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jeudi 6 décembre 2012

NDDL : Les Forces de l'Ordre ça coûte très cher ... aux contribuables !

http://www.letelegramme.com/ig/generales/regions/finistere/n-d-des-landes-un-dispositif-policier-a-1meur-05-12-2012-1930835.php


Notre-Dame-des-Landes. Un dispositif policier à 1M€ 


de : Hervé Chambonnière       

mercredi 5 décembre 2012

Les forces de l'ordre peuvent-elles venir à bout des squatteurs de Notre-Dame- des-Landes ? Gendarmes et policiers nous affirment que c'est quasiment ... impossible. La mission coûte, en tout cas, très cher : selon nos informations, déjà plus d'1M€ pour les frais des seuls policiers.
Construction-démolition, évacuation-réoccupation ... Les forces de l'ordre peuvent-elles reprendre le contrôle de Notre-Dame-des-Landes ? Premier obstacle : la taille du site. Le terrain de construction du projet d'aéroport du Grand Ouest est aussi vaste que... l'île d'Ouessant. Son coeur, la «Zone d'aménagement différé», rebaptisée «Zone à défendre» par les opposants, représente l'équivalent de 1.147 terrains de football ou quatre îles de Bréhat, ou encore six principautés de Monaco! Cette zone boisée et boueuse est squattée en permanence par une centaine d'opposants très organisés. «Évacuer, c'est techniquement toujours possible, même sur une zone aussi importante et difficile. Il suffit juste d'y mettre les moyens», explique un officier supérieur de la gendarmerie, spécialiste du maintien de l'ordre. 

Plus de 1.000 gendarmes et CRS

Question moyens, l'État fait les choses en grand. Actuellement, selon nos informations, quatre compagnies républicaines de sécurité (CRS), soit 320 hommes, sont déployées dans la seule région nantaise (Nantes ville et aéroport Nantes-Atlantique). «Plus de dix escadrons» de gendarmerie mobile, soit plus de 730 militaires, ont été engagés à et dans les environs de Notre-Dame-des-Landes. Mais pour les opérations coup de poing, comme lors des premières expulsions, en octobre dernier, le double de ces effectifs, soit au moins 2.200 hommes, sont déployés, affirme le principal syndicat de police, Unité SGP, majoritaire aussi chez les CRS. Selon ce syndicat, quatorze escadrons de gendarmes mobiles et quinze compagnies républicaines de sécurité ont été mobilisés à cette période-là sur la région nantaise. Le ministère de l'Intérieur, de son côté, reconnaît que «plus de 500 gendarmes mobiles et CRS ont pu participer simultanément aux opérations». 

Hébergés à Vannes à Rennes et à Angers 

Le gouvernement peut-il consentir un tel effort dans la durée? 
«La logistique a du mal à suivre, rapporte Thierry Boutier, délégué zonal Ouest du syndicat Unité SGP pour les CRS. Parfois mobilisées pour une ou deux journées, des compagnies ont dû être hébergées à Angers, à Vannes et à Rennes, faute de logement disponible dans la région nantaise. Cela fait des temps de déplacement supplémentaires et de la fatigue en plus. «Les relèves posent problème, surtout quand les renforts viennent de toute la France (Nice, Orléans, Pau et LaRochelle actuellement)». 

«On n'en voit pas la fin» 

Le syndicat déplore aussi «l'absence de visibilité et d'anticipation». 
«Nous sommes habitués à intervenir en urgence, mais ici, on n'est plus dans l'urgence. Cela fait déjà un mois et demi que ça dure et on n'en voit pas la fin. Et nous avons d'autres missions», explique le policier syndicaliste, évoquant, notamment, la mise en place des zones de sécurité prioritaire. 
«Il ne faudrait pas qu'il y ait d'autres gros événements de ce type en France ou des manifestations dans tout le pays, prévient un autre policier. Il n'est pas possible de tenir dans la durée et de fixer autant d'effectifs sur un seul site». 
C'est bien là le gros problème des forces de l'ordre. «Déloger, on peut faire. Mais tenir, c'est impossible. On ne peut pas empêcher les gens de revenir le lendemain ou la nuit», reconnaît un spécialiste du maintien de l'ordre. Le dispositif risque en tout cas de coûter une petite fortune à l'État et donc au contribuable. À titre indicatif, il y a trois ans, le député UMP Éric Ciotti estimait le coût de mobilisation d'une CRS (salaires, primes et heures supplémentaires) à 13.200€ par jour. Selon nos informations, depuis le 9 octobre dernier, «plus d'un million d'euros» a été versé pour régler les seuls frais (hébergement, restauration, transport, indemnités de déplacement et heures supplémentaires) des CRS affectés à la mission «Notre-Dame-des-Landes». Cette somme n'intègre pas les salaires de ces fonctionnaires et ne prend pas en compte les frais des gendarmes mobiles, qui représentent au moins la moitié des effectifs mobilisés.


mercredi 5 décembre 2012

NDDL : Point de vue d'un commandant de bord


http://7seizh.info/2012/12/02/notre-dame-des-landes-un-commandant-de-bord-en-retraite-ecrit-a-la-zad/


Notre-Dame-des-Landes : un commandant de bord en retraite écrit à la ZAD

2 décembre 2012
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Les réactions anti-aéroport arrivent de toutes parts. Parmi celles adressées aux opposants, celle d’un commandant de bord en retraite datée du 30 novembre 2012, qui exprime avec détail une réalité assez peu mise en avant. Nous reprenons la publication des Zadistes pour une diffusion plus large.
« Et si on écoutait un peu les techniciens ?
J’ai bientôt 70 ans , 40 années dans l’aéronautique, 15 comme commandant de bord, 14500 heures de vol. Je ne connais pas tous les aéroports du monde mais j’en connais beaucoup,franchement beaucoup.Néanmoins , si je veux comprendre quelque chose dans cette polémique , je dois faire comme tout le monde : procéder par comparaisons.
On me dit que l’aéroport de Nantes est dangereux car les avions passent sur la ville. Ah bon ! j’ai passé ma vie de pilote à survoler des agglomérations à basse altitude, tant au décollage qu’à l’atterrissage, avec des procédures spécifiques à chaque endroit . Ici il faut virer sitôt l’attitude de sécurité atteinte, là il faut réduire la puissance, ailleurs c’est la pente qui est réglementée … Bref, je ne veux pas trop m’étendre sur les détails techniques mais les aéroports où les pilotes sont peinards et peuvent gérer les approches et les décollages comme bon leur semble sont rares. Aussi rares que les villes non survolées par les avions. Je connais Nantes pour avoir pratiqué cet aéroport plusieurs fois par semaine il y a quelques années et n’ai pas souvenir de spécificités particulières. Si on reconnaît Nantes dangereux, il faut interdire plusieurs milliers d’aéroports dans le monde et commencer par rayer de la carte celui de Chambéry. Hé oui les savoyards ! L’aéroport de Chambéry le Bourget est coincé entre deux montagnes sur ses flancs, le lac à un bout de piste la ville à l’autre bout. Pourtant les gros jets se posent et décollent sans scandales ni polémiques. Ne parlons pas de celui de Hong kong, : là , jusqu’en 1998 , c’était carrément un spectacle. Hongkong était dans un délire, Nantes aussi mais en sens inverse.
Si on considère maintenant l’autre volet de l’affaire, c’est à dire l’augmentation de l’activité, on va se retrouver encore une fois dans les arguments spécieux et délirants. On me dit que cet aéroport avec ses 3,5 millions de passagers en 2011 se trouve « à l’étroit » et qu’il faut prévoir l’avenir. On voudrait me faire croire que cette infrastructure arrive à saturation. C’est vrai que le chiffre ne me parle que si je compare, autrement je suis prêt à croire tout ce que l’on me dit.
Lors de l’éruption volcanique islandaise de l’année passée, Nantes qui était hors zone, a multiplié son trafic par trois pendant plusieurs jours , et tout s’est très bien passé. Les aéroports de la taille de Nantes sont les plus nombreux et il suffit de comparer avec d’autres pour se rendre compte de l’importance des balivernes prononcées sur le sujet. Un exemples parmi tant d’autres : Genève. Cet aéroport a reçu l’année passée plus de 12 millions de passagers. Oui vous avez bien lu : en fait, presque 13 millions ( je n’ai pas le chiffre exact) . Une seule piste, des contraintes de proximité urbaine et une plate-forme aussi grande que Nantes. Il est vrai que les Suisses sont en démocratie et ne se font pas enfumer. Le premier prix au championnat du monde du genre revient à San Diego en Californie : une seule piste, plate-forme beaucoup plus petite qu’à Nantes, des contraintes incroyables d’environnement et d’interdictions de nuit : 18 millions de passagers l’année passée. Oui chers amis écolos, 5 fois plus que Nantes. Bon il faut reconnaître le grand professionnalisme des contrôleurs aériens américains et aussi celui des pilotes. Les contrôleurs français sont également très bons et les pilotes pas maladroits et on voudrait nous faire croire que Nantes sera à saturation en 2020 avec… 5 millions de passagers !!! 5 millions en 2020, c’est tout ? et c’est y qui qui nous les fait ces prévisions ? Et basées sur quoi ? Si c’est aussi sérieux que le reste, on est encore en droit de douter. Même si le chiffre est dérisoire. Pour le moment présent ce n’est que moins de 4 millions.
Puisque personne ou presque dans ce pays n’écoute les arguments écolos, il me semble qu’il serait bon d’en employer d’autres : ceux qui frappent les esprits, ces arguments par exemple. L’essentiel n’est-il pas dans le résultat ?
Sauver des terres agricoles et permettre aux petits oiseaux de continuer de voler c’est bien, c’est même essentiel mais puisque personne n’écoute, tenons donc un autre langage !!!
Éviter de dépenser un demi milliard d’euros dans une lamentable stupidité à la gloire de ces hommes politiques qui auront disparu dans l’enfumage des irresponsabilités lorsque le projet réalisé révélera sa bêtise. Se préserver du gaspillage à une époque qui, nous dit-on, va devenir encore plus dure : cela devrait suffire à convaincre les plus sourds non ? et surtout renvoyer les pelleteuses au garage.
On peut aussi continuer de subir l’oligarchie, se complaire dans ce système corrompu de pseudo démocratie dite représentative, honorer 577 députés, gaver 350 sénateurs et leur permettre de donner leur nom aux édifices construits avec l’argent public. Concernant l’aéroport de Nantes je propose Ayrault port. On peut aussi espérer qu’un jour peut-être , les français découvrent que la solution n’est pas dans les hommes politiques mais dans l’action citoyenne responsable. Qu’il soient de droite de gauche du milieu ou de Mars, les politiques ne sont pas la solution : ils sont le problème. »

NDDL : ce qui risque d'être détruit par une prochaine offensive

Les cabanes protégées par les tracteurs

Cliquez sur la photo pour l'agrandir

NDDL : les forces de l'ordre jusqu'en 2017 ?







Notre-Dame-des-Landes, grand bourbier des forces de l’ordre


Vendredi 23 novembre de violents affrontements avaient eu lieu à Notre Dame des Landes (Archive Le Mensuel)

Alors que la situation s’enlise sur le site du futur aéroport, la "mission Notre-Dame-des-Landes" apparaît déjà comme l’une des plus vastes opérations de police menées en France. Elle a mobilisé jusqu’à 2 200 hommes au plus fort de la crise et commence à agacer dans les rangs.
Les gendarmes et les policiers la surnomment « mission Notre-Dame-des-Landes »*. Un nom simple qui désigne une des plus importantes opérations de maintien de l’ordre menées à ce jour en France. Pas forcément en terme d’effectifs. Le G8 de Strasbourg en 2009 ou le G20 de Deauville en 2011 ont mobilisé plus de policiers et de gendarmes. Mais durant une semaine... La « mission NDDL » dure déjà depuis un mois et demi et son issue paraît aléatoire.
NDDL mobilise à la fois des gendarmes mobiles et des CRS. « Ils viennent de toute la France. Avignon, Nice, Lille, Guéret, Saint-Brieuc et Lille. C’est un incroyable chassé-croisé ! », souffle un gendarme. Sur le terrain, cependant, les rôles sont bien définis. A quelques exceptions près (lire ici), les gendarmes interviennent dans la campagne, autour et sur le site du futur aéroport du grand Ouest. Les policiers, eux, veillent sur la préfecture et le centre-ville de Nantes, ou encore sur la plateforme de Nantes Atlantique. Quand les événements l’imposent, ils prêtent main forte à leurs collègues militaires.
DEUX FOIS PLUS D'HOMMES À NDDL QU'EN AFGHANISTAN
Ce fut le cas dans la semaine du 16 octobre, au plus fort des premières évacuations menées dans les maisons de la Zone d’aménagement différé (Zad). Combien étaient-ils exactement ? Selon le syndicat de police Unité SGP, jusqu’à 15 compagnies républicaines de sécurité* et 14 escadrons de gendarmes mobiles* ont été mobilisés sur cette période. Soit près de 2 200 hommes. Deux fois plus que le nombre de soldats français déployés actuellement en Afghanistan...
« Tout le monde n’est pas intervenu au même moment », nuance Thierry Boutier, délégué zonal du syndicat Unité SGP des CRS. Au ministère de l’Intérieur, on s’en tient au chiffre officiel, le seul avancé jusqu’à aujourd’hui. « Ce qu’on peut dire, c’est qu’au plus fort de la crise, à un instant T, il y a eu plus de 500 gendarmes et policiers à intervenir sur les expulsions », assure Pierre-Henry Brandet, porte-parole.
Les chiffres avancés par les syndicats seraient-ils faux ? « Il y a des compagnies qui sont venues une seule journée, d’autres deux. Certaines étaient en repos, en réserve, d’autres sécurisaient certains sites sensibles, détaille le porte-parole du ministre de l’Intérieur. Je ne dis pas que les chiffres des syndicats sont faux. Je dis qu’il ne faut pas les additionner, car ils ne représentent pas la réalité. »
SUJET SENSIBLE
Combien de policiers et gendarmes restent déployés ? Quel est le coût d’une telle opération ?** Autorités locales et gendarmes ne souhaitent pas communiquer. Il faut dire que le sujet est très sensible. La « mission NDDL » n’a pas été placée sous la tutelle du préfet de Loire-Atlantique, comme c’est généralement le cas quand des forces mobiles sont engagées. Le ministère de l’Intérieur, via son unité de coordination des forces mobiles (UCFM), gère en direct avec le préfet.
Dans les rangs, la mission commence à agacer. Seuls à prendre officiellement la parole, les syndicats de police relaient le ras-le-bol commun des deux « corps » engagés sur le terrain. « D’accord, les CRS sont là pour gérer les imprévus, mais cela fait maintenant un mois et demi que ça dure, rappelle Thierry Boutier. On continue à envoyer un jour une compagnie de Nice, le lendemain une de Lille, et le surlendemain une de Saint-Brieuc. Cela rajoute du trajet et beaucoup de fatigue à des missions qui ne sont déjà pas faciles. » Même son de cloche chez Alliance CRS, syndicat de gardiens de la paix affilié à la CFE-CGC. « On n'a aucune visibilité sur notre mission. Les gars savent quand ils partent de chez eux, mais jamais quand ils reviennent. »
L'opération du 23 novembre, sur le site du futur aéroport, semble aussi avoir révélé les limites du dispositif. Problèmes de mobilité, de communication, difficultés pour se repérer liées à une méconnaissance du terrain, manque de munitions… Les gendarmes engagés dans les violents affrontements en fin de semaine dernière ont éprouvé des difficultés à faire face. Leur tenue de "Robocop", pas franchement adaptée au terrain, n'a pas simplifié les manoeuvres. Et l'opération s'est révélée compliquée à commander car ses contours juridiques étaient flous. 
ENGAGÉS JUSQU'EN 2017 ?
Outre les ennuis tactiques, les policiers pointent les problèmes logistiques engendrés par l’importance des effectifs présents. Depuis quelques semaines, les locaux de la CRS 42, la compagnie de Nantes, sont devenus un véritable « hall de gare ». La cantine peine à nourrir tout le monde. De même pour l’hébergement. Il est arrivé que plus un seul lit ne soit disponible dans la capitale de Loire-Atlantique. Résultat : des policiers niçois, sécurisant Nantes, ont dû dormir à Rennes.
Le malaise latent au sein des forces de l’ordre est accentué par l'impossibilité à envisager une sortie de crise. « Si encore on connaissait la date de la fin de notre mission, confient en chœur des policiers. Mais là, on n’a aucune visibilité. Les opposants ne lâcheront pas le morceau. On risque d’être présents jusqu’à la mise en service de l’aéroport, en 2017 ! »
Au cabinet du ministre, on se veut plus optimiste. Une commission de dialogue a été mise en place ce vendredi. « Si on arrive à s’entendre, ça peut évoluer vite », affirme le porte-parole du ministère. Rien n'est moins sûr.
*Une compagnie républicaine de sécurité compte 80 policiers.
*Un escadron de gendarmes mobiles compte 70 gendarmes.
**Une source citée par Presse océan a avancé la somme de 500 000 € pour l’opération du 16 octobre. Ce chiffre n’a jamais été démenti.
Auteur : Claire Staes avec Killian Tribouillard

lundi 3 décembre 2012

NDDL : Les failles du projet


ND-des-Landes : les failles du projet

http://www.politis.fr/Les-failles-du-projet,20211.html

Par Lena Bjurström 29 novembre 2012


Après de nouvelles expulsions, le Premier ministre veut « dialoguer », mais poursuit le chantier.

Une « commission du dialogue », c’est la proposition de Jean-Marc Ayrault, samedi 24 novembre, aux opposants à l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes. Au lendemain des tensions provoquées par de nouvelles expulsions sur la ZAD (zone d’aménagement différé pour les uns, zone à défendre pour les autres), le Premier ministre semble vouloir jouer l’apaisement autour d’un dossier devenu très médiatique, et Europe Écologie-Les Verts applaudit ce qui pourrait être une solution à l’ambiguïté de leur position. Pourtant, pas de grand changement en perspective. Jean-Marc Ayrault « réitère l’engagement du gouvernement » dans le projet, mais, puisque « des interrogations subsistent », cette commission sera chargée d’entendre « toutes les parties prenantes ». 

La question est de savoir si elle entendra les arguments contre un projet dont les failles multiples placent le gouvernement face à ses contradictions. L’une de ces failles, et non la moindre, est d’ordre environnemental. Le futur aéroport du Grand-Ouest devrait en effet s’étendre sur 1 650 hectares, dont 80 % de zones humides. Pour respecter les exigences de la loi sur l’eau, la société promotrice, Vinci, devrait compenser la destruction de ces zones en les recréant au double. Un « dédommagement » qui n’avait jamais été envisagé à cette échelle, si bien que la commission d’enquête constituée dans ce cadre, tout en donnant son aval au projet, demande que les méthodes de compensation environnementale soient validées par un comité scientifique.

Une réserve de taille, que les ministères des Transports, de l’Agriculture et de l’Écologie semblent prendre en compte dans un communiqué commun, annonçant le report des travaux de défrichement (prévus en janvier 2013) jusqu’aux conclusions de ce comité scientifique. Néanmoins, les ministres rappellent, à l’instar de Jean-Marc Ayrault, « la nécessité de poursuivre le déroulement du projet ». 

Et ce, quelles que soient les conclusions du comité scientifique ?

Déclaré d’utilité publique par décret en février 2008, le projet d’aéroport devrait coûter 556 millions d’euros. La société Vinci investirait 315 millions d’euros, se remboursant par l’exploitation de la concession durant cinquante-cinq ans, tandis que les parts de l’État et des collectivités territoriales s’élèveraient respectivement à 125,5 et 115,5 millions d’euros, avec une clause de participation aux résultats d’exploitation. 

Le coût est important en ces temps d’austérité budgétaire, d’autant qu’il pourrait ne pas être contrebalancé par le « bénéfice » attendu. Si l’étude de déclaration d’utilité publique annonce un retour de 600 à 700 millions d’euros à la collectivité, celle réalisée par le cabinet hollandais CE-Delft en 2011, à la demande notamment du Collectif d’élus doutant de la pertinence du projet (Cedpa), est nettement moins optimiste et alerte sur un risque de déficit de 90 à 600 millions d’euros selon les estimations. Pour un aéroport qualifié d’« inutile » par certains, il pourrait coûter cher. Relancé en 2000, le projet est attaqué sur le fond, alors que le contexte n’est plus le même. 

L’aéroport de Nantes-Atlantique suffirait largement au trafic aérien, et serait même au tiers de ses capacités puisque, d’après le Collectif de pilotes de ligne doutant de la pertinence du projet, sa piste pourrait absorber 35 avions par heure, contre les 10 à 12 à l’heure actuelle. Par ailleurs, selon l’étude du cabinet CE-Delft, il serait plus rentable d’exploiter, voire de modifier, cet aéroport plutôt que de s’engager dans la construction de son remplaçant.

Alors que Jérôme Cahuzac, ministre du Budget, annonçait cet automne la réévaluation des projets d’infrastructure du Schéma national des infrastructures de transport, établi par l’ancien gouvernement et jugé « incompatible avec l’objectif de retour à l’équilibre des finances publiques », on s’interroge sur l’intérêt du projet de Notre-Dame-des-Landes. Et c’est avec ce débat, de plus en plus relayé par les médias, que la « commission du dialogue » devra composer. Sans pouvoir envisager l’annulation du projet, l’exercice pourrait être difficile.

NDDL : ou comment les chiffres ont été manipulés ...

http://www.reporterre.net/spip.php?article3563

Notre Dame des Landes : l’Etat a manipulé les chiffres. Voici comment



Comment faire passer un schéma boiteux pour un projet avantageux ? En manipulant les chiffres. Reporterre révèle le tour de passe-passe qui a permis à l’Etat de faire croire que le projet d’aéroport de Notre Dame des Landes serait rentable.Hervé Kempf (Reporterre & Le Monde) - 3 décembre 2012


Un mot interpelle : celui de "manipulation", employé par le sénateur EELV Ronan Dantec le 17 novembre :
"Lors de l’enquête coût-bénéfice sur le projet, l’Etat a manipulé les chiffres. Au moment de calculer la valorisation en euros des gains de temps permis par le nouvel aéroport, les sommes ont été au moins doublées. Sans cela, l’enquête coût-bénéfice aurait été négative. Cela a été fait sous la responsabilité du préfet de l’époque, Bernard Hagelsteen, aujourd’hui conseiller chez Vinci... Cela contribue à l’extrême fragilité de la légitimité démocratique de ce projet."
Le propos est grave. Pour comprendre son origine, il faut aller consulter l’"Instruction cadre relative aux méthodes d’évaluation économique des grands projets d’infrastructure de transport", publié en 2005 par le Ministère des Transports.

Ce document précise notamment comment valoriser monétairement les gains de temps de transport permis par les nouvelles infrastructures. Il est le document de référence auquel doivent se référer les agents de l’Etat qui ont charge d’opérer ces valorisations monétaires.
Il explique ainsi, page 34, la "valeur du temps" à prendre en compte pour les"voyageurs interurbains". Pour les distances inférieurs à 50 km, c’est ainsi 8,94 € de l’heure (valeur 2000).

Si l’on applique cette valeur au projet d’aéroport de Notre Dame des Landes, en la projetant en 2025 et en appliquant le taux d’inflation, on arrive à des valeurs s’étageant entre 18,6 € et 20 €, selon les différents scénarios de trafic.

C’est ce qu’observe le rapport du cabinet néerlandais CE Delft, qui a mené une contre-expertise du dossier d’enquête d’utilité publique en 2011, page 20.
L’enquête publique a-t-elle pris ces valeurs, qui découlent de l’Instruction cadre qu’elle devait appliquer ?
Non. Elle a utilisé des chiffres bien supérieurs. On arrive même à 98,10 € pour le scénario 2, qui est considéré comme le plus probable.

98 euros au lieu de 19,25 : c’est une multiplication par quatre !
Or, cette valeur joue un rôle très important, puisqu’elle détermine l’avantage économique du projet d’aéroport. Si elle était inférieure, il n’y aurait plus d’avantage économique, mais au contraire une perte.
Allons vérifier sur pièce, pour bien comprendre.
Il faut retrouver le Dossier d’enquête publique préalable à la déclaration d’utilité publique, du Projet d’aéroport du Grand Ouest Notre Dame des Landes, réalisé en 2006 et ayant conduit au Décret d’utilité publique pris en février 2008.

Dans ce volumineux dossier de plusieurs centaines de pages, on va trouver la clé dans la pièce F :

Les ingénieurs néerlandais de CE Delft ont-ils raison ? Où ont-ils trouvé le quadruplement de la valeur normale ?
Eh bien, dans le deuxième volume de la Pièce F, page 97 :

Que veut dire ce tableau ? Qu’en 2025 (deuxième colonne), l’aéroport fait gagner 312 000 heures ce qui génère des "avantages" de 30,6 millions d’euros par an, soit plus de 900 millions sur trente ans.
On divise 30,6 millions par 312 000 et l’on voit que l’heure gagnée est valorisée à 98,10 €.
Au lieu de 19,25 €, si l’on suivait les instructions officielles du ministère des Transports.
Joli tour de passe-passe, non ?
Le quadruplement des chiffres, qui n’est pas justifié dans le texte, a une lourde conséquence : il permet de présenter comme économiquement avantageux un projet d’aéroport qui, si l’on avait suivi la méthode recommandée, serait apparu comme déficitaire.
Cette manipulation pose de nombreuses questions :
- qui l’a opéré ?
- a-t-elle été couverte par les autorités préfectorales de l’époque, dont le préfet Bernard Hagelsteen, qui travaille maintenant chez Vinci ?
- pourquoi le Conseil d’Etat n’a-t-il pas vu ce manquement évident à la méthode officielle d’expertise ?
Et par ailleurs, et c’est essentiel : avant toute discussion, va-t-on reprendre l’expertise économique de ce projet, en écoutant tous les experts, et pas seulement ceux qui, pour des raisons qui restent à éclaircir, ont intérêt à présenter ce projet sous le jour le plus favorable ?

L’enquête ci-dessus a nourri les informations publiées dans la chronique Ecologie du journal Le Monde, dans son édition datée du dimanche 2 décembre :



Sources :
Reporterre
Le Monde daté du 4 décembre 2012.