Ce blog rassemble, à la manière d'un journal participatif, les messages postés à l'adresse lemurparle@gmail.com par les personnes qui fréquentent, de près ou de loin, les cafés repaires de Villefranche de Conflent et de Perpignan.
Mais pas que.
Et oui, vous aussi vous pouvez y participer, nous faire partager vos infos, vos réactions, vos coups de coeur et vos coups de gueule, tout ce qui nous aidera à nous serrer les coudes, ensemble, face à tout ce que l'on nous sert de pré-mâché, de préconisé, de prêt-à-penser. Vous avez l'adresse mail, @ bientôt de vous lire...

BLOG EN COURS D'ACTUALISATION...
...MERCI DE VOTRE COMPREHENSION...

samedi 9 février 2019

Chronique des Zones A Defendre (ZAD ) de janvier 2019

 Des infos, des liens, des photos pour tout savoir (ou presque) sur ce qu'il s'est passé dans les Zones A Défendre (ZAD) pendant ce mois de janvier 2019 ; on y parle de Notre Dame Des Landes et de plein d'autres zones à défendre.


Merci à l'auteur, membre du Collectif de Soutien NDDL66, pour cette compilation mensuelle précieuse.

 

NOTRE DAME DES LANDES (44) 

 Enraciner l’avenir

Source : ZAD.nadir.org et médias

Janvier 2019

Et ailleurs : contre Macron et son monde – gilets jaunes - Amassada (12) – Sivens (81) –
Ambazada au Pays basque (64) – CIGEO (55) & Anti nucléaire (Grand Est) – Anti rep Paris (75) – Landivisiau (29) - Gazoduc franco-espagnol (66) – Blanquefort sur Briolance (47) -
St Père en Retz (44) – Lisbonne (Portugal) - GILETS JAUNES : BILANS DE LA REPRESSION


ZAD de NDDL - 44


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Infos du 7 au 13 janvier
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Mardi 8 janvier

►AntiRep

Les deux camarades ont été relaxées ce matin ! Accusées d’avoir participé au dépôt des restes de grenades devant la préfecture pendant les expulsions, elles sont libérées des accusations de "dépôts d’ordure" ! Bravo et la lutte continue !
https://www.ouest-france.fr/pays-de-la-loire/nantes-44000/nantes-grenades-de-la-zad-renvoyees-la-prefecture-deux-militantes-relaxees-6162729

(cf. https://zad.nadir.org/spip.php?article6288)

Vendredi 11 janvier

►Anti-colonialisme :
Semaine du cinéma Palestinien du 8 janvier au 15 janvier. Contre le colonialisme et l’apartheid ! Pas mal de ciné sont autour de la ZAD : Héric, Blain, Nort sur Erdre,...

Dimanche 13 janvier


►Nantes :




Rions un peu avec l’info du jour : l’aéroport français qui voit son trafic augmenter le plus... c’est Nantes ! il a accueilli 6,2 millions de passager·es en 2018. A quand un nouvel aéroport pour la métropole nantaise ?? Heureusement qu’on est là pour limiter le trafic, l’avion, c’est toujours le moyen le plus polluant.

►ZAD :

Si vous vous dites que la nouvelle année est le bon moment pour prendre un peu de recul... Si l’approche du 17 janvier vous rend nostalgique, alors on vous conseille la lecture de Et si seulement... chronique subjective de 2018 sur la zad. Comme son titre l’indique c’est un parti pris mais ça a le mérite de tenter un bilan de l’année complète.

►Nantes :

Il n’y a pas que le trafic aéoportuaire qui augmente à Nantes, il y a aussi la mobilisation des Gilets Jaunes avec encore près de 3.000 personnes dans la rue ce samedi 12 janvier



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Infos du 14 au 20 janvier
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Lundi 14 janvier

►NDDL Poursuivre Ensemble :
Des nouvelles : lettre d’infos n°6
https://www.nddl-poursuivre-ensemble.fr/

DEUX DATES TRES IMPORTANTES : 17 janvier et 9 février

17 JANVIER 2019 : UN AN SANS AEROPORT ÇA SE FETE !

NDDL POURSUIVRE ENSEMBLE

Fidèle à ses engagements et ses statuts, apporte tout son soutien et toute sa détermination à accompagner les projets des nouveaux habitants de la ZAD. A ce jour nous exigeons que soit donnée la priorité à l’installation sur les terres sauvées du béton plutôt qu’à l’agrandissement souvent synonyme de destruction d’un environnement fragile. De même nous insistons pour que les cop (conventions d’occupation précaire) soient rapidement transformées en baux et que les habitats sauvés et/ou imaginés par les nouveaux habitants soient reconnus et maintenus en utilisant tous les outils existants qui peuvent aisément s’inscrire dans le PLUI.

Toutes ces actions à venir ne sont possibles que parce que l’aéroport et son cortège funèbre de destructions environnementales a été abandonné.

C’est pourquoi NDDL Poursuivre Ensemble se joint aux habitants de la ZAD pour appeler ses adhérents et tous ceux qui le souhaitent à venir fêter, sur le site, le 17 janvier 2019, la première année sans aéroport. Samedi 9 février 15 heures : rencontre intermédiaire à NDDL

Nous, NDDL POURSUIVRE ENSEMBLE, organisons une rencontre intermédiaire avant AG en direction de tous nos adhérents le samedi 9 février à la salle Cassiopée de NDDL. Nous vous invitons à nous rejoindre à 15 heures. Nous ferons un point sur le fonctionnement de notre asso, parlerons des nouvelles de la ZAD et un volet de cette réunion concernera les autres luttes de proximité que nous soutenons.

Venez nombreux, c’est avec plaisir que nous nous retrouverons...




Vendredi 18 janvier


Les zadistes veulent acheter les terres 
de Notre-Dame-des-Landes

Un an après l’abandon de l’aéroport, le mouvement fête sa victoire. Et lance une levée de fonds. Le but : une propriété collective des fermes, bâtiments agricoles et terres de la Zad.




Notre-Dame-des-Landes (Loire-Atlantique), reportage

Il y a un an, éclatait la joie incrédule d’avoir gagné contre l’Etat et une multinationale. Mais à Notre-Dame-des-Landes, les lendemains de cette victoire ont été très durs : offensive militaire de l’Etat, fortes dissensions et engueulades entre zadistes sur la stratégie face à la normalisation. Un an après, le ton est à effacer ces temps lacrymogènes pour ne garder que « la poursuite de l’aventure collective » après l’abandon du projet d’aéroport. Pour fêter l’entrée dans l’an 2, les militants restés sur le terrain ont fait un appel à dons pour être en mesure de racheter collectivement terrains et bâtiments.



La journée du premier anniversaire, jeudi 17 janvier, a été plutôt festive qu’axée sur la discussion. Contrairement aux habitudes des précédents rassemblements, aucun débat n’avait été programmé. On a surtout chanté et bu du vin chaud, dégusté de la bière de la Zad - « cuvée des Fosses noires ». Sous le croisillon de poutres blondes de l’Ambazada, le lieu international édifié par des Basques, on a écouté de la musique de chambre, Chostakovitch pour piano et deux violons en parkas. Le triton géant de toile s’est payé une sortie aux flambeaux du pied du phare de La Rolandière au pré entre la Wardine et l’Ambazada, où a été planté le barnum du banquet pour lequel 450 réservations avaient été faites. « On n’a pas plus de couverts que ça », dit Jean-Mathieu.

Geneviève Coiffard : « Cette structure juridique permet une propriété privée mais collective ».


Mais le message du jour était surtout financier. Pour acheter des parcelles et des fermes, il faut un trésor de guerre. La forme choisie pour collecter ce pactole est celle du fonds de dotation. « Cette structure juridique particulière, entre l’association et la fondation, permet une propriété privée mais collective, explique Geneviève Coiffard. On a bataillé avec la préfecture pour obtenir que les administrateurs aient une égalité de droits et de devoirs, mais on nous a imposé de mettre un nom en avant. C’est comme ça que je suis présidente, mais ça reste très collectif ».

Lancé à la mi novembre, le fonds de dotation a été baptisé La Terre en commun. Auprès des cercles proches, il a déjà récolté 220.000 euros auprès de trois cents personnes, et table sur 2 à 3 millions d’euros, sans savoir encore ce qui sera à vendre, à quel prix ni quand. « Les premières contributions vont de 20 euros à des dons à trois ou quatre zéros. »

Un fonds de dotation ne prévoit ni parts ni actions, et évidemment aucun dividende aux donateurs, hormis les bonus fiscaux.
L’avantage : une réduction d’impôt de 66 % du montant des sommes versées, dans la limite de 20 % de son revenu imposable pour le particulier, et pour les entreprises une défiscalisation de 60 % du versement, dans la limite de 0,5 % du chiffre d’affaire annuel.

Dans un petit territoire où du temps de l’occupation, l’usage de l’argent avait été réduit au minimum, la pratique du troc et du prix libre permettant à chacun de trouver sa place, on a besoin d’euphémismes pour parler de tant d’argent. « Ce n’est pas un pari fou. C’est un pari tout court. La lutte contre le projet d’aéroport a été vue comme un pari dingue, et on a mis à genoux l’Etat. On va gagner aussi avec le fonds de dotation ! C’est une redirection des fonds des citoyens, qui ne savent pas aujourd’hui où vont leurs contributions », souligne Christian Grisollet, ancien vice-président de l’association citoyenne Acipa ; opposé à la dissolution de celle-ci, il a cofondé l’association NDDL Poursuivre ensemble. « C’est même plus qu’une réorientation fiscale, c’est une réorientation vers des alternatives qui tiennent aux tripes des donateurs », ajoute Elisabeth Guist’hau, administratrice régionale de Terre de Liens.

Les administrateurs du fonds La terre en commun représentent les diverses composantes de la lutte : Naturalistes en lutte, paysans historiques, zadistes, membres de l’association citoyenne. « Toutes et tous tirent leur mandat de l’assemblée des usages ».



 Cette nouvelle étape d’une lutte qui a souvent fait fi de la légalité et de la propriété a laissé certains perplexes : « Auprès de l’ultra gauche, ça ne passe pas bien », dit ce militant de longue date. « C’est sûr, entre nous, il y a eu pas mal de débat, explique Armand, notamment avec ceux qui ont le sens anticapitaliste le plus marqué, ou les paysans qui ne voulaient pas de propriété privée des terres, préférant un droit d’usage. Mais cette formule du fonds de dotation permet de sortir des bâtiments de la spéculation. Potentiellement, on voudrait racheter toute la Zad, mais apparemment ce n’est pas et ça ne sera pas à vendre. Cependant, le Département n’a pas vocation à gérer les bâtiments et il est probable qu’il s’en débarrassera assez vite en les mettant à la vente. D’anciens proprios n’ont pas fait valoir leur droit à la rétrocession. On pense qu’une douzaine de lieux-dits de la Zad, habitats, fermes et infrastructures collectives, vont être mis sur le marché dès les prochains mois, mais pratiquement sans terrain. En revanche le foncier, les terres agricoles, on craint que le Département se les garde,
pour s’en servir de zone de compensation écologique lors d’autres projets d’artificialisation des sols. »

La formule de SCI (société civile immobilière), a été écartée sur les conseils de paysans du cru qui l’ont utilisée pour collectiviser des acquisitions autour de luttes foncières et fermières dans les années 70. L’existence de parts de SCI pose problème quand des fondateurs meurent et que leurs enfants se montrent peu concernés, voire pas du tout motivés par la pérennité de ces formules collectives.

Sans parts ni actions qui pourraient se transmettre ou se vendre, le fonds de dotation évite cet écueil. « Mais ça nous fait quand même un peu bizarre, sachant que c’est un truc créé par Sarkozy comme genre de paradis fiscal légal. Bon, si ça nous sert à nous, pour une gestion collective des terres, et qu’on ne peut pas spéculer avec, ça nous va bien... », explique une adhérente de Poursuivre ensemble.

« J’ai un peu honte d’utiliser un outil pareil, mais je l’assume parfaitement, d’autant que ça interdit toute gestion spéculative » dit Geneviève Coiffard, par ailleurs militante d’Attac. Et tant pis si la procédure sous contrôle continu du préfet, est solennelle, toute donation dite « affectation irrévocable à titre gratuit » devant être effectuée par acte notarié.



« Nous, on a donné un peu de sous, pas au fonds de dotation, mais directement au projet d’élevage de moutons et d’apiculture de Vincent et Amalia à La Riotière. De toutes façons l’avantage fiscal, ça ne nous concerne pas : on ne paye pas d’impôts, on n’est pas bien riche » : c’est ce que nous dit un couple, alors que nous cheminons ensemble sur le tapis de feuilles de la forêt de Rohanne, lors de la balade naturaliste, entre le hêtre fendu comme la lettre grecque Mu et la leçon sur le lierre, écosystème à lui seul exerçant solidarité et solidité, aux antipodes de la notion de parasite malfaisant qui lui colle à l’écorce.

Et si l’argent récolté ne pouvait servir à racheter des terres si elles ne sont pas à vendre ? « La question a été abordée en assemblée des usages. La réponse est qu’il y aura toujours des projets à soutenir sur la Zad... En tous cas, les statuts du fonds de dotation font que les apports financiers ne sont pas restitués aux donateurs. »

« Pour nous il serait incohérent, inconcevable, que la Zad soit partiellement écolo, partiellement Monsanto, dit Jean-Marie Dréan, des Naturalistes en lutte. Le réseau de haies, de petits boisements et de bocage riche en biodiversité a été protégé de fait par la lutte. Pour sa préservation, on a besoin d’une vraie maîtrise du foncier de cette “zone environnementale habitée” dont le nom lui-même résume notre position. »

Nicolas de la Casinière – Reporterre




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Infos du 21 au 27 janvier




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Lundi 21 janvier


►Jardin des ronces :

Le verger s’agrandit, la métropole nous contacte, et une grande fête s’annonce !

L’arrivée du froid n’a pas atteint la motivation des roncier-e-s ! Au contraire, nous vous invitons le dimanche 20 janvier à partir de 14h pour un chantier ’plantation fruitiers’. Une dizaine d’arbres fruitiers greffés vont venir s’ajouter à ceux qui ont déjà pris racine depuis plus d’un an maintenant.
Autrement dit, on se projette toujours, et on n’a pas l’intention de céder la place à quelque projet métropolitain quel qu’il soit !

À ce sujet, pour la première fois depuis l’existence du jardin, Nantes Métropole, propriétaire du terrain, nous a contacté pour se rencontrer. Une rencontre va avoir lieu prochainement. Nous vous tiendrons bien sûr au courant de toute actualité concernant le jardin, et appellerons à votre soutien en cas de besoin !

Quoi qu’il en soit, nous annonçons d’ors et déjà que la grande fête du jardin pour son 5e anniversaire aura lieu les 25 et 26 mai !! À vos agendas !!

D’ici là, rencontrons-nous au jardin !

Roncièrement !

Le collectif des Ronces

Retrouvez toutes les infos sur notre blog : https://lesronces.noblogs.org/
Adresse : rue de la Papotière, Nantes. Face au cimetière (Bus 87 et 12).
Contact : lesronces@riseup.net

Amazon :

Un article sur la discussion qui avait eu lieu à Treillères par rapport au projet d’implantation d’Amazon. Merci à NDDL Poursuivre Ensemble pour l’organisation du débat et sa vigilance par rapport aux grands projets inutiles et imposés.

https://www.ouest-france.fr/pays-de-la-loire/nantes-44000/des-citoyens-critiques-sur-l-aubaine-amazon-6132870

Une kass-dédi à Jean-Paul Naud, maire de Notre-Dame-des-Landes, qui a tout d’abord annulé, puis refusé la location de la salle à l’association, qui, située à NDDL, a un accès de droit aux salles de la commune, sauf en cas de "risques de troubles à l’ordre public". Les motifs avancés, par écrit, étaient explicitement politiques. Autant dire qu’il n’avait rien légalement pour soutenir son acte de censure.

Ce refus a d’ailleurs été rendu le plus tardivement possible pour empêcher au possible l’assocation d’avoir le temps de trouver une autre salle. Merci à l’AMAP de Treillères d’avoir accepté de se mouiller à la dernière minute et de soutenir ce combat.

Alors Jean-Paul, le goût du pouvoir et de l’arbitraire te manquait ? Sache que la prochaine fois, on sera plus réactifs/ves pour te remettre à ta place, histoire que tu te rappelles tes prérogatives et du fait que tu as des comptes à rendre aux habitant.e.s de ta commune !

Lecture :

Joyful Militancy - Défaire le radicalisme rigide [extraits]

Il y a environ un siècle, la célèbre anarchiste Emma Goldman était à une fête, quand un jeune homme la prend à part. “Avec un visage grave, comme s’il allait annoncer la mort d’un camarade,” l’homme lui dit “qu’il n’était pas très avisé de la part d’un agitateur de danser”. Selon lui, cela donnait une mauvaise image du mouvement révolutionnaire. Goldman était bourrée, et lui répondit grosso modo d’aller se faire voir. On dit de cette rencontre qu’elle est à l’origine de la phrase de défense célèbre de la joie et du jeu, souvent attribuée à Emma Goldman : “Si je ne peux pas danser, ce n’est pas ma révolution”. Mais il ne s’agissait pas seulement de danse. Pour Goldman, le conformisme et le contrôle de soi étaient inhérents aux mouvements radicaux eux-mêmes, et les militant.e.s étaient supposé.es faire passer leur “cause” avant leurs propres désirs.

https://expansive.info/Defaire-le-radicalisme-rigide-1364 https://joyfulmilitancy.com/



Mardi 22 janvier


►Relance de l’Assemblée Générale du Mouvement. Prochaine AG du Mouvement le mardi 5 février 2019, venez nombreuSEs et motivéEs : dès 19h pique-nique convivial autour du bar, début de la réunion à 20h30 précises.

https://zad.nadir.org/spip.php?article6312



Mercredi 23 janvier

AntiRep

Hier, 5 personnes ont été arrêtées de façon spectaculaire, alors qu’elles auraient pu être convoquées à la gendarmerie. les flics n’ont pas hésité à utilisé un arsenal renforcé, qui a bien sûr pour but d’impressionner, les chefs d’incupation sont tout aussi spectaculaires et visent à discréditer les personnes qui vivent ici. Elles sont maintenant en garde à vue depuis hier matin.

Un rassemblement de soutien aura lieu demain matin pour ce qui pourrait être la fin de leur garde à vue. RDV à 10H devant la gendarmerie de St Nazaire, 79 rue F de Lesseps.

Voir le communiqué lié aux arrestations 

mise à jour du lieu de rdv pour rassemblement de soutien demain :

Après avoir enduré 48h de garde à vue, les personnes arrêtées mardi sur la zad vont probablement être déferrées ce jeudi matin devant un juge. Celui-ci va décider de les placer ou non en détention préventive pendant le temps indéfini de la poursuite d’une enquête. Il est absolument impensable que ces habitant.e.s de la zad soient incarcérées.

Nous appelons donc à rassemblement de soutien ce jeudi 24 à 10h devant le tribunal de grande instance de St Nazaire au 77 avenue Albert de Mun.


Vendredi 25 janvier

►Toute la journée de jeudi, une centaine de personnes se sont relayées devant le tribunal de St-Nazaire, en soutien aux 5 personnes arrêtées il y a 2 jours sur la zad et ailleurs. il y aura probablement plus d’informations à propos de cette affaire dans les prochains jours. Nous pensions en avoir vu beaucoup ces dernières années mais nous n’étions pas au bout de nos surprises...
3 des 5 personnes ont été incarcérées et 2 autres sortent sous contrôle judiciaire - soutien aux potes !!!

Des nouvelles du procès de nos 5 camarades :

le chef d’inculpation d’"association de malfaiteurs" a été abandonné. Il reste des accusations de séquestration et violence. On ignore encore quels sont les faits qui leur sont reprochés mais on se doute bien du caractère éminemment politique de ce procès : un énorme dossier, la cheffe des procureurs de Saint Nazaire, bien connue pour ses positions anti-zadistes, à l’attaque. Le rassemblement d’hier a montré la solidarité du mouvement anti-aéroport avec la présence de gens de toutes les composantes, NDDL Poursuivre Ensemble qui a déployé une banderole, occupant·es, paysan·nes, naturalistes. Les camarades du collectif de soutien de Saint-nazaire étaient présent·es en nombre, merci à elles et eux !

Ce soir à 18h, point info à la Rolandière. La mobilisation va continuer, nous le laisserons pas nos camarades emprisonnés. A bas toutes les prisons !!!



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Infos du 28 au 31 janvier
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Lundi 28 janvier

►ZAD

Ce soir, organisation du soutien aux 5 personnes de la zad arrêtées ! Pour organiser le soutien aux 5 personnes de la zad arrêtées mardi dernier, un premier rdv d’un comité de soutien se déroulera lundi 28 janvier, à 20h à l’accueil de la Rolandière.

Il s’agira de proposer et organiser des manières concrètes de s’impliquer dans le soutien aux 3 personnes qui sont incarcérées, et aux 2 qui sont sous contrôle judiciaire : courriers, mobilisations, chantiers, etc. Toutes celles et ceux qui souhaitent y contribuer sont les bienvenus.

https://zad.nadir.org/spip.php?article6331

Punchline du jour

"Les gilets jaunes réunionnais sont-ils infiltrés et manipulés ? [...] On me signale une forte présence de militants de la France insoumise et même d’une vingtaine de ZADistes qui, après avoir été expulsés de Notre Dame des Landes, sont venus se refaire une santé à la Réunion auprès d’amis déjà installés ici. Et bizarrement, ils appliquent les mêmes méthodes que celles qu’ils reprochent aux politiques."

https://www.zinfos974.com/Pierrot-Dupuy-Les-gilets-jaunes-reunionnais-sont-ils-infiltres-et-manipules_a136547.html

On nous signale aussi que les zadistes sont derrière l’augmentation de la présence de chemtrails en Bretagne, et qu’ils sont financés par les vitriers et assurances de Nantes pour chaque vitrine cassée...


Mardi 29 janvier

►Criminalisation des luttes

On s’organise pour soutenir nos camarades inculpé·es ! Dimanche prochain on nous invite à venir nombreu.ses à un chantier de soutien contre la répression judiciaire et pour l’avenir de la ZAD. Ce sera l’occasion de discuter, s’informer et de participer à des chantiers pour permettre aux activités des personnes arrêtées et/ou interdit de territoire sur la zad de perdurer. Pas de justice, pas de paix !


Mercredi 30 janvier


►Punchline du jour

Les calculs de “Capital” sont édifiants : il aurait mieux valu construire deux aéroports à Notre-Dame-des-Landes plutôt qu’abandonner le projet de Vinci !!
[...]
« Récapitulons : si l’aéroport s’était fait, il aurait coûté 700 millions d’euros. » Une broutille qui garantissait le développement économique de la région. « Mais à la place, si tout le monde obtient gain de cause, c’est une facture de 1,5 milliard d’euros qu’il faudra payer. » Plus du double ! Imaginez : pour ce prix, on aurait pu construire deux aéroports à Notre-Dame-des-Landes (et décupler le trafic aérien).
« Ça commence à faire cher pour un aéroport qui n’est jamais sorti de terre. »


Il serait moins coûteux de relancer le projet. Merci à M6 pour cette implacabe démonstration scientifique. Ça change des reportages sensationnalistes de Bernard de la Villardière sur les affreux zadistes.


Pour l’article : https://www.telerama.fr/television/m6-devoile-le-scandale-de-labandon-du-projet-daeroport-a-notre-dame-des-landes,n6112054.php


Jeudi 31 janvier

►Criminalisation des luttes

On attend des nouvelles de l’appel de Ben qui demande à être libéré (cf articles en une du site). Retour demain matin, 10h.

Solidarité avec les inculpé·es !

Un point presse est prévu dimanche à 11h30 à la ferme de Bellevue.

Un autre aura lieu à Rennes mardi 5 février à 9h devant la cour d’appel.

Parmi les 5 personnes interpellées le 22 janvier dernier, accusées de violence et de séquestration, trois sont aujourd’hui en détention provisoire. Le maintien en prison de ces trois habitants de la zad est incompréhensible. Le dossier, qui repose sur un stupéfiant renversement de situation, est constitué du témoignage affabulateur du plaignant qui a attaqué à coups de hache l’un des emprisonnés, et du récit invérifiable de deux témoins sous X. Il n’y a aucune raison pour que nos trois compagnons de lutte soient éloignés de leurs amis, de leurs familles, de leurs bêtes. C’est pourquoi ils ont fait appel de leur détention : pour Ben cet appel aura lieu demain à la cour d’appel de Rennes, pour Greg et F. mardi 5 février (à Rennes encore).

Mercredi matin, la Préfecture a remis pour signature les Conventions d’Occupation Précaires attribuant les terres pour une nouvelle année à 15 des projets agricoles prenant place sur les terres de la zad. Deux des signataires sont parmi les détenus.

Mais le Parquet, donc l’État, les a de manière paradoxale mis dans l’impossibilité d’honorer leur engagement, en décidant de les arrêter une semaine avant ces signatures (et plus de quatre mois après les faits). Si demain et mardi la cour d’appel décide de leur maintien en détention, leurs projets risquent de s’effondrer, mettant aussi à mal le projet commun.

Dans l’attente de la libération des trois détenus, nous organisons des chantiers et un atelier d’écriture dimanche prochain à la ZAD à partir de 10h (rendez-vous à Bellevue) afin d’affirmer notre soutien concret aux 5 personnes arrêtées et à leurs activités





                                                                     AILLEURS
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Infos du 1er au 6 janvier
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Jeudi 3 janvier

►Contre Macron et son monde :

Les (A) Voeux du President de La Republique Francaise 2019.

https://www.youtube.com/watch?time_continue=21&v=h4lIeRyJ4SI

[https://lundi.am/Les-A-Voeux-du-President-de-La-Republique-Francaise-2019]

►Gilets Jaunes :

Mediapart - Les Gilets jaunes de Commercy lancent une coordination nationale. Forts du succès de leur premier appel, les Gilets jaunes de Commercy (dans la Meuse) proposent d’organiser « une grande réunion nationale des comités populaires locaux, en janvier, avec des délégué-es de toute la France, pour rassembler et mettre en commun les cahiers de revendicationset décider d’un mode d’organisation collectif, authentiquement démocratique ». Texte et vidéo.

https://blogs.mediapart.fr/jean-pierre-anselme/blog/301218/les-gilets-jaunes-de-commercy-lancent-une-coordination-nationale

►Amassada

Bona annada / bonne année à vous !

Encore une année à lutter ensemble contre les projets mortifères, année que nous avons clôturée par un magnifique réveillon, mêlant nos rires à nos chants, nos actions à notre solidarité, notre chaleur à nos ivresses. Et c’est toujours aussi déterminés et galvanisés par nos rencontres que nous avons attaquer ensemble l’an 2019. Difficile de savoir avec précision ce que cette nouvelle année nous réserve, mais nous allons nous tenir prêts à toutes les éventualités. Nous appelons tous ceux qui le
peuvent à venir nous retrouver là-haut, à l’Amassada, pour soutenir la lutte en défendant cette commune libre.

Et pour commencer, nous nous retrouvons le dimanche 13 janvier, de 10h à 17h, pour un temps d’échange et d’action sur notre stratégie défensive en cas d’expulsions. Nous consacrerons la matinée à la discussion, toutes les personnes qui se sentent concernées sont les bienvenues. Puis l’après-midi, nous mettrons en pratique...

Nous vous proposons de venir fêter comme il se doit le quatrième anniversaire de l’Amassada, le samedi 19 janvier. Il y a 4 ans apparaissait sur la plaine cette cabane, symbole de la lutte contre le transformateur géant aux milles éoliennes. Petit à petit, c’est un hameau qui a vu le jour, et qui nous accueillera ce jour-là pour manger, chanter, jouer et danser ensemble.

La vie s’est organisée au sein du hameau, et pour continuer à se nourrir tant physiquement qu’intellectuellement, nous vous proposons des rendez-vous réguliers : soirée poésie et lecture, repas convivial, balade, atelier enfant... (planning complet ci-dessous)

Au vu des révoltes actuelles portés par les gilets jaunes dans tous les territoires, nous avons décidé de modifier un peu notre organisation quotidienne, en décalant les réunions hebdomadaires du samedi au dimanche, toujours à 14h30.

Encore une bonne année à tous et toutes, force, courage et détermination. Ce ne sera pas 2019 qui nous arrêtera !

Planning du quotidien à l’amassada :

lundi, à 18h30 : lecture de texte tiré du site d’information "lundi matin"

mercredi, à 18h30 : repas partagé pour discuter de ce qui nous anime et nous relie, se donner le temps de l’échange.

jeudi, à 17h30 : soirée poésie sous toutes ses formes, ramener nourriture terrestre et célestes

dimanche plusieurs rendez-vous : 12h pique-nique partagé, rendez-vous au calvaire de Crassous (parc éolien) ; 14h30 réunion hebdomadaire à l’Amassada ; 18h réunion pour préparer des articles de presse et étudier la DUP, à l’Amassada.

le 3ème mercredi du mois, atelier pour les enfants (circuits, cabane...) à 14h

Agenda de janvier :

dimanche 13, 10h à 17h : journée pour s’organiser face au risque d’expulsion

samedi 19, anniversaire des 4 ans de l’amassada

Et ailleurs :

12 janvier à la remoutarié (Martrin) concert de soutien anti-rep

25 janvier à la loco (Millau) concert de soutien anti-rep

►Punchline du jour :

"Il y a tout de même un paradoxe saisissant : détruire le bien public entraîne justement plus de taxes et d’impôts, alors que c’est précisément ce pourquoi les prévenus sont en colère"

De la part d’un proc qui n’a pas compris grand chose...



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Infos du 7 au 13 janvier
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Lundi 7 janvier

►Amassada :

Bonjour à toutes et tous,

alors que nous avons reçu il y a quelque jours une information concernant un projet de création, sur la commune de Cros (Lodévois-Larzac) de parc photovoltaïque de 400 hectares - oui 400 hectares ! - couplé à une production de méthane (porté par la société Arkolia Energies,) et alors que RTE finit de phagocyter toujours plus les propriétés autour de son projet de méga transfo à Saint Victor (dont l’emprise au sol a encore augmenté incluant à présent 5 hectares supplémentaires de terrains jouxtant le projet en tant que tel), sachant que ce genre de nœud des autoroutes de l’électricité n’est qu’une pièce de l’interconnexion totale de l’Europe et du monde, la situation, ici, est désormais évidente. Le pouvoir en place mène une guerre sans merci contre le monde rural, et nous, habitants, sommes des "empêcheurs" de ces infrastructures de passer où bon leur semble.

Macron l’avait bien dit, en plein début du mouvement des gilets jaunes : il s’agit pour son gouvernement de propulser une « écologie industrielle » et « high tech » au devant de la scène internationale, et de multiplier par 3 le nombre d’éoliennes et par 5 le nombre de parcs photovoltaïques en France.... Imaginez l’emprise au sol de ces infrastructures supplémentaires dans les territoires ruraux, littéralement sacrifiés au nom des « vertus écologiques » de quelque élite technocratique. C’est une mascarade qui ne nous fait plus rire !!

Macron avait eu cette phrase cynique : « on va traiter la fin de mois en même temps que la fin du monde » .... on sait à présent qu’il ne fera ni l’un ni l’autre ! Mais qu’il continuera et sa folie ultra capitaliste contre le monde et sa folie répressive contre le peuple.

Alors, de notre côté nous ne nous laisserons pas faire, nous nous défendrons, et rendrons coup pour coup. Comme le disait une banderole lors d’un rassemblement de Gjs à Saint Affrique, dernièrement :« Nous ne sommes ni d’extrême gauche, ni d’extrême droite, mais d’extrême nécessité ».

L’agenda de cette semaine :

Outre les différents rdv déjà prévus chaque soir à l’Amassada pour des lectures poético-politiques ou des bouffes...

*Le samedi 12 janvier dès 9 h : Manifestation des Gjs sur le marché de Saint Affrique et APPEL a MOBILISATION de MASSE au rond point de Saint Germain toujours occupé H 24 !!!!! (aire de covoiturage au dessus de Millau)

**Le dimanche 13 janvier : toute la journée à l’Amassada : assemblée pour la défense de la Plaine (discussions et ateliers pratiques)

***Le samedi 19 janvier : anniversaire des 4 ans de l’Amassada : toute la journée plantons des arbres, ramener peinture, banderoles, matériel de décoration – à 17h : assemblée puis repas et boom.

****Les besoins urgentissimes pour l’occupation ici à l’Amassada : bois de chauffage, isolation (laine de verre ou autre), visserie et clous, palettes, pneus, talkie walkie

Rien n’est finit, tout commence .....

►Vidéos & Images

Soutien aux gilets jaunes depuis le Rojava.

Aux gilets jaunes, à celles et ceux qui manifestent, qui sont sur les barricades et blocages, qui occupent leurs lycées et leurs facs, qui sont en grève, qui s’organisent. Nous nous adressons à vous en tant que Commune Internationaliste depuis le Rojava, le Kurdistan de l’Ouest, au Nord de la Syrie.

https://paris-luttes.info/videos-soutien-aux-gilets-jaunes-11323?lang=fr

►Ambazada :

La tribu de l’Ambazada, toujours prête à prêter main forte aux copaines de partout ailleurs, s’en ira tenir sa prochaine assemblée au Pays Basque, territoire rebelle millénaire. Les chantiers et activités de cette année y seront ficelés, des festins seront au menu, des bardes autochtones nous berceront les oreilles et nous trinquerons ensemble la potion magique à la santé de Jupiter, Trump et leurs acolytes, qui tiendront leur G7 concilium à Biarritz fin août.

Rendez-vous du 24 au 26 janvier prochains au Pays Basque, pour de nouvelles aventures.

https://zad.nadir.org/spip.php?article6293

Mardi 8 janvier

►Gilets Jaunes :

Second Appel des Gilets Jaunes de Commercy : L’assemblée des assemblées !

A tous les Gilets Jaunes. A toutes celles et ceux qui ne portent pas encore le gilet mais qui ont quand même la rage au ventre.

Cela fait désormais plus de six semaines que nous occupons les ronds-points, les cabanes, les places publiques, les routes et que nous sommes présents dans tous les esprits et toutes les conversations.

Nous tenons bon !

Cela faisait bien longtemps qu’une lutte n’avait pas été aussi suivie, aussi soutenue, ni aussi encourageante !

https://zad.nadir.org/spip.php?article6295


Mercredi 9 janvier

Au procès du gendarme de Sivens : « On ne jette pas une grenade à l’insu de son plein gré»

Le gendarme dont le jet de grenade a blessé une zadiste à Sivens en octobre 2014 a été condamné à Toulouse à six mois de prison avec sursis. La cour est restée en deçà du réquisitoire au terme d’une audience sur laquelle l'actuelle répression du mouvement social a pesé.


Six mois de prison avec sursis, interdiction de porter et détenir une arme pendant six mois, condamnation au remboursement des frais de justice à hauteur de 1 000 euros et renvoi à une audience au civil le 3 avril pour une évaluation plus précise du préjudice subi par la victime : c’est la peine, qui ne sera pas inscrite au bulletin no 2 de son casier judiciaire, dont a écopé mardi soir le maréchal des logis-chef Richard Vilamanya.

Ce gendarme de 49 ans comparaissait devant le tribunal correctionnel de Toulouse pour des violences commises par personne dépositaire de l’autorité publique et avec usage d’une arme, ayant entraîné une incapacité totale de travail supérieure à huit jours, selon les termes de l’ordonnance de renvoi du 28 août 2018.

Le 7 octobre 2014, à l’occasion d’une opération d’évacuation de militants sur la parcelle no 520 de la zone de Sivens (Tarn), Richard Vilamanya avait jeté une grenade de désencerclement (dite « DMP », pour dispositif manuel de protection) à l’intérieur d’une caravane où se trouvaient trois zadistes pacifistes.

Pensant qu’il s’agissait d’un gaz lacrymogène, l’une des trois, E. (voir en Boîte noire), avait tenté de se saisir du projectile, mais la DMP lui avait explosé à la main. Bilan : dix jours d’hospitalisation et une année de soins et de rééducation. Quatre ans et demi plus tard, la jeune femme, 25 ans au moment des faits, n’en garde pas de séquelles fonctionnelles, mais, a rappelé le président du tribunal Jérôme Glavany, conserve sur le plan psychologique des « symptômes révélateurs d’un état de stress
post-traumatique
».

Durant toute une après-midi, la cinquième salle d’audience du tribunal de Toulouse a replongé quatre ans en arrière lorsqu’à l’automne 2014, forces de l’ordre et militants écologistes opposés à la construction d’un barrage sur la zone humide de Sivens, s’étaient durement confrontés durant plusieurs semaines. Une séquence clôturée par la mort du militant pacifiste Rémi Fraisse, tué le 26 octobre par une grenade offensive lancée par la police.

Mardi, à 21 h 30, le président du tribunal correctionnel de Toulouse a donc reconnu le gendarme coupable de ces faits de violence aggravée à l’égard d’E. au terme d’un procès de plus de sept heures. Une audience à laquelle les journalistes ont accédé non sans avoir dû protester auprès de gendarmes qui, peu conciliants, leur en barraient l’accès, arguant du remplissage de la salle.

Dans un climat tendu, chargé d’émotion, l’actuel contexte français a pesé lourd, comme a semblé l’attester le réquisitoire du parquet que la cour a préféré ne pas suivre jusqu’au bout.

Dans son intervention, le procureur de la République, Pierre Couttenier, avait requis huit mois de prison avec sursis, une interdiction de port d’armes d’un an et une interdiction « d’au moins trois ans » d’assurer des missions de maintien de l’ordre, s’interrogeant aussi sur « l’aptitude » de l’accusé « à exercer des missions de police judiciaire ».

Avant de prononcer des mots sévères à son endroit : « Vous avez commis un acte de violence, ce sont les faits, en faisant usage d’une arme, ce sont les circonstances. Il ne s’agit pas d’imprudence, d’inattention ou de manquement. On ne jette pas une grenade à l’insu de son plein gré. Vous teniez le terrain, les violences ont été volontaires et elles n’étaient pas justifiées (...). Je ne crois pas une seconde que la grenade, vous l’ayez jetée à côté de la caravane... »

Rapidement questionné par le président Glavany sur la présence supposée d’un groupe de « huit ou dix opposants » dont il aurait voulu se défendre en jetant la grenade, Richard Vilamanya, qui en avait fait l’un de ses principaux arguments de défense face aux enquêteurs de l’Inspection générale de la gendarmerie nationale (IGGN) à l’époque, reconnaît ne plus en être si sûr.

Dès lors, la question de son respect du cadre légal d’usage du DMP, ce 7 octobre 2014, est au centre des débats. Projetant dix-huit plots de caoutchouc de neuf grammes chacun sur un rayon de trente mètres et pouvant provoquer de très graves blessures et mutilations, la grenade de désencerclement a vocation à n’être utilisée qu’en cas de mise en danger avérée et, comme son nom l’indique, d’encerclement des fonctionnaires de police.

Ce n’était pas le cas, a reconnu le gendarme. Resté en retrait de ses collègues refoulant d’autres opposants vers la « métairie neuve », il se trouvait seul à l’extérieur de la caravane face à des militants désarmés qui refusaient de sortir, mais tentaient de lui parler. Le DMP doit par ailleurs être roulé au sol, comme le mentionne clairement un pictogramme qui y figure, et ne peut en aucun cas être lancé en cloche. Ce qui n’a pas non plus été le cas puisque la grenade a pénétré dans la caravane par la fenêtre comme le montre la vidéo filmée par l’un des occupants.

https://youtu.be/e43FMURkcEg


Projetée à l’audience, cette vidéo, dont l’authenticité a été établie par un expert de l’institut de recherche criminelle de la Gendarmerie nationale, demeure la pièce centrale du dossier, celle sans laquelle le procès n’aurait sans doute jamais eu lieu. De nombreux plans, cartes et photos ont également été montrés au cours de l’audience, afin de préciser le déroulement des faits et éclairer le contexte de l’époque.

« Vous êtes quand même dans un peloton spécialisé [en l’occurrence, le peloton de surveillance et d’intervention de la gendarmerie (PSIG) de Gaillac – ndlr], donc particulièrement sensibilisé à ce type de dispositif balistique et pourtant, on est très loin de la doctrine d’emploi et de la doctrine d’usage... », relève le président Glavany face au militaire, qui, cheveux gris coupés ras, reconnaît avoir « commis une erreur » et une « mauvaise appréciation ».

« J’ai lancé la grenade en me déplaçant, je voulais la lancer devant la caravane, pas à l’intérieur », plaide-t-il, provoquant les sarcasmes du président : « Vous êtes un mauvais lanceur ? » Rires dans la partie gauche de la salle d’audience, où se trouvent de nombreux soutiens d’E. Grincement de dents de l’autre côté, où se massent une quinzaine de gendarmes et policiers, dont certains en tenue et armés, venus soutenir leur camarade, décrit par son ancien chef du PSIG comme un homme «consciencieux, droit et loyal dans l’accomplissement de sa mission ».

Un descriptif de militaire « exemplaire » très largement repris par la défense dans ses plaidoiries. Déstabilisés par l’offensive du parquet, les deux avocats du gendarme, Emmanuelle Franck et Alexandre Martin, se sont partagé le travail pour lui répondre : l’une argumentant quant au caractère « involontaire » des blessures causées par la grenade de son client, l’autre insistant lourdement sur « l’ambiance de guerre » qui régnait selon lui à Sivens à cette période et sur la fatigue des forces de
l’ordre.

La puissance publique avait alors fait le choix de « laisser sur le terrain des opposants et des gendarmes en sous-effectif pendant des jours et des jours », a pour sa part rappelé Claire Dujardin, l’avocate d’E., estimant qu’il « faudra démontrer plus tard la responsabilité de l’État » dans cette affaire. Avant d’insister sur la dangerosité des armes utilisées dans le cadre du maintien de l’ordre à la française.

L’avocate avait organisé le matin même une conférence de presse réunissant des représentants des collectifs « Désarmons-les ! », « L’assemblée des blessés » et des street medics intervenant dans les manifestations. Toutes et tous, dont deux étaient cités l’après-midi comme témoin, ont fait part de l’inquiétante montée en flèche des blessures et mutilations depuis le début du mouvement des « gilets jaunes » : douze personnes éborgnées, quatre qui ont perdu leur main et des centaines de blessés.

« Je ne peux m’abstraire du contexte immédiatement actuel. Dans ces temps de violence et de tension, le point cardinal, c’est le respect de la loi et du cadre légal de l’usage de la force », avait prévenu le procureur en commençant son réquisitoire.

Journaliste ayant couvert la ZAD de Sivens, Grégoire Souchay est venu à la barre pour témoigner, récit factuel à l’appui, qu’il y avait bien eu « quelque chose de malsain dans le maintien de l’ordre à Sivens ». À la barre une heure avant, achevant, très émue, la lecture d’un texte rédigé pour l’occasion, E. s’était tournée vers le banc de l’accusé : « La forêt et la vie sauvage de cette zone humide ont été détruites à jamais. Vous avez même tué un homme. Maintenant, il vous reste quoi ? La satisfaction
du travail bien fait ?
»

« On ne peut pas entendre ça ! » grognait, énervé, un gendarme en civil assis dans la salle.

Emmanuel Riondé – Médiapart


Vendredi 11 janvier

►Amassada :

Ce matin plusieurs fourgons de police (gendarmes mobiles, PSIG, renseignements..) sont venus à l’Amassada, menaçant d’expulser les occupants présents sur place. Ce n’est pas le première fois qu’il font ce genre de coup ces derniers temps, autant d’occasions pour eux de prendre des informations sur place, et préparer leur sordide opération. Nous avons envoyé un message d’alerte qui s’avère inutile, les flics étant assez vite repartis.

Nous avons toutes raisons de croire cependant que l’expulsion peut arriver rapidement et appelons à toujours rester alerte les temps à venirs.

Rappel : l’assemblée hebdomadaire a lieu le dimanche (gilets jaunes obligent), 14h30

Pas res nos arresta.

►Punchline du jour :

"Quand on voit des types qui tabassent à coup de pied un malheureux policier par terre, que (les policiers) se servent de leurs armes une bonne fois ! Ça suffit, ces nervis d’extrême droite et d’extrême gauche ou des quartiers qui viennent taper des policiers. (...) On a la quatrième armée du monde, elle est capable de mettre fin à ces saloperies"

Luc Ferry, ex-ministre de l’Éducation (2002-2004).

Contre les armes de la police :

Une nouvelle arme pour la Police et la Gendarmerie.

Les forces de l’ordre se réarment et se militarisent de plus en plus.

Avec une nouvelle commande de 450 lanceurs multicoups et 1200 LBD "classique" le père noël est de passage. Le Monde écrit :

l’appel d’offres vise à « équiper les personnels de la sécurité intérieure notamment lors des missions de maintien de l’ordre, pour contrôler les mouvements de foule et disperser des individus agressifs » , au moyen de 1280 nouveaux « lanceurs mono-coup » (type LBD, dont 1275 pour la gendarmerie), plus 270 « lanceurs multi-coups » (LMC) « 4 coups », et 180 « 6 coups » (soit 450 LBD semi-automatiques) pour les policiers.

Toujours dans le même article du Monde :

Tandis que la fenêtre de « tir optimum » du LBD est de 30 mètres, les « multi-coups » , précise le cahier des charges techniques, devront quant à eux « permettre de stabiliser les munitions utilisées sur les distances comprises entre 30 et 100 m » .

Ces multi-coups pourront tirer jusqu’à 100 m ! On imagine les dégats sur les corps quand le projectile touchera un manifestant à moins de 30 m comme c’est souvent le cas. Au vu des très nombreux blessé.e.s par LBD40 ces derniers mois cette information n’est pas rassurante pour la sécurité des gens qui contestent le pouvoir.

Donc une petite nouveauté, un lanceur 4 coups, plus léger que les gros 6 coups. On imagine bien les bac, bst et autres horreurs rafaler de joie avec grenades lacrymo, et des balles de défense.

[Merci à Paris Luttes : https://paris-luttes.info/une-nouvelle-arme-pour-la-police-11377?lang=fr]
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Infos du 14 au 20 janvier
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Lundi 14 janvier

►Anti-Nucléaire :

CYCLE DE CONFÉRENCE GRAND-EST AUTOUR DE CIGEO ET DU NUCLÉAIRE - Voyage vers un avenir non atomique :

En janvier, on s’arrête à Joinville, Bar-le-Duc, Nancy, Montiers-sur-Saulx, Troyes, et Verdun ! Le chapitre Ier, "En route vers la nucléarisation du territoire", est en voie de s’achever. Il nous reste à programmer en temps voulu la conférence sur le projet de laverie nucléaire d’Unitech, censurée par le maire de Suzzanecourt, pour le clôturer.

Nous reviendrons prochainement sur les premières conférences, afin de vous livrer nos ressentis !

En attendant, place au chapitre second " Vous avez des questions ?"

Cigéo et le nucléaire interrogent bien des sujets qui nous concernent directement. L’emploi et le travail dans le nucléaire est une question trop souvent évacuée. Le fait que Cigéo nous oblige à raisonner dans des échelles de temps inhabituelles pose nécessairement la question de la mémoire. Il est essentiel aussi de réfléchir aux risques, qu’il s’agisse de ceux liés à la radioactivité (et qu’est-ce que c’est, au juste ?!) ou de ceux inhérents à Cigéo. Il semble tout aussi indispensable également de revenir sur les accidents nucléaires comme Tchernobyl. L’ensemble des sujets à aborder est dense, l’ensemble des questions que l’on se pose aussi, mais nous allons tenter d’y remédier !

Et maintenant, prenez connaissance des conférences de janvier :

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SOUS-TRAITANT.E.S DANS LE NUCLÉAIRE EN MEUSE ET EN HAUTE-MARNE :
COMMENCEZ VOTRE RECHERCHE !

JOINVILLE, Vendredi 18 Janvier (à 20H, salle de l’auditoire, rue de l’auditoire)

BAR-LE-DUC, Samedi 19 janvier (à 20H, salle du centre social côte Sainte Catherine)

Qui sont les travailleur.es du nucléaire ? Quelles sont leurs conditions de travail ? Sont-elles les mêmes pour chacun.e d’entre eux ou est-ce que des différences de traitement découlent de leur statut, qu’ils et elles soient salarié.es du nucléaire ou sous-traitant.es du nucléaire ?

Prennent-ils des risques à exercer leur travail ? Combien gagnent-ils pour cela ?

Savez-vous que la maintenance des installations nucléaires est effectuée par 80% de sous-traitant-es du nucléaire ?

On entend beaucoup parler du nucléaire, mais peu de la question de l’emploi et des conditions de travail. Durant ces deux soirées à Joinville et à Bar-le-Duc, on a voulu y remédier !

Intervenant : Gilles Reynaud, président de l’association « Ma zone contrôlée »

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CIGEO : DE GÉNÉRATIONS FUTURES A CIVILISATIONS FUTURES, LA QUESTION DE LA MÉMOIRE

NANCY, Mercredi 23 janvier, (à 19H, faculté de lettres de Nancy)

BAR-LE-DUC, Jeudi 24 Janvier (lieu et horaire à confirmer)

MONTIERS-SUR-SAULX, Vendredi 25 janvier (20H, salle des fêtes)

Projection et débat autour du film d’Isabelle Masson Loodts "Un héritage empoisonné" :

« Alors qu’un siècle a suffi pour faire oublier le danger, pourtant encore réel, des rebuts de 14-18, comment croire que notre mémoire permettra de maintenir la vigilance des générations futures autour des déchets nucléaires qui resteront dangereux pour plusieurs millénaires ? »

Pour voir la bande-annonce : http://www.stopcigeo-bure.eu/unheritageempoisonne/

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"DESSINE-MOI LA RADIOACTIVITÉ" : TOUT CE QUE VOUS AVEZ ENVIE DE SAVOIR SANS OSER LE DEMANDER !

TROYES, Lundi 28 Janvier (à 19H, Maison des Associations de Troyes)

VERDUN, Mardi 29 Janvier (à 20H, centre social et culturel Kergomard)

Qu’est ce que la radioactivité ? Atomique ou nucléaire ? Alpha, béta, gamma, X... Qué zaquo ? Ça fait bronzer tout ça ? Une demi-vie, c’est la moitié d’une vie ou une vie à moitié ? Les becquerels : des oiseaux ? Et nos cellules dans tout ça ? Des normes pour protéger qui ?

À cette conférence, nous n’invitons pas les scientifiques (bien qu’ielles soient les bienvenu.e.s et que nous les invitons à participer à la discussion s’ielles le souhaitent !) : nous souhaitons avant tout échanger avec celles et ceux qui ont envie de comprendre ce qu’est la radioactivité ou qui se posent des questions à son sujet.

Intervenant : Roland Desbordes, président de la CRIIRAD (Commission de Recherche et d’Information Indépendantes sur la Radioactivité)

/ !\ Pour l’ensemble de ces conférences, nous avons bien besoin d’un coup de main pour nous aider à la communication, à l’affichage et au dépôt de tracts dans les lieux de passage. Si vous habitez dans le secteur d’une de ces conférences, n’hésitez pas à nous écrire (adresse : cycledeconferences-grandest@riseup.net) et nous pourrons vous envoyer un paquet d’affiches et de flyers. Merci !!! / !\

►AntiRep :

155 arrestations ce samedi : appel à aller au tribunal lundi et mardi

Appel à aller au TGI de Paris ces lundi 14 et mardi 15 janvier 2019 à partir de 13h30 par le groupe legal de la Coordination antirépression IDF. Les comparutions ont lieu dans 3 chambres en salles 204, 205 et 601.

Sur 167 interpellations, 155 personnes auraient été placées en Garde-à-vue ce samedi 12 janvier 2019 à Paris dont 6mineur.es. 25 d’entre elles auraient été libérées sans suite des commissariats.
Celles qui n’ont pas été libérées directement, seront déférées en comparution immédiate (CI) ces lundis 14 ou mardi 15 janvier.

Nous appelons les personnes qui le peuvent à aller les soutenir en se rendant au TGI de Paris porte de Clichy à partir de 13h30. C’est un moment où on peut faire des liens entre nous...

Ce lundi, trois chambres sont mobilisées pour faire le « sale travail » de cette justice expéditive que sont les CI : 23.2, 23.3 et 24.1 — respectivement en salles 204, 205 et 601 (2è et 6è étage), c’est toujours indiqué sur un écran au rez-de-chaussée ou en demandant à l’accueil.

Ne laissons pas la répression nous isoler !

Le groupe légal de la coordination antirep Paris IDF. stoprepression@riseup.net

https://paris-luttes.info/appel-a-aller-au-tgi-de-paris-ces-11484?lang=fr

►Punchline du jour :

"Notre pays a toujours su accueillir ceux qui ont fui les guerres, les persécutions et ont cherché refuge sur notre sol : c’est le devoir de l’asile, qui ne saurait être remis en cause. Notre communauté nationale s’est aussi toujours ouverte à ceux qui, nés ailleurs, ont fait le choix de la France, à la recherche d’un avenir meilleur : c’est comme cela qu’elle s’est aussi construite. Or, cette tradition est aujourd’hui bousculée par des tensions et des doutes liés à l’immigration et aux défaillances de notre
système d’intégration.

Que proposez-vous pour améliorer l’intégration dans notre Nation ? En matière d’immigration, une fois nos obligations d’asile remplies, souhaitez-vous que nous puissions nous fixer des objectifs annuels définis par le Parlement ? Que proposez-vous afin de répondre à ce défi qui va durer ?"

Macron qui, dans sa lettre aux français.es, parle de quota d’immigration..

https://www.lemonde.fr/societe/article/2019/01/14/immigration-emmanuel-macron-suggere-de-fixer-des-quotas_5408795_3224.html

Samedi 19 janvier

►Collectif pour la sauvegarde de la zone humide du TESTET (81)
Journée mondiale Zones Humides - Samedi 2 février 2019


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Infos du 21 au 27 janvier
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Lundi 21 janvier

L’Andra paye des médias 
pour orienter l’opinion en faveur de Cigéo


Pour rendre acceptable le projet Cigéo d’enfouissement des déchets nucléaires, l’Agence nationale des déchets radioactifs porte une attention particulière au travail des consciences, notamment des plus jeunes. Avec l’aide – rémunérée – de médias et de youtubeurs.

Le projet titanesque Cigéo, conduit par l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra) attend toujours une autorisation de création. Avant de creuser dans l’argile lorrain des puits et des galeries à 500 mètres sous terre pour y enfouir les pires des déchets nucléaires, cela fait vingt ans que l’Agence creuse son sillon dans les consciences afin d’influencer les populations. Et, en premier lieu, les plus jeunes. « L’Andra essaye d’arranger une histoire qui n’est pas simple du tout et elle veut faire passer cette solution excessivement dangereuse comme la solution miracle. C’est une politique de communication et non d’information, antinomique de l’idée de choix démocratiques », regrette Corinne François, de l’association Bure Stop.

L’Andra revendique au contraire le volontarisme et la transparence. « On ne fuit pas les sujets difficiles. Par exemple, nous organisons ou participons à des réunions publiques sur les risques ou à des débats sur les alternatives à Cigéo ; nous ne sommes pas là pour attiser les peurs mais pour diffuser une information étayée sur la manière dont sont gérés les déchets », explique à Reporterre par courriel Annabelle Quenet, attachée de presse de l’Andra.

Sur le terrain de la communication, l’Agence déploie des moyens considérables pour graver son projet dans les esprits. Les supports vantant les mérites de l’enfouissement des déchets radioactifs se multiplient : publications imprimés, youtubeurs, médias ad hoc, revues et jeux à destination des enfants, sites internet ou encore infolettres, etc. L’Agence s’est d’abord refusée à nous préciser le montant de son budget total de communication avant de nous transmettre une estimation. Elle y consacrerait « un peu plus d’un million d’euros par an », sans plus de détails.


Les opposants ont vite compris que sur ce terrain, le combat ne serait pas équitable. « Quand tu arrives sur place, tu comprends tout de suite, il suffit de discuter avec les gens. Et d’ouvrir les yeux. Il y a des panneaux publicitaires pour l’agence partout. Chez les voisins, tu tombes toujours quelque part sur les feuilles en papier glacé de leur journal », raconte Gaspard d’Allens, journaliste qui s’est installé en Meuse en 2016. Le trimestriel dont il parle, Le journal de l’Andra, est tiré à plus de 200.000 exemplaires et distribué gratuitement aux riverains.

1 « Ça fait totalement stratégie de communication, je ne suis pas aveugle »

Depuis qu’elle est présente en Meuse et en Haute-Marne, l’Andra ne ménage pas ses efforts pour présenter son projet sous le meilleur jour : journées portes ouvertes, visites scolaires du laboratoire, concours artistiques. Corinne François se souvient d’une exposition en 2012, « La radioactivité de Homer à Oppenheimer » : « Elle préparait les générations futures à aimer la radioactivité, à ne plus en avoir peur. On dédramatisait ce qu’est l’atome et on banalisait quelque chose de dangereux en
faisant intervenir des personnages de bande dessinée
», tel Homer Simpson, héros de la série animée Les Simpson, qui travaille dans une centrale nucléaire. Une façon de communiquer qui rappelle les efforts d’influence du secteur électronucléaire à ses débuts : il avait vu dans la bande dessinée, déjà, un vecteur efficace pour rassurer les populations et les accoutumer aux centrales nucléaires. En France, Jacques Castan mit son crayon au service du centre nucléaire de Marcoule à partir des années 1960. The Battle For Survival fut édité en 1975 aux États-Unis par la compagnie électrique Virginia Electrics and Power.

Le plus récent coup de communication de l’Andra est le recrutement de stars de la toile avec des youtubeurs branchés technologie pour faire la promotion du projet Cigéo. Simon Puech, Anonimal et Dave Sheik, qui totalisent à eux trois près de 700.000 abonnés, ont sorti durant l’été 2018 des vidéos pour le moins élogieuses autour de Cigéo. Un seul, Anonimal, a la franchise de préciser qu’il a été financé par l’Andra, mais comme il l’affirme dans sa vidéo, « le but n’est pas de vous vendre un truc ». Tout de même, le projet Cigeo est décrit comme « ultrasécurisé », « ultra-impressionnant » et « ultracontrôlé ».

Certains de ces jeunes « influenceurs » reconnaissent auprès de Reporterre avoir été démarchés par une agence spécialisée pour réaliser une vidéo sur l’Andra moyennant rémunération. Combien ont-ils touché ? Environ 4.000 euros, plus le défraiement du déplacement en Meuse. Mais tous se défendent d’avoir été influencés dans la réalisation de leur sujet. Il fallait cependant transmettre la vidéo à l’Andra avant publication... L’un d’eux, Dave Sheik, reconnaît avoir reçu quelques recommandations : « Modifier des tournures de phrase qui leur semblaient à charge. » Avant de concéder, lucide : « Ça fait totalement stratégie de communication, je ne suis pas aveugle. »



C’est dans les médias numériques que l’Andra se montre la plus imaginative pour distiller ses messages. Au sein de sa direction de la communication et du dialogue avec la société, certains membres ont fait un passage par la case journalisme.

L’Andra s’est par ailleurs entourée de partenaires spécialisés dans la communication dite « innovante ». Principaux piliers de cette stratégie : la revue Usbek & Rica, le groupe de presse Playbac ou encore l’éditeur d’une infolettre de vulgarisation, Sciencetips. Leur point commun ? Réinventer le publireportage, c’est-à-dire proposer à leurs clients de diffuser des messages ciblés à mi-chemin entre communication et information, dans des supports allant de la lettre d’information scientifique jusqu’à des médias dédiés. Dans ces eaux troubles, la déontologie ne semble pas prioritaire.

2 « La rédactrice en chef m’a confirmé que, pour ce qui touchait au nucléaire, il y avait un droit de regard »

Comme le groupe Auchan pour mieux « vendre » son projet de mégacentre commercial EuropaCity, ou encore l’agglomération de Nantes du temps du projet d’aéroport à Notre-Dame-des-Landes, l’Andra a fait appel à la revue Usbek & Rica pour créer son propre média en ligne, appelé Les Arpenteurs, « le média des générations futures », lancé en 2015. En vitrine ? Des « débats » et de la « prospective » : depuis la transition énergétique jusqu’au survivalisme en passant par les vacances du futur. Le directeur d’Usbek & Rica, Jérôme Ruskin évoque une collaboration logique. « L’Andra a une mission d’information, de pédagogie, dit-il à Reporterre. C’est dans ce cadre qu’ils nous ont demandé d’animer une réflexion sur les générations futures. Mais nous avons une charte éditoriale très claire avec nos clients pour que les journalistes puissent faire leur travail et que ce soit clair pour nos lecteurs. Il y a une grosse culture de la transparence chez Usbek&Rica. »

Pourtant, environ 15 % des articles publiés sur le site Les arpenteurs.fr ont pour sujet l’Andra, ses dirigeants et ses projets : interviews de directeurs, reportages au cœur de Cigéo, etc. Pas de quoi émouvoir Jérôme Ruskin : « Le sujet des déchets nucléaires est un sujet comme les autres, c’est le deal. » Et d’ajouter : « Il n’y a pas un traitement différent des autres sujets. L’Agence n’a pas de droit de regard, il n’y a aucun filtrage. »

Une action de militants opposés au projet Cigéo devant les locaux parisiens de la revue « Usbek & Rica », le 18 mai
2018.


Cependant, des journalistes n’ont pas vécu la même chose. « Dès le début, un camarade m’avait prévenu que les articles n’étaient pas signés, c’était bizarre, se souvient Louis (prénom modifié), un temps intéressé par une collaboration avec Les arpenteurs. Il avait aussi reçu des demandes spécifiques et explicites de la rédaction de remanier certains papiers concernant le nucléaire. 
Et, quand j’ai voulu intégrer l’équipe, la rédactrice en chef m’a confirmé que, pour ce qui touchait
au nucléaire, il y avait un droit de regard.
» Et de poursuivre : « Ce n’est plus seulement une agence de communication qui essaye de blanchir quelqu’un avec un article sponsorisé [un publireportage rédigé par une tierce partie], c’est un organisme qui se paye un média pour faire passer ses idées. » 

Montant du contrat passé entre l’Andra et le groupe U&R ? Entre 15.000 et 40.000 euros annuels, nous indique Jérôme Ruskin, en fonction du volume de contenus produit.

3 Un travail de sape qui vise à banaliser l’atome

Une autre entreprise s’est positionnée sur cette niche de la communication sponsorisée, le groupe Playbac. La société édite de petits quiz, « les Incollables », sous forme d’éventails questions-réponses mais aussi la plupart des quotidiens pour enfants en circulation dans l’Hexagone : L’Actu (pour les ados), Le Petit Quotidien (6 à 10 ans), Mon Quotidien (10 à 14 ans), et propose aux entreprises de « collaborer » sur des numéros spéciaux qui seront ensuite envoyés à tous les abonnés.

Cela intéresse beaucoup de monde : Toyota, EDF, la Fédération française de football... [1]. Et, bien sûr, l’Andra. Dès 2010, un numéro spécial de L’Actu, titre destiné aux plus de 14 ans, a été conçu avec l’agence. Puis un autre en octobre 2017. À chaque fois, une flopée de messages orientés influence des enfants pas toujours conscients de ce qu’ils ont entre les mains.

Florilège de l’édition 2017 : « Aujourd’hui, la radioactivité est utilisée au quotidien par l’homme », ou encore « La radioactivité est partout, présente naturellement dans le sol, dans l’eau, et même dans notre corps. » Et puis, concernant le projet Cigéo : « Des études scientifiques sont menées pour s’assurer que Cigéo restera sûr face à n’importe quel phénomène » ; « Tous les scénarios, même les plus invraisemblables, ont été envisagés ». Même propagande orientée dans la précédente édition de 2010 : « Nous avons imaginé tous les scénarios possibles pour vérifier que la population et
l’environnement ne seront jamais en danger
», « Phénomène naturel, la radioactivité est présente partout : roches, végétaux, air et espace... Même notre corps est légèrement radioactif ! » Pour s’assurer que les messages sont bien passés, pas d’interro écrite, mais un petit quizz en dernière page...

Dans ces contenus, un travail de sape qui vise à banaliser l’atome, son usage, ses déchets. L’expert indépendant Bernard Laponche, opposé à Cigéo, ne mâche pas ses mots en parcourant les pages : « C’est difficile de détecter des erreurs. C’est bien fait, aucune phrase n’est scientifiquement fausse, mais c’est clairement de la publicité. » Une zone grise assumée par Playbac : « Notre mission est de permettre une communication par l’information, nous explique par courriel Marina Duprez, chargée des partenariats. Le financement d’une information ne la rend ni fausse ni mauvaise si elle reste objective. »

Appeler Playbac en se faisant passer pour un client permet de mieux cerner la philosophie de l’entreprise. C’est ce qu’a fait Reporterre en appelant le média. « Nous proposons de sensibiliser les enfants à votre sujet, mais aussi les parents, les professeurs », nous répond-on. Et si on a quelques doutes sur la façon de communiquer aux plus jeunes, on est vite rassuré : « C’est notre expertise et notre parti pris : on est capable de parler de n’importe quel sujet à des enfants de n’importe quel âge. » Et d’ajouter, comme pour clore la négociation : « Les professeurs s’en servent comme support
pédagogique.
» Combien coûtent ces opérations d’influence ? 16.530 euros hors taxes pour s’offrir un numéro spécial chez Playbac, nous a répondu notre interlocuteur.

4 Pour l’Andra, il n’y a rien d’anormal à cibler les enfants

L’intérêt de l’Andra pour les jeunes générations ne s’arrête pas là. Les « matériaux pédagogiques » destinés aux enseignants sont aussi au cœur de sa communication. Accessibles sur le site de l’agence ou sur des sites spécialisés de soutien scolaire comme webpedago.com, ils sont polis sur mesure pour s’intégrer aux programmes des différentes classes. L’Andra en profite, comme nombre d’acteurs industriels, pour disséminer ses messages et s’installer durablement dans le paysage.



Un passage de « Le stockage souterrain de déchets radioactifs », vidéo du « kit pédagogique » de l’Andra destiné aux élèves de collège.

Pour l’Agence nationale de gestion des déchets radioactifs, il n’y a rien d’anormal à cibler les enfants. « Les jeunes générations sont concernées directement par la problématique des déchets car c’est une question de long, voire très long terme. Si c’était un sujet de court terme, nous n’aurions pas cette volonté de sensibiliser les jeunes. Mais ils sont les citoyens de demain et ils auront à gérer l’exploitation des centres de stockage existants ou en projet », justifie Annabelle Quenet.

Ce qui pose problème, c’est que l’agence diffuse une vision partielle de l’enjeu de l’enfouissement des déchets nucléaires en omettant certains sujets. De fait, il existe bien des débats et des questions toujours en suspens. Que ce soient les avis mitigés de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) sur Cigéo, les expériences comparables à l’étranger qui tournent court (« désenfouissement » de 126.000 barils radioactifs à Asse, en Allemagne, incidents à répétition au cœur du Wipp aux États-Unis) ou encore les solutions différentes choisies par d’autres pays pour des projets similaires (enfouissement en sol granitique plutôt qu’argileux) : mais de tout cela, il est difficile de trouver la moindre mention dans les contenus pédagogiques ou les médias téléguidés par l’Andra.

Raphaël Goument - Reporterre

Mercredi 23 janvier

►Gilets jaunes : Jaune, le journal pour gagner

►centrale à gaz

rassemblement à Landivisiau

Nous vous donnons RDV jeudi matin à 8h30 au rond-point du Drennec à Landivisiau. En effet, le premier tractopelle a fait son apparition sur le site de la Centrale, nous devons réagir.

N’hésitez pas à partager l’information dans vos réseaux afin d’ assurer le succès de l’opération.

Le projet de gazoduc entre la France et l’Espagne 
est abandonné

Les régulateurs de l’énergie français et espagnols ont annoncé mardi 22 janvier qu’ils refusaient la construction d’une nouvelle interconnexion gazière entre les deux pays. Le projet Step (South Transit East Pyrenees), première phase du projet d’interconnexion gazière MidCat (Midi-Catalogne), est donc abandonné.

Le Step avait ressurgi en France en fin d’année 2017 avec l’organisation d’une consultation publique locale menée par l’opérateur français Teréga. Depuis, 350.org, les Amis de la Terre et le collectif contre le gazoduc transfrontalier ont multiplié les actions pour bloquer ce projet.

« C’est une grande satisfaction pour tous les catalans, car ce projet aurait eu des impacts environnementaux désastreux. Il comportait aussi des risques économiques et climatiques. L’abandon de ce projet est une bonne nouvelle pour la transition énergétique localement », à déclaré Claude Bascompte, du collectif contre le gazoduc transfrontalier, dans un communiqué.

Un rapport publié en mai dernier questionnait en effet l’intérêt du projet à la fois du point de vue de la sécurité d’approvisionnement et de la viabilité économique. Il critiquait aussi ses implications climatiques, le gaz fossile n’étant ni une énergie bas-carbone ni une énergie de transition.

« L’abandon de Step devrait logiquement impliquer celui de l’ensemble du projet MidCat et du projet d’interconnexion entre l’Espagne et le Portugal, ceux-ci n’ayant pas lieu d’être sans Step », a écrit l’ONG les Amis de la Terre dans un communiqué.

• Source : Les Amis de la Terre sur Reporterre

Vendredi 25 janvier


En Aveyron, des éoliennes déclenchent une bataille pour l’équité territoriale

 
Un conflit contre un transformateur RTE et des parcs éoliens industriels en Aveyron interroge les rapports entre monde rural et pôles urbains. En lien avec les revendications des « gilets jaunes », des opposant·e·s à un poste électrique formulent de nouvelles exigences de justice environnementale.


De notre envoyée spéciale à Saint-Victor-et-Melvieu (Aveyron)-

Une infirmerie-bibliothèque, une cabane-bureau, un hangar d’accueil. C’est un minuscule hameau perché sur un causse battu par les vents. Une micro ZAD à l’aplomb d’un panorama époustouflant de collines et de forêts. Tout autour, des pylônes parsèment le plateau rocheux et des lignes haute tension quadrillent le paysage.

Depuis 2015, la commune libre de l’Amassadal’assemblée » en occitan) s’est élevée sur des champs d’élevage de brebis pour s’opposer au poste électrique que veut y construire RTE, la filiale d’EDF dédiée au transport d’électricité. Quelques centaines de personnes s’y sont retrouvées en septembre dernier pour la fête du vent, autour de discussions sur l’éolien industriel au Mexique, le projet de mine aurifère Montagne d’or en Guyane, et d’autres luttes de territoire. En janvier 2019,
une dizaine de personnes y tiennent le lieu désormais protégé de barricades dans l’attente d’une expulsion. Ils n’y montrent plus leur visage, pour échapper à l’astreinte de 2 000 euros par jour et par personne notifiée par l’huissier. Pour Nelly, membre de l’association Plateau survolté qui combat le projet depuis des années : « C’est une atteinte au droit de manifester. Nous luttons aussi contre la répression. »


Le transformateur de RTE a été déclaré d’utilité publique en juin dernier et l’entreprise est désormais officiellement propriétaire de la parcelle occupée. Les gendarmes passent régulièrement, selon un habitué : « Ils demandent : “Combien êtes-vous ?”, “Que comptez-vous faire” ? » Pour empêcher la construction de l’infrastructure, 136 personnes avaient acquis la même parcelle au cœur de l’emprise du futur chantier. Elles ont été expropriées. Trente-neuf personnes viennent de déposer un recours contre l’utilité publique du transformateur. La bataille judiciaire est engagée.

C’est un transformateur électrique, un équipement d’une emprise de cinq hectares – dans sa version réduite concédée par l’opérateur –, qui a déclenché leur entrée en lutte : contre la destruction des champs de deux familles paysannes, contre la démolition du paysage, contre l’installation de nouveaux mâts éoliens dans un territoire déjà saturée de turbines. Mais au fil des assemblées générales et des rassemblements, les revendications du mouvement se sont déployées : contre
l’industrialisation des campagnes, la dépossession des terres rurales, la métropolisation des territoires, la militarisation des collines qu’on risque de ne peut plus arpenter sans subir des contrôles d’identité.

Pour Nelly, de Plateau survolté : « L’industrialisation de ce territoire rural est une dépossession. C’est la planification d’une désertification. L’État a choisi de vider les campagnes et de laisser les aménageurs faire ce qu’ils veulent. Il a fait le choix de défaire les services publics dans le monde rural, de fermer les écoles, les hôpitaux, les maternités, et d’installer toute la population dans les métropoles. Contre cette logique, tout l’Aveyron est une zone à défendre. »

Si bien que des familier·e·s de l’Amassada ont naturellement rejoint le mouvement des « gilets jaunes », toujours actifs en Aveyron à la veille de l’acte XI, en cette fin janvier 2019. « On a passé le Nouvel An ensemble, explique un habitant de l’Amassada, On a participé à l’occupation du viaduc de Millau, avec l’instauration d’un péage gratuit – alors que le tarif est de 12 euros habituellement. Eux occupent les ronds-points depuis des semaines ; nous, on bloque un rond-point de l’électricité depuis quatre ans. Ce ne sont pas les voitures qu’on bloque, c’est l’énergie, mais c’est la même circulation de marchandises. Les gilets jaunes ont bien compris l’arnaque de la transition énergétique d’Emmanuel Macron. Nos luttes ne sont pas si éloignées. »

L’effondrement des cadres collectifs habituels fait exploser les codes politiques. De nombreux gilets jaunes se disent apolitiques tout en exprimant une contestation plus radicale et féconde que bien des cercles militants ; les défenseur·e·s de l’Amassada affûtent contre les parcs éoliens des arguments ailleurs utilisés contre le nucléaire. Ce déplacement n’est pas anecdotique. Alors que la conscience de la gravité des dérèglements climatiques semble enfin se diffuser dans la société française, le développement des énergies renouvelables contre le recours aux énergies fossiles est l’une des seules actions portées par le gouvernement. Mais l’enjeu de la justice entre les territoires ne disparaît plus derrière la nécessité de réduire les gaz à effet de serre.

L'actuel poste électrique de RTE à Saint-Victor-et-Melvieu, aujourd'hui saturé (JL).

À qui profitent les éoliennes – ou les parcs photovoltaïques au sol – soutenues par les appels d’offres gouvernementaux ? Est-il juste, d’un point de vue social et environnemental, que des territoires ruraux peu peuplés subissent les dommages d’installations de production d’électricité consommée ailleurs ? Est-ce vraiment aller dans le sens de la transition énergétique que d’installer toujours plus de sources de production d’électricité, même renouvelable, alors que les analyses convergent
pour dire que la consommation d’électrons va baisser ou stagner en France ? La bataille de Saint-Victor contre « le transfo aux mille éoliennes », selon l’expression des militant·e·s, démentie par RTE, interroge les rapports entre monde rural et pôles urbains et soulève des questions relativement nouvelles de justice environnementale. En septembre 2018, une même marche a réuni à Saint-Affrique défenseur·e·s de l’hôpital public et anti-transfo. « L’aménagement du territoire en Aveyron passe par les partenariats publics privés et les pôles de compétitivité, et en même temps, une classe a fermé ici à la rentrée, le plateau du Larzac a perdu une école primaire, les hôpitaux manquent d’équipement technique et le personnel est à bout, décrit Michel (son nom a été modifié à sa demande), militant à SUD éducation. Les urgences et la maternité sont menacées. On est
en train de tuer la possibilité de vivre ici.
»

Secrétaire départemental de la Confédération paysanne, Jean-Marie Roux explique : « La Conf’ n’est pas anti-éoliennes, mais nous voulons une distribution équitable sur ces territoires, et que les éoliennes ne soient pas au service de quelques-uns. Nos campagnes doivent rester à la disposition de tous : promeneurs, paysans, pêcheurs. La vocation des paysans, c’est de nourrir les gens, pas de produire de l’électricité. » Le syndicat agricole dénonce, là comme dans le reste de la France, la baisse du nombre d’agriculteurs et l’augmentation de la taille des fermes, de 40 hectares dans les années 1980 au double en moyenne aujourd’hui.

Pour Laurent, un opposant : « À 90 %, ce courant n’est pas destiné au territoire local, mais à l’exportation. L’Aveyron est autosuffisante en électricité. Et ça profite à des entreprises privées. Certains opérateurs pensent que les campagnes sont des lieux dociles alors qu’il y a eu plein de voix critiques exprimées dans l’enquête publique. » Un autre ajoute : « Ce modèle ne sert pas à aller à la fin du nucléaire. Ce n’est pas une transition, mais une accumulation énergétique. »

« Ce n’est pas une transition énergétique, c’est une accumulation ! »


La « transition écologique » est l’un des quatre sujets choisis par l’Élysée pour le grand débat de sortie de la crise des gilets jaunes. En repoussant de dix ans, à 2035, la réduction à 50 % du nucléaire dans la production d’électricité, le gouvernement empêche que les nouvelles sources d’énergie se substituent aux centrales atomiques. « Ce n’est pas une transition énergétique, c’est une accumulation ! » dénonce un habitant de l’Amassada. Cette contradiction crée une confusion dommageable au sens de l’essor éolien dans ce département prisé des installateurs par son exposition au vent et la faible densité de ses habitant·e·s.

La région Occitanie s’est dotée d’un scénario « à énergie positive » d’ici 2050, qui ambitionne de répondre aux besoins par des sources renouvelables locales et de réduire les consommations. La puissance installée en éolien terrestre doit passer de 1030 mégawatts (MW) en 2015 à 5 500 MW dans trente ans. Pour Paul Neau, membre du réseau d’expert·e·s NégaWatt qui scénarise depuis des années des voies vers une France 100 % renouvelable, et gérant du bureau d’études Abies : « En Europe le photovoltaïque et l’éolien font reculer les énergies fossiles. En France cela ne se sent pas à cause du nucléaire. Mais si on n’installe pas de renouvelables, on ne pourra jamais remplacer le nucléaire. ». Le prix de l’électricité qui sortira des nouveaux réacteurs nucléaires de type EPR – en construction à Flamanville et en prévision en Grande-Bretagne à Hinkley Point – sera plus cher que celui du photovoltaïque et de l’éolien. Les renouvelables à terme remplaceront fossiles et nucléaires, assurent beaucoup d’analystes.

Manifestation de maires contre le transformateur de RTE, septembre 2018 (JL).

Mais d’ici là ? À partir du moment où les éoliennes d’Occitanie ne se substituent pas aux kilowattheures de la centrale nucléaire de Golfech, leur bilan environnemental se dégrade mécaniquement : elles ne défont pas le verrou de la radioactivité, elles émettent des gaz à effet de serre et consomment des métaux rares pour leur fabrication. Elles contribuent aussi à créer des situations de surproduction, qui rend nécessaire la construction de postes de transformation, comme celui de Saint-Victor-et-Melvieu, pour éviter de saturer le réseau d’électricité, ce qui créerait un risque de black out. « Le réseau électrique actuel n’est pas dimensionné pour transporter la production croissante d’énergies renouvelables du nord de l’Occitanie vers les centres de consommation urbains, explique RTE, sollicité par Mediapart. Lors des pics de production d’électricité, dont l’intensité augmente chaque année, le risque de coupures d’électricité de grande ampleur est avéré, sur les trois départements de l’Aveyron, du Tarn et de l’Hérault. Aujourd’hui, il est de quelques heures par an. Demain, ce sera plusieurs centaines d’heures par an avec le développement de la production d’énergies renouvelables (hydraulique, solaire, éolien, biomasse, géothermie...) et une consommation locale stable. Si bien que nous devons construire ce poste électrique qui permettra d’utiliser la grande capacité de transport du réseau à 400 000 volts pour soulager le réseau électrique à 225 000 volts d’ores et déjà saturé (...) C’est la transition énergétique qui rend ce poste indispensable. »

« Si on veut être à énergie positive en 2050, il faut faire appel à toutes les énergies, y compris l’éolien terrestre, explique Thierry Salomon, coauteur du scénario à énergie positive pour l’Occitanie, et ancien président de NégaWatt. Il peut y avoir de l’éolien qui rende nécessaire un transformateur. » Les deux réacteurs de la centrale nucléaire de Golfech, entre Agen et Montauban, produisent environ la moitié de l’électricité régionale, soit quelque 17,4 Twh d’électricité. Les énergies renouvelables pourraient passer de 15,8 Twh aujourd’hui à 42 Twh en 2050. Une hausse de près de 25 Twh, soit plus que ce que produit aujourd’hui la centrale nucléaire. Résultat : elle deviendrait inutile.

Mais d’ici la fermeture des deux réacteurs nucléaires, la production d’électricité régionale serait largement excédentaire, et partirait alimenter les grands centres urbains les plus proches : Rodez, Albi, Béziers, Toulouse, Montpellier, selon RTE. Exactement ce que reprochent les habitant·e·s de l’Amassada au système en cours de déploiement.

Pylônes et lignes à haute tension autour de Saint-Victor-et-Melvieu

Et au risque de discréditer les appels à la sobriété : à quoi bon économiser l’énergie si elle abonde ? « Seule la maîtrise de la consommation permet de substituer progressivement les renouvelables au nucléaire, analyse Yves Marignac, directeur du cabinet d’expertise Wise Paris, et lui aussi membre de NégaWatt, même si le besoin de sobriété se détendra peut-être le jour où les renouvelables se seront beaucoup développées. » Il identifie un point dur dans la politique actuelle de transition du gouvernement : « On a un discours favorable à l’installation de nouvelles sources d’énergie, mais en maintenant le système nucléaire actuel. Ce qui fait qu’on se retrouve avec une logique d’addition des énergies. Or il y a une opposition assez radicale entre d’un côté l’idée de sobriété comme clé pour transformer le système énergétique en substituant des moyens de production aux autres, et de l’autre, l’idée d’une transformation par accumulation. C’est un vrai terrain de bataille politique. »

À l’entendre, « l’énergie fait système et ce système fait société ». La montée des énergies renouvelables oblige à penser différemment la forme du réseau électrique, car on passe d’une production en base – forte et rigide – et centralisée, à une production moindre, irrégulière et décentralisée. « Cela oblige à penser beaucoup plus en terme de synergie et de mutualisation. Dès lors que l’on reconnaît l’intérêt des énergies renouvelables, dans notre logique, elles doivent être diffuses pour répartir la valeur qu’elles créent sur l’ensemble du territoire. »

De son côté, Thierry Salomon défend que « ça ne tient pas la route d’avoir une vision uniquement régionale ». « Il faut réfléchir à ce qu’une région peut offrir à celles qui manquent de ressources. On ne vise pas l’autarcie en Occitanie. Pourquoi ne pas réfléchir à des formes de solidarité interrégionales pour l’alimentation électrique entre zones rurales et pôles urbains, en échange de contreparties ? »

La mise en discussion de la transition énergétique ne peut plus se limiter aux mesures de gaz à effet de serre ni au taux d’imposition. « Justice environnementale », « solidarités territoriales », « sobriété », « synergies régionales » : autant d’idées absentes du formulaire du grand débat gouvernemental.

Jade Lindgaard - Médiapart

►Amassada

Des nouvelles de nos camarades en lutte contre l’installation d’un parc éolien. Il y a moyen d’y passer régulièrement, pour cela voir l’ Agenda quotidien du hameau de l’Amassada. Ils et elles appellent également à venir renforcer l’occupation de "la zad la moins boueuse de France", manière sans doute de se moquer gentiment de notre zone humide

Dimanche 27 janvier

Gilets jaunes : à Commercy, «l’AG des AG» remporte un succès d'affluence

Dans la petite commune de la Meuse, 75 délégations de gilets jaunes se sont retrouvées ce week-end pour débattre des suites à donner au mouvement. Au menu, échanges d’expérience et débats animés sur une possible structuration du mouvement.

« Commercy, capitale des gilets jaunes ! » La formule, lancée par un participant dans la liesse qui caractérise depuis le début de la journée les quelques 300 représentants qui ont répondu à l’appel de cette petite ville de la Meuse, enthousiasme un moment. Venues de toute la France, près de 75 délégations ont envoyé à Commercy des représentants pour participer à l’assemblée générale des assemblées générales des gilets jaunes, créées un peu partout sur le territoire ces dernières semaines.

« On est dans une volonté de mise en commun des idées », précise Steven, un représentant du groupe de Commercy, avant de s'exclamer : « C’est extraordinaire ce qui se passe ici ! » Le succès dépasse manifestement les organisateurs : « On ne s’attendait pas du tout à ça, on est ravis », assure Claude, qui a largement contribué à l’organisation de ce week-end, mais qui tient d’emblée à préciser que l’AG de Commercy « ne va pas prétendre représenter tous les gilets jaunes de France. On va être humbles. Il s’agit de s’engager dans un processus démocratique par le bas ».

La question, lancinante, de la légitimité de cette assemblée, de ceux qui s’expriment, traversera d’ailleurs tous les débats de ce mouvement si attaché à son horizontalité.

Assemblée générale de Commercy. © LD

À partir de neuf heures du matin, commencent à se rassembler dans la salle des fêtes de petits groupes venus de tout l’Hexagone et parfois même d’un peu plus loin. Un journaliste grec, qui échange avec un couple de Suisses, a fait le déplacement parce que « le monde entier regarde ce mouvement ».

Rico et Chantal arrivent de l’Ariège, du Mas-d’Azil. Ils ont été mandatés par leur AG pour venir les représenter à Commercy. « On a été tirés au sort », précise Chantal, sémillante septuagénaire, qui depuis des semaines multiplie les actions dans son coin de l’Ariège certes reculé, mais « où existe un tissu associatif très vivant ». « Faut la voir bloquer des camions à quatre heures du matin ! », affirme Rico, la quarantaine, admiratif.

« Macron peut lâcher sur les 80 km, on n’en a rien à faire. Son grand débat, c’est de l’enfumage ! Ce qu’on veut, c’est la justice sociale. On en a marre de bosser comme des cons pour rien avoir à la fin », résume Chantal, au diapason d’une assemblée remontée à bloc et persuadée que le mouvement des gilets jaunes, loin de s’essouffler, ne fait que commencer.

La plupart des participants disent être venus à Commercy pour échanger leurs expériences, prendre des contacts, mais aussi se redonner de la force. « C’est important de discuter, de créer des liens. Et puis il faut qu’on s’organise face à la répression », estime Stéphane, qui vit à Saillans dans la Drôme. « Moi je viens prendre un max de contacts pour échanger, parce qu’avec une grosse manif par semaine on a un peu la tête dans le guidon et on a du mal à prendre du recul », affirme Christophe, qui arrive de Montpellier.

Une participante à l’assemblée de Commercy. © LD

Adel, qui vient lui de Rungis, attend de voir « quelles suites va prendre le mouvement ». « En Île-de-France, on est un peu en retard, mais par contre ça continue à grandir », assure-t-il.

La nécessité de mieux se coordonner, de mieux s’organiser est largement partagée. Tout comme l’inquiétude liée à la structuration d’un mouvement spontané et initié par la base. Dans la salle, si chacun met de côté son parcours politique, le refus de toute organisation bureaucratique du mouvement fait l’unanimité.

Dans cette assemblée nettement marquée à gauche, et bien que chacun tienne à mettre de côté son éventuel parcours militant, on sent les militants échaudés par leurs expériences d’organisation pyramidale.

Pour Younès, qui a été mandaté par son AG de Grenoble, c’est la grande force des gilets jaunes, qui rassemblent « des gens sans arrière-pensée politique, qui essaient de s’organiser en sachant que le pouvoir ne doit pas être accaparé par quelques-uns. Ils sont très vigilants sur cette question, ils ne veulent surtout pas d’un leader qui a la science infuse ».

Ici, la question d’une liste gilets jaunes aux européennes ne fait même pas débat. « On dénonce un système politique, c’est pas pour rentrer dedans ! », résume Anne, qui arrive de Nancy et pense comme la majorité des participants interrogés que cette initiative ne vise qu’à affaiblir le mouvement, autant que le « grand débat » organisé par Macron, unanimement rejeté.

Vers 13 heures, la longue présentation des différentes délégations débute avec cette consigne, rappelée par Claude : « Ne pas être trop long, ne pas jouer les grandes gueules. »

De Dijon à Poitiers en passant par Lorient ou Nice, avec une forte présence de groupes franciliens, les différents représentants détaillent la situation de leur côté. Et témoignent de la grande diversité du mouvement. Un représentant de l’AG de Saint-Nazaire raconte que les gilets jaunes occupent là-bas un bâtiment vide, rebaptisé « maison du peuple ». « On fait une assemblée générale par jour », explique-t-il, précisant que les gilets jaunes sont aussi très mobilisés « sur le ralentissement de
l’activité portuaire
».

Venu du Vigan, petit village du Gard, Kevin affirme que le mouvement y reste fort : « Pour un village de 3 000 habitants, on a entre 60 et 80 personnes à chaque assemblée. » Des « commissions thématiques » y ont été mises en place « sur la question de l’autonomie alimentaire de la vallée, par exemple », précise-t-il.

« Le problème, c’est la coordination de toutes les actions » Patrick, de Paris, rappelle que la question qui revient le plus dans les allées du marché de la place de La Réunion, dans le XXe, est celle du logement, des loyers trop chers, quand Louise explique qu’elle s’exprime ici au nom du groupe des femmes gilets jaunes en Île-de-France, un groupe créé « pour porter les revendications spécifiques des femmes isolées dans les gilets jaunes. Parce que plus prolo que le prolo, il y a la femme du prolo », lance-t-elle.

À Horbourg-Wihr, petite commune d’Alsace, le mandaté décrit, de son côté, la présence bienvenue des motards dans le mouvement : « Je peux vous dire que lorsqu’ils sont là, c’est assez impressionnant », se réjouit-il.

Un représentant de Dijon explique, lui, que si dans sa ville la mobilisation reste importante, « le problème, c’est la coordination de toutes les actions. Il y a beaucoup de groupes qui agissent chacun de leur côté », déplore-t-il. « J’ai vu qu’il y avait par exemple beaucoup de gens qui faisaient des tracts super. Ce serait bien si on pouvait les partager pour ne pas réinventer l’eau chaude chacun de notre côté », lance un représentant de Besançon.

Panneau affiché à l'AG de Commercy. © LD

Beaucoup disent ce jour-là leur préoccupation d’élargir le mouvement, notamment en s’arrimant aux combats des salariés dans les entreprises. « Au départ, on s’est retrouvés par l’association des VTC, raconte Adel, mandaté par l’AG de Rungis. Une petite famille s’est créée. Aujourd’hui, on soutient les salariés de Geodis et on soutient naturellement tous les salariés en lutte. »

Faut-il appeler à la grève générale le 5 février, comme y appellent notamment la CGT et La France insoumise ? La question est âprement débattue, tout comme celle de la place à donner aux syndicats dans le mouvement. Certains refusent, par principe, de s’associer à un mot d’ordre syndical alors que les syndicats sont restés largement en dehors du mouvement.

Quelles revendications mettre en avant ? Le débat s’anime entre ceux qui estiment qu’il est trop tôt pour arrêter un socle détaillé et ceux qui jugent important d’acter les grandes tendances autour de la justice fiscale et sociale ou les exigences démocratiques.

« Il faut mettre en avant des revendications unificatrices », avance un participant, quand un autre propose de « se mettre d’accord sur les grands points pour nous permettre de massifier le mouvement ». « Ou alors on se met d’accord sur ce qu’on ne veut plus, parce qu’être trop précis dans les revendications, cela peut diviser », suggère un autre.

La discussion, alors que la soirée avance et que la nuit est tombée depuis longtemps, finit par patiner un peu. « J’ai l’impression qu’on est à Nuit debout, là », s’agace à nos côtés un jeune homme barbu.
Quelqu’un s’inquiète : « On ne va pas ressortir de ce week-end sans un écrit, quand même ! » « Les gens ne sont pas venus ici pour du beurre, nous confie Patrick, de Paris. En tout cas, cela présage un débat extrêmement compliqué sur la structuration du mouvement ! », pronostique-t-il.

L’idée de rédiger un texte commun le lendemain matin est finalement actée.

En fin de soirée, sur la position à tenir face à l’extrême droite, la discussion s’affole et la sérénité joyeuse qui a marqué l’essentiel de la journée disparaît quelques minutes. Alors qu’au cours de la journée, de nombreux participants ont demandé qu’une position claire soit prise contre toute forme de xénophobie, sexisme ou homophobie, les avis divergent sur la manière de se démarquer de l’extrême droite.

« On nous a assez traités de fachos. Il faut dire que ces gens-là n’ont rien à voir avec nous
», estime une participante, qui propose que l’AG condamne explicitement les violences commises le jour même par des groupuscules d’extrême droite.

« On est censés être apartisans », souligne un jeune homme, qui se dit gêné par l’idée de cibler, plus ou moins explicitement, le Rassemblement national. « C’est pas un parti politique, l’extrême droite ! », lui rétorque celle qui a fait la proposition. « Ben si ! », se voit-elle répondre.

Alors que la fatigue se fait sentir, Claude qui joue ce soir-là le monsieur Loyal reprend le micro pour aborder le dernier point à l’ordre du jour : « Comment on s’organise pour rester le plus démocratique possible ? »

Faut-il demander que tous les mandats des représentants soient impératifs ? Sans pouvoir décisionnel ? Plusieurs interventions défendent l’idée de ne surtout pas imposer un carcan national aux assemblées locales. « Les assemblées locales doivent être souveraines », juge une participante.

Une chose est sûre : « La démocratie, c’est super difficile, on le constate encore aujourd’hui », conclut Claude du haut de sa longue expérience militante.

Lucie Delaporte – Médiapart

Appel de la première « assemblée des assemblées » des Gilets jaunes

« L’assemblée des assemblées » des Gilets jaunes s’est tenue à Sorcy-Saint-Martin, près de Commercy (Meuse), samedi 26 janvier et dimanche. Elle vient de publier son appel, que l’on peut regarder, télécharger et lire ci-dessous.
https://youtu.be/gJI5_us3RJI


5 APPEL DE LA PREMIÈRE « ASSEMBLÉE DES ASSEMBLÉES » DES GILETS JAUNES

Nous, Gilets Jaunes des ronds-points, des parkings, des places, des assemblées, des manifs, nous sommes réunis ces 26 et 27 janvier 2019 en « Assemblée des assemblées », réunissant une centaine de délégations, répondant à l’appel des Gilets Jaunes de Commercy

Depuis le 17 novembre, du plus petit village, du monde rural à la plus grande ville, nous nous sommes soulevés contre cette société profondément violente, injuste et insupportable. Nous ne nous laisserons plus faire ! Nous nous révoltons contre la vie chère, la précarité et la misère. Nous voulons, pour nos proches, nos familles et nos enfants, vivre dans la dignité. 26 milliardaires possèdent autant que la moitié de l’humanité, c’est inacceptable. Partageons la richesse et pas la misère ! Finissons-en avec les inégalités sociales ! Nous exigeons l’augmentation immédiate des salaires, des minimas sociaux, des allocations et des pensions, le droit inconditionnel au logement et à la santé, à l’éducation, des services publics gratuits et pour tous.

C’est pour tous ces droits que nous occupons quotidiennement des ronds-points, que nous organisons des actions, des manifestations et que nous débattons partout. Avec nos gilets jaunes, nous reprenons la parole, nous qui ne l’avons jamais. Et quelle est la réponse du gouvernement ? La répression, le mépris, le dénigrement. Des morts et des milliers de blessés, l’utilisation massive d’armes par tirs tendus qui mutilent, éborgnent, blessent et traumatisent. Plus de 1.000 personnes ont été arbitrairement condamnées et emprisonnées. Et maintenant la nouvelle loi dite « anti-casseur » vise tout simplement à nous empêcher de manifester. Nous condamnons toutes les violences contre les manifestants qu’elles viennent des forces de l’ordre ou des groupuscules violents. Rien de tout cela ne nous arrêtera ! Manifester est un droit fondamental. Fin de l’impunité pour les forces de l’ordre ! Amnistie pour toutes les victimes de la répression !

Et quelle entourloupe que ce grand débat national qui est en fait une campagne de communication du gouvernement, qui instrumentalise nos volontés de débattre et décider ! La vraie démocratie, nous la pratiquons dans nos assemblées, sur nos ronds-points, elle n’est ni sur les plateaux télé ni dans les pseudos tables rondes organisées par Macron.

Après nous avoir insultés et traités de moins que rien, voilà maintenant qu’il nous présente comme une foule haineuse fascisante et xénophobe. Mais nous, nous sommes tout le contraire : ni racistes, ni sexistes, ni homophobes, nous sommes fiers d’être ensemble avec nos différences pour construire une société solidaire.

Nous sommes forts de la diversité de nos discussions, en ce moment même des centaines d’assemblées élaborent et proposent leurs propres revendications. Elles touchent à la démocratie réelle, à la justice sociale et fiscale, aux conditions de travail, à la justice écologique et climatique, à la fin des discriminations. Parmi les revendications et propositions stratégiques les plus
débattues, nous trouvons : l’éradication de la misère sous toutes ses formes, la transformation des institutions (RIC, constituante, fin des privilèges des élus...), la transition écologique (précarité énergétique, pollutions industrielles...), l’égalité et la prise en compte de toutes et tous quelle que soit sa nationalité (personnes en situation de handicap, égalité hommes-femmes, fin de l’abandon des quartiers populaires, du monde rural et des outres-mers...).

Nous, Gilets Jaunes, invitons chacun avec ses moyens, à sa mesure, à nous rejoindre. Nous appelons à poursuivre les actes (acte 12 contre les violences policières devant les commissariats, actes 13, 14...), à continuer les occupations des ronds-points et le blocage de l’économie, à construire une grève massive et reconductible à partir du 5 février. Nous appelons à former des comités sur les lieux de travail, d’études et partout ailleurs pour que cette grève puisse être construite à la base par les
grévistes eux-mêmes. Prenons nos affaires en main ! Ne restez pas seuls, rejoignez-nous !

Organisons-nous de façon démocratique, autonome et indépendante ! Cette assemblée des assemblées est une étape importante qui nous permet de discuter de nos revendications et de nos moyens d’actions. Fédérons-nous pour transformer la société !

Nous proposons à l’ensemble des Gilets Jaunes de faire circuler cet appel. Si, en tant que groupe gilets jaunes, il vous convient, envoyez votre signature à Commercy (assembleedesassemblees@gmail.com). N’hésitez pas à discuter et formuler des propositions pour les prochaines « Assemblées des assemblées », que nous préparons d’ores et déjà.

Macron Démission ! Vive le pouvoir au peuple, pour le peuple et par le peuple.

Appel proposé par l’Assemblée des Assemblées de Commercy.

Il sera ensuite proposé pour adoption dans chacune des assemblées locales.

Sur Reporterre

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Infos du 28 au 31 janvier
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Lundi 28 janvier

Près de Commercy, l’assemblée des Gilets jaunes refonde la démocratie
 


À Sorcy-Saint-Martin, le 27 janvier, près de 75 délégations des Gilets jaunes de toute la France ont adopté un Appel. Mettant en avant la revendication du partage des richesses, l’assemblée ambitionne de donner un cadre au mouvement, tout en respectant scrupuleusement son exigence démocratique.

Sorcy-Saint-Martin (Meuse), reportage

« C’est un moment d’histoire » : Patrick, de Paris XXe, rit de toute sa face, pleinement heureux, comme les trois cent personnes dans cette salle qui s’étreignent et se félicitent. Samedi 26 janvier, l’Assemblée des assemblées des Gilets jaunes a décidé qu’elle pouvait publier un appel. Elle s’est déclarée légitime, et dans l’enthousiasme général, on sent passer le souffle de ce qu’ont pu ressentir les délégués du Serment du jeu de Paume, le 20 juin 1789, quand ils décidèrent de ne plus se séparer
jusqu’à l’élaboration d’une Constitution. Les Gilets jaunes ont donc une Assemblée. Ce mouvement épars, diffus, mais puissant, qui cherche sa voie depuis le 17 novembre, se voit proposer un cadre d’union face au pouvoir.

Quelques heures plus tard, Valérie, de Salvetat-sur-Agout (Hérault) m’explique. « Pourquoi est-ce un moment historique ? », lui demandé-je. « Parce que nous avons cherché à agir de la manière la plus démocratique possible, dans le respect de la parole populaire. Et parce que nous avons réussi à établir une coordination du mouvement ».

Revenons en arrière. Dans l’immense mouvement des Gilets jaunes, une plante originale s’est épanouie à Commercy, dans la Meuse, dès novembre. Ici comme dans de nombreux coins de France, ronds-points occupés, manifestations, blocages, puis construction d’une cabane permanente sur la place principale de cette ville de 6.000 habitants, ont ponctué une lutte ininterrompue. Mais dès l’origine, la volonté est née de donner une assise démocratique à cette lutte, en « créant partout en
France des comités populaires, qui fonctionnent en assemblées générales régulières
», ainsi que le proposait le premier appel de Commercy, début décembre. Chemin faisant, l’appel ayant reçu beaucoup d’échos à travers le pays, l’idée a germé d’organiser une « Assemblée des assemblées » locales, de se regrouper pour donner une unité au mouvement tout en respectant scrupuleusement l’autonomie de chaque groupe local. À Commercy même, la dynamique ne faiblissait pas, avec
des assemblées générales quotidiennes ou tous les deux jours. Et si l’expérience de quelques militants anti-Cigéo (le projet d’enfouissement des déchets nucléaires est situé à 40 km) a été utile, c’est bien un mouvement animé par des Gilets jaunes sans expérience militante qui s’est développé.

Environ 75 délégations, venues de toute la France.

À la suite de l’appel, les liens avec des groupes locaux se sont établis, et le projet d’Assemblée des assemblées s’est engagé, conduisant à ce rassemblement dans la salle des fêtes de Sorcy-Saint-Martin, un bourg à quelques kilomètres de Commercy.
Une belle organisation, avec hébergement chez l’habitant, repas à prix libre par la cantine La Marmijotte, documents préparatoires soignés, sono et automédia vidéo. Et samedi 26 janvier, très pluvieux, près de 75 délégations se sont retrouvées, dont une cinquantaine avec mandat et les autres en « observatrices », sans délégation explicite de leur assemblée locale. Les délégations étaient le plus souvent en binôme – avec une parité homme-femme -, voire en groupe plus nombreux.

Claude Kaiser : « On ne peut pas prétendre représenter les Gilets jaunes de France. On représente une idée. Il s’agit ici

de s’engager dans un processus »
 

En ouverture de l’assemblée, l’animateur, Claude Kaiser, de Commercy, a posé le principe des discussions : « On ne peut pas prétendre représenter les Gilets jaunes de France. On représente une idée. Il s’agit ici de s’engager dans un processus ».
Puis, les groupes présents ont présenté chacun leur démarche et leurs principales actions : de Poitiers au Vigan (Gard), de Noisy-le-Sec (93) à Saint-Nazaire, de Crolles (Isère) à Flixecourt (Somme). Et partout, une détermination sans faille, et tenace, comme en Ardèche, où la cabane des Gilets jaunes a été détruite sept fois, rebâtie sept fois – « et maintenant, on la démonte le soir et on la rebâtit le matin ». Autre dominante : « Rarement on a vu autant de femmes dans un mouvement », dit la représentante de Conflans-en-Jarnisy (Meurthe et Moselle). Ce que les prises de parole confirmaient.

« Rarement on a vu autant de femmes dans un mouvement »

Après ce long tour de présentations qui donnait la jauge de l’énergie collective, le débat s’est engagé pour savoir si l’Assemblée pouvait publier une liste de revendications. Cette liste avait été établie par un questionnaire envoyé par ceux de Commercy aux assemblées locales des Gilets jaunes. Une quarantaine de celles-ci ont répondu, plaçant en tête des revendications un meilleur partage des richesses et le rétablissement de l’ISF (Impôt de solidarité sur la fortune), nettement devant la demande du référendum d’initiative citoyenne.

Le sujet central de la discussion : l’assemblée était-elle légitime pour décider la publication de ce document ? Celui-ci montre que la question du RIC, mise en avant par une partie des Gilets jaunes en France et par les médias, est peut-être moins importante que la revendication de justice sociale. Nombre de délégués jugeaient qu’ils n’avaient pas été mandatés pour prendre une telle décision, et qu’il fallait la soumettre à leur assemblée locale. Pour d’autres, ce processus interdisait l’efficacité. Ainsi Clément, d’Ivry, observait : « Si on va a au bout du formalisme, on ne pourra jamais décider, parce qu’il faudra plein d’allers-retours. On peut dire que cette assemblée des assemblées est légitime pour prendre des décisions. » Légitime ? C’est précisément ce dont elle n’était pas assurée, la préoccupation de rester parfaitement démocratique dominant les esprits. Marco, de Dijon, expliquait : « Il y a un très gros complexe de légitimité ici. Nous avons la volonté de super bien
faire, pour ne pas répéter ce que nous reprochons au pouvoir. Mais vous ne trahissez pas l’assemblée si votre texte correspond à ce qui s’est dit.
» Alors, l’Assemblée était-elle décisionnelle ? Oui, disait la déléguée de Strasbourg, « rien n’empêche de dire qu’on redescendra dans la AG pour validation ou rejet. » « Sur 150 délégués ici, lui rétorquait une autre, qui a un mandat sur ce point ? Personne. Donc on ne vote pas, point ! » Les esprits s’échauffaient, et il fallait l’humour du clown Cilasz - par ailleurs délégué de Die (Drôme) - pour ramener la sérénité : « Cou-cou ! Nous sommes mus par une
urgence intérieure, mais nous prenons le temps, nous sommes là pour construire et il faut savoir que ça ne va pas être de la tarte.
»

Voter ? Oui. L’assemblée est légitime

En chemin, l’idée de publier telle quelle la liste des revendications avait été abandonnée. De fait, le document, intéressant mais touffu, aurait été difficile à communiquer tel quel. C’est donc vers un appel, plus lisible, que l’Assemblée s’orientait. Voter ? Oui ! Et un vote presque unanime donnait le feu vert à l’écriture de cet appel. La liesse générale éclatait, l’assemblée des assemblées des Gilets jaunes existait ! Et d’aucuns, réjouis, parlaient de « moment historique ».

Repos ? Non. Studieuse, l’assemblée reprenait la discussion, sur le thème : « Comment s’organiser pour être le plus démocratique à toutes les échelles ? » Un souci émergeait : ne pas uniformiser les formes et les actions, laisser à chaque assemblée locale le soin de déterminer ce qu’elle avait à faire. La discussion roulait ensuite sur le point de savoir quand on se réunirait de nouveau. Dans un mois, dans deux, plus tard ? « Ne nous pressons pas, disait un délégué, la Révolution prend trois, quatre ans ». Mais il y a l’urgence, la loi anti-casseurs dès le 29 janvier, les lois que continuent à voter les députés du parti macroniste LREM. Et l’assemblée acceptait la proposition de Saint-Nazaire - où les Gilets jaunes occupent un bâtiment renommé « Maison du peuple » - de se réunir d’ici un mois et demi ou deux mois. Si possible, Montreuil (93) organiserait une assemblée d’ici un mois.

« Ce texte, on l’a tous salué, avec notre cœur. Soyez fiers de vous, vous avez fait du beau travail. »

Le lendemain, dimanche, l’assemblée des assemblées, après divers ateliers de discussion sur des thèmes spécifiques, adoptait l’Appel. Un texte avait été préparé par une dizaine de délégué(e)s. La discussion partait, proposant moult amendements.
Allait-on s’enliser ? Une représentante de Nantes emportait l’assentiment général : « Ce texte lu, on l’a tous salué, avec notre cœur. Après, on peut changer plein de choses. Mais... on va apprendre à travailler ensemble. Ce qu’on a vécu ce week-end est magnifique ? Il faut publier le texte le plus vite possible. Soyez fiers de vous, vous avez fait du beau travail. Merci Commercy ! ». Que répondre ? Des applaudissements. Le groupe du texte repartait intégrer quelques ajouts (par exemple, la mention de l’Outre-mer et de l’attention aux personnes handicapées), et le texte était adopté en début d’après-midi.

Lecture de l’Appel de l’Assemblée des assemblées : « Du plus petit village à la plus grande ville, nous nous sommes

soulevés contre cette société profondément violente, injuste et insupportable. »

Et maintenant ? Le texte sera-t-il adopté par les assemblées de Gilets jaunes à travers la France ? On verra. Ici, à Sorcy-Saint-Martin, restait une conviction, exprimée par un délégué de Rennes : « Il ne faut pas que le mouvement des Gilets jaunes s’arrête en chemin. Nous avons un devoir envers ceux qui sont morts durant le mouvement ». À partir d’un sentiment simple et fort, exprimé samedi par une déléguée : « Qui on est, les Gilets jaunes ? Un mouvement populaire, émanation du peuple
dans sa diversité. Que veut-on ? Vivre dignement, sans avoir peur du lendemain.
»

« Qui on est, les Gilets jaunes ? Un mouvement populaire, émanation du peuple dans sa diversité. Que veut-on ? Vivre

dignement, sans avoir peur du lendemain. »

Pascal Hennequin et Hervé Kempf - Reporterre

►Deuxième Appel des Gilets Jaunes de Commercy : l'assemblée des assemblées ! par Gilets Jaunes Commercy

https://youtu.be/GB1-Sg4jt7Y

Là bas si j’y suis

Un petit poème :
« Macron, si tu te réveilles au crépuscule / avec quatre testicules / ne te prends pas pour Hercule / c’est un gilet jaune qui t’enc... ».

Elodie – gilet jaune de Blois sur Médiapart

Et un peu d’histoire :

À la Patte d’Oie, j’avais entendu une fois le mot “bougnoule”. Je suis allé voir le gars pour lui expliquer que ce mot terrible venait d’une expression, “Aboul Gnoul” (“Apporte l’alcool”), entendue de la bouche des tirailleurs sénégalais dans les tranchées. Il avait l’air surpris, il s’est excusé. »

Mohamed – gilet jaune de Blois sur Médiapart

►Un texte de Lordon qui résume la situation actuelle de la France :
https://blog.mondediplo.net/il-est-alle-trop-loin-il-doit-partir

Un extrait :
"En vérité, ce pouvoir est symboliquement à terre. Il a franchi un à un tous les seuils du discrédit, et puis ceux du scandale. Il ne lui reste plus que la force armée pour contenir la contestation. "

Mardi 29 janvier

►Contre les grands projets
L’aménagement capitaliste du territoire continue, on nous demande de relayer cet appel contre l’ouverture d’une carrière à Blanquefort sur Briolance

►Amassada
Des nouvelles de l’Amassada. Ils et elles ont reçu des menaces de la gendarmerie. Si vous n’êtes pas loin on vous demande de vous rendre sur place dès ce soir ou demain pour les soutenir.

Mercredi 30 janvier

►Contre les grands projets
Implantons la résistance contre le Surf Park à St Père en Retz (44) le dimanche 24 Février ! Marche vers les terres du projet, plantations d’arbres, construction d’une cabane de la résistance et festivités !
https://zad.nadir.org/spip.php?article6342

Jeudi 31 janvier

►Landivisiau
Contre la centrale à gaz à Landivisiau. C’est une lutte au long cours dont on se sent solidaire. Illes appellent à se rassembler contre la reprise des travaux. Ne laissons pas faire !


Solidarités Internationales

Lutte anti aéroport à Lisbonne

LES GILETS JAUNES : 
BILANS DE LA REPRESSION




Pascal Boyart alias P.BOY - Paris – 07-01-2019

Mercredi 9 janvier

                                       
               Bilan de la répression le plus lourd depuis 50 ans

Au soir du 9 janvier 2019 :
- 10 morts
- 1 700 blessés dont 82 très grièvement
- 12 yeux crevés – 4 mains arrachées
- 5 399 gardés à vue – 815 mandats de dépôt
- 292 incarcérations – des milliers de suites pénales

Le blog de Jean Luc Mélenchon

Samedi 19 janvier

         Le terrible bilan de deux mois de violences policières




Depuis le début de la mobilisation Gilets jaunes, plusieurs recensements font état d’au moins 97 blessés graves par les armes de la police, dont quatre ont eu la main arrachée et au moins quatorze ont perdu un oeil. La faute aux lanceurs de balle de défense, aux grenades GLI-F4 et à une doctrine de maintien de l’ordre ultraviolente.




« J’étais en train de filmer avec mon téléphone portable aux Champs-Elysées quand il y a eu un mouvement de foule. J’ai reculé et j’ai senti cette balle de Flash Ball percuter ma tête. J’ai eu l’impression que ma joue droite éclatait. »

Axelle Marquise, 28 ans, a été blessée par un tir de lanceur de balle de défense (LBD) le samedi 8 décembre à Paris, lors d’une manifestation des Gilets jaunes. C’était la première fois de sa vie que cette serveuse à Six-Fours (Var) descendait dans la rue. Les examens médicaux diagnostiqueront une brûlure au deuxième degré, un hématome majeur, une double fracture de la mâchoire et un trismus – contraction constante des muscles de la mâchoire qui l’empêche d’ouvrir la bouche de plus d’un
centimètre. « Je dois manger liquide pendant six semaines. J’ai déjà perdu six kilos. Après le rendez-vous le 29 janvier avec la chirurgienne pour vérifier que la fracture est bien réduite, je devrai faire je ne sais combien de séances de kiné pour soigner le trismus. Quand je pourrai enfin ouvrir la bouche, il faudra voir les dégâts au niveau des dents. J’ai perdu un bout de la molaire au fond à droite et je sens que quelque chose ne va pas », décrit-elle à Reporterre.

Axelle Marquise, 28 ans, serveuse à Six-Fours (Var), a été blessée le samedi 8 décembre aux Champs-Elysées, à Paris. Elle souffre d’une brûlure au deuxième degré sur la joue droite, d’un hématome majeur et d’une double fracture de la mâchoire.

La jeune femme s’est vue prescrire dix jours d’incapacité totale de travail (ITT). Pourtant, elle dit avoir eu « énormément de chance » par rapport aux autres blessés qui témoignent avec elle dans une vidéo. Celle-ci a été mise en ligne le 15 janvier par le collectif des « Mutilés pour l’exemple » (attention, images très choquantes). On y voit les cicatrices de Thomas, qui a lui aussi pris un tir de LBD en plein visage. Bilan, « 25 points de suture, une fracture du sinus, la lèvre tuméfiée et l’œil gauche touché ». Et le moignon d’Antoine, 26 ans, qui a eu la main droite arrachée par une grenade GLI-F4.

Dans un courriel adressé à Reporterre le 17 janvier, le ministère de l’Intérieur a comptabilisé depuis le 17 novembre « 1.800 blessés parmi les manifestants et un millier de blessés parmi les forces de l’ordre » - dont les trois-quarts, selon Le Journal du dimanche, n’auraient pas donné lieu à un arrêt de travail. Ces chiffres ne disent rien de la gravité des blessures. Le 5 décembre, Reporterre recensait trois mains arrachées par des grenades GLI-F4, des blessures à la tête causées par des tirs de LBD et le décès de Zineb Redouane, 80 ans, à Marseille, après qu’une grenade ait été tirée dans son appartement.



97 blessés graves depuis le 17 novembre

Affiche des blessés lors de l’acte 9 des Gilets jaunes, le 12 janvier 2019, à Lille.

Depuis 2012, le collectif contre les violences d’État « Désarmons-les ! » tient la sinistre comptabilité des blessés graves et tués par la police. « Nous parlons de blessure grave dès lors qu’il y a plaie ouverte avec fracture, traumatisme crânien, perte d’un membre, rupture d’un organe ou blessure à la tête. Les informations nous viennent des réseaux sociaux, de membres du réseau et d’avocats engagés dans la lutte contre les violences policières, explique à Reporterre Ian B., membre du collectif. Quand une information nous parvient, nous demandons confirmation aux proches de la victime ainsi que plusieurs photos à différents stades de la guérison avant de la verser à la liste. » Dans un bilan provisoire mis en ligne le 4 janvier, le collectif dénombrait 97 blessés graves depuis le 17 novembre. « Quasiment les trois quarts ont été blessés à la tête » et plusieurs ont été définitivement mutilés : quatre ont eu une main arrachée, une personne est devenue sourde suite à l’explosion d’une grenade et dix-sept personnes ont été éborgnées.

Le journaliste indépendant David Dufresne a quant à lui entrepris de signaler blessures et violences les plus graves sur son fil Twitter et au ministère de l’Intérieur. Quand Reporterre l’a rencontré, mercredi 16 janvier, il avait déjà rédigé 307 « signalements ». « La plupart concernent des blessures. D’autres, des manquements à la déontologie ou un non-respect des règles qui sont la matrice de la blessure. Toutes les blessures à la tête causées par des LBD et des Flash Ball sont interdites, puisque les policiers ne sont pas autorisés à viser la tête et les parties génitales. Les tabassages ne sont pas autorisés non plus. Cette centaine de blessés graves et ce millier de blessés légers sont déshonorants. »

Le quotidien Libération s’est appuyé sur ces travaux pour établir son propre recensement « non exhaustif ». Bilan le 15 janvier : 94 blessés graves, dont 69 par des tirs de LBD. Et au moins 14 personnes éborgnées.




6 Plus de blessés graves par la police en deux mois qu’en vingt ans


Un policier vise le journaliste Simon Louvet à Rouen le 29 décembre 2018.

Chez ces observateurs, c’est l’effroi qui prime. « J’ai entrepris ce travail à cause d’un sentiment de sidération devant les images de violences policières et le déni politique et médiatique de ces violences, explique David Dufresne, qui avait publié en 2013 un livre d’enquête intitulé Maintien de l’ordre (éd. Fayard). Avec les Gilets jaunes, on a battu les records des mobilisations contre le CIP en 1994, contre le plan Juppé en 1995 et contre le CPE en 2006. Il faut remonter à Mai 68 pour déplorer un tel bilan. Certes, en Mai 68, il y avait eu des morts. Mais là aussi, une dame de 80 ans est morte à Marseille. Une enquête doit établir s’il s’agit d’une victime collatérale, mais elle reste une victime. »

Même sentiment d’aggravation du côté de Désarmons-les : « Le collectif est né en 2012, quand nous nous sommes rendus compte que des manifestants étaient blessés par les armes de la police et notamment les grenades utilisées depuis les années 2000, raconte Ian B. En février 2014, trois personnes ont été éborgnées à Nantes lors d’une manifestation contre le projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes. Le nombre de blessés a grimpé en flèche au moment de la mort de Rémi Fraisse à Sivens en octobre 2014, des mobilisations contre la « loi travail » en 2016 et de l’expulsion de la Zad de Notre-Dame-des-Landes en 2018. » Mais la mobilisation des Gilets jaunes fait exploser les compteurs. « Entre 1999 et le 17 novembre 2018, soit environ vingt ans, nous avons recensé 53 blessés graves, dont un grand nombre en-dehors de manifestations. Depuis le 17 novembre, nous en sommes à 97 blessés graves, quasiment tous en manifestations. »

Comment en est-on arrivé là ? En juillet 2017, l’Action des chrétiens contre l’abolition de la torture (Acat) dénonçait dans une note adressée au Défenseur des droits un « tournant majeur dans la doctrine française du maintien de l’ordre » depuis le début des années 2000, avec « le développement des logiques d’interpellation d’une part et la transformation de l’armement d’autre part ». « Allant de pair avec une logique chiffrée de l’action policière, le nombre d’interpellations est devenu un enjeu des opérations de maintien de l’ordre, peut-on y lire. Une interpellation implique un rapprochement au corps à corps, et donc, de facto, un abandon de la logique de mise à distance. »
L’évolution de l’armement s’est traduite par l’essor des armes de force intermédiaire – lanceurs de balle de défense dont le LBD 40, grenades lacrymogènes instantanées GLI-F4 et grenades de
désencerclement –, à l’origine de la plupart des blessures graves en manifestation ces dernières années. A noter que seule la France utilise ces armements : ni l’Allemagne, ni le Royaume-Uni, ni la Belgique n’utilisent de grenades à effet de souffle type GLI-F4 et de LBD.

Le maintien de l’ordre en France, « une exception française »


Le ministre de l’Intérieur, Christophe Castaner, et son secrétaire d’État, Laurent Nunez (à sa droite), le 5 janvier 2019.

Cette évolution néfaste s’est faite avec la complicité du politique. Dans leur article « Un splendide isolement. Les politiques françaises du maintien de l’ordre », les sociologues Olivier Fillieule et Fabien Jobard s’intéressent à « la certitude, largement entretenue par policiers et gendarmes, que le maintien de l’ordre ’à la française’ est d’excellence et qu’il est prisé dans le monde entier. Cela fut peut-être vrai par le passé, mais ce n’est plus le cas. » En outre, « cette difficulté à se remettre en
question s’adosse à un discours sur les spécificités de la situation française avec l’idée que les casseurs sont d’une détermination jamais vue auparavant et que l’on bascule dans un cycle inédit de violence (...). Le politique se contente de reprendre à son compte les déclarations des principaux syndicats de police, selon lesquels la violence de l’adversaire exonère le dispositif de maintien de l’ordre. (...) Se laissant convaincre par les arguments policiers sur la ’
violence extrême’ des adversaires, les ministres de l’Intérieur par cette seule posture s’empêchent tout examen au fond de l’action policière. » La déclaration de Christophe Castaner le 16 janvier à Carcassonne, illustre bien ce soutien sans faille : « Moi, je ne connais aucun policier, aucun gendarme qui ait attaqué des Gilets jaunes. Par contre, je connais des policiers et des gendarmes qui utilisent des moyens de défense de la République, de l’ordre public ».

Mais de plus en plus de voix s’élèvent pour dénoncer la multiplication des blessures causées par les violences policières et réclamer l’interdiction des armes de force intermédiaire. Le 1er décembre, six avocats écrivaient à M. Castaner pour lui demander l’interdiction des grenades GLI-F4. Le 7 décembre, environ 200 personnalités, dont des élus de gauche, des sociologues, des historiens et des écrivains, appelaient à cesser « immédiatement » l’usage des LBD en manifestation. Le 14 décembre, c’était au tour d’Amnesty international de prendre la plume. Le 17 janvier, le Défenseur des droits Jacques Toubon réclamait une nouvelle fois la suspension de l’usage des LBD.

Il avait déjà préconisé l’interdiction des lanceurs de balle de défense dans un rapport remis le 10 janvier 2018 à l’Assemblée nationale. « Au cours d’une manifestation où, par définition, les personnes visées sont généralement groupées et mobiles, le point visé ne sera pas nécessairement le point touché et la personne visée pourra ne pas être celle atteinte », y lit-on. « Par ailleurs, le caractère ‘ non létal ’ des armes de force intermédiaire conduit en pratique les agents à les utiliser avec moins de précautions que les armes traditionnelles. Comme le relève Cédric Moreau de Bellaing, sociologue, l’introduction des armes sub-létales a plus d’effets délétères que positifs ’ car elles induisent ‘ l’absolue certitude qu’au pire on amochera mais qu’on ne tuera pas ’, ce qui explique qu’‘ on les utilise plus souvent ’ », poursuit le Défenseur des droits.


« Les victimes sont issues de toutes les franges de la population »

Portraits des victimes policières lors des manifestation des Gilets jaunes, réalisé le 28 décembre 2018.

L’explosion du nombre de blessés joue dans la prise de conscience, mais pas seulement. Avec les Gilets jaunes, le profil des victimes a changé ; plus possible de mettre en avant l’image de « casseurs », « anarchistes » ou « zadistes » qui, quelque part, « l’auraient bien cherché ». « Les victimes ne sont plus issues du monde militant mais de toutes les franges de la population », observe David Dufresne. « Ce sont des citoyens ordinaires, des gens qui travaillent et qui ont une famille, et qui pour beaucoup descendent dans la rue pour la première fois pour défendre leurs droits », confirme Ian B, de Désarmons-les. « Avant d’aller en manifestation, je me disais que les personnes blessées avaient elles-mêmes commis des violences. Je ne pensais pas qu’un manifestant lambda pouvait se faire tirer dessus, témoigne Axelle Marquise. Mais aujourd’hui, quand je vois les images de Fiorina, 20 ans, qui a perdu un œil à cause d’un tir de Flash Ball, j’ai des frissons dans tout le corps et les larmes aux yeux : comment une fille si jeune, qui allait à sa première manif, a-t-elle pu être mutilée de cette manière ? »

La riposte judiciaire s’amorce. Le 11 janvier, l’Inspection générale de la police nationale avait été saisie de 207 signalements pour des dénonciations de violences policières, dont 71 enquêtes judiciaires et une enquête administrative, depuis le début du mouvement. 25 réclamations sont actuellement en cours de traitement par le Défenseur des droits, dont certaines concernent des groupes de personnes.

Axelle Marquise, elle, a porté plainte contre X pour « violence aggravée avec menace ou usage d’une arme ». Elle n’est pas retournée manifester depuis sa blessure : « J’ai pensé accompagner mon compagnon la semaine dernière, mais je n’en ai pas dormi de la nuit. Je me suis vue prendre à nouveau un tir de LBD dans la tête et perdre un œil ou être défigurée à vie. » En revanche, elle se dit prête à répondre à l’appel du collectif des Mutilés pour l’exemple, pour des rassemblements le 2 février devant les commissariats et gendarmeries, avec des manifestants couverts de bandages demandant l’interdiction des armes de force intermédiaire. « Je ne sais pas si on obtiendra cette interdiction. De plus en plus de personnes ont conscience que ces armes peuvent mutiler et même tuer. Mais en même temps, je crains que le gouvernement trouve encore des excuses, en prétendant que les manifestants sont violents, qu’ils n’avaient pas à être là, comme l’a insinué Castaner en disant que ceux qui iraient manifester se rendraient complices des violences. »


Portrait de M. Castaner, ministre de l’Intérieur, réalisé à partir de photos de victimes des actes des forces de l’ordre

depuis le 17 novembre 2018.

Le courriel du ministère de l’Intérieur n’est pas très encourageant : « Il s’agit d’armes de défense qui sont utilisées par les forces de l’ordre en réponse à des violences, en situation de légitime défense et dont l’usage qui en est fait est proportionné.
Les manifestations, à Paris et en province, la plupart non déclarée, ont été caractérisées par des actions particulièrement violentes, et une volonté affichée d’en découdre avec les forces de l’ordre
», a-t-il laconiquement répondu à Reporterre.

Émilie Massemin – Reporterre

Mardi 22 janvier

►Gilets Jaunes - Folle répression et procès politiques :

Un homme de 32 ans comparaissait lundi 21 janvier devant le tribunal correctionnel de Toulouse pour avoir pointé un laser sur l’hélicoptère des gendarmes, lors de l’acte 10 des Gilets jaunes. Il a été condamné à deux ans et demi de prison, dont un an ferme. Pour le procureur de la République, le prévenu aurait pu provoquer une catastrophe, « pire qu’AZF ». Il réclame trois de prison ferme et un mandat de dépôt. C’était la première fois qu’il participait à une manifestation de Gilets jaunes, et son casier judiciaire était vierge. Après délibération, le tribunal correctionnel l’a condamné à deux ans et demi de prison, dont un an ferme. L’homme est reparti en détention.

https://www.ouest-france.fr/societe/gilets-jaunes/toulouse-prison-ferme-pour-un-gilet-jaune-qui-visait-l-helicoptere-des-gendarmes-avec-un-laser-6188661

Douze personnes suspectées d’avoir participé en décembre à l’incendie de la zone de péage sud de Narbonne, en marge d’une manifestation des Gilets jaunes, ont été arrêtées ce lundi, a annoncé le parquet de Narbonne. « L’opération a débuté ce matin (lundi) à 6 h, avec l’engagement de moyens importants de la gendarmerie », a indiqué le parquet dans un communiqué.

https://www.ouest-france.fr/societe/gilets-jaunes/incendie-du-peage-de-narbonne-douze-gilets-jaunes-interpelles-6186502

Quatre hommes ont été interpellés lors de la manifestation régionale des Gilets jaunes, samedi 19 janvier. Deux d’entre eux sont condamnés à quatre mois de prison avec sursis pour avoir jeté des pierres sur les forces de l’ordre. Ces deux hommes ont été déférés devant le parquet d’Angers, ce lundi 21 janvier. Ils ont été condamnés à une peine de quatre mois de prison avec sursis. « Une orientation qui aurait pu être différente s’ils avaient eu des antécédents et blessés les gendarmes », souligne le parquet d’Angers.

https://www.ouest-france.fr/pays-de-la-loire/angers-49000/angers-interpellations-pendant-l-acte-10-quatre-mois-de-prison-avec-sursis-pour-deux-hommes-6186526

Samedi 19 janvier 2019, quatorze personnes ont été interpellées lors de l’Acte X des Gilets jaunes, à Caen. Depuis le début de la mobilisation des Gilets jaunes, près de 150 personnes ont été interpellées dans l’agglomération caennaise.

https://www.ouest-france.fr/normandie/caen-14000/gilets-jaunes-caen-deja-150-interpellations-depuis-le-debut-du-mouvement-6181294

Mercredi 23 janvier

►La loi « anti-casseurs » prépare la criminalisation des manifestants sur Reporterre

https://reporterre.net/La-loi-anti-casseurs-prepare-la-criminalisation-des-manifestants

La CGT et la LDH demandent à la justice d’interdire en urgence les flashballs

Le syndicat et l’organisation de défense des droits de l’homme estiment que l’usage des lanceurs de balles de défense constitue une violation des libertés fondamentales. Ils réclament son interdiction temporaire et assignent l’État en justice. Une procédure en urgence, inédite à quelques jours de l’« acte XI » de la mobilisation des « gilets jaunes ».

Mâchoires cassées, membres fracturés, visages tuméfiés. Plus d’une centaine de blessés graves ont été recensés parmi les participants au mouvement des « gilets jaunes ». Pour la CGT, l’ampleur du phénomène ne laisse guère place au doute : « Il y a une volonté de blesser pour punir les manifestants, pour faire peur à la population », estime le secrétaire général de l’Union départementale de Paris, Benoît Martin.

© Reuters
Le syndicat a déposé, ce mardi, deux requêtes en référé-liberté, l’une au nom de son antenne parisienne et l’autre au nom de la Confédération nationale, auprès du tribunal administratif de Paris pour demander l’interdiction des lanceurs de balles de défense (LBD), plus connus sous le nom de flashball, lors des manifestations du 26 janvier et du 2 février. La Ligue des droits de l’homme interviendra à l’audience en soutien de cette demande.

Le « caractère irréversible des blessures » que peuvent occasionner les tirs de flashball « constitue indiscutablement une entrave au droit de manifester en ce que chaque individu se voit sérieusement dissuadé d’exercer son droit », d’après la requête de la CGT.

À défaut d’obtenir une interdiction des LBD sur l’ensemble du territoire, elle espère voir cette arme bannie de la capitale. Depuis le début de la mobilisation, 43 personnes ont été blessées à Paris et, dans l’écrasante majorité des cas, à la suite d’un tir de flashball, d’après le décompte de CheckNews et du collectif Désarmons-les !.

La CGT cible notamment un modèle de lanceur de balles, utilisé par les forces de l’ordre françaises depuis 2009 : le LBD 40. Désignée comme « non létale » par le ministère de l’intérieur, cette arme peut néanmoins causer de graves lésions corporelles à moins de sept mètres.

Dans la droite ligne des arguments du syndicat, la Ligue des droits de l’homme affirme que le recours aux LBD 40x46 et 44 mm est « illégale » et « porte atteinte au droit de ne pas être soumis à des traitements inhumains ou dégradants », au « respect de la dignité de la personne humaine » et « à la liberté de manifestation ».

La dangerosité de ce lanceur de balles à faible distance a poussé le Défenseur des droits à préconiser la « suspension » du LBD 40 dans les opérations de maintien de l’ordre, dans un rapport remis le 10 janvier 2019. Loin d’enrayer la spirale de la violence, les flashballs présenteraient, selon Jacques Toubon, le risque « d’entraîner des réactions imprévisibles » chez les manifestants témoins d’une blessure grave dans leurs rangs.

Ce rapport du Défenseur des droits est resté sans réponse de la part de l’exécutif, selon la CGT. Le syndicat dénonce de ce fait « l’impassibilité du gouvernement » et estime que les pouvoirs publics ont failli à leur devoir de protéger les gilets jaunes :
« L’accumulation et la systématicité des violences graves et mutilantes chaque week-end de mobilisation permettent de caractériser la carence de l’État à prévenir ces atteintes à l’intégrité physique des manifestants », argue la confédération nationale.

Ces armes auraient éborgné dix-sept personnes, selon le décompte du journaliste indépendant David Dufresne. Selon le ministre de l’intérieur, seules « quatre personnes » ont été gravement blessées à l’œil à la suite d’interventions policières lors de manifestations depuis le début du mouvement.

Auditionné devant les députés, Christophe Castaner a annoncé, le 22 janvier, que l’ensemble des policiers armés de LBD seraient « systématiquement équipés de caméras-piétons » à partir de « l’acte XI », prévu ce week-end. Les images tournées par les forces de l’ordre pourraient ainsi être produites devant un tribunal, au cas où l’usage du flashball serait contesté.

La LDH prend acte de cette mesure, « à même de faciliter les enquêtes judiciaires en cas de violences illégitimes », mais « elle ne permet pas d’éviter les violations graves et manifestement illégales des libertés fondamentales » décrites par l’association.

L’avocat de la Ligue, Arié Alimi, soulève de surcroît que la « non-létalité » de ces armes, régulièrement invoquée place Beauvau, « n’a jamais fait l’objet d’une évaluation ou de tests véritables ». Le Défenseur des droits avait, lui aussi, fait part de ses doutes en 2015 et pointé les incohérences dans les instructions données aux forces de l’ordre. Contrairement à la police, la gendarmerie avait interdit « strictement » de « viser le cœur, en raison de risques traumatiques mortels ».

L’audience est fixée ce jeudi. Le juge des référés dispose de 48 heures pour répondre à la requête formulée par la CGT, avant un nouveau week-end sous haute tension.

Hugo Lemonnier – Médiapart

Vendredi 25 janvier

«Allô place Beauvau ? C’est pour un bilan»

Typologie des blessures


Mise à jour le 25.01.2019

151 Blessures à la tête
11 Blessures à la main
8 Blessures au dos
28 Blessures aux membres supérieurs
39 Blessures aux membres inférieurs
3 Blessures aux parties génitales
48 Autres, non renseignés
49 Intimidations, insultes, entraves à la liberté de la presse

• 337 signalements
• 1 décès
• 151 blessures à la tête
• 17 éborgné·es
• 4 mains arrachées

Cartographie de la répression

Acte I - 17.11.2018



Acte II - 24.11.2018






https://alloplacebeauvau.mediapart.fr/actes/3/





https://alloplacebeauvau.mediapart.fr/actes/4/


"Quand la #violence se déchaîne, la #liberté cesse". Emmanuel Macron - 10.12.18


 https://alloplacebeauvau.mediapart.fr/actes/5/


https://alloplacebeauvau.mediapart.fr/actes/6/

"Déterminé à ramener l’#ordre" Édouard Philippe - 24.12.18



https://alloplacebeauvau.mediapart.fr/actes/8/


https://alloplacebeauvau.mediapart.fr/actes/9/

"Je ne ne connais aucun policier qui ait attaqué des Gilets jaunes". Christophe Castaner - 14.01.19


https://alloplacebeauvau.mediapart.fr/actes/10/


Les armes controversées en présence

https://alloplacebeauvau.mediapart.fr/armes/gli-f4/

18 signalements #Grenade explosive GLI-F4



https://alloplacebeauvau.mediapart.fr/armes/lbd-40/

185 signalements #LBD 40

 

https://alloplacebeauvau.mediapart.fr/armes/gmd/

35 signalements #Grenade désencerclante GMD

Médiapart et David Dufresne (documentariste)


À Montpellier, la police a tiré au fusil à pompe 
avec des munitions en plastique

Lors d’échauffourées ayant eu lieu durant l’acte IX des gilets jaunes, le samedi 12 janvier à Montpellier, la brigadede recherche et d’intervention (BRI), une unité spécialisée de la police, a tiré au fusil à pompe des munitions en plastique, dites « bean bags », sur des manifestants.

C'est une étape de plus dans l'escalade de la répression policière face aux gilets jaunes. Lors d’échauffourées ayant eu lieu durant l’acte IX des gilets jaunes, le samedi 12 janvier à Montpellier, la brigade de recherche et d’intervention (BRI), une unité spécialisée de la police, a tiré au fusil à pompe des munitions en plastique, dites « bean bags », sur des manifestants.

Capture d'écran d'une vidéo filmée par un commerçant à Montpellier, le 12 janvier 2019. L'agent de la BRI armé

d'un fusil à pompe apparaît en pantalon de treillis à droite. © DR


C’est le site Montpellier Poing Info qui s’est le premier interrogé sur une vidéo filmée par un commerçant montpelliérain, montrant la présence dans le centre-ville, au milieu de policiers en civil de la brigade anticriminalité (Bac), d’un agent casqué en treillis portant un fusil à pompe, sans brassard de police. Le site a également publié des photos d’une cartouche verte de calibre 12 de marque Fiocchi recueillie par un manifestant ce jour-là et retranscrit le témoignage d'un manifestant ayant vu le fusil à pompe. « Des policiers “d’élite” se sont-ils servis d’un fusil à pompe contre des manifestants le samedi 12 janvier à Montpellier lors de l’acte IX des gilets jaunes ? », demande Jules Panetier, rédacteur au Poing et militant anticapitaliste, le 23 janvier sur la page Facebook du journal local.

Montpellier Poing Info
mercredi

DES POLICIERS « D’ÉLITE » ONT-ILS TIRÉ DES BALLES NON LÉTALES AVEC UN FUSIL À POMPE SUR DES GILETS JAUNES À MONTPELLIER ?

// Montpellier Poing Info republie cet article initialement diffusé sur lepoing.net mais dont les images sont devenues invisibles suite à un piratage du site \\

Le samedi 12 janvier 2019, lors de l’acte IX des gilets jaunes, un individu cagoulé, casqué et muni d’un treillis militaire a été aperçu à Montpellier dans la rue de l’Aiguillerie aux côtés de poli......

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Contacté, le Sicop (Service d'information et de communication de la police nationale) confirme l’information. Selon la police nationale, deux fusils à pompe de marque américaine Kel-Tec ont bien été engagés sur la manifestation des gilets jaunes le 12 janvier par la BRI de Montpellier, « qui a cette arme en dotation collective ». Et une vingtaine de tirs ont eu lieu « a priori lors de violences contre les policiers de la Bac et de la BRI », sans que l’on ne sache si des personnes ont été blessées.
Aucune interpellation n’a eu lieu, selon la police nationale. Il s’agit d’une première depuis le début du mouvement des gilets jaunes, marquant une escalade inquiétante dans sa répression par les forces de l'ordre. Cette arme et ces munitions, dont seules les unités spéciales de la police (comme le Raid et les BRI) sont équipées, sont habituellement réservées à des interventions contre le grand banditisme ou des opérations antiterroristes. « C’est a priori une arme et une munition plutôt utilisées pour maîtriser un individu très violent sur une scène d’une grande violence », explique le Sicop.

Dépendant de la Direction centrale de la police judiciaire (DCPJ), les BRI ne sont pas spécialisées dans le maintien de l’ordre. Mais elles ont été appelées en renfort, comme d’autres unités spéciales, depuis le début du mouvement des gilets jaunes, notamment pour effectuer des interpellations. Il s’agit d’unités qui peuvent à la fois réaliser des actes d’enquête judiciaire (du type surveillances) et des interventions spéciales, lors de prises d’otage par exemple.

Fusil à pompe vendu sur le site du fabricant américain Kel-Tec. © DR

En quoi la manifestation du 12 janvier à Montpellier justifiait-elle l'utilisation de fusils à pompe ? Les vidéos tournées par un commerçant rue de l’Aiguillerie, où apparaît un agent doté du fusil à pompe, montrent des échanges de projectiles entre des policiers et des manifestants, pour certains équipés de gilets jaunes. D’un côté, des jets de bâtons et d’un cocktail Molotov, de l’autre des policiers qui tirent au flashball. Le niveau de violence côté manifestants ne dépasse donc pas, a priori, ce que l’on a pu voir lors de précédents rassemblements, notamment à Paris. Pourquoi la BRI a-t-elle alors fait usage du fusil à pompe ? « Ils l’ont utilisée, car ils l’ont en dotation », nous répond le Sicop. Ce qui montre le danger de recourir lors de mouvements sociaux à des unités non spécialisées dans le maintien de l'ordre.

France Bleu Hérault indique de son côté : « La manifestation du samedi 12 janvier a réuni environ un millier de gilets jaunes. Un itinéraire déclaré, mais aussi mieux organisé que les fois précédentes : une poignée de manifestants a assuré un cordon de sécurité. » Le site précise que « le climat s'est tendu en début de soirée devant la préfecture de l'Hérault où quelques gilets jaunes se sont retrouvés. Des poubelles ont été incendiées et la police a dispersé des gaz lacrymogènes ». Là encore, des dégradations, mais rien d’insurrectionnel...

Photo des douilles trouvées le 12 janvier 2019 à Montpellier, prise par un militant montpelliérain au syndicat Sud étudiant. © DR

Léon*, 21 ans, cité par le journal Le Poing, nous décrit ainsi la manifestation : « Comme toutes les manifestations qui se sont mal déroulées, le rassemblement a commencé place de la Comédie puis s’est dirigé vers la préfecture où il a stagné. Il y a eu quelques jets de projectiles, des tirs de gaz lacrymogène, de flashball puis les CRS nous ont repoussés jusqu’à la place de la Comédie. » C’est alors qu’un autre manifestant lui a remis deux douilles vertes, ramassées dans une proche ruelle.

Paul*, 23 ans, également cité par Le Poing, a quant à lui aperçu en fin de manifestation « un civil en treillis sans brassard » équipé d’une arme et d’un casque qui l’ont intrigué, car « ils ne correspondaient pas à ceux de la Bac », nous explique-t-il. C’est plus tard, en voyant sur Facebook les images de l’agent en civil sur la vidéo ainsi que de la douille verte, qu’il a fait le rapprochement et compris qu’il s’agissait d’un fusil à pompe.

Photo des douilles trouvées le 12 janvier 2019 à Montpellier, prise par un militant montpelliérain au syndicat Sud étudiant. © DR

Quelle est la dangerosité de ces munitions ? Il s’agit de munitions de calibre 12, inférieur au diamètre des balles en caoutchouc tirées par les LBD 40, communément appelés flashballs. Ces munitions sont donc potentiellement plus pénétrantes. « C’est plus petit que les balles des LBD 40 [de diamètre 4 cm – ndlr], donc l’impact est traumatisant, mais c’est un filet granuleux donc c’est moins dur », répond le Sicop.

Sur le site de l’armurier italien Fiocchi, ces cartouches vertes, rangées dans la catégorie « less than lethal » réservée aux forces de l’ordre, peuvent contenir trois types de projectiles, en gomme ou en plastique, dont des « granulés de plastique ».

La police nationale nous indique qu’à la suite de cette utilisation d’un fusil à pompe contre des manifestants, la Direction centrale de la police judiciaire (DCPJ) a demandé le 18 janvier un retrait de cette arme sur les mouvements de gilets jaunes. Et ce « pour ne pas qu’il y ait de confusion [avec une arme à balles réelles – ndlr], car c’est une arme impressionnante ». L’Inspection générale de la police nationale a pour sa part été saisie d’une « évaluation sur les conditions d’usage de cette arme ». Il ne s’agit pas d’une enquête administrative, mais de préparer le nouveau « schéma national de l’ordre public », précise la police nationale.

Le premier ministre a en effet demandé début janvier au ministre de l’intérieur Christophe Castaner de procéder à une « actualisation du schéma national d'ordre public ». S’agit-il d’envisager l’usage de ces fusils à pompe en maintien de l’ordre, ce qui constituerait une évolution très inquiétante ? L’emploi en manifestation d’armes permettant de viser des personnes, comme les flashballs ou fusils à pompe, va à contre-courant d’une conception du maintien de l'ordre fondée, depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale en France, sur la mise à distance des protagonistes du conflit sans frapper les corps.

Le 3 décembre, le syndicat de police Vigi Île-de-France, minoritaire et issu de la CGT Police, avait réclamé sur Twitter « une évolution de la doctrine d’emploi » avec « l’utilisation de gomme-cogne en calibre 12 ». « Ça serait une bonne chose d’en venir à ce genre de munitions avec des fusils à pompe, car c’est beaucoup plus petit et précis que le LBD, justifie François Chaillet, délégué du syndicat en charge des CRS. Ça ne traverse pas, ça ne fait que des bleus. » Plusieurs sources policières,
spécialisées en maintien de l’ordre, se disent très surprises de l’utilisation de fusils à pompe à Montpellier. « Je suis très étonné, je n’ai jamais vu ça déployé sur le terrain », reconnaît également François Chaillet.

Certaines unités de sécurité publique de la police nationale, comme les Bac, utilisaient dans les années 1990 des fusils à pompe avec des balles en caoutchouc de calibre 12, dites gomme-cogne, dans les quartiers populaires. Mais ces armes ont depuis été remplacées par les flashball.

Dans un entretien en 1999 avec le sociologue Laurent Bonelli, un commissaire, en poste dans un secteur sensible, décrivait ainsi son travail dans les cités : « [Les gardiens de la paix] utilisent des fusils à pompe. Les balles sont certes en caoutchouc, mais pour le policier, le principal geste est fait : braquer quelqu'un avec un fusil à pompe. Avant, ces armes collectives ne sortaient pas des armureries, ou alors, pour des missions très ponctuelles et encadrées. [...] Cela vient des consignes de tenir le terrain à tout prix, même en sous-effectif. » Mouvement des gilets jaunes en 2019, mêmes causes, mêmes effets ?

Louise Fessard – Médiapart



Ninef, un œil en moins, pour avoir été au mauvais endroit 
au mauvais moment

À Toulon, Ninef Radjah, simple passant, s’est retrouvé en pleine opération de maintien de l’ordre lors d’une manifestation des « gilets jaunes », sur le port le 12 janvier. Visé à la tête par les forces de l'ordre, il a perdu son œil gauche.

Ninef Radjah, surnommé par tous « Néné », est sorti de l’hôpital lundi 21 janvier, encore sous morphine, le moral embarqué sur des montagnes russes. « Parfois je ris, parfois je pleure, c’est nerveux, je ne réalise pas encore ce qui m’est arrivé. » Le 12 janvier 2018, en milieu d’après-midi, l’homme descend de la commune de La-Valette-du-Var pour rejoindre le centre-ville de Toulon, et se dirige vers le port pour prendre le bateau-bus vers La Seyne-sur-Mer, de l’autre côté de la rade. Il tombe en plein chaos. L’acte IX des « gilets jaunes » s’achève, et les forces de l’ordre, nombreuses, veulent manifestement évacuer les lieux.

Ninef n’a jamais été impliqué dans le mouvement des gilets jaunes. « Marcher en rond dans la ville pour rien, non merci... » Mais il reste sur place, choqué par un tel « carnage », selon ses mots. « Ça gazait de partout, un vrai nuage de fumée. Les gens couraient, il y avait même des enfants, des vieux. Il y avait une telle détresse, je suis resté pour donner un coup de main. » Bien mal lui en a pris.

Ninef Radjah, après plusieurs jours d'hospitalisation au centre hospitalier de Toulon. © DR

Après un tir de grenade explosive, Ninef Radjah voit un agent des forces de l’ordre le viser, à moins de cinq mètres selon lui. « Comme dans un film. » Touché au visage, il se met à courir, sans se rendre compte de la gravité de sa blessure, avant de s’effondrer sur le sol d’une station-service, près du stade Mayol. Son œil gauche est fichu, explosé par l’impact de la balle, qui a fait de son globe oculaire une vraie charpie. « Il me reste un bout d’œil, qui va servir de support pour mettre une espèce d’œil de verre dessus. Mais je ne verrai plus de mon œil gauche, le nerf optique est mort », explique-t-il, encore sonné. Le chirurgien lui a notifié trente jours d’ITT, et va devoir réopérer ce mois-ci. La douleur, dit Ninef, est lancinante, surtout la nuit.

Cynthia Cazorla, commerciale et gilet jaune, s’est rendue aux toilettes ce samedi 12 janvier, en pleine manifestation, dans une brasserie en face du stade. Le temps de redescendre, une brigade de police s’est installée, barrant la rue, avec casques et boucliers, ainsi qu’une deuxième ligne de policiers équipés de LBD. Une autre brigade apparaît, provoquant la panique côté port (voir la vidéo).

https://youtu.be/ghJWXYc5XIk -

Une vidéo réalisée par un gilet jaune à Toulon, le 12 janvier, près du stade Mayol, sur le port. ©
DR

« Et là, sans sommation, j’entends une grenade sur le côté gauche, deux détonations, c’était la brigade derrière nous qui nous tirait dessus. J’ai couru, et devant moi, j’ai vu Néné. J’ai hurlé qu’il y avait un blessé. » Depuis, Cynthia passe son temps près de Ninef, lui rend visite à l’hôpital, et a même créé une cagnotte pour l’aider à faire face à ses frais médicaux.
« On a beaucoup parlé de ce pompier dans le coma à Bordeaux après le 12 janvier. Ici, nous avons eu une personne, même pas gilet jaune, qui a été éborgnée par un tir de policier en pleine rue, et personne n’en a parlé... »

Alors que Ninef est encore à terre, pris en charge par des street medics qui tentent de le rassurer, la charge continue. Plusieurs gilets jaunes forment une ligne autour du blessé, et crient à plusieurs reprises « On a un blessé ! » aux forces de police. « Je tenais le couvercle d’une benne à ordures de la main gauche pour protéger Néné, de l’autre je filmais, décrit Nicolas Frediani, présent ce jour-là dans la manifestation. J’ai eu une peur énorme. » Les sapeurs-pompiers, avertis par les street medics, débarquent enfin et d’après des vidéos que Mediapart a pu consulter, c’est un pompier qui s’interpose pour que les forces de l’ordre laissent la zone tranquille jusqu’à l’évacuation de Ninef. « Après qu’il a été emmené, les policiers ont repris la charge et là, ils ont fait une sommation, poursuit Nicolas Frediani. Moi, il me tenait en joue, parce que je filmais, à hauteur de flashball. »

Les gilets jaunes du Var, présents le 12 janvier et interrogés par Mediapart dans le cadre d’un reportage, décrivent unanimement une situation très violente. Ce soir-là, Toulon joue contre Édimbourg en coupe d’Europe. « Tout se passait bien, c’était soir de match, nous discutions avec les supporters, près du stade, explique Géraldine, l’une des organisatrices du groupe gilets jaunes de Toulon. Il y avait des familles, des gens en terrasse, des poussettes. Pour moi, les flics se sont lâchés
au coup de sifflet. C’était horrible, on a couru à travers les immeubles, sur le port, les palets volaient, je les ai entendus tomber dans l’eau, j’ai vraiment vu l’accident arriver.
»

Cynthia et Nicolas assurent que « devant le stade Mayol, toutes les compagnies étaient là », les CRS, la BRI (brigade de recherche et d’intervention), la Bac (brigade anticriminalité), les policiers municipaux, armés de LBD. Interrogée sur cette opération de maintien de l’ordre, mais également sur la blessure de Ninef Radjah, la direction départementale de la sécurité publique du Var, au sein de la préfecture, a répondu par le biais de son service communication ne pas vouloir répondre à nos
questions.

Ninef est conducteur d’engins de chantiers en intérim, il va porter plainte devant le procureur de Toulon d’ici à la fin de la semaine, « dégoûté » et encore perdu, selon ses soutiens. Il aime le vélo, mais « avec un œil en moins, pour les angles morts, ça va être chaud ». Ce père de famille fait ce triste constat : « J’ai deux filles, si je les tiens par la main, celle de gauche, je ne la vois plus. »

Mathilde Goanec – Médiapart

Gilets jaunes : Castaner maintient la pression policière

Le ministre de l’intérieur a choisi d’équiper les policiers de « caméras-piétons » afin de poursuivre l’utilisation des lanceurs de balles de défense. À l’exception des hôpitaux de Paris, l’opacité reste de mise sur le nombre réel de blessés accueillis par les services de santé.

C’est évidemment un aveu, mais aussi un joker. En décidant d’équiper d’une « caméra-piéton » les policiers porteurs d’un lanceur de balles de défense (LBD) à compter de samedi, le ministre de l’intérieur Christophe Castaner a fini par admettre, implicitement, la dangerosité de cette arme, employée depuis deux mois face aux manifestants gilets jaunes.

Mais le déploiement de la caméra lui permet aussi de justifier la poursuite des tirs de balles en caoutchouc par LBD, quand de nombreuses voix se sont élevées en faveur de son interdiction – demandée cette semaine par la Ligue des droits de l’homme et la CGT – ou de la « suspension » de son usage – une position soutenue par le Défenseur des droits.

Si l’opinion est désormais informée des dégâts humains provoqués par les armes dites « intermédiaires » de la police – LBD et grenades –, la stratégie du ministre reste inchangée. La caméra n’est qu’une « prévenance supplémentaire » (sic) des forces de l’ordre vis-à-vis des manifestants, a-t-il ainsi soutenu mardi. Christophe Castaner continue de nier l’importance et le nombre des blessures infligées, en couvrant d’un voile opaque les bilans chiffrés remontés par l’administration.

Emmanuel Macron et Christophe Castaner à l’Arc de triomphe, le 2 décembre 2018. © Thibault Camus/REUTERS

Mardi, le ministre a prétendu que les LBD avaient été employés dans le cadre d’actions « de défense », et non pas « pour gérer » les manifestations. Dans la pratique, la mobilisation, dès le 8 décembre, d’unités mobiles d’intervention, composées de policiers en civil – y compris des brigades de recherche et d'intervention (BRI), l’ex-antigang – suréquipés en LBD, à Paris et en province, avait pour objectif de disperser les rassemblements, et les tirs ont effectivement touché des personnes qui
n’étaient pas impliquées dans des affrontements avec la police.

Aussi la mise en place de la caméra par le ministère de l’intérieur et son utilisation seront-elles scrutées de près, samedi, lors des rassemblements des gilets jaunes pour l’acte XI de leur mobilisation. « C’est d’abord une annonce politique, parce que cette caméra n’est pas forcement le matériel adéquat, a commenté Philippe Capon, secrétaire général de l’Unsa Police, questionné par Mediapart. C’est une caméra qui se porte sur le torse, avec un harnais. Et il est donc prévu d’équiper non pas le porteur du LBD, mais un binôme, avec la caméra. Il faudra aussi que ce collègue puisse avoir le même angle de vue que le tireur. »

« Cette annonce n’a pas été préparée techniquement », tranche le syndicaliste. Attribué en mai 2018 à une PME du Maine-et- Loire, le marché de 10 400 caméras-piétons vise à équiper, d’ici à 2019, les forces de police et de gendarmerie. Et les CRS qui n’en disposent pas a priori devaient en recevoir 300 cette semaine.

« La caméra-piéton a été conçue pour les contrôles d’identité, qui s’effectuent à un, deux ou trois mètres, explique de son côté Frédéric Lagache, secrétaire général adjoint du syndicat Alliance Police à Mediapart. J’attends de voir la visibilité de cette caméra à dix mètres ou plus. Je ne crois pas que ces images pourront être exploitables au plan judiciaire. » Pour le syndicaliste d’Alliance, la caméra est « une suspicion jetée sur les collègues » : « On est transparents, c’est absurde, mais on va l’accepter. » « Le matériel sera défectueux, et l’on est dans l’incapacité de tirer et de filmer en même temps », critique-t-il.


Pour rassurer ses troupes, le ministre a précisé que la caméra serait enclenchée « en conditions normales », mais qu’il accepterait les dérogations si des policiers en situation difficile devaient « garantir leur propre défense ». Dans un télégramme aux forces de l’ordre, le directeur général de la police nationale a annoncé de son côté qu’une « étude » technique allait être lancée « sur la faisabilité de l’installation d’une caméra sur le LBD », ou sur les casques.

Dans un communiqué, le syndicat Vigi a de son côté pointé du doigt les règles d’habilitation au LBD et « le scandale de la formation » à son maniement. « Deux balles doivent être tirées pour se familiariser avec l'arme, et trois balles tirées respectivement à 15, 20 et 25 mètres, a résumé le syndicat. Si on a deux impacts dans la cible sur les trois tirs, le fonctionnaire est habilité pour trois ans. » « Cinq balles tirées tous les trois ans suffisent pour devenir un pro du LBD, selon des bureaucrates du ministère de l'Intérieur », a ironisé Vigi, qui souligne que l’arme est si peu précise que « même des tireurs chevronnés en visant le ventre, touchent la cible à la tête à l'entraînement ».

« L’idée est de montrer au monde entier ce que ce gouvernement a fait à son peuple »

L’opacité et le déni dominent pour ce qui est du bilan humain des affrontements, et des tirs policiers. Ainsi, questionné mardi devant la commission des lois de l’Assemblée nationale sur la violence de la riposte policière, Christophe Castaner a affirmé que « quatre personnes [avaient] eu des atteintes graves à la vision ». Un euphémisme, s’agissant des blessés éborgnés. « Sur [...] 81 enquêtes judiciaires au titre des projectiles tirés par LBD, il y a quatre pertes de vision, a-t-il précisé. Certains pouvant effectivement perdre un œil. » Selon les décomptes indépendants, ce ne sont pas quatre, mais dix-sept personnes qui ont été éborgnées par des tirs de balles en caoutchouc, dans les manifestations de ces deux derniers mois. D'après la synthèse réalisée par le documentariste David Dufresne, 149 personnes ont été blessées à la tête.

Un policier braquant son flashball, samedi 8 décembre. © Karl Laske

Devant les députés, le ministre de l’intérieur a indiqué que selon le bilan établi par ses services, dix personnes avaient trouvé la mort – il s’agit des décès survenus dans les ronds-points et de celui de la personne âgée décédée des suites d’un tir de grenade lacrymogène –, 1 800 manifestants avaient été blessés, ainsi que 1 000 policiers et gendarmes. Le cabinet du ministre a indiqué à Mediapart qu’il s’agissait des données globales « remontées des services de secours », impossibles à préciser. « Il
est impossible de donner un chiffre fiable sur les blessés graves
», a indiqué le cabinet.

Pourtant, ainsi que Mediapart l’a déjà révélé, le ministère de la santé a activé la plateforme d’identification des victimes SI-VIC lors des manifestations des gilets jaunes du 1er décembre. Dédiées aux événements générant de nombreux blessés, et en premier lieu les attentats, SI-VIC enregistre différentes données personnelles – prise en charge hospitalière, contacts des victimes et des proches – à destination des autorités sanitaires.

Dans une réponse à Mediapart, le 10 janvier, la Direction générale de la santé avait confirmé avoir activé SI-VIC afin d’assurer « l’identification et le suivi des manifestants blessés ».

« Les bilans quantitatifs issus de SI-VIC ont été communiqués au ministère de l’intérieur, indiquait la DGS. Ces informations ont également permis de répondre aux questions des journalistes concernant le nombre de blessés. Ce dénombrement concernait l’ensemble des personnes blessées dans le cadre du mouvement gilets jaunes (forces de l’ordre, pompiers, manifestants ou simples passants). »

Le ministère de l’intérieur dispose donc d’informations « consolidées », qu’il ne souhaite pas rendre publiques. Réinterrogée par Mediapart le 25 janvier, la DGS a indiqué qu’elle « ne dispos[ait] pas du bilan global du nombre de blessés pris en charge par les établissements de santé lors de l’ensemble des manifestations des gilets jaunes ». « En effet, le dispositif SI-VIC n’a été activé par le ministère de la santé que lors des manifestations des 8 et 15 décembre », a-t-elle précisé.

Contredisant la DGS, la direction de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) nous a indiqué avoir renseigné le dispositif SI-VIC à compter du 1er décembre et jusqu’au 19 janvier, à l’occasion de la prise en charge de blessés par les hôpitaux de Paris. Selon les indications communiquées à Mediapart, 167 patients étaient pris en charge lors de la manifestation du 1er décembre, 187 patients le 8 décembre, 13 patients le 15 décembre, 13 patients le 12 janvier, et 3 patients le 19 janvier. Le dispositif de comptage national SI-VIC pourrait donc délivrer un bilan quantitatif fiable, à partir du 1er décembre.

« On a eu un nombre important de blessés au niveau de la tête, souligne Christophe Prudhomme, porte-parole de l'Association des médecins urgentistes de France (Amuf). La répétition de ce type de blessures et leur nombre sont alarmants. La plupart sont des salariés lambda, souvent jeunes, qui se retrouvent avec des lésions très graves. C’est un usage disproportionné de la force. On génère, on fabrique des handicapés, des gueules cassées, c’est catastrophique. Quand on voit ce type de blessures, on a la rage : aucun argument n’est valide pour défigurer les gens. On est là pour réparer des gens, mais quand on sait que l’on pourrait éviter ce type de blessures, ça nous touche. »

De leur côté, des gilets jaunes blessés réunis dans un collectif informel préparent une marche blanche à Paris, samedi 2 février. « J’ai déclaré un parcours de Daumesnil à République, explique Antonio Ulrich, grièvement blessé au pied par une grenade à Paris. Nous voulons qu’un maximum de blessés soient présents en tête de cortège. L’idée est de demander l’interdiction des grenades et des armes de type Flashball, et de montrer au monde entier ce que ce gouvernement a fait à son peuple. »

Karl Laske – Médiapart


Samedi 26 janvier

Un leader des gilets jaunes touché à l’œil :

Au premier jour de l’expérimentation des « caméras piétons », un policier en civil a blessé l’un des animateurs des gilets jaunes, Jérôme Rodrigues, place de la Bastille.

Jérôme Rodrigues à son arrivée à l'hôpital. © DR
 https://www.mediapart.fr/journal/france/260119/un-leader-des-gilets-jaunes-touche-l-oeil


Bruno25 – commentaire sur Médiapart

Jeudi 31 janvier

Les députés ont voté la loi qui limite la liberté de manifester sur Reporterre

https://reporterre.net/INF-Les-deputes-ont-vote-la-loi-anti-casseurs-qui-renverse-la-presomption-d

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