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dimanche 21 décembre 2025

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"Beaucoup ignorent que le mot "Noël" 
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 bien antérieur au christianisme. 
L'origine la plus vraisemblable du mot Noël 
ne serait pas le latin natalis dies (jour de naissance) 
mais le gaulois noïo hel signifiant
 « nouveau soleil ». 
Avant la réforme du calendrier par Jules César, 
le solstice d'hiver correspondait au 25 décembre 
du calendrier romain 
et les festivités ont continué de se tenir 
à cette date 
même après que le solstice eut correspondu 
au 21 décembre du calendrier julien. 
Étymologiquement parlant, 
les laïques, les libres penseurs et les athées 
auraient donc toutes les raisons du monde 
de se souhaiter Joyeux Noël, 
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samedi 20 décembre 2025

Ces basques ont sauvé un maïs vieux de 500 ans qui ne nécessite ni pesticides, ni irrigation

Ces basques ont sauvé un maïs 

vieux de 500 ans 

qui ne nécessite 

ni pesticides, ni irrigation

 

Texte : Laurie Debove 
Photographie : ARTO GoRRIA 
11 décembre 2025

 


« Ces maïs paysans explorent beaucoup mieux le sol que des maïs industriels qui auront été conduits en système un peu hors-sol où on leur apporte de l'engrais en surface, des produits chimiques, et ils perdent cette capacité des racines à explorer le sol pour se nourrir. A l’inverse, notre maïs a gardé une rusticité et une force racinaire très importante » 

Un réseau de paysans basques a sauvé un maïs datant du XVIème siècle. Dans leurs fermes, le maïs est produit sans irrigation, en agriculture biologique. Exit les engrais chimiques, les désherbants, les insecticides et la dépendance aux multinationales de l’agroindustrie.

Une histoire d’autonomie

A mon arrivée à la ferme de Jon Harlouchet, les paysans se creusent la tête sur la façon de réparer l’effeuilleuse mécanique : problème de tenseur ou de courroie ? Cette machine mécanique provient d’une vente de seconde main, elle est parfaitement adaptée à leurs cultures, mais attention aux doigts.

Lorsqu’il a repris la ferme familiale en 1998, Jon a tout de suite fait le choix de l’agriculture biologique. « Mon parti pris, c’est que je suis paysan pour nourrir sainement les gens », explique-t-il pour La Relève et La Peste. Ses parents étant déjà ouverts à la démarche, il n’y eu aucun conflit de génération sur la conversion des terres en bio.

Sur sa ferme en polyculture-élevage de 35 ha, 3ha sont cultivés en maïs tandis que le reste sert de prairies pour le troupeau d’une vingtaine de vaches laitières. La ferme vit de la vente du maïs, du lait et de ses produits comme le yaourt. 

Jon et Phil réparent l’effeuilleuse – Crédit : Laurie Debove
 Jon était dépendant des semenciers industriels. C'est la menace de l’arrivée des OGMs en 2007, avec les coups d’éclat des Faucheurs Volontaires, qui l’ont poussé à se renseigner sur la qualité de ses semences.

« J’étais très engagé contre cette technologie OGM que je considère vraiment totalitaire parce qu’en plein air, il n’y a pas de frontières pour le pollen et elle s’impose aux autres. Elle empêche les autres paysans de faire leur propre choix de culture », explique-t-il pour La Relève et La Peste

Un de ses collègues espagnols a ainsi perdu sa labellisation bio, ainsi que les aides à l’agriculture biologique, suite à l’hybridation de son maïs avec une population OGM. Il a dû arrêter complètement le maïs. Suite à ces épisodes, plus question pour Jon d’acheter ses semences auprès d’entreprises développant des OGMs, malgré leur gamme « bio ».

« Il y avait quelque chose d’incohérent. J’étais complètement dépendant d’eux », raconte Jon. 

Les vaches de Jon Harlouchet – Crédit : Laurie Debove 

 C’est un formidable hasard qui lui apporte la solution. Un de ses collègues a retrouvé, caché au fond d’un tiroir d’un monastère, une variété de maïs paysan endémique : le Grand Roux Basque. Sa grande diversité génétique se reflète dans l’éventail de couleurs de ses épis, allant du jaune or au rouge bordeaux.

Cette variété de maïs paysan, diffusé à partir du 16ème siècle dans le nord de la région basque, avait presque disparu à la fin du 20ème à cause de l’introduction de variétés hybrides plus productives. Miraculeusement retrouvé en 2010, les paysans basques ont alors décidé de multiplié et reproduire le Grand Roux basque. Le collectif « Arto Gorria » est né.  

Des paysans basques du collectif Arto Gorria

La sélection paysanne au fil des siècles

Au début, les basques pensaient utiliser ce maïs rustique pour l’alimentation de leurs animaux en hiver. La première année, les rendements de Jon étaient moyens. Puis, le bouche-à-oreille a fait connaître la démarche auprès des voisins basques, ce qui lui a permis de retrouver 14 autres origines différentes du maïs.

« Le problème des petites quantités, c’est qu’on rentre vite dans des phénomènes de consanguinité et de dégénérescence (comme les animaux quand il n’y a pas assez de d’individus pour renouveler l’espèce, ndlr). Le fait d’avoir trouvé d’autres origines a permis de ramener un spectre génétique beaucoup plus large. Et les progrès ont été vraiment spectaculaires en termes de rendement », raconte Jon alors que nous nous baladons dans les épis.

Au bout de 3 ans de culture, Jon a arrêté d’acheter de la semence : il était devenu autonome. Ce qu’il n’avait pas prévu, c’est que la farine du maïs déclencherait des passions culinaires grâce à l’élaboration de taloak, la galette de maïs traditionnelle du Pays basque.

« Aujourd’hui, on l’utilise surtout pour se nourrir nous et moins pour les vaches. Finalement, le maïs est passé de la consommation animale à l’alimentation humaine. Au début, c’est un coup de pot, mais nos aïeux ont toujours utilisé le maïs pour se nourrir. Ils ont donc gardé des maïs goûteux, agréables à manger. Chose que les semenciers industriels n’ont pas du tout pris en compte dans leur sélection », décrypte Jon pour La Relève et La Peste. 

Si certains anciens étaient sceptiques à l’idée de manger du « maïs pour les poules », le goût du maïs Grand Roux a vite remporté l’unanimité. Face à ces qualités organoleptiques, les paysans ont acheté un moulin en commun pour faire de la farine. Le maïs apporte un revenu supplémentaire aux fermiers.

Jon et ses deux salariés lancent d’ailleurs un atelier de taloak sur la ferme. Ben, un ancien restaurateur, faisait partie des cuisiniers qui achetaient sa farine. Il a complètement arrêté la restauration pour être à 100% sur la ferme et travailler avec Jon. 

« Au niveau du goût, ce maïs est assez complet. C’est un produit qui se conserve bien, idéal quand on veut s’approvisionner en local, même l’hiver, et qui permet d’expérimenter de nombreuses recettes : taloak, polenta, semoule, etc. Un restaurateur peut faire de supers bénéfices avec le maïs, et c’est sans gluten ! », sourit Ben pour La Relève et La Peste.

Ben a choisi de travailler le maïs à la façon des Mexicains, avec la nixtamalisation. Cette technique culinaire d’Amérique centrale ancestrale consiste à tremper les grains de maïs puis les cuire dans une solution alcaline, habituellement de l’eau de chaux, ou un mélange de centres de bois et d’eau. En fragilisant le péricarpe – la coque externe translucide du grain d’amidon, cette méthode permet de bien digérer et profiter de tout le contenu nutritionnel du maïs. Elle évitait ainsi aux sud américains de contracter la pellagre. 

Justement, à peine arrivés au champ, Jon reçoit l’appel d’une restauratrice qui veut savoir quand sera prête la prochaine polenta. La restauratrice voulait s’assurer d’avoir des stocks, la récolte ayant été très mauvaise l’année d’avant à cause du vent.

Cette année, le challenge est donc de sélectionner des maïs résistants à la verse, un accident de végétation touchant certaines cultures qui se trouvent couchées au sol. En effet, les plants peuvent rapidement atteindre 3,5m de hauteur et sont alors trop exposés au vent : ils peuvent être pliés en deux.

« Vu qu’on a retrouvé les grains très tard, nous avions quand même accusé un peu de retard en termes de sélection des semences, notamment pour s’adapter au vent. Alors que les gros semenciers, eux, avaient déjà fait ce travail de sélection depuis 60 ans », précise Jon en montrant les différents épis. 

La verse est devenue l’une de leurs difficultés principales. Les paysans sont en première ligne de l’augmentation en intensité des accidents climatiques, comme le coup de vent.

« Tout l’été, on croise les doigts. On voit la chaleur, on voit les nuages qui arrivent, on se dit, est-ce qu’on va le prendre là ? Et puis, ça tourne vite aussi. Des fois c’est menaçant, des fois tout allait bien, mais ça pète d’un coup. »

Le cahier des charges du jour : que les épis de maïs aient poussé à la moitié inférieure de la tige, pour que le centre de gravité soit le plus bas possible, environ avant 1m50. Entre de beaux épis rouges et la hauteur appropriée, le cœur de Jon balance parfois.

« Si j’ai vraiment une belle couleur, je risque de craquer. Je sens que c’est déchirant cette sélection aujourd’hui », raconte-t-il en souriant.

Comme le détaille le semencier Joseph Lofthouse dans son livre « Semences Paysannes Métissées », les couleurs vives des légumes sont un gage de qualité nutritive. Tout comme manger des fruits et légumes rouges nous protègerait des microplastiques.  

Jon sélectionne des maïs résistants à la verse – Crédit : Laurie Debove

Irrigation et spécificités du pays basque 

L’autre particularité de ce maïs, c’est qu’il n’a pas besoin d’irrigation, particulièrement au Pays basque où il pleut souvent : « très compliqué pour les céréales mais parfait pour le maïs », sourit Jon.

« Quand le maïs est arrivé, il s’est parfaitement adapté à nos conditions pédoclimatiques basques. Grâce à lui, les populations se sont beaucoup mieux nourries. Les historiens expliquent qu’il y a eu une grosse évolution démographique à partir de l’arrivée du maïs », raconte Jon pour La Relève et La Peste.

Dans les Andes, c’est par le sol que le maïs prenait toute l’eau, vu qu’ils étaient principalement cultivés sur des zones humides. Le maïs était d’ailleurs cultivé en milpa, aussi connue sous le nom de technique des trois sœurs : planté en poquet avec des intercultures de courges, et des haricots qui grimpaient sur les tiges comme tuteurs.

« Surtout, l’avantage principal de ce maïs, par rapport à un maïs industriel, c’est qu’il est sélectionné ici, avec mes conditions de culture. Je ne travaille qu’en fertilisation organique donc ce qui est important, c’est le précédent. Les nodosités qui seront restées de la prairie précédente, dans les légumineuses, qui apportent de l’azote. Et ensuite, l’apport de fumier que je vais composter. On est sur un sol qui fonctionne par l’activité biologique, principalement », détaille-t-il.

Au pays basque, les entrées maritimes et les montagnes qui bloquent les nuages créent un micro-climat pluvieux – Crédit : Laurie Debove

Jon travaille en rotations : 4 ans de prairie et 2 ans de maïs, pour laisser le temps au sol de se reposer. Il pratique le labour seulement deux années sur six, avant de planter le maïs.

« Ces maïs paysans explorent beaucoup mieux le sol que des maïs industriels qui auront été conduits en système un peu hors-sol où on leur apporte de l’engrais en surface, des produits chimiques, et ils perdent cette capacité des racines à explorer le sol pour se nourrir. A l’inverse, notre maïs a gardé une rusticité et une force racinaire très importante », précise Jon.


Encore mieux : le maïs réagit bien durant les années de sécheresse. En 2025, la pluie arrivée au moment de la fructification a sauvé la mise. Une fois la récolte effectuée, les cannes de maïs servent de litière aux vaches. Et ce mélange va être composté en fermentation aérobie pendant 15 à 20 jours maximum. Cela permet d’avoir un engrais organique très minéralisant.

« Évidemment, l’élevage est une contrainte. Il faut être là tous les jours. C’est une production qui n’est pas rémunérée à sa juste valeur compte. Les gens ne s’en rendent pas compte. C’est très injuste », déplore Jon. 

A ses yeux, si on avait des systèmes de polyculture-élevage, cela permettrait de grosses économies à la collectivité, ainsi que des retombées environnementales positives. Du bon sens paysan qui n’est « pas du tout encouragé par la collectivité, ni la PAC ».

Jon et les paysans d’Arto Gorria, eux, préfèrent valoriser leur savoir-faire et leurs choix de culture. Les bonnes années, leurs rendements sont équivalents à l’agroindustrie et même supérieurs, car ils n’achètent ni engrais chimiques, ni pesticides. Un bel exemple de résilience territoriale.

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Laurie Debove

 

Source : https://lareleveetlapeste.fr/ces-basques-ont-sauve-un-mais-vieux-de-500-ans-qui-ne-necessite-ni-pesticides-ni-irrigation/

vendredi 19 décembre 2025

Guillaume Meurice : « Tous les êtres vivants sont mes colocataires »

Guillaume Meurice : 

« Tous les êtres vivants 

sont mes colocataires »

 
29 novembre 2025 

L'humoriste et auteur Guillaume Meurice à Rennes, le 24 novembre 2025.

L’humoriste Guillaume Meurice, auteur de BD sur la cause animale, nous raconte ses observations de chevreuils en Bourgogne, sa volonté d’abolir tout rapport de domination sur Terre et comment il « traduit sa colère par des vannes ».

Rennes (Ille-et-Vilaine), reportage

La rencontre a lieu dans un café rennais qui ne paye, a priori, pas de mine. En poussant la porte, on découvre un cadre chaleureux et cosy, avec beaucoup de plantes vertes. La terrasse, dissimulée par la verdure, offre une ravissante vue sur la Vilaine. « Monsieur est un habitué, il vient souvent ici », glisse la tenancière, complice.

Guillaume Meurice, arrivé légèrement en avance, est exactement tel qu’on se l’imagine : grand, le visage long et sympathique surmonté d’une touffe de cheveux poivre et sel, qui tranche étrangement avec des traits juvéniles, presque adolescents… Sans doute le rire conserve-t-il.

Ce jour-là, c’est sous sa casquette de scénariste de BD que nous le rencontrons. L’humoriste, ex-chroniqueur de France Inter, vient de sortir deux albums : La Contre-révolte sans précédent (éd. Dargaud) en septembre, deuxième tome d’une série de BD humoristiques sur la cause animale, et Loumi, l’odyssée du poisson pané en octobre (éd. Delcourt), sur les ravages de la surpêche. Deux ouvrages tout public qui reflètent son engagement écologiste, et plus particulièrement, son profond attachement à la condition animale. Choix délibéré ou simple coïncidence ? Le lieu qu’il a choisi pour cette rencontre s’appelle « Les chouettes ».

« Tous les êtres vivants de cette planète sont mes colocataires »

Installé dans un petit fauteuil en velours, Guillaume Meurice est détendu et d’humeur taquine : c’est le seul jour de la semaine où il ne court pas après le temps, ballotté dans le TGV entre Rennes et Paris. Voilà deux ans et demi qu’il réside dans la capitale bretonne, où il a rejoint sa conjointe, rennaise depuis toujours. Est-il devenu un « bobo rennais » ? « Bien sûr ! Je l’étais déjà avant de toute façon », rétorque le Breton d’adoption, désormais investi dans de nombreux projets et collectifs locaux. S’il apprécie la bonne bière et les guinguettes au bord de l’eau, il n’a cependant pas succombé à la galette saucisse, emblème culinaire du chef-lieu d’Ille-et-Vilaine, et pour cause : il est végétarien.

Pour Meurice, l’écologie consiste à abolir tout rapport de domination, y compris avec les animaux : « Je considère que tous les êtres vivants de cette planète sont mes colocataires, donc je ne vois pas pourquoi j’irais les défoncer pour les manger. Je ne mange pas mes coloc’, moi », lance-t-il, en se marrant. 

«  La BD est beaucoup plus efficace pour expliquer quelque chose de complexe  », observe-t-il. © Louise Quignon / Reporterre

Élevé par des parents soixante-huitards — « les deux seuls qui votaient écolo du village » — cet enfant du pays bourguignon a toujours ressenti une dissonance entre cette éducation « de gauche » et le fait de continuer à consommer de la viande ou du poisson. « Mon père pêchait à la mouche, il était très proche de la nature. Il adorait marcher le long des rivières, et connaissait un tas de choses sur les poissons… Tout ça pour accrocher un animal au bout d’un hameçon. Je le charriais beaucoup là-dessus, en lui disant “si les poissons avaient des cordes vocales, tu ne pêcherais pas !” » raconte l’humoriste, sans résister au plaisir d’imiter un poisson qui parle.

Un antispéciste revendiqué

Ce n’est que plus tard, au tournant de la trentaine, qu’il est devenu vraiment végétarien. Le déclic s’est produit lors d’une discussion avec un ami qui le place face à ses contradictions. « C’était un problème facile à résoudre pour moi, car je n’ai jamais été un gros viandard », ajoute-t-il. Depuis lors, il refuse de considérer les animaux comme des « proies » mais recherche au contraire un rapport d’égalité avec eux : « Ce qui m’intéresse, c’est la rencontre ».

Il tente donc de provoquer cette rencontre avec le monde animal, en suivant des photographes animaliers et en faisant lui-même de l’affût chez ses parents, en Bourgogne. Il a récemment réussi à observer deux chevreuils : « C’était une maman et son petit qui m’ont observé autant que je les observais, pendant dix minutes. Et là dedans, il y avait un truc d’égal à égal. C’était un des plus beaux moments de ma vie », raconte ce naturaliste amateur.

Fini France Inter, il est désormais à la tête de l’émission humoristique «  La Dernière  », sur Radio Nova, enregistrée en public et en direct, le dimanche de 18 à 20 heures. © Louise Quignon / Reporterre

Se revendique-t-il antispéciste ? « Oui, avant tout pour populariser le mot ! » répond le célèbre humoriste, conscient des controverses que suscite le terme.« Dès que tu dis ça, on te répond toujours “et les moustiques alors ?” mais antispéciste, ça ne veut pas forcément dire mettre toutes les espèces sur le même plan. Ça veut dire refuser le postulat du rapport de domination. Refuser de penser qu’on a le droit de vie ou de mort sur l’intégralité des autres êtres vivants de la planète. C’est juste ça. Donc oui, je me considère antispéciste. »

Il pousse même la réflexion encore plus loin : « Je pense que tout le monde est un peu antispéciste, affirme-t-il, pas peu fier de sa sortie. Dans la mesure où les gens ne mangent pas leurs chats, et où ils pleurent quand leurs chiens meurent, ça veut bien dire qu’il y a un échange, une complicité entre les humains et ces animaux. »

Humoriste, oui, mais pas militant

Meurice aime la polémique et n’a pas peur de la provoquer. Deux jours avant cette rencontre, son collègue Pierre-Emmanuel Barré a créé le scandale dans l’émission « La Dernière », animée par Meurice sur Radio Nova, après avoir dit que « la police, c’est comme Daesh avec la sécurité de l’emploi ». Il faisait référence aux violences policières à Sainte-Soline et aux plaintes pour viol récemment déposées à l’encontre de deux policiers. Résultat : le ministre de l’Intérieur Laurent Nunez a porté plainte contre l’humoriste.

Du pain béni pour Meurice qui « aime quand ça gratte, parce que ça oblige tout le monde à se positionner, et les masques tombent ». Lui-même a été d’ailleurs licencié de France Inter après une sortie sur le chef d’État israélien, Benyamin Netanyahou. Cela ne semble pas l’avoir vacciné, au contraire, « je ne cherche pas les polémiques à tout prix, mais c’est vrai que ça occupe ! », se marre-t-il.

« Je ne cherche pas la polémique, mais c’est vrai que ça occupe ! »

L’humoriste ne se considère toutefois pas comme un militant : « Je ne cherche pas à convaincre, je fais juste des blagues en donnant mon avis. Je traduis ma colère par des vannes. » Comment faire de l’humour sur des sujets comme l’exploitation animale, les abattoirs, l’abandon des animaux ? « C’est plus facile de traiter ça par l’humour parce qu’il y a des associations qui font le taf et qui montrent la réalité. Pour faire de l’humour, il faut un référentiel. Si tu fais de l’humour sur les abattoirs et que les gens ne savent pas ce qui s’y passe, ça tombe à plat », explique celui qui soutient des associations comme L214 ou Sea Shepherd.

La bande dessinée pour parler de la cause animale

Avec la bande dessinée, Guillaume Meurice a trouvé un format qui lui permet justement d’aborder ces sujets à sa façon. Dans sa série BD La Révolte sans précédent, réalisée avec la dessinatrice Sandrine Deloffre, il s’autorise un ton loufoque, avec des animaux qui parlent sous un trait de dessin rond, un poil naïf, qui permet de contourner l’écueil du gore. Le scénario en lui-même est très « second degré », puisqu’il s’agit d’une bande d’animaux baptisée « la Meute », qui cherche la meilleure stratégie révolutionnaire pour mettre fin à l’exploitation animale par les humains. « C’est toujours drôle de faire parler des animaux, c’est un processus humoristique qui existe depuis Jean de La Fontaine », pointe Meurice. En plus, la BD joue sur les clichés.

« La BD est aussi beaucoup plus efficace pour expliquer quelque chose de complexe », observe-t-il. Dans sa deuxième BD, Loumi, L’Odyssée du poisson pané, le dessin permet d’illustrer en quelques cases les différentes techniques de pêche industrielles, « alors que ça aurait été beaucoup plus long et fastidieux par écrit », constate l’humoriste qui s’est énormément documenté pour scénariser cette BD. Il a puisé ses sources chez l’ONG Bloom, et a rencontré le scientifique Sébastien Moro, qui travaille sur la cognition des poissons. 

L’humoriste vient de publier «  La Contre-révolte sans précédent  » (éd. Dargaud) et «  Loumi, l’odyssée du poisson pané  » (éd. Delcourt). © Louise Quignon / Reporterre

Guillaume Meurice a un côté très perfectionniste : « J’aime bien que ce soit précis et rigoureux. Qu’il n’y ait pas d’erreur de chiffre ou de date », admet celui qui a fait changer un dessin d’espadon pour un requin-marteau à la dernière minute, avant que la BD ne parte pour l’impression… À cause de ça, les dessinateurs avec qui il collabore sont parfois un peu déstabilisés, mais Guillaume l’assure : il travaille sur lui. Peu à peu, il a pris goût à la scénarisation de BD et annonce la sortie d’un troisième tome de La Révolte sans précédent, et d’un second tome des aventures de Loumi.

« Je ne fais pas ce métier pour être aimé »

Alors qu’il raconte sa nouvelle passion pour la BD, un trio de petites mamies vient s’asseoir sur la table juste à côté. « Oh mais c’est Guillaume Meurice ! Est-ce qu’on peut vous prendre en photo ? ». Il accepte, et prend la pose, bonne pâte. Malgré sa célébrité, Meurice reste simple et sans chichi. « Et qu’est-ce qu’il fait à Rennes, Guillaume Meurice ? » demande l’une d’elles. Il répond, et les taquine un peu au passage. La blague ne prend pas trop, les mamies n’ont pas tout compris. « C’est comme ça, relativise l’humoriste, tout le monde ne rit pas forcément à mes blagues. »

Certains sont même franchement énervés par son humour : il lui arrive parfois de recevoir de longs mails d’insultes ou de haine, ce qui ne le déstabilise pas plus que ça. « Je ne fais pas ce métier pour être aimé, donc je n’ai pas de problème à ce que les gens me détestent, ou ne soient pas d’accord avec moi. » Outre sa force mentale, c’est surtout que Guillaume Meurice est un homme, blanc, cisgenre, hétérosexuel, avec une certaine notoriété. Un statut privilégié dont il a parfaitement conscience, et qui lui permet « de continuer à discuter avec tout le monde ».

«  Je conseille toujours de questionner les gens plutôt que de leur asséner des informations de façon méprisante  », dit-il. © Louise Quignon / Reporterre

Sa botte secrète pour répondre aux climatosceptiques et aux antivégétariens ? « Je conseille toujours de questionner ces personnes plutôt que de leur asséner des chiffres et des informations de façon descendante ou méprisante, explique-t-il, en s’inspirant de ses cours de théâtre d’improvisation. Les gens ne détestent rien tant qu’être pris en flagrant délit d’incohérence. En leur posant des questions comme : “Mais au fait d’où tu sors cette information sur les végétariens ? Comment tu sais ça ?”, on les pousse dans leurs retranchements. S’ils s’énervent, vous avez gagné. » Un conseil plus que bon à prendre à l’approche des fêtes de fin d’année.

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Source : https://tinyurl.com/yvrm73jp