'avis de Maxime Combes, représentant d'Attac France et co-organisateur de
cet Espace : "les stratégies des activistes
sont éclatées : les uns ciblent les énergies fossiles, les autres insistent sur
la souveraineté alimentaire, certains visent le marché du carbone, et d'autres
ne croient plus qu'à la transition locale ancrée sur un territoire. Pour
l'instant, on ne sait pas réunifier cela ».
4 – Intermède théâtral au FSM : "D'un retournement
l'autre", de Frédéric Lordon
Une pièce en quatre
actes et en alexandrins qui met en scène et en ironie les mécanismes qui ont
conduit à la crise financière mondiale, jouée le 28 Mars dans un théâtre avec
une très belle architecture intérieure : "le 4ème Art".
Salle
remplie à 50%, avec très peu de spectateurs tunisiens, suivi d'un débat avec
les acteurs/actrices.
Extrait dit par Le Nouveau deuxième conseiller au
premier ministre: « Vos actes sont parlants, surtout leur hiérarchie qui
disent quel est l’ordre dans lequel les gens sont servis : d’abord les
créanciers, le peuple s’il en reste, voilà en résumé la trahison funeste
» (acte IV, scène 3).
En partenariat avec Attac France, les Compagnies
Fractal Julia et Ultima Chamada donneront plusieurs représentations de la pièce
de Frédéric Lordon « D’un retournement l’autre » à Tunis et Carthage
pendant le FSM.
Depuis sa création en 2005, la Compagnie Ultima
Chamada conjugue son objectif artistique avec l’engagement de l’équipe qui la
constitue (comédiens, musiciens, techniciens), attestant d’une volonté
d’ouverture sur la société civile, tant par les thématiques abordées, sociales
ou économiques et leur portée politique, que par les actions mises en place
telles que les débats avec le public qui seront proposés conjointement avec
Attac France après les représentations.
Créée à Paris en mars 2012, sur le thème de la
crise financière et du jeu de pouvoir entre les acteurs économiques et
politiques, la comédie de Frédéric Lordon, écrite en alexandrins, invite le
spectateur à un décryptage des mécanismes économiques, légaux ou détournés,
ainsi que des influences qui ont conduit à la situation de crise actuelle.
Mais le spectacle s’adresse surtout à la société
civile, soucieuse et responsable, et contribue, par son aspect pédagogique, à
une première étape préalable à toute mobilisation contre le capitalisme sauvage
et l’obscurantisme qui l’accompagne. Répondant au besoin d’un large public de
comprendre ce phénomène de crise « pervasive » à l’échelle mondiale
et proposant une véritable démonstration de ses causes et de leurs effets, les
débats s’orienteront sur l’impact de la crise en Europe et dans les pays
méditerranéens et les dynamiques porteuses d’alternatives et de mobilisations.
5
– Les assemblées de convergence et la manifestation de clotûre
L'Assemblée
des mouvements sociaux du vendredi soir – grand amphi de la fac de sciences
Ambiance
enthousiaste et très "combative", drapeaux, slogans :
"travail,
liberté, dignité" – "à bas le capital", "à bas la
dictature"
"
la lutte anti-capitaliste est la seule capable de faire retrouver la dignité au
monde"
Sont
passé/es à la tribune, pour des interventions de 5 mns : représentante de la
Marche Mondiale des Femmes, de Via Campesina, de la Confédération Paysanne,
d'ONG de Colombie, d'Haïti, du Brésil. Un catalan est même monté impromptu avec
le drapeau de Catalogne Sud, réclamant l'indépendance ! Et j'ai oublié beaucoup
d'autres intervenant-es, car j'ai retrouvé des copains de catalogne (nord), et
j'en ai profité aussi pour discuter avec des étudiants tunisiens, tristes de
voir se terminer les débats. Des petits incidents ont encore eu lieu entre
sahraouis et représentants marocains ...
Assemblée
finale du samedi matin : le futur du processus du FSM
Amphi 5 bourré à craquer,
surtout des représentant-es d'ONG faisant partie du Conseil International du
FSM, dont le fondateur brésilient, Chico Whitaker.
Représentante
du CCFD : "on a parfois parlé pour des gens qui n'étaient pas là
..."
Camerounaise : "si
tu ne fais pas de politique, la politique te fera"
Québecoise : suggestion
pour prochain FSM : l'organiser en
Occident, dans un pays du G20 (le Québec par exemple !).
Une
journaliste autrichienne a déploré que le travail n'a pas été facilité pour la presse, car il n'y avait pas de
véritables salles de presse informatisées, internet n'a pas très bien marché
...
Réactions : cela n'a pas empêché la réussite du Forum et les échanges !
Réactions : cela n'a pas empêché la réussite du Forum et les échanges !
Et
la plus belle intervention – pour moi -, d'un urugayen : "prenons soin
de notre utopie !"
En
guise de conclusion, Chico Whitaker a indiqué qu'il "fallait dissoudre
le Conseil d'Organisation actuel et le transformer en un Collectif plus
ouvert, et qui déciderait du prochain lieu."
J'insère ci-dessous les
explications post-forum qu'il a données sur son blog :
La
manifestation de clôture du samedi 30 Mars dans les rues de Tunis
La date du 30 Mars étant
aussi celle de la Journée Mondiale de la Terre, cette manifestation était
dédiée à la lutte du peuple palestinien.
Entre
10 et 15.000 personnes, moins que les organisateurs l'espéraient, car de
nombreux participants au Forum étaient repartis dans leur pays.
Le
dispositif policier était impressionnant au début : petits chars blindés, cars,
... mais peu de policiers devant les ministères devant lesquels nous avons
défilé par la suite.
Le
cortège s'est formé au début des allées Bourguiba, pour terminer devant
l'Ambassade de Palestine, soit plus de 5 kms, sous un ciel maussade et parfois
pluvieux.
Je
suis restée au début au milieu de la Marche Mondiale des Femmes, puis j'ai
"remonté et descendu" la manif, afin de me rendre compte au mieux.
Mais des incidents se sont
produits à l'approche de l'Ambassade palestinienne, quand un groupe important
(1 bon millier de personnes) arborant les insignes et les slogans du parti
Ennahdha s'est infiltré au milieu des cortèges français de Sud/Solidaires et du
Mouvement de la Paix .... ces derniers ont finalement réussi à les renvoyer en
fin de manifestation.
Lorsque je suis passée devant l'Institut Pasteur, tout proche de l'Ambassade de Palestine, une biologiste en blouse blanche qui nous regardait m'a dit, assez en colère : "comment pouvez-vous tolèrer Ennahdha au milieu de vous, vous faites leur jeu ! Ils doivent dégager, comme Ben Ali !".
Lorsque je suis passée devant l'Institut Pasteur, tout proche de l'Ambassade de Palestine, une biologiste en blouse blanche qui nous regardait m'a dit, assez en colère : "comment pouvez-vous tolèrer Ennahdha au milieu de vous, vous faites leur jeu ! Ils doivent dégager, comme Ben Ali !".
Des prises de parole ont
ensuite eu lieu depuis le toit de l'Ambassade, et l'ambiance est redevenue plus
chaleureuse ...
Article paru dans "La Presse de Tunisie"
dimanche 31 Mars :
Pertinence des propos et du dessin
NOTES
1 - Comment le
FMI et la Banque mondiale ont pris le contrôle de la Tunisie
Consulter :
http://www.bastamag.net/article3024.html
Accord Tunisie FMI, sans débat avec les élus de
l’Assemblée parlementaire tunisienne
2 - Le XIIIe congrès du Front Polisario, qui a débuté à Tifariti, « territoire libéré » selon les indépendantistes sahraouis, a commencé ses travaux par un appel à la lutte contre le Maroc jusqu’à « l’obtention de la liberté et de la dignité ».
Dans
son discours inaugural du congrès, le président du « parlement
sahraoui », Khatri Abdou, a expliqué que la feuille de route pour les
prochaines quatre années consistera à donner plus d’impulsion à la « cause
sahraouie », dans le but « d’obtenir l’autodétermination et
l’indépendance« .
De
son côté, le polisario en chef, Mohamed Abdelaziz, a souligné que le conflit du
Sahara et l’instabilité de la région ont favorisé la prolifération des armes
dans la région et une augmentation substantielle de la menace terroriste.
Plus
de 2000 participants étaient présents dans ce recoin du désert du Sahara
occidental non contrôlé militairement par le Maroc. Parmi eux, beaucoup étaient
venus de ce que les polisariens appellent les « territoires occupés »,
c’est-à-dire de Laâyoune, Dakhla, Smara etc…
Cette
délégation de Sahraouis de l’intérieur, qui participe pour la première fois au
congrès du Polisario, a été considérée comme « un fait
extraordinaire » par les organisateurs.
Il
est loin le temps, déclare un participant à un journaliste espagnol, où le roi
du Maroc menaçait les Sahraouis de l’intérieur de faire le choix entre le
patriotisme ou la trahison.
C’était
en 2009, lors du traditionnel discours commémorant la Marche
verte. Mohamed VI s’était exclamé en direction des Sahraouis du Sahara qu’en ce
qui concerne ce conflit, « on est patriote ou on est traître ».
ET SURTOUT, le site de référence,
pour l'avant, le "pendant", et l'après FSM :
Au revoir la Tunisie, et bon
courage aux tunisiens, tunisiennes, à tous les peuples du monde ...
Rédigé entre mai et juin 2013
annegau66@orange.fr
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