Bonjour.
Ici Jean Monestier.
Un débat public sur le Train Jaune a eu lieu ce vendredi 25 avril 2014.
Etaient notamment présents à la tribune Charles Fiterman, ainsi que JC Gayssot, envoyé sans doute par la Région bien que les transports ne soient plus de sa compétence. Il a donc servi un peu de paratonnerre à Bourquin, avant que tout le monde ne se rejoigne autour d'un verre.
Il semble qu'une dame de la SNCF était dans le public, peut-être envoyée officieusement en observatrice, mais qui, étant intervenue depuis la salle, a été interpellée par un participant.
J'ai enregistré toute la réunion en MP3 et peux la transmettre à qui voudra.
Je joins en PJ une participation au débat que j'avais rédigée en m'appuyant sur le texte de l'invitation, et que j'ai largement élaguée quand je suis intervenu.
J'ai été très content que les courriels que j'ai envoyés très tardivement aient fait venir au moins 3 personnes à ma connaissance.
NB pour Train en Têt : pour s'abonner à Mobilité66, il faut faire
"mobilite66-abonnement yahoogroupes fr" <mobilite66-abonnement@ yahoogroupes.fr>,
Amicalement.
J Monestier
Contribution au débat public sur le Tain Jaune
organisé au
Palais des Congrès de Perpignan le vendredi 25 avril à 18h00.
Jean Monestier, du Soler : 06 83 99 03 25.
Titulaire d’une maitrise d’économie auprès de
l’Université de Toulouse.
Défenseur d’une biosphère habitable.
Il y a un partenaire qu’on oublie un peu
dans la défense du Train Jaune : le public. Combien de personnes du
département prennent le Train Jaune pour se déplacer le long de la vallée de la
Têt ? Très peu actuellement. Mais voir seulement dans le Train Jaune un
train touristique, un jouet pour adulte, serait une erreur. Et je suis d’accord
avec ceux qui pensent que le Train Jaune doit être considéré A LA FOIS comme un
vecteur touristique ET comme un moyen de transport, de voyageurs ET
potentiellement de fret. Ce qui se passe en Suisse avec les nombreuses lignes à
voie métrique démontre bien qu’une attitude différente donne des résultats
différents.
On se gargarise beaucoup en France avec
la Transition Energétique. Or cette dernière ne consiste pas seulement à
basculer la production d’énergie des énergies de stock (fossiles :
pétrole, charbon, gaz naturel, nucléaire) vers les énergies renouvelables
(hydraulique, éolienne, photovoltaïque, marémotrice, gaz issu de la biomasse,
etc.), mais à faire des efforts de sobriété et d’efficacité (voir le Manifeste
Négawatt, édité par Domaine du possible – Actes Sud en 2012, qu’on trouve dans
toutes les bonnes librairies). La sobriété sera difficile à adopter car nous
avons pris de mauvaises habitudes, mais cela viendra forcément. Restons-en à
l’efficacité. Elle ne se répand que de façon marginale, que ce soit dans les
transports ou dans la construction des immeubles neufs, deux postes majeurs qui
impliquent la participation des citoyens, des élus, et des techniciens.
Le prix du pétrole a été multiplié par 5
en dix ans environ. Le pic pétrolier, celui des découvertes de gisements puis
celui de l’extraction (je trouve très prétentieux de parler de production), a
déjà eu lieu, et même l’AIE le reconnaît. Les gisements offshore, les sables
bitumineux et autres gaz de schiste, qui coûtent 10 fois plus cher à mettre en
œuvre que le pétrole classique, ne feront que retarder le problème tout en
polluant deux fois plus. Merci pour le climat. En janvier 2011, j’ai filmé à
l’Assemblée Nationale un colloque sur le sujet, avec l’intervention de divers
spécialistes, dont Bernard Durand, retraité de l’industrie pétrolière, donc
libre de parler. Il y a une forte probabilité pour que le prix du pétrole soit
à nouveau multiplié par 5 dans les 15 prochaines années, et bien plus si nous
ne changeons rien, avec l’arrivée de la Chine et de l’Inde sur ce marché. La
Chine met en circulation 20 millions de voitures neuves chaque année, et ce
chiffre est toujours déjà dépassé quand on le cite. Une demande qui explose
pour une offre qui stagne et qui va irrémédiablement baisser : même une
détaxation complète des carburants ne fera qu’augmenter la brutalité de la
transition.
Dans ce même Palais des Congrès, lors d’une Journée de
l’Agglo sur la logistique, il y a quelques années, Jean-Paul Alduy nous
annonçait que le ferroutage au départ de St Charles allait être multiplié par
plus de 10, mais il prédisait simultanément un doublement de la demande de
transport, et, tous calculs faits par mes soins, dans ces conditions, le
transfert modal ne compensait pas, et de loin, ne serait-ce que l’augmentation
envisagée du camionnage. Il nous apportait, au mieux, un ralentissement de
cette dernière. Voilà pourquoi le rapport Négawatt évoque autant la sobriété
(transporter moins vite, moins loin, moins souvent, au choix) que l’efficacité.
Dans les transports, l’efficacité, c’est le rail qui
nous l’offre. Si la transition énergétique n’est pas une simple incantation, il
nous faut préparer le transfert de la mobilité vers le rail. Je ne parle pas
seulement des économies d’échelles, mais de l’efficacité énergétique. A masse
et accélération égales, le rail consomme deux à cinq fois moins d’énergie que
la route. C’est un sujet très peu abordé. Je donnerai seulement deux
exemples : un cheval tire deux tonnes sur route, mais dix tonnes sur rail (12
berlines de 800 kg, ce qui était la norme dans les mines de charbon). C’est
d’ailleurs pour cela qu’on a inventé le rail dans les mines de charbon
anglaises au 18ème siècle. Autre exemple : l’autobus, qui,
pendant la guerre, roulait sur les rails entre Carcassonne et Quillan. Il
transportait environ 50 personnes sur la route, mais 125 sur rail, car il
tirait alors une remorque Decauville de 75 places, pour 15 tonnes de poids
mort. Coefficient : 2,5. Mais, après la guerre, tout ceci fut vite oublié.
Pour la vallée de la Têt, le train Jaune est LA
solution pour la transition énergétique dans le domaine de la mobilité. Le
problème, c’est qu’il faut anticiper sur ce qui va se produire d’ici 10 ou 15
ans. Quand je vois, le dimanche soir, en hiver, des dizaines de voitures
redescendant de Cerdagne qui piétinent au PN de Marquixanes, je désespère. Mais
je vois aussi, dans le train de Villefranche à Perpignan, plus crédible au
niveau des vitesses et de la régularité, et dont la voie a été refaite à neuf,
des gens modestes, qui, quotidiennement, pour rentrer de Villefranche à Thuir,
descendent en train au Soler, où les attend leur voiture, qui finit de les ramener
à Thuir. Ils ont comparé le prix des pleins avec le train à 1 €uro, et ils ont
fait leur choix. Un choix d’abord économique, certes, mais qui va dans le bon
sens.
La croissance ne reviendra guère, car, des calculs
l’ont démontré, sans pétrole, elle s’étiole. Mais une « prospérité sans
croissance », comme le suggère l’anglais Tim Jackson (Editions Etopia
& De Boeck), est tout à fait envisageable dans une économie stationnaire. Il
est certain qu’il ne faut pas louper le coche, et réhabiliter le Train Jaune de
toute urgence. Fermer la ligne compromettrait gravement la vie future des Hauts
Cantons. Tant qu’on envisage de construire en France 1000 km d’autoroutes, et
d’ajouter des voies routières autour de Perpignan, on a encore largement les
moyens d’investir. Mais il ne faut plus les gaspiller dans des routes
nouvelles. Je ne parle pas de l’entretien courant, ou des déviations auxquelles
les riverains ont droit par simple équité républicaine, mais des grands travaux
neufs comme la poursuite de la 4 voies de Ille à Prades. Il faut réorienter cet
argent vers le ferroviaire, le Train Jaune (sans oublier la ligne de Céret, dont
6 km dorment dans les broussailles). Si, dans dix ans, on n’a plus les moyens
encore opulents dont nous disposons aujourd’hui, malgré la
« rigueur », ou grâce à la « rigueur », il sera trop tard,
et le temps perdu ne se rattrape jamais.
Jean Monestier.
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