Huit plaintes pour harcèlement
contre un enseignant
d'une petite école de montagne
des Pyrénées-Orientales
Une enquête est en cours après plusieurs plaintes pour harcèlement scolaire visant un instituteur de Sahorre dans les Pyrénées-Orientales. Des parents d’élèves et des élus dénoncent un climat de "peur" et "d’humiliations" dans la petite école de ce village de montagne.
Ce samedi 14 juin, une trentaine de parents d’élèves, accompagnés de plusieurs maires du secteur, se sont réunis devant les locaux de l’inspection académique de Prades, dans les Pyrénées-Orientales. Pancartes à la main, ils ont exprimé une colère longtemps contenue. Sur les écriteaux : des phrases chocs. "Tu es nul ", "Tu seras chômeur comme ton père"… Autant de propos que leurs enfants disent avoir entendus dans l’enceinte de l’école de Sahorre, petit village de montagne perché à 900 mètres d’altitude, dans la vallée de la Rotja.Depuis trois mois, huit plaintes ont été déposées à la gendarmerie de Prades pour harcèlement scolaire, visant un enseignant en poste à l’école communale, qui accueille deux classes de la maternelle au CM2.
Une association, "École sereine Sahorre", vient d’être créée par des parents d’élèves. Son objectif : obtenir la mise en retrait de l’instituteur. Les quatre maires des communes concernées (Mantet, Sahorre, Py et Escaro) soutiennent la démarche.
"Notre fils pleurait tous les matins"
Pauline et Éric ont été les premiers à franchir la porte de la gendarmerie le 5 mars dernier. Leurs mots traduisent une profonde détresse. *"Ça a commencé au mois de janvier. Notre fils ne voulait plus aller à l'école. C'était des crises d'angoisse. *Il pleurait tous les soirs, il pleurait tous les matins", raconte Pauline. "Il n'osait pas nous parler parce qu'il avait peur qu'on aille voir l’enseignant et qu'il y ait des représailles."
Le couple décrit une situation extrême. "Il y a même une fois où il nous a dit plutôt crever que d'aller à l'école", confie Pauline. "On ne peut pas martyriser des enfants comme ça. Ce n’est pas possible."
"Il l’a faite applaudir parce qu’elle n’avait pas fini ses maths"
Gaëlle Brouard, conseillère municipale de Sahorre, a également porté plainte. Sa fille a été déscolarisée en cours d’année 2023 : "Elle est rentrée en pleurs en disant qu’il l’avait faite applaudir par toute la classe parce qu’elle n’avait pas fini ses mathématiques. Il a dit : Eh bien, tu n’as pas fini tes maths, bravo ! Vous serez tous privés de sport, allez, on l’applaudit !"
Gaëlle poursuit : "**Il la retenait après 16h30 pour des prétextes absurdes : casier pas rangé, cahier mal placé... On attendait dehors, en plein hiver. Elle était seule, stressée. Elle ne dormait plus. Elle ne voulait plus y aller. **Elle avait perdu tout goût pour l’école."
Mais ce qui la révolte le plus, c’est le "manque de réaction de l’institution" : "Des signalements ont été faits dès 2020. Rien n’a été fait. On a l'impression que l’inspection académique est un paquebot qui n’arrive pas à se remettre en question", s’indigne-t-elle. "On entend souvent parler du harcèlement entre enfants. Mais là, c’est un adulte. Il faut aussi en parler."
"Des séquelles encore visibles"
Laetitia, maman d’un élève d’Escaro et trésorière de l’association, évoque aussi des faits datant de plusieurs années. "Mon fils a subi des brimades toute la journée. Il rentrait en pleurant, en disant : "Tout le monde a été privé de récré parce que je n’ai pas été assez rapide"." Son fils, en surpoids, dit avoir été la cible de remarques cruelles. "Le maître lui a dit devant tout le monde : "Allez, roule ! Tu es un paquebot !" C’était humiliant. Il en garde encore des séquelles."
Laetitia affirme avoir alerté les autorités dés 2020. "Si on avait réagi plus tôt, les enfants n’auraient pas eu autant de souffrance et de mal-être. Il faut au minimum que cet enseignant soit retiré de l’école le temps de l’enquête."
Le soutien des maires
Face à l’ampleur de la mobilisation, les élus locaux montent au créneau. "L’Éducation nationale est là pour aider les enfants à grandir, pas les abaisser. Nous avons un devoir de protection", s'alarme Jean-Luc Blaise, maire de Mantet.
Et les conséquences sont lourdes, selon lui. "Depuis deux ou trois ans, une vingtaine de familles ont déscolarisé leurs enfants ou refusé de les inscrire à Sahorre. Vingt enfants, c’est presque une classe. À terme, cela menace même l’existence de l’école."
Le maire appelle les instances éducatives à prendre leurs responsabilités : "La souffrance avérée d’un certain nombre d’enfants doit être entendue. Nous, élus, avons fait notre part en soutenant les familles. À l’Éducation nationale d’agir." L’école de Sahorre accueille une quarantaine d’élèves de la maternelle au CM2, répartis sur deux classes.
Contactée, la directrice académie, Anne-Laure Arino, dit prendre la situation très au sérieux. Elle a rencontré deux maires et des représentants des parents d’élèves pour "échanger avec eux sur la situation actuelle et des suites à donner". En lien avec le parquet et la gendarmerie, elle explique être dans l’attente d’informations précises et factuelles, avant de prendre toute décision.
L’enseignant mis en cause n’a pas pu être contacté. Selon nos informations, il bénéficie du soutien de nombreux parents.
Source : https://tinyurl.com/yy289h28
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